L’appel en matière d’expropriation

Notez ce point juridique

Les conclusions d’appel qui sont de pure réplique à celles du commissaire du gouvernement, appelant incicent, ne formulant pas de demandes nouvelles sont recevables.


L’établissement public territorial Grand Paris Sud Est Avenir Développement a créé la ZAC du centre commercial du Grand Ensemble, confiée à la SPLA GPSEAD devenue ensuite la SPLA AD – GPSEAA. Une enquête publique et parcellaire a été menée, suivie d’une déclaration d’utilité publique et d’une ordonnance d’expropriation. La SASU Heir Invest, propriétaire d’un lot commercial dans le centre commercial, a saisi la juridiction de l’expropriation pour fixation de l’indemnité. Le juge a fixé l’indemnité à 1.361.800 euros, composée d’une indemnité principale, d’une indemnité de remploi et d’une indemnité pour pertes de revenus locatifs. La SPLA AD – GPSEAA a interjeté appel du jugement, contesté le montant de l’indemnité. La SASU Heir Invest a également formé un appel incident pour demander une indemnité plus élevée. Les parties ont présenté des arguments sur la consistance du bien, sa superficie, l’évaluation de l’indemnité, les frais irrépétibles, etc. Le commissaire du gouvernement a proposé une indemnité inférieure à celle fixée par le juge.

Aux termes de l’article R 311-26 du code de l’expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 – article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l’appel étant du 3 novembre 2022, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel.

À peine d’irrecevabilité, relevée d’office, l’intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L’intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d’exemplaires qu’il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l’article R 311-26 du code de l’expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 – article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l’appel étant du 3 novembre 2022, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel.

À peine d’irrecevabilité, relevée d’office, l’intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d’exemplaires qu’il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l’espèce, les conclusions de la SPLA AD-GPSEAA du 2 février 2023, de la SASU Heir Invest du 28 avril 2023 et du commissaire du gouvernement du 22 mars 2023 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions de SPLA AD-GPSEAA du 11 juillet 2023 sont de pure réplique à celles de la SASU Heir Invest et du commissaire du gouvernement, appelants incidents, ne formulant pas de demandes nouvelles sont recevables.

Les conclusions de la SASU Heir Invest du 12 janvier 2024 sont de pure réplique à celles de la SPLA AD-GPSEAA et à celles du commissaire du gouvernement, appelant incident, ne formulant pas de demandes nouvelles sont donc recevables.

Sur le fond

Aux termes de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s’impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la réserve d’une juste et préalable indemnité.

L’article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l’article L 321-1 du code de l’expropriation, les indemnités allouées couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.

Aux termes de l’article L 321-3 du code de l’expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l’indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l’article L 322-1 du code de l’expropriation le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l’expropriant fait fixer l’indemnité avant le prononcé de l’ordonnance d’expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l’article L 322-2,

– Indemnité due par la SPLA GPSEA à la SASU Heir Invest pour la dépossession des locaux : 796 488 euros, décomposée en :
– Indemnité principale : 654 080 euros
– Indemnité de remploi : 66 408 euros
– Indemnité pour perte de revenus locatifs : 76 000 euros

– SASU Heir Invest doit verser à la Société AVENIR DEVELOPPEMENT – GPSEA AMENAGEMENT : 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.


Réglementation applicable

Aux termes de l’article R 311-26 du code de l’expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 – article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l’appel étant du 3 novembre 2022, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel.

À peine d’irrecevabilité, relevée d’office, l’intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L’intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d’exemplaires qu’il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES-REIMS
– Me Christine CASTERA
– Me Julien LAMPE de l’AARPI FRECHE ET ASSOCIES
– Me Clara SEBBAG-LEBRATI
– Monsieur [V] [C]

Mots clefs associés

– Recevabilité des conclusions
– Dépôt des conclusions dans un délai de trois mois
– Nombre d’exemplaires des conclusions et documents à produire
– Notification des pièces transmises
– Conclusions recevables
– Date de référence
– Nature du bien et usage effectif
– Consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété
– Méthode d’évaluation
– Références des parties
– Abattement pour occupation
– Abattement pour grande surface
– Indemnité principale
– Indemnité de remploi
– Indemnité pour perte de revenus locatifs
– Indemnité pour frais divers
– Article 700 du code de procédure civile
Dépens

– Recevabilité des conclusions: conditions requises pour que les conclusions d’une partie soient prises en compte par le tribunal
– Dépôt des conclusions dans un délai de trois mois: obligation de déposer les conclusions dans un délai de trois mois à compter de la notification de la clôture de l’instruction
– Nombre d’exemplaires des conclusions et documents à produire: nombre d’exemplaires des conclusions et des documents à produire devant le tribunal
– Notification des pièces transmises: obligation de notifier à l’autre partie les pièces transmises au tribunal
– Conclusions recevables: conclusions qui respectent les règles de forme et de fond et qui peuvent être prises en compte par le tribunal
– Date de référence: date à laquelle certains éléments sont pris en compte pour évaluer une situation juridique
– Nature du bien et usage effectif: caractéristiques du bien et son utilisation réelle
– Consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété: description des biens à la date de l’ordonnance de transfert de propriété
– Méthode d’évaluation: méthode utilisée pour évaluer la valeur d’un bien
– Références des parties: informations permettant d’identifier les parties à un litige
– Abattement pour occupation: réduction de l’indemnité due en cas d’occupation d’un bien
– Abattement pour grande surface: réduction de l’indemnité due en cas de grande surface du bien
– Indemnité principale: montant principal de l’indemnité due à une partie
– Indemnité de remploi: indemnité destinée à financer le remploi d’un bien exproprié
– Indemnité pour perte de revenus locatifs: indemnité destinée à compenser la perte de revenus locatifs suite à une expropriation
– Indemnité pour frais divers: indemnité destinée à couvrir les frais divers engendrés par une expropriation
– Article 700 du code de procédure civile: article du code de procédure civile prévoyant le versement d’une somme au titre des frais de justice
– Dépens: frais engagés par les parties dans le cadre d’une procédure judiciaire

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 7

ARRÊT DU 21 MARS 2024

(n° , 25 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/02029 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CHATY

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Juillet 2022 par le Tribunal Judiciaire de CRÉTEIL – RG n° 22/00005

APPELANTE

SOCIÉTÉ AVENIR DÉVELOPPEMENT – GPSEA AMÉNAGEMENT

anciennement dénommée SPLA GRAND PARIS SUD EST AVENIR DÉVELOPPEMENT, Société publique locale d’aménagement, agissant en

la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 11]

[Localité 50]

représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 substitué à l’audience par Me Christine CASTERA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

SOCIÉTÉ HEIR INVEST

[Adresse 13]

[Localité 44]

représentée par Me Julien LAMPE de l’AARPI FRECHE ET ASSOCIES,

avocat au barreau de PARIS, toque : R0211 substitué à l’audience par

Me Clara SEBBAG-LEBRATI, avocat au barreau de PARIS, toque : R0211

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES

DU VAL DE MARNE – Pôle Gestion Publique – Division Domaine –

Pôle Evaluation Domaniale – Commissaire du Gouvernement

[Adresse 1]

[Localité 50]

représentée par Monsieur [V] [C], en vertu d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 1er Février 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Madame Valérie MORLET, Conseillère

Madame Valérie DISTINGUIN, Conseillère

Greffier : Madame Dorothée RABITA, greffier lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Par délibération du 29 mars 2017, l’établissement public territorial Grand Paris Sud Est Avenir Développement a créé la ZAC du centre commercial du Grand Ensemble. L’aménagement de la ZAC a été confié à la société publique locale d’aménagement Grand Paris Sud Est Avenir Développement (ci-après « SPLA GPSEAD »), en vertu d’un traité de concession du 09 novembre 2018. En 2022, la SPLA GPSEAD est devenue la société publique locale d’aménagement AVENIR DEVELOPPEMENT – GPSEA Aménagement (ci-après « SPLA AD – GPSEAA ») (Pièce 24I).

