1. En cas d’opération de paiement non autorisée, il est important de signaler rapidement le problème à votre prestataire de services de paiement afin de bénéficier du remboursement prévu par la loi. Assurez-vous de conserver toutes les preuves de communication avec votre banque concernant le litige.
2. Si vous contestez avoir autorisé une opération de paiement, il revient à votre prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée et dûment enregistrée. Ne vous contentez pas des arguments de la banque et demandez des preuves tangibles de votre prétendue faute.
3. En cas de litige avec votre banque, n’hésitez pas à faire valoir vos droits en saisissant les autorités compétentes. Si la banque ne parvient pas à prouver une fraude ou une négligence de votre part, vous pourriez obtenir gain de cause et être indemnisé pour les préjudices subis.
L’affaire concerne des virements frauduleux effectués depuis les comptes de la société CASQUE D’OR et de M. [E] [K] vers des comptes à l’étranger, pour un montant total de 48.000 euros. M. [E] [K], la SCI VICTOR ROUX et la société CASQUE D’OR ont assigné la BRED BANQUE POPULAIRE en justice pour obtenir le remboursement des opérations non autorisées et la réparation du préjudice subi. M. [E] [K] demande le remboursement des virements frauduleux et des dommages-intérêts, tandis que la BRED BANQUE POPULAIRE conteste sa responsabilité et demande le sursis à statuer en attendant les résultats de l’enquête pénale. Le tribunal devra statuer sur la réalité des préjudices, la responsabilité des parties et les demandes d’indemnisation.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le sursis à statuer
On ignore si l’enquête préliminaire est toujours en cours et, dans cette hypothèse, quels en seront les résultats. Par conséquent il y a lieu de rejeter la demande de sursis à statuer dans l’attente des résultats de l’enquête pénale formée par la BRED BANQUE POPULAIRE.
Sur la demande de remboursement des virements litigieux
L’article L.133-18 du code monétaire et financier pose le principe du remboursement par la banque des opérations de paiement non autorisées. Par dérogation à ce principe, l’article L.133-19 IV prévoit que le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part. Il appartient donc à la banque de prouver la faute volontaire ou non du payeur.
Sur les demandes au titre du préjudice matériel et du préjudice moral
Le refus de la BRED BANQUE POPULAIRE de rembourser ne permet pas d’établir l’existence d’une résistance abusive. Les demandeurs seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts sur ce chef.
Sur les autres demandes
La BRED BANQUE POPULAIRE sera condamnée aux entiers dépens et devra payer des sommes aux demandeurs sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
– Société MS AMLIN INSURANCE SE : 4 038 795,98 euros
– SARL GYSELE : 204 916,725 euros (MIC INSURANCE COMPANY) + 40 983,345 euros (SA GENERALI IARD)
– Sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES : 2 558 564,62 euros
– Société ALLIANZ IARD : 909 953,08 euros
– Société INNELEC MULTIMÉDIA : 156 204 euros
– Société BGA DIFFUSION : 4 672 euros
– Société RAPIDE FORMALITE : 1 000 euros
– Association B2V GESTION : 20 435,53 euros
– SCI STESA : 34 006,79 euros
– SARL [Adresse 23] : 42 599,92 euros
– Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] et [Adresse 27] : 16 654 euros
– Article 700 du code de procédure civile :
– Société MS AMLIN INSURANCE SE : 5 000 euros
– SARL GYSELE : 3 500 euros
– Syndicat des copropriétaires (représenté par FONCIA) : 5 000 euros
– Société GESTION ET TRANSACTION DE FRANCE (GTF) et SA AXA FRANCE IARD : 5 000 euros
– SAS DESAUTEL et SA AXA FRANCE IARD : 5 000 euros
– SA ALLIANZ IARD : 3 500 euros
– SAS CABINET CHAREL et société CGPA : 5 000 euros
– Sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES : 3 500 euros
– Sociétés ALLIANZ IARD, OMNIDEC INDUSTRIES, INNELEC MULTIMÉDIA, BGA DIFFUSION, RAPIDE FORMALITE, et association B2V GESTION : 3 500 euros
– SCI [Adresse 22] : 3 000 euros