Une enquête publique et parcellaire a été menée du 12 octobre 2020 au 13 novembre 2020.

Par arrêté préfectoral du 15 février 2021, la ZAC du centre commercial du Grand Ensemble a été déclarée d’utilité publique.

Un arrêté de cessibilité des biens a été pris le 15 avril 2021.

L’ordonnance d’expropriation, emportant transfert de propriété au profit de la SPLA GPSEAD, a été rendue le 08 juillet 2021.

Le centre commercial du Grand Ensemble est érigé sur la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42] d’une superficie totale de 6.010 m². Il s’agit d’une copropriété à usage commercial située au milieu d’une zone importante de logements.

Est notamment concernée par l’opération, la SASU Heir Invest, en tant que propriétaire du lot 1 à usage commercial situé au sein du centre commercial du Grand Ensemble à [Localité 51].

Faute d’accord sur l’indemnisation, la SPLA GPSEAD a saisi la juridiction de l’expropriation du Val-de-Marne le 05 novembre 2021 aux fins de fixation de l’indemnité d’expropriation.

Par un jugement du 04 juillet 2022, après transport sur les lieux le 05 avril 2022, le juge de l’expropriation de Créteil a :

Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 05 avril 2022,

Fixé l’indemnité due par la SPLA GPSEAD à la SASU Heir Invest au titre de la dépossession des locaux situés du centre commercial Grand Ensemble sis à [Localité 51] à la somme de 1.361.800 euros HT/HD ;

Dit que cette indemnité de dépossession foncière se décompose de la façon suivante :

1.168.000 euros au titre de l’indemnité principale

(2.000 euros/m² × 584 m²),

117.800 euros au titre de l’indemnité de remploi,

76.000 euros au titre de l’indemnité pour pertes de revenus locatifs ;

Condamné la SPLA GPSEAD à payer à la SASU Heir Invest la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SPLA GPSEAD aux dépens ;

Rejeté toutes les autres demandes des parties.

La SLPA AD – GPSEAA a interjeté appel du jugement le 03 novembre 2022 sur le montant de l’indemnité de dépossession, les frais irrépétibles, les dépens et le rejet de ses autres demandes.

Pour l’exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ déposées au greffe le 02 février 2023 par la SLPA AD – GPSEAA, notifiées le 02 février 2023 (AR intimé le 06 février 2023 et AR CG le 06 février 2023), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

La déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

Y faisant droit,

Réformer le jugement rendu le 04 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil en ce qu’il a fixé l’indemnité revenant à la SASU Heir Invest à la somme de 1.361.800 euros HT/HD se décomposant comme suit :

1.168.000 euros au titre de l’indemnité principale,

117.800 euros au titre de l’indemnité de remploi,

76.000 euros au titre de l’indemnité pour perte de revenus locatifs ;

Réformer le jugement rendu le 04 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil en ce qu’il « condamne la SPLA GPSEAD à payer à la SASU Heir Invest la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile »

Réformer le jugement en ce qu’il « rejette toutes les autres demandes des parties », mais uniquement lorsqu’il rejette les demandes de la SPLA AD – GPSEAA anciennement dénommée SPLA GPSEAD.

Statuant à nouveau,

Fixer l’indemnité principale à 532.000 euros en valeur occupée ;

Fixer l’indemnité de remploi à 54.200 euros ;

Fixer l’indemnité pour perte de revenus locatifs à six mois de loyer HT/HC, soit 38.000 euros ;

Fixer le montant des frais irrépétibles à 2.500 euros ;

En tout état de cause,

Condamner la SASU Heir Invest aux entiers dépens liés à la procédure d’appel et à verser une somme de 7.500 euros à la SPLA AD – GPSEAA au titre des frais irrépétibles exposés par elle en cause d’appel en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Débouter la SASU Heir Invest de toutes demandes contraires au présent dispositif.

2/ déposées au greffe le 11 juillet 2023 par la SLPA AD – GPSEAA, notifiées le 19 juillet 2023 (AR intimé le 29 juillet 2023 et AR CG le 27 juillet 2023), aux termes desquelles les mêmes demandes sont formulées.

3/ déposées au greffe le 28 avril 2023 par la SASU Heir Invest, intimée, formant appel incident, notifiées le 28 avril 2023 (AR appelant non daté et AR CG le 02 mai 2023), aux termes desquelles elle forme appel incident et demande à la cour de :

Rejeter les demandes de réformation du jugement du 04 juillet 2022 par la SPLA AD – GPSEAA ;

Rejeter les demandes de réformation du jugement du 04 juillet 2022 du commissaire du gouvernement ;

Confirmer le jugement du 04 juillet 2022 en ce qu’il a condamné la SPLA AD – GPSEAA à verser la somme de 10.000 euros à la SASU Heir Invest au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Réformer le jugement du 04 juillet 2022 en ce qu’il a fixé l’indemnité d’expropriation à la somme de 1.361.800 euros et statuant à nouveau :

À titre principal,

Fixer à 5.259.718 euros l’indemnité due à la SASU Heir Invest en conséquence de l’expropriation de la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42] du lot 1 sise sur le territoire d'[Localité 51] correspondant à l’expropriation de sa partie privative et de ses parties communes décomposée comme suit :

Indemnité principale : 4.640.653 euros,

Indemnité de remploi : 465.065 euros,

Indemnités accessoires : 154.000 euros,

Total : 5.259.718 euros ;

À titre subsidiaire,

Fixer à 3.729.039 euros l’indemnité due à la SASU Heir Invest en conséquence de l’expropriation de la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42] lot 1 sise sur le territoire d'[Localité 51] correspondant à l’expropriation de sa partie privative et de ses parties communes décomposée comme suit :

Indemnité principale : 3.249.126 euros,

Indemnité de remploi : 325.913 euros,

Indemnités accessoires : 154.000 euros,

Total : 3.729.039 euros ;

À titre très subsidiaire,

Fixer à 2.303.449 euros l’indemnité due à la SASU Heir Invest en conséquence de l’expropriation de la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42] lot 1 sise sur le territoire d'[Localité 51] correspondant à l’expropriation de sa partie privative et de ses parties communes décomposée comme suit :

Indemnité principale : 1.953.135 euros,

Indemnité de remploi : 196.314 euros,

Indemnités accessoires : 154.000 euros,

Total : 2.303.449 euros ;

À titre infiniment subsidiaire,

Fixer à 2.250.904 euros l’indemnité due à la SASU Heir Invest en conséquence de l’expropriation de la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42] lot 1 sise sur le territoire d'[Localité 51] correspondant à l’expropriation de sa partie privative et de ses parties communes décomposée comme suit :

Indemnité principale : 1.905.368 euros,

Indemnité de remploi : 191.537 euros,

Indemnités accessoires : 154.000 euros,

Total : 2.250.904 euros ;

À titre très infiniment subsidiaire,

Fixer à 2.198.360 euros l’indemnité due à la SASU Heir Invest en conséquence de l’expropriation de la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42] lot 1 sise sur le territoire d'[Localité 51] correspondant à l’expropriation de sa partie privative et de ses parties communes décomposée comme suit :

Indemnité principale : 1.857.600 euros,

Indemnité de remploi : 186.760 euros,

Indemnités accessoires : 154.000 euros,

Total : 2.198.360 euros ;

En tout état de cause,

Condamner la SPLA AD – GPSEAA à verser à la SASU Heir Invest la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

4/ déposées au greffe le 12 janvier 2024 par la SASU Heir Invest, intimée, formant appel incident, notifiées le 17 avril 2023 (AR appelant le 19 janvier 2024 et AR CG non daté), aux termes desquelles les mêmes demandes sont formulées.

5/ adressées au greffe le 22 mars 2023 par le commissaire du gouvernement, intimé, notifiées le 27 mars 2023 (AR appelant le 29 mars 2023 et AR intimé le 28 mars 2023), aux termes desquelles il forme appel incident et demande à la cour de :

Fixer l’indemnité de dépossession foncière à la somme de 456.301 euros, décomposée comme suit :

Indemnité principale : 413.910 euros en valeur occupée,

Indemnité de remploi : 42.391 euros,

Indemnité de perte de revenus locatifs : six mois de loyers HT/HC

sur justificatifs.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

La SLPA AD – GPSEAA fait valoir dans un premier jeu de conclusions que :

Concernant la consistance, l’état et la situation du bien, le premier juge considère, à tort, que le bien bénéficie d’un certain nombre d’éléments de plus-value tenant à la très bonne localisation du site au milieu d’habitations. Le centre commercial au sein duquel est situé le bien exproprié est en désuétude et connaît un taux de vacance important, de nombreux commerces étant fermés depuis plusieurs années (Pièce 9A). Aussi, le bien exproprié est également vétuste en ce que la procédure porte à la fois sur les parties privatives et les tantièmes de parties communes du bien. Or, le mauvais état d’entretien des parties communes impacte nécessairement la valeur du lot de copropriété. C’est en ce sens que la SPLA AD – GPSEAA a fait valoir devant le juge de première instance des éléments de moins-value, dont le premier juge n’a pas tenu compte. Sur les treize lots de la copropriété composant le Grand Ensemble, sont recensés une supérette dont la fréquentation est à la baisse depuis plusieurs années, cinq commerces divers, une pharmacie, un local de stockage, un local professionnel occupé par une société d’ambulances, deux lots vacants et un local associatif. L’environnement dégradé a d’ailleurs motivé le lancement de l’opération d’aménagement en 2017 (Pièce 21A). Les dysfonctionnements du centre commercial (enclavement, dégradation, accès par l’arrière, nature du bâti) rendent difficile l’intégration urbaine à l’échelle du territoire. Les espaces extérieurs du centre commercial sont de faible qualité. Le bâti manque d’entretien et présente la trace de dégâts des eaux liés aux problèmes d’étanchéité des toitures. En première instance, le commissaire du gouvernement a confirmé l’état vétuste et dégradé du centre commercial, l’absence d’exploitation de certains commerces autour du bien exproprié, et la situation d’enclave du centre commercial, en périphérie de la ville et en retrait par rapport aux axes de circulation. Pour autant, le procès-verbal de transport sur les lieux ne fait pas état de l’environnement du bien. De plus, la SASU Heir Invest n’a pas produit les annexes au bail commercial du 13 mars 2020 qui comprennent un « état prévisionnel des travaux à réaliser au cours des trois années postérieures à la signature du Bail assorti d’un budget prévisionnel » et un « dossier technique amiante ». En ne tenant pas compte de ces éléments de moins-value, le jugement entrepris encourt l’infirmation.

Concernant la superficie du bien, le premier juge a retenu une surface à 584 m². Il ressort en effet du relevé de géomètre produit par la SPLA AD ‘ GPSEAA que la surface du bien est de 584,2 m² (Pièce 23A). Le jugement doit être confirmé.

Concernant les termes retenus et le calcul de l’indemnité principale, l’avis des Domaines du 08 avril 2020 estime l’ensemble des dix lots expropriés à la somme de 1.800.000 euros pour une surface utile de 1.683 m², soit environ 1.070 euros/m² (Pièce 8A). Consultée à nouveau sur la seule valeur vénale du lot 1 de la copropriété, dont la superficie utile était alors estimée à 650 m², la DDFIP a évalué le bien à 455.000 euros en valeur occupée dans son avis du 12 octobre 2020 (Pièce 7A). L’autorité expropriante a alors fixé l’indemnité principale à 455.000 euros en valeur occupée, soit 700 euros/m² en tenant compte d’un abattement pour occupation. Au regard de cette estimation, elle a proposé à la SASU Heir Invest une indemnité principale de 455.000 euros pour un local occupé et 591.500 euros pour un local vide. En s’appuyant sur les cessions des autres lots de copropriété, l’offre de la SPLA GPSEAD en 2020 a été fixée à 700 euros/m² en valeur occupée, compte-tenu de l’avis des Domaines du 08 avril 2020 et de la dépréciation dans le temps du centre commercial.

La méthode d’évaluation retenue par la SASU Heir Invest n’est pas pertinente, le lot 1 n’étant pas un terrain à bâtir. De plus, la surface des tantièmes de parties communes appartenant à la SASU Heir Invest ne doit pas être prise en compte. La SPLA AD – GPSEAA critique l’ensemble des termes de comparaison produits par l’expropriée en première instance au motif qu’ils concernent des biens situés ailleurs qu’à [Localité 51], des terrains à bâtir ou des constructions sol intégré, des biens de petite surface, des biens situés dans des secteurs plus favorables commercialement.

Le commissaire du gouvernement proposait de retenir un prix unitaire de 1.350 euros/m² en valeur libre d’occupation, outre un abattement pour occupation de 30% et un abattement pour grande surface, au regard de huit termes de comparaison révélant une valeur unitaire moyenne de 1.721 euros/m². Le jugement est erroné en ce qu’il retient un prix unitaire supérieur à celui sollicité par les parties, et en ce qu’il refuse d’appliquer un abattement pour grande surface, le lot 1 ayant la plus grande surface parmi tous les autres lots de copropriété.

La SPLA AD – GPSEAA a commis le cabinet Expercia afin de réaliser un rapport d’évaluation du bien exproprié (Pièce 27A). L’expert s’est fondé sur les éléments disponibles dans la base BIEN, sur les termes de comparaison de la base de la DDFIP, sur les offres de vente pour des locaux commerciaux, sur les statistiques fournies par la cote annuelle des valeurs vénales immobilières et foncières, sur les écarts de commercialité entre les différents secteurs de la commune d'[Localité 51], pour conclure que la valeur unitaire moyenne est de 1.500 euros/m². Dans la mesure où les droits du propriétaire sont limités, l’occupation du bien justifie une décote de 30%. Le bien exproprié souffre en effet de faiblesses, notamment en ce qu’il est peu liquide sur le marché, les acquéreurs potentiels étant des propriétaires exploitants. Le premier juge se méprend donc en considérant que le bien bénéficie d’une attractivité particulière pour les investisseurs et en retenant une absence de moins-value pour occupation. En effet, l’expert considère que le caractère peu liquide du bien limite les droits du propriétaire, ce qui justifie l’application d’un abattement pour occupation. Donc, la valeur unitaire doit être fixée à 1.400 euros/m², soit 910 euros/m² après abattement de 30% pour occupation.