– SARL [Adresse 23] : 3 000 euros
– SCI STESA : 3 000 euros
– SCI BINIANIM : 3 000 euros
– Dépens et coût de l’expertise judiciaire : à la charge de la société MIC INSURANCE COMPANY, la SARL AQUARELLE et la SA GENERALI IARD
Réglementation applicable
– Article L.133-18 du code monétaire et financier
– Article L.133-19 IV du code monétaire et financier
– Article L.133-23 du code monétaire et financier
– Article 700 du code de procédure civile
– Article 514 du code de procédure civile
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Maître Philippe REZEAU de la SELARL QUANTUM IMMO
– Maître Jean-philippe GOSSET de la SELEURL CABINET GOSSET
Mots clefs associés
– Sursis à statuer
– Remboursement des virements litigieux
– Article L.133-18 du code monétaire et financier
– Article L.133-19 IV du code monétaire et financier
– Article L.133-23 du code monétaire et financier
– Fraude
– Négligence grave
– Authentification forte
– Conditions générales « Banque à distance »
– Preuve de la faute du payeur
– Réaction rapide du client
– Document « les informations présentées dans les différents onglets CNX & VIR »
– Fraude ou négligence de la part du client
– Dommages et intérêts
– Entiers dépens
– Article 700 du code de procédure civile
– Exécutoire de droit à titre provisoire
– Sursis à statuer : Décision par laquelle un juge décide de reporter sa décision finale dans l’attente d’un événement ou de l’accomplissement de certaines formalités.
– Remboursement des virements litigieux : Restitution des fonds transférés par virement bancaire en cas de litige, souvent lié à une erreur ou une fraude.
– Article L.133-18 du code monétaire et financier : Cet article stipule que l’utilisateur de services de paiement doit notifier sans tarder à son prestataire de services de paiement toute opération non autorisée ou mal exécutée.
– Article L.133-19 IV du code monétaire et financier : Précise les conditions dans lesquelles un payeur peut obtenir le remboursement d’une opération de paiement autorisée mais dont les détails n’ont pas été précisés.
– Article L.133-23 du code monétaire et financier : Définit les obligations du prestataire de services de paiement en cas d’opération de paiement non autorisée signalée par le client.
– Fraude : Acte délibéré visant à obtenir un avantage illégitime, souvent financier, par des moyens trompeurs ou illégaux.
– Négligence grave : Manquement significatif à un devoir de prudence ou de diligence dans la réalisation d’une action, augmentant le risque de survenue d’un préjudice.
– Authentification forte : Procédure de vérification de l’identité d’un utilisateur demandant l’accès à un système ou une transaction, utilisant au moins deux facteurs indépendants.
– Conditions générales « Banque à distance » : Ensemble des règles et des procédures régissant les services bancaires fournis par des moyens électroniques, comme l’internet ou le mobile.
– Preuve de la faute du payeur : Élément de preuve nécessaire pour démontrer que le payeur est responsable d’une opération de paiement non autorisée ou incorrecte.
– Réaction rapide du client : Action immédiate requise de la part du client en cas de découverte d’une transaction non autorisée ou suspecte pour limiter les dommages ou les pertes.
– Document « les informations présentées dans les différents onglets CNX & VIR » : Référence à un document spécifique fournissant des détails sur les transactions ou les connexions dans un contexte bancaire.
– Fraude ou négligence de la part du client : Situation où le client est impliqué directement ou par manquement dans une activité frauduleuse ou négligente affectant ses transactions financières.
– Dommages et intérêts : Compensation financière accordée à une partie lésée pour réparer le préjudice subi.
– Entiers dépens : Ensemble des frais de justice que la partie perdante doit payer en totalité.
– Article 700 du code de procédure civile : Article permettant au juge d’octroyer une somme d’argent à la partie gagnante pour couvrir ses frais non inclus dans les dépens.