Concernant l’indemnité de remploi, en application de l’article R.322-5 du code de l’expropriation, elle doit être fixée à 54.200 euros.

Concernant l’indemnité pour pertes de revenus locatifs, son montant doit s’apprécier au regard de la situation concrète de l’expropriée. À l’inverse, il ressort de la jurisprudence que lorsque l’exproprié ne justifie pas, de l’existence de difficultés particulières pour acquérir un nouveau local, l’indemnité est fixée sur la base de six mois HT/HC de loyer, et non douze mois (Pièce 28A). En l’occurrence, le premier juge fait référence à ce qui serait « alloué habituellement », pour justifier de fixer la base d’indemnisation à une année. Or, il ne ressort pas du marché une rareté particulière des locaux commerciaux sur la commune d'[Localité 51], bien au contraire au regard des énonciations du rapport du cabinet Expercia. Au surplus, il convient de relever que le premier juge a pris en compte non seulement le délai nécessaire à l’exproprié pour trouver un local, mais également le délai lui permettant de retrouver un locataire, alors même que le local exproprié ne constitue pas un bien de rapport. L’allocation d’une indemnité équivalente à douze mois de loyer apparaît à cet égard inadéquate. Le montant du loyer annuel est de 76.000 euros HT/HC (Pièce 34A). L’autorité expropriante sollicite donc la réformation du jugement entrepris en ce qu’il a fixé l’indemnité pour perte de revenus locatifs à douze mois de loyer, et demande la fixation de ladite indemnité à six mois de loyer soit 38.000 euros (76.000 euros ÷ 2).

Concernant les frais irrépétibles, la somme de 10.000 euros allouée en première instance par le premier juge excède le montant habituellement accordé, sans qu’aucune circonstance particulière ne le justifie, étant précisé que la production du rapport du cabinet Colomer Expertise ne peut pas la justifier car celui-ci était inadéquat et partial. Le montant alloué en première instance doit donc être limité à la somme de 2.500 euros. Par ailleurs, la SPLA AD – GPSEAA a été contrainte pour faire valoir ses droits d’interjeter appel et de mandater un expert immobilier aux fins d’établissement d’un rapport. Dans les circonstances de l’espèce, il lui sera alloué la somme de 7.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SLPA AD – GPSEAA fait valoir dans un second jeu de conclusions que :

Concernant la consistance, l’état et la situation du bien, la SASU Heir Invest soutient qu’une indemnité supplémentaire au titre des tantièmes de parties communes devrait lui être allouée. Or, les décisions jurisprudentielles dont elle se prévaut ne sont pas comparables à la situation en l’espèce. En tout état de cause, les parties communes du centre commercial du Grand Ensemble présentent une surface limitée de configuration irrégulière, sont principalement à usage de voies de circulation et d’espaces végétalisés. Elles ne sont donc pas constructibles. Au surplus, le sol des lots de copropriété constituait des parties communes de sorte que la SASU Heir Invest ne bénéficiait d’aucun droit à construire. La situation de copropriétaire constitue au contraire un élément de moins-value.

Contrairement à ce que soutient la SASU Heir Invest, l’absence d’entretien des parties communes n’est pas due à la procédure d’expropriation, qui n’a débutée qu’en 2020.

Concernant la superficie du bien, contrairement à ce que soutient la SASU Heir Invest, il ne faut retenir ni la surface « GLA » qui n’est utilisée que pour les centres commerciaux d’une superficie supérieure à 5.000 m², ni la surface de plancher du local au sens de l’article R.111-22 du code de l’urbanisme qui ne peut pas être établie. La méthode de calcul utilisant la surface Carrez est donc pertinente.

Concernant les termes retenus et le calcul de l’indemnité principale, l’indemnité d’expropriation ne peut pas tenir compte de l’affectation future du bien exproprié, étant précisé que la SASU Heir Invest est majoritaire au sein de la copropriété et aurait donc pu engager les travaux dont elle entend tirer bénéfice. Enfin, la surface des parties communes est mal estimée.

S’agissant de l’abattement, les décisions juridictionnelles dont se prévaut l’expropriée concernent des biens sans rapport avec le bien exproprié. La superficie du bien n’a aucun rapport avec sa constructibilité, la SASU Heir Invest n’étant pas propriétaire du sol et de l’affectation du lot 1. La qualification de « supermarché » du local commercial par l’INSEE est étrangère aux débats.

Concernant l’indemnité pour frais divers, la SASU Heir Invest sollicite l’allocation d’une indemnité de 2.000 euros pour couvrir les frais de l’expert qu’elle a mandaté. Or, cette demande est déjà couverte par les frais irrépétibles. La SASU Heir Invest doit donc être déboutée de sa demande.

Concernant les frais irrépétibles, il est remarqué que la SASU Heir Invest se prévaut du rapport du cabinet Colomer Expertise pour solliciter une indemnité pour frais divers, de sorte qu’elle ne justifie pas le montant sollicité au titre des frais irrépétibles.

La SASU Heir Invest rétorque dans un premier jeu de conclusions que :

Concernant la date de référence, la date du 02 octobre 2019 retenue par le premier juge ne fait pas débat.

Concernant la localisation, le lot 1 de la SASU Heir Invest est situé [Adresse 49] et [Adresse 46] à [Localité 51]. Le secteur est résidentiel, avec peu de concurrents, à proximité immédiate des quais de Seine, des voies routières départementales et autoroutières, et des transports en commun. Le premier juge a parfaitement retenu que la situation de l’enseigne était particulièrement bénéfique. L’enclavement du centre commercial au centre d’habitats collectifs et loin du centre-ville constitue, contrairement à ce que soutient l’autorité expropriante, un avantage concurrentiel d’après le rapport du cabinet Colomer Expertise.

Concernant les références cadastrales, le terrain d’assiette, appartenant en copropriété à la SASU Heir Invest, est cadastré AD n°[Cadastre 42].

Concernant la construction édifiée sur le terrain, il s’agit d’un bâtiment indépendant en très bon état comprenant une grande aire de vente avec une hauteur sous plafond de 3,39 m, et des espaces réservés au personnel. D’une part, l’autorité expropriante est mal fondée à se prévaloir de la prétendue vétusté des parties communes alors que le premier juge a constaté leur état lors du transport sur les lieux, que l’autorité expropriante refuse toute indemnité portant sur les tantièmes de copropriété, que l’état du bâtiment est à la charge du preneur d’après le contrat de bail, et que l’autorité expropriante a contribué à l’absence d’entretien des parties communes. D’autre part, contrairement à ce que soutient l’autorité expropriante, le lot 1 est facile d’accès.

Concernant la situation urbanistique, le terrain se trouve dans une zone Ube du plan local d’urbanisme.

Concernant la surface du bâtiment, la surface locative utile brute ou surface GLA est de 593 m² (Pièce 6I). C’est cette surface qu’il convient de retenir dans le cadre de l’évaluation d’un centre commercial, à l’inverse de la surface Carrez. S’agissant de l’abattement pour grande surface, le premier juge l’a parfaitement écarté dans la mesure où cette grande surface n’entraîne pas de difficultés particulières (CA Montpellier 22/00006 ; CA Paris 14/03646 ; 16-14.793 ; CA Pau 19/02204, 17/03362 ; CA Paris 18/02116, 06/00033 ; CA Colmar 20/03143 ; CA Paris 19/11021, 10/08637). Il est à noter que la surface est qualifiée de « supermarché » par l’INSEE, ce qui démontre qu’il ne s’agit pas d’une grande surface. Les 366/1.000èmes des parties communes doivent être indemnisés, de jurisprudence constante (06-12.404, 88-70.292 ; CA Amiens 18/05030). La cour d’appel d’Amiens a jugé que le refus d’indemniser des parties communes d’une surface non négligeable et constructive, entraîne un enrichissement sans cause de l’autorité expropriante (CA Amiens 18/04500). En l’espèce, l’ordonnance d’expropriation ne vise pas le syndicat des copropriétaires de sorte que chaque copropriétaire devra être indemnisé de ses tantièmes de parties communes. Par ailleurs, les tantièmes de parties communes dont la SASU Heir Invest est propriétaire lui confèrent une minorité de blocage aux assemblées générales.

Concernant la méthode d’évaluation, la méthode par comparaison « sol et construction » est la plus pertinente (CA Versailles 18/04165) puisqu’elle permet de déterminer la valeur intrinsèque du bien lorsque que le terrain vaut plus que le bâti, généralement parce qu’il est d’une surface importante (95-70.162). À l’inverse, la méthode « terrain intégré » doit être privilégiée pour évaluer les biens de grande hauteur édifiés sur des terrains de petite surface (CA Paris 01/42011 ; 11-19.230). Les 366/1.000èmes des parties communes correspondent à une surface de 6.177 m² au sol, ce qui est bien plus grand que les parties privatives, à savoir 1.018 m², d’après un relevé produit par l’autorité expropriante elle-même. L’utilisation de la méthode « terrain intégré » ne permettrait pas d’indemniser les tantièmes de parties communes.

Concernant la situation locative et l’abattement pour occupation, un bail commercial a été consenti en 2020. Le premier juge a parfaitement retenu que l’abattement pour occupation n’avait pas lieu d’être appliqué car cet abattement n’est pas impératif lorsque l’exploitation par un commerçant constitue un élément de sécurité et donc un avantage. En l’espèce, le locataire actuel occupe les locaux depuis le 1er février 2007 (Pièce 2I). Le jugement doit être conformé en ce qu’il a écarté l’application d’un abattement pour occupation.

Concernant le rejet de l’appel formé par la SPLA AD – GPSEAA sur le montant de l’indemnité, l’autorité expropriante n’intègre pas l’indemnisation des tantièmes de parties communes. Elle s’est fondée sur des termes de comparaison non pertinents. Elle s’est fondée sur l’avis des Domaines du 08 avril 2020 qui avait une durée de validité d’un an ne tenant pas compte des parties communes dont la SASU Heir Invest est propriétaire. Elle sollicite la fixation d’une indemnité inférieure à celle qu’elle a elle-même proposé à l’expropriée sans justifications en janvier 2020, à savoir 1.386.000 euros. Elle retient une valeur unitaire bien inférieure à l’estimation du cabinet Expercia qui l’estime entre 2.000 euros/m² et 4.066 euros/m². La SASU Heir Invest critique les deux termes de comparaison produits par l’autorité expropriante, en raison notamment de leur ancienneté.

Concernant le rejet de l’évaluation du commissaire du gouvernement, le terme de comparaison dont se prévaut tout particulièrement le commissaire du gouvernement concerne un lot du centre commercial du Grand Ensemble d’une surface dix fois moins importante que le bien exproprié. Retenir ce terme de comparaison ne permettrait donc pas de tenir compte du déséquilibre des tantièmes de copropriété attachés à chaque lot. La minoration de la moyenne des termes de comparaison produits par le commissaire du gouvernement ne doit pas être appliquée, car les abattements pour occupation et grande surface sont inopportuns.

Concernant les demandes de la SASU Heir Invest au titre de l’indemnité principale, à titre principal sur la valorisation du bien par la méthode « sol et constructions », il convient de tenir compte du fait que le bâtiment est indépendant, de la qualité de la construction, de l’existence d’un toit en béton, et de la surface importante de l’aire de vente bien configurée. La SASU Heir Invest reproduit les termes de comparaison cités dans le rapport du cabinet Colomer Expertise et ajoute d’autres termes de comparaison. Sur la base de ces termes de comparaison, elle retient une valeur unitaire de 2.000 euros/m², avec un abattement de 20% pour vétusté. Le rapport du cabinet Colomer Expertise retient une valeur unitaire minimale de 1.200 euros/m² avec un abattement de 20% pour vétusté. Par ailleurs, les parties communes correspondant à des surfaces constructibles doivent être valorisées en tant que terrain à bâtir avec application éventuelle d’un abattement pour encombrement (CA Paris 18/26685). La moyenne des neufs termes de comparaison produits s’établit à 2.317 euros/m². En l’espèce, l’application d’un abattement pour encombrement, copropriété ou aléa dans l’obtention du permis de construire n’apparaît pas justifiée en raison de la déclaration d’utilité publique de la ZAC, et car les termes de comparaison concernaient des terrains soumis aux mêmes contraintes d’encombrement et de constructibilité (CA Paris 20/06567, 21/143657). En tout état de cause, l’encombrement des parties communes étant de 15% au total, l’abattement ne pourra pas excéder 10% (CA Paris 16/04016, 19/13577). À défaut, un abattement de 50% pour copropriété et risque lié au permis de construire pourra être pratiqué sur la base d’une valeur unitaire minorée de 2.000 euros/m². Au total, l’indemnité principale selon la méthode « sol et construction » s’élève à 4.640.652,75 euros avec application d’un abattement pour occupation de 25% [(593 m² × 2.000 euros/m² × 0,80 + 2.261 m² × 2.317 euros/m²) × 0,75]. Au minimum, l’indemnité principale ne pourra pas être inférieure à la somme de 1.953.135 euros [(593 m² × 1.200 euros/m² × 0,80 + 2.261 m² × 2.000 euros/m² × 0,50 × 0,90) × 0,75].

Concernant les demandes de la SASU Heir Invest au titre de l’indemnité principale, à titre subsidiaire sur la valorisation du bien par la méthode « terrain intégré », il convient en tout état de cause d’indemniser l’entièreté du préjudice matériel, direct et certain causé par l’expropriation. La moyenne des neuf termes de comparaison s’établit à 3.590,56 euros/m². Il convient de moduler cette valeur unitaire en fonction de l’usage des différentes parties du bien, pour une moyenne pondérée de 3.143 euros/m². L’indemnité principale s’élèverait alors à la somme arrondie de 1.857.600 euros. Si la méthode « terrain intégré » devait être retenue, il conviendrait d’effectuer la moyenne de l’indemnité principale telle que calculée selon les deux méthodes, pour un total de 3.249.126 euros. À défaut, il convient de retenir la somme de 1.905.368 euros retenue par le rapport du cabinet Colomer Expertise. À défaut, il convient de retenir la somme de 1.857.600 euros retenue par l’expropriée dans les présentes conclusions.

Concernant les termes de comparaison, l’évaluation réalisée par le rapport du cabinet Colomer Expertise est corroborée par la moyenne des huit termes de comparaison produits qui s’établit à 1.864,23 euros/m².