– Exécutoire de droit à titre provisoire : Qualité d’une décision de justice qui peut être mise en œuvre immédiatement, avant que tous les recours ne soient épuisés.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:
■
9ème chambre 1ère section
N° RG 22/01696
N° Portalis 352J-W-B7G-CWCDO
N° MINUTE : 1
Contradictoire
Assignation du :
04 Février 2022
JUGEMENT
rendu le 23 janvier 2024
DEMANDEURS
Monsieur [E] [K]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représenté par Maître Philippe REZEAU de la SELARL QUANTUM IMMO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #L0158
S.C.I. SCI VICTOR ROUX
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Maître Philippe REZEAU de la SELARL QUANTUM IMMO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #L0158
S.A.S. CASQUE D’OR
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Maître Philippe REZEAU de la SELARL QUANTUM IMMO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #L0158
DÉFENDERESSE
S.A. BRED BANQUE POPULAIRE
[Adresse 2]
[Localité 5]
Décision du 23 Janvier 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 22/01696 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWCDO
représentée par Maître Jean-philippe GOSSET de la SELEURL CABINET GOSSET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B0812
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Anne-Cécile SOULARD, Vice-présidente,
Monsieur Patrick NAVARRI,Vice-président,
Madame Marine PARNAUDEAU, Vice-présidente,
assistés de Madame Chloé GAUDIN, greffière lors des débats et Madame Sandrine BREARD, greffière lors de la mise à disposition.
DÉBATS
A l’audience du 31 octobre 2023 tenue en audience publique devant Monsieur Patrick NAVARRI, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile.
A l’audience du 31 octobre 2023, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2024, date à laquelle le délibéré a été prorogée au 23 janvier 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition
Contradictoire
En premier ressort
FAITS CONSTANTS
M. [E] [K] est le gérant de la SCI VICTOR ROUX et de la société CASQUE D’OR. Ces deux sociétés ainsi que M. [E] [K] possèdent chacun un compte bancaire dans les livres de la BRED BANQUE POPULAIRE.
Entre le 24 et le 28 août 2021, huit virements ont été effectués, pour un montant total de 48.000 euros, depuis les comptes bancaires de la société CASQUE D’OR et de M. [E] [K] vers des comptes bancaires situés à l’étranger soit les virements suivants :
– Le 24 août 2021, un virement d’un montant de 10.000 € depuis le compte de la société CASQUE D’OR vers le compte appelpay domicilié en Espagne de Monsieur [X] [S] ;
– Le 24 août 2021, un virement d’un montant de 10.000 € depuis le compte de la société CASQUE D’OR, vers le compte domicilié en Italie de Monsieur [P] [J] ;
– Le 25 août 2021, un virement d’un montant de 8.000 € depuis le compte de Monsieur [K], vers le compte domicilié en Espagne de Monsieur [X] [S] ;
– Le 26 août 2021, un virement d’un montant de 10.000 € depuis le compte de la société CASQUE d’OR vers le compte libellé ATTIE ABDULLAH ;
– Le 27 août 2021, un virement d’un montant de 10.000 euros depuis le compte de la société CASQUE D’OR vers le compte domicilié en Italie libellé AMBU GREGA PATRIZIA FACTURE.
En outre les 24, 26 et 28 août 2021, respectivement les sommes de 20.000 euros, 20.000 euros et 40.000 euros ont été transférées du compte de la SCI VICTOR ROUX vers celui de la société CASQUE D’OR.
Par courriel du 10 septembre 2021, M. [E] [K] a contesté tous ces virements auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE.
Le 10 septembre 2021, M. [E] [K] a déposé plainte.
Le 24 septembre 2021, une nouvelle opération frauduleuse a été réalisée depuis le compte de la société CASQUE D’OR, au bénéfice du compte domicilié en Espagne de Monsieur [X] [S] pour un montant de 10.000 €.
Se disant victimes de virements frauduleux non autorisés et en l’absence de remboursement de la BRED BANQUE POPULAIRE, M. [E] [K], la SCI VICTOR ROUX et la société CASQUE D’OR ont fait assigner la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE devant le tribunal judiciaire de Paris par acte d’huissier en date du 4 février 2022 pour obtenir le remboursement des opérations non autorisées et la réparation du préjudice en résultant.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 03 juillet 2023, M. [E] [K] demande au tribunal de :
Vu les articles L.133-17 et suivants du Code monétaire et financier et 1103, 1104 et 1217 et suivants
du Code Civil :
À TITRE LIMINAIRE
– DÉBOUTER la BRED BANQUE POPULAIRE de sa demande de sursis à statuer,
– CONSTATER l’existence d’opérations frauduleuses non autorisées par les demandeurs, sur leur compte dans les livres de la BRED BANQUE POPULAIRE,
– CONSTATER l’absence de faute des demandeurs dans l’utilisation de leur compte,
– CONSTATER les manquements de la BRED BANQUE POPULAIRE à ses obligations contractuelles,
EN CONSEQUENCE,
– DÉCLARER Monsieur [K], la société CASQUE D’OR et la SCI VICTOR ROUX recevables et bien fondés en leurs demandes,
– DÉBOUTER la BRED BANQUE POPULAIRE de l’ensemble de ses demandes,
À TITRE PRINCIPAL,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la société CASQUE D’OR la somme de 50.000 € en remboursement des virements frauduleux exécutés par la Banque, avec intérêts au taux légal à compter du 30 août 2021,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [K] la somme de 8.000 € en remboursement des virements frauduleux exécutés par la banque, avec intérêts au taux légal à compter du 30 août 2021,
À TITRE SUBSIDIAIRE,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à titre de dommages-intérêts :
o La somme de 50.000 € à la société CASQUE D’OR au titre du préjudice résultant des virements frauduleux opérés sans autorisation depuis son compte en banque, avec intérêts au taux légal à compter du 30 août 2021,
o La somme de 8.000 € à Monsieur [K] au titre du préjudice résultant des virements frauduleux réalisés sans autorisation depuis son compte en banque, avec intérêts au taux légal à compter du 30 août 2021,
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
– CONDAMNER la Banque BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la société CASQUE D’OR la somme de 2.000 € en réparation de son préjudice résultant de la résistance abusive de la banque,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la SCI VICTOR ROUX la somme de 2.000 € en réparation de son préjudice résultant de la résistance abusive de la banque,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [K] la somme de 2.000 € en réparation de son préjudice résultant de la résistance abusive de la banque,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la société CASQUE D’OR, à la SCI VICTOR ROUX et à Monsieur [K] la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code
de Procédure Civile,
– RAPPELER que l’exécution provisoire du jugement à intervenir est de droit,
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE aux entiers dépens.
M. [E] [K], la SCI VICTOR ROUX et la société CASQUE D’OR précisent que la demande de sursis à statuer dans l’attente des résultats de l’enquête préliminaire doit être rejetée car l’issue de l’enquête est incertaine. Ils affirment qu’ils ne sont pas à l’origine des opérations litigieuses, qu’ils n’ont pas autorisé les virements litigieux, qu’ils n’ont jamais communiqué leurs coordonnées bancaires à quiconque et ne connaissent pas les bénéficiaires des virements. Ils soutiennent qu’il revient à la banque d’apporter la preuve de leur fraude ou de leur négligence grave et qu’ils ne sont pas tenus d’établir la faute de la BRED BANQUE POPULAIRE.
Ils font valoir que la BRED BANQUE POPULAIRE a manqué à son obligation de vigilance en faisant preuve d’une négligence dans la gestion des comptes, notamment en ne les avisant pas dès l’apparition des premières opérations qui étaient anormales ce qui la rend responsable des virements dont ils demandent le remboursement au titre de leur préjudice matériel. Ils estiment également subir un préjudice du fait de la résistance abusive de la BRED BANQUE POPULAIRE.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 27 juillet 2023, la BRED BANQUE POPULAIRE demande au tribunal de :
Vu les articles L.131-1 et suivants du Code monétaire et financier,
Vu l’article 1103 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
RECEVOIR la BRED en ses conclusions, l’y déclarant bien fondée,
A titre principal :
SURSEOIR A STATUER d’office dans l’attente de l’issue de l’enquête pénale toujours en cours et ce conformément à sa faculté qui lui en laisse la possibilité,
A titre subsidiaire :
Décision du 23 Janvier 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 22/01696 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWCDO
JUGER que les demandeurs n’apportent en tout état de cause pas la preuve par des éléments suffisamment probants de la réalité de leurs préjudices en l’absence des suites données au dépôt de plainte pénale du 10 septembre 2021,
JUGER en tout état de cause que la responsabilité de la BRED n’est pas engagée en l’absence d’opérations de virement qualifiables de non – autorisées en l’espèce et ce de surcroît en présence des nécessaires négligences graves des demandeurs ayant permis l’exécution des opérations litigieuses,
JUGER en outre que la BRED n’a en tout état de cause pas manqué à son devoir de vigilance normale,
DEBOUTER en conséquence les demandeurs de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à l’encontre de la BRED,
CONDAMNER solidairement les demandeurs à verser à la BRED la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Les CONDAMNER solidairement aux entiers dépens.