Concernant l’indemnité de remploi, elle s’établit à titre principal à 465.065,30 euros, à titre subsidiaire à 325.913 euros, à titre infiniment subsidiaire à 191.537 euros, à titre très infiniment subsidiaire à 186.760 euros.

Concernant la perte de revenus locatifs, une indemnité doit être allouée, laquelle est en général équivalente à deux années de loyers hors charges compte tenu du temps nécessaire pour acquérir un bien équivalent (02-70.079, 13-27.547). En l’espèce, ce délai est justifié, et ne pourra en tout état de cause être réduit à moins d’un an (TJ Créteil 19/00039 ; CA Paris 20/15812). La perte de loyers s’élève donc à la somme de 152.000 euros HT.

Concernant les frais divers, la SASU Heir Invest a dû faire appel à un expert pour valoriser son bien, ce qui lui a coûté 2.000 euros TTC (Pièce 3I). Partant, la SASU Heir Invest demande que les frais d’expertise pour l’établissement d’un rapport certes non contradictoire, mais nécessaire à assurer sa défense devant la cour d’appel, et conséquence directe de la présente procédure d’expropriation, soient pris en charge dans le cadre de la présente instance au titre de l’indemnité pour frais divers.

La SASU Heir Invest rétorque dans un second jeu de conclusions que :

Concernant la surface du bâtiment, les parties communes du centre commercial du Grand Ensemble sont comparables à celles concernées par les décisions juridictionnelles produites, s’agissant de surfaces au sol constructibles et valorisables. De plus, la constructibilité du terrain est un facteur de plus-value d’après le Traité de l’évaluation des biens.

Le commissaire du gouvernement conclut que :

Concernant la description du bien exproprié, la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 42], d’une superficie de 6.010 m², est sise [Adresse 39] à [Localité 51] (94). Il s’agit d’une copropriété à usage commercial. Le commissaire du gouvernement reprend les descriptions telles qu’elles sont retenues dans le procès-verbal de transport sur les lieux. S’agissant de la surface, dans le cadre d’une expropriation de lot de copropriété, il convient de prendre en compte la surface Carrez et non la surface utile. Il est donc proposé de retenir la surface retenue par le premier juge à savoir 73 m² Carrez. S’agissant de la situation locative, le lot 1 est occupé par une supérette sous l’enseigne « Franprix ».

Concernant la date de référence, en vertu des articles L.322-2 du code l’expropriation et L.213-6 du code de l’urbanisme, puisque le bien exproprié est soumis au droit de préemption urbain, la date de référence est celle du 02 octobre 2019, date à laquelle la modification du plan local d’urbanisme a été approuvée par le Conseil territorial.

Concernant la situation d’urbanisme, la parcelle AD n°[Cadastre 42] est située en zone Ube à la date de référence. La zone UB correspond à des espaces à dominante d’habitat collectif. Le bien est dans le secteur Ube, correspondant au secteur sud-ouest du Grand ensemble, dans lequel les dispositions réglementaires organisent la rénovation urbaine.

Concernant les références relevées par le commissaire du gouvernement, l’étude de marché porte sur des mutations récentes de locaux commerciaux, situés sur la commune d'[Localité 51], les mutations restant assez rares sur cette zone géographique. Les termes de comparaison trouvés concernent des biens libres d’occupation. La moyenne des huit termes de comparaison s’établit à 1.743,38 euros/m².

Concernant l’examen des références de l’expropriant appelant en cause d’appel, le rapport du cabinet Expercia produit neuf termes de comparaison qui ne sont pas référencés et ne peuvent donc pas être retenus. Le rapport inclut également quatre annonces de biens à la vente qui ne sont pas des mutations effectives et ne peuvent donc pas être retenues.

Concernant l’examen des références citées par l’expropriée intimée en première instance, le rapport du cabinet Colomer Expertise propose deux études de marché, l’une via une méthode « sol et construction » permettant d’évaluer le terrain et les constructions séparément, l’autre via la méthode « terrain intégré ». Selon la première méthode, les termes de comparaison de terrains nus ne sont pas référencés et les coûts de constructions présentés sont issus de décisions judiciaires non référencées et antérieures à 2011. Ces termes ne peuvent donc pas être retenus. Selon la seconde méthode, les termes de comparaison ne sont pas référencés et concernent des biens dont la surface n’est pas comparable au bien exproprié. Ces termes ne peuvent donc pas être retenus.

En synthèse, le commissaire du gouvernement propose de privilégier la première mutation qui ressort de l’étude de marché, celle-ci ayant lieu dans le même centre commercial et étant la plus récente. De plus, les termes de comparaison produits dans le cadre de l’étude de marché concernent des mutations de biens libres, c’est pourquoi il convient de retenir un abattement de 30% pour occupation commerciale. Il convient également de pratiquer un abattement de 25% pour grand surface en raison de la grande différence de surface entre le terme de comparaison privilégié et le lot 1.

Concernant l’indemnité principale, le commissaire du gouvernement retient la méthode par comparaison globale, terrain et accessoires intégrés, montant exprimé HT/HD. L’estimation est réalisée en valeur occupée. La surface utile retenue est de 584 m² Carrez. La valeur unitaire retenue est de 1.350 euros/m². Il applique un abattement de 30% pour occupation et un abattement de 25% pour grande surface. L’indemnité principale s’élève donc à 584 m² × 1.350 euros/m² × 0,70 × 0,75 = 413.910 euros.

Concernant l’indemnité de remploi, elle doit être fixée à la somme de 42.391 euros.

Concernant l’indemnité de perte de revenus locatifs, elle doit être fixée à six mois de loyers HT/HC sur justificatifs.

SUR CE, LA COUR

– Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l’article R 311-26 du code de l’expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 – article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l’appel étant du 3 novembre 2022, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel.

À peine d’irrecevabilité, relevée d’office, l’intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L’intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d’exemplaires qu’il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l’espèce, les conclusions de la SPLA AD-GPSEAA du 2 février 2023 , de la SASU Heir Invest du 28 avril 2023 et du commissaire du gouvernement du 22 mars 2023 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions de SPLA AD-GPSEAA du 11 juillet 2023 sont de pure réplique à celles de la SASU Heir Invest et du commissaire du gouvernement, appelants incidents, ne formulant pas de demandes nouvelles sont recevables.

Les conclusions de la SASU Heir Invest du 12 janvier 2024 sont de pure réplique à celles de la SPLA AD-GPSEAA et à celles du commissaire du gouvernement, appelant incicent, ne formulant pas de demandes nouvelles sont donc recevables.

Sur le fond

Aux termes de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s’impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la réserve d’une juste et préalable indemnité.

L’article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l’article L 321-1 du code de l’expropriation, les indemnités allouées couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.

Aux termes de l’article L 321-3 du code de l’expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l’indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l’article L 322-1 du code de l’expropriation le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l’expropriant fait fixer l’indemnité avant le prononcé de l’ordonnance d’expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l’article L 322-2, du code de l’expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération – sous réserve de l’application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code – leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L’appel de la SPLA GPSEAD concerne l’indemnité de dépossession foncière, l’article 700 du code de procédure civile et les dépens .

Elle conteste la superficie retenue par le jugement.

L’appel incident de la SASU Heir Invest concerne le montant de l’indemnité de dépossession ; elle conteste la surface retenue par le jugement, la méthode retenue et demande l’indemnisation des parties communes.

L’appel incident du commissaire du gouvernement a trait à l’indemnité principale, l’indemnité de remploi et l’indemnité pour perte de revenus locatifs.

S’agissant de la date de référence, le premier juge en application des articles L213-6 et L213-4 du code de l’urbanisme , le bien exproprié étant soumis au droit de préemption, a retenu le PLU modifié le 2 octobre 2019.

La SPLA AD- GPSEA n’a pas conclu sur ce point, tandis que la SASU Heir Invest indique que celle-ci ne fait pas débat.

Le commissaire du gouvernement retient comme le premier juge en application de l’article L213-4 du code de l’urbanisme la date du 2 octobre 2019.

En l’absence de contestation par les appelants, il convient de confirmer le jugement qui a exactement retenu, le bien exproprié étant soumis au droit de préemption, en application de l’article L213-4 du code de l’urbanisme, la date du 2 octobre 2019, correspondant au PLU approuvé par le conseil territorial du 14 décembre 2016, modification n°1 approuvée le 2 octobre 2019 par le Conseil territorial.

S’agissant des données d’urbanisme, à cette date de référence, la parcelle AD numéro [Cadastre 42] est située en zone Ube, la zone UB correspondant à des espaces à dominante d’habitat collectif et la zone Ube, au secteur sud ouest du Grand Ensemble, dans lequel les dispositions réglementaires organisent la rénovation urbaine.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s’agit d’une parcelle cadastrée section AD numéro [Cadastre 42] d’une superficie de 6010 m², située [Adresse 39] à [Localité 51] (94) sur laquelle se trouve une copropriété à usage commercial, la procédure visant le lot de copropriété numéro 1, correspondant à un local commercial se situant au milieu d’une zone importante de logements.

La SPLA GPSEAD indique que le jugement a retenu à tort que le site présente un certain nombre d’éléments de plus-value, alors que le lot exproprié constitue un lot de copropriété situé au sein d’un centre commercial vétuste, non entretenu, et dont la plupart des commerces ne sont plus exploités depuis plusieurs années ; que le bien exproprié est également vétuste en ce que la procédure porte à la fois sur les parties privatives et les tantièmes de parties communes du bien ; que le mauvais état d’entretien des parties communes impacte nécessairement la valeur du lot de copropriétés, quand bien même celui-ci serait lui-même en bon état d’entretien ; que les espaces extérieurs sont de faible qualité ; que le jugement ne tient donc pas compte des éléments de moins-value pour statuer sur la valeur vénale du bien.

La SASU Heir Invest rétorque que son bien dispose d’une excellente localisation dans un secteur résidentiel comprenant peu de concurrents à proximité immédiate :

‘des quais de Seine,

‘des voies routières départementales et autoroutières,

‘des transports en commun (station RER Vert de Maison située à 400 m, bus à 350 m et 550 m).

Elle indique que le rapport Colomer qu’elle verse aux débats souligne que : « assez bonne situation pour un supermarché, dans un secteur à dominante résidentielle peu commerçant ou réside une population à faible pouvoir d’achat, à proximité des quais de Seine et des voies routières telles que les routes départementales D6 et D 148 et de l’autoroute A 86 et bénéficiant d’une desserte par les transports en commun, la station de RER « le Vert de Maison » (Ligne D) étant située à 450 m environ » (pièce numéro 3).

Le commissaire du gouvernement, s’agissant des références, précise que les mutations restent rares sur la zone géographique avec peu de références sur ce centre commercial.

Le rapport d’évaluation expertise immobilière versée par SPLA AD – GPSEAA, EXPERCIA retient au titre des facteurs influençant l’évaluation du bien :

Forces :

‘seule supérette du secteur ;

‘forte densité de population au sein du quartier.

Faiblesses :

‘centre commercial en désuétude ;

‘commercialité en retrait par rapport aux autres secteurs de la ville ;

‘localisation difficile d’accès ;

‘bien peu liquide sur le marché (produit non pas d’investissements mais de propriétaire exploitant).

‘Grande surface, pouvant être limitante au vu d’un acquéreur (projets devront correspondre à cette superficie).

S’agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s’agit de celle du jugement de première instance conformément à l’article L322-2 du code de l’expropriation, soit le 4 juillet 2022.

– Sur l’indemnité principale

1° Sur les surfaces

Le premier juge a retenu une surface de 584 m² selon le relevé de géomètre qui a été effectué, en précisant que la superficie des parties communes de l’ensemble commercial n’a pas à entrer en ligne de compte dans l’évaluation qui concerne la surface du lot de copropriété, tantièmes intégrés.

La SPLA AD – GPSEAA demande la confirmation en indiquant que cette superficie précisément de 584,2 m² ressort du relevé du géomètre qu’elle produit calculée en application de la loi Carrez (pièce numéro 23).

La SASU Heir Invest demande l’infirmation en demandant de retenir la surface GLA de 593 m² en indiquant que s’agissant de l’évaluation d’un bien immobilier destiné à la démolition et à la reconstruction, la surface loi Carrez n’est pas pertinente.

Le commissaire du gouvernement retient la surface utile du local commercial de 584 m² loi Carrez.

S’agissant de la surface d’un local commercial, il convient de retenir comme il est d’usage la surface loi Carrez, et non la surface GLA, celle- ci n’étant applicable que pour les centres commerciaux d’une superficie supérieure à 5 000 m².

Le jugement sera confirmé en ce sens.

2° Sur la situation locative

Aux termes de l’article L 322-1 du code de l’expropriation le juge fixe le montant des indemnités d’après la consistance des biens à la date de l’ordonnance portant transfert de propriété.

Le lot 1 est occupé par une supérette sous l’enseigne « Franprix ».

Le premier juge n’a pas appliqué d’abattement pour occupation.

Cette question sera étudiée après examen des références des parties.

3° Sur la méthode

Le juge de l’expropriation dispose du pouvoir souverain d’adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

Le premier juge a retenu la méthode par comparaison globale, terrain et accessoires intégrés, montants exprimés HT/HD, l’estimation étant faite en valeur occupée, en indiquant que cette méthode est par ailleurs retenue pour l’évaluation des autres lots du centre commercial.

La SPLA AD- GPSEAA demande la confirmation, en indiquant qu’il n’y a pas lieu comme demandé par la SASU Heir Invest à une indemnité supplémentaire au titre des tantièmes de parties communes, puisque les parties communes du centre commercial du Grand Ensemble présentent une superficie limitée, sont principalement affectées à la circulation des usagers et un petit espace digitalisé au milieu des locaux, et ne constituent en aucun cas un terrain constructible ; que loin de constituer un avantage, la situation de copropriété représente plutôt une moins-value par rapport à un local en pleine propriété, que ce soit en termes de contraintes juridiques, administratives et financières.

La SASU Heir Invest demande l’infirmation en indiquant que le jugement a évalué, à tort, la seule valeur du local commercial sans tenir compte de la valorisation des tantièmes de copropriété des parties communes qu’elle détient dont elle est également expropriée ; elle sollicite une indemnisation de l’ensemble de son bien et des droits qui sont attachés, et cite à l’appui deux arrêts de la Cour de cassation (Civile, 3ème , 31 janvier 2007 numéro 06-12 404, 18 avril 1991, numéro 88-70 292) et un arrêt de la cour d’appel d’Amiens du 9 janvier 2020 numéro 18/05030.

Le commissaire du gouvernement demande la confirmation.

Les arrêts de la Cour de cassation cités par la SASU Heir Invest concernent l’ordonnance d’expropriation en matière de copropriété et non l’indemnisation et l’arrêt de la cour d’appel d’Amiens est inédit.

Si l’article L321-1 du code de l’expropriation exige de limiter la prise en charge pécuniaire au seul préjudice, direct, certain et matériel, l’indemnisation allouée doit couvrir toutes les conséquences dommageables qui sont en relation directe avec l’expropriation ; chaque copropriétaire est bien fondé à demander l’indemnisation de la perte de valeur de sa partie privative résultant de l’expropriation portant sur les parties communes ; cependant, l’évaluation des lots privatifs est faite au m² loi Carrez de local, valeur des parties communes intégrées, puisque les parties communes sont destinées au service de la collectivité tout entière pour permettre l’exercice du droit de propriété ; le terrain, compris dans les parties communes de 6177 m², compris dans les parties communes, n’a pas de valeur intrinsèque et ne peut faire l’objet d’une évaluation distincte ; en outre, cette partie non bâtie du terrain n’était pas constructible à la date de référence au regard des règles d’urbanisme applicable ; il ne peut s’agir d’un terrain à bâtir, puisque l’indemnité d’expropriation ne peut tenir compte de l’affectation future du foncier exproprié ; la méthode sollicitée par la SASU Heir Invest aboutirait à une double indemnisation des parties communes, le terrain étant déjà intégré dans le prix au m² utile de lots privatifs, en tant que partie commune.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a exactement retenu la méthode par comparaison globale, terrain et accessoires intégrés, l’estimation se faisant en valeur occupée.

4° Sur les références des parties

Le premier juge a écarté les références de l’expropriant, les références de l’exproprié, a retenu 5 références du commissaire du gouvernement et a retenu une valeur de 2 000 euros/m², sans appliquer d’abattement pour occupation, soit une indemnité de dépossession foncière de :

584 m² X 2 000 euros/m² =1 168 000 euros.

Il convient en conséquence d’examiner les références des parties :

a) Les références de la SPLA GPSEAD

Elle demande de retenir après abattement pour occupation une valeur unitaire de 1 400 euros/m², avec application d’un abattement de 30 % pour occupation.

Elle invoque l’avis des Domaines du 8 avril 2020 (pièce n°8) retenant 1 070 euros/m² et son avis pour le lot n°1 (pièce n°7), pour une valeur de 760 euros/m² en tenant compte de l’abattement de 30 % pour occupation.

Les avis des Domaines ne correspondant pas à des mutations effectives seront écartés.

Elle invoque les mutations suivantes :

‘cession en 2012 ; un local de 86 m² situé dans le centre commercial du Grand Ensemble (pièce n°5) : selon jugement du 12 mai 2015 ordonnant la réitération de la vente et publiée au service de publicité foncière de [Localité 53] le 29 novembre 2019, ce local commercial a été cédé par sa propriétaire Madame [G] moyennant un prix de 65’000 euros, soit 756 euros/m² (pièce n°2).

Il ressort de l’avis du Service des Domaines rendu le 2 septembre 2012 que la préemption est effectuée au prix de 65’000 euros fixé par la venderesse (pièce n°3) ;

-cession de local commercial par M. et Mme [U] (lot n°7), préempté en 2013 par l’ex-CAPCVM au prix fixé par les vendeurs de 68’000 euros (pièce n°4).

L’avis rendu par le service des Domaines précise que le local présente une superficie de 60 m², ce dont il résulte une valeur de 1 133 euros/m² (pièce n°5).

Ces cessions datant de plus de cinq ans sont trop anciennes comme l’indique la SASU Heir Invest et seront donc écartées.

Elle produit le rapport d’un cabinet EXPERCIA (pièce n°25) et indique que selon les éléments disponibles sur la base BIEN, les transactions concernent des locaux situés dans la partie nord d'[Localité 51], qui sont répartis en deux groupes : ceux situés [Adresse 61], bénéficiant de la meilleure commercialité pour une moyenne de 4 066 euros/m² et ceux situés à l’écart de l’artère commerciale principale pour une moyenne de 2 475 euros/m² ; que les offres de vente pour des locaux commerciales correspondent à des valeurs unitaires comprises entre 2 000 euros et 2 800 euros pour des locaux situés en dehors des principaux axes commerçants, avec même une référence d’un produit neuf à proximité du RER cédé à un prix unitaire de 2 800 euros/m² ; que l’expert conclut : « nous retiendrons donc une valeur métrique moyenne de 1 500 euros/m², ayant posé l’hypothèse que les valeurs métriques supérieures ne puissent se retrouver que dans des secteurs de meilleure commercialité, comme par exemple au nord de la ville, à proximité de la [Adresse 61].

Enfin, le centre commercial affiche des problèmes structurels qui sembleraient de nature à limiter l’investissement dans cette cellule commerciale. La forte vacance au coeur du site en est un des exemples majeurs ».

L’expert EXPERCIA invoque neuf références issues de la base BIEN (page 28) correspondant à des commerces/magasins/boutique :

N° du terme

Date de vente

Adresse

Surface

Prix en euros

Prix en euros/m²

Observations

T1

30 août 2019

[Adresse 21]

38

115’000

3026

libre

T2

17 octobre 2018

[Adresse 28]

26

67’000

2577

libre

T3

18 juillet 2018

[Adresse 15]

69

138’680

2010

libre

T4

30 novembre 2017

[Adresse 26]

25

55’000

2200

libre

T5

29 mars 2017

[Adresse 9]

39

100’000

2564

libre

T6

25 janvier 2017

[Adresse 22]

47

180’000

3830

libre

T7

25 janvier 2017

[Adresse 22]

52

196’000

3769

libre

T8

17

janvier 2017

[Adresse 32]

19

78’000

4105

libre

T9

14 novembre 2016

[Adresse 17]

57

260’000

4561

occupé

Moyenne

3183

L’expert indique qu’on peut répartir les transactions en deux groupes :

‘ les références 6/7/8/9 toutes situées le long de la [Adresse 61], présentant ainsi une valeur métrique moyenne de 4 066 euros/m² ;

‘ les références 1/2/3/4/5 dont la moyenne des valeurs métriques est de 2 475 euros/m², celles-ci étant à l’écart de l’artère principale commerciale de la ville.

En l’absence des références de publication, s’agissant de la base BIEN, ne permettent pas d’accéder à l’acte de ventes pour connaître les caractéristiques de la vente, celles- ci seront donc écartées.

Le rapport invoque quatre annonces de commerces présentées à la vente entre le 1er octobre 2016 et le 1er octobre 2019 (page 31) :

‘ 9 septembre 2019 : commerce, [Adresse 31], à [Localité 51], 74 m², 150’000 euros, 2 027 euros/m², rez-de-chaussée ;

‘ 11 août 2018 : commerce, proche RER D, 357 m², 996’800 euros, 2 792 euros/m², dans un programme de standing, local commercial d’environ 356 m², deux places de stationnement ;

‘ 23 août 2019 : commerce, proche mairie, 51 m², 142’000 euros, 2 784 euros/m², local commercial de plain-pied, disposant d’une enseigne sur un angle et axe passant, proches des transports et de toutes les