La BRED BANQUE POPULAIRE demande le sursis à statuer dans l’attente des résultats de l’enquête pénale. Elle affirme que les virements litigieux ont été réalisés sur les accès personnels de la banque en ligne des demandeurs par la saisie de leur identifiant et de leur mot de passe. Elle estime qu’un tel processus d’authentification rend la thèse d’opérations effectuées à l’insu des demandeurs totalement improbable et conteste toute responsabilité contractuelle de la BRED BANQUE POPULAIRE. Elle ajoute qu’en application du principe de non-ingérence, elle ne pouvait s’opposer à l’exécution des virements litigieux.
La BRED BANQUE POPULAIRE considère que les demandeurs ont fait preuve de négligence dans la surveillance de leurs comptes bancaires. Elle précise que les opérations litigieuses se sont déroulées sur une période de plusieurs jours sans réaction de la part des titulaires des comptes. Elle conteste les demandes indemnitaires présentées en l’absence de faute de sa part et de démonstration de la réalité des préjudices.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé des moyens et arguments venant au soutien de leurs demandes et de leurs défenses.
Le juge de la mise en état a clôturé l’instruction de l’affaire par ordonnance du 29 août 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le sursis à statuer
On ignore si l’enquête préliminaire est toujours en cours et, dans cette hypothèse, quels en seront les résultats. Par conséquent il y a lieu de rejeter la demande de sursis à statuer dans l’attente des résultats de l’enquête pénale formée par la BRED BANQUE POPULAIRE.
Sur la demande de remboursement des virements litigieux
L’article L.133-18 du code monétaire et financier pose le principe du remboursement par la banque des opérations de paiement non autorisées : « En cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur dans les conditions prévues à l’article L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l’opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant, sauf s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement et s’il communique ces raisons par écrit à la Banque de France. Le cas échéant, le prestataire de services de paiement du payeur rétablit le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération de paiement non autorisée n’avait pas eu lieu. »
Par dérogation à ce principe, l’article L.133-19 IV prévoit que le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L.133-16 et L.133-17, lesquels lui font obligation notamment de préserver la sécurité de ses données.
L’article L.133-23 du code monétaire et financier fixe les règles de preuve applicables lorsque l’utilisateur conteste avoir donné son autorisation au paiement : « En application de l’article L.133-23 du code monétaire et financier, lorsqu’un utilisateur de services de paiement nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, il incombe à son prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée et qu’elle n’a pas été affectée par une déficience technique ou autre.
L’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière. Le prestataire de services de paiement, y compris, le cas échéant, le prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, fournit des éléments afin de prouver la fraude ou la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement. »
Il s’en déduit que le fait que l’utilisateur d’un service de paiement, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en application des articles L. 133-16 et L. 133-17 du code monétaire et financier, ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été utilisés. Ce principe est également applicable en cas « d’authentification forte ».
Il appartient donc à la banque de prouver la faute volontaire ou non du payeur, autrement qu’en démontrant l’utilisation de données hautement confidentielles et elle ne peut se contenter d’invoquer le probable « hameçonnage » dont le client aurait été victime, c’est-à-dire un courriel ou un SMS frauduleux qui l’aurait nécessairement conduit, en réponse, à divulguer ses éléments d’identification personnels au fraudeur.
La BRED BANQUE POPULAIRE se prévaut des conditions générales « Banque à distance » selon lesquelles une fois identifié et authentifié, le client peut réaliser des opérations depuis son espace client internet, la validation de ces opérations emportant consentement du client aux opérations réalisées étant précisé que « ces opérations sont alors réputées jusqu’à preuve du contraire émaner du client lui-même ». Ces conditions générales prévoient également que « L’utilisation du code de sécurité à usage unique constitue la preuve de l’identification du client et de son consentement au traitement de l’opération demandée. En conséquence toute opération effectuée dans le cadre du présent service est présumée émaner, jusqu’à preuve du contraire, du client ».
Toutefois, ces stipulations contractuelles ne peuvent tenir en échec les principes légaux rappelés précédemment, lesquels font l’obligation à la banque de prouver la fraude ou la négligence grave de l’utilisateur.
Les virements litigieux ont eu lieu entre le 24 août et le 28 août 2021, soit sur une période de 5 jours et M. [E] [K] s’est aperçu de ces détournements le 8 septembre 2021. Il en résulte qu’il a réagi rapidement sans qu’il puisse lui être reproché de ne pas avoir surveillé le fonctionnement de ses comptes pendant cette brève période. En outre le 24 septembre 2021, une nouvelle opération frauduleuse a été réalisée depuis le compte de la société CASQUE D’OR, dont il est le gérant, au bénéfice du compte domicilié en Espagne de Monsieur [X] [S] pour un montant de 10.000 € alors que ce dernier avait déjà réalisé deux opérations frauduleuses sur ce même compte et que M. [E] [K] avait dénoncé cette situation à la BRED BANQUE POPULAIRE.
La BRED BANQUE POPULAIRE verse aux débats un document intitulé « les informations présentées dans les différents onglets CNX & VIR sont la transcription exacte des traces techniques (logs) afin d’en faciliter la lecture ». Outre que ce document fait état de différentes opérations sans plus de précision, il précise que des SMS et mails ont été envoyés aux demandeurs mais sans en produire la copie alors que les demandeurs contestent les avoir reçus.
Dans ces conditions, la BRED BANQUE POPULAIRE, qui ne produit aux débats que les conditions générales de la banque à distance, ne rapporte pas la preuve d’une fraude ou d’une négligence de la part de M. [E] [K] dans les virements non autorisés.
Dès lors, il y a lieu de :
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la société CASQUE D’OR la somme de 50.000 € en remboursement des virements frauduleux exécutés par la banque, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2021, date de réception de la lettre de mise en demeure ;
– CONDAMNER la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [K] la somme de 8.000 € en remboursement des virements frauduleux exécutés par la banque, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2021, date de réception de la lettre de mise en demeure.
Sur les demandes au titre du préjudice matériel et du préjudice moral
Quand bien même la BRED BANQUE POPULAIRE s’est opposée aux demandes de remboursement, son refus ne permet pas d’établir l’existence d’une résistance abusive commise par la BRED BANQUE POPULAIRE à leur encontre et les demandeurs seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts sur ce chef.
Sur les autres demandes
Partie perdante au procès, la BRED BANQUE POPULAIRE sera condamnée aux entiers dépens.
La BRED BANQUE POPULAIRE sera également condamnée à payer à la société CASQUE D’OR, à la SCI VICTOR ROUX et à Monsieur [K] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l’article 514 du code de procédure civile, la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
DÉBOUTE la BRED BANQUE POPULAIRE de sa demande de sursis à statuer ;
CONDAMNE la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la société CASQUE D’OR la somme de 50.000 € en remboursement des virements frauduleux, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2021 ;
CONDAMNE la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [E] [K] la somme de 8.000 € en remboursement des virements frauduleux, avec intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2021 ;
REJETTE la demande indemnitaire de la société CASQUE D’OR, de la SCI VICTOR ROUX et de Monsieur [E] [K] au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive;
REJETTE l’ensemble des demandes de la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE ;
CONDAMNE la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE aux entiers dépens ;
CONDAMNE la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la société CASQUE D’OR, la SCI VICTOR ROUX et M. [E] [K] la somme totale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Fait et jugé à Paris le 23 janvier 2024.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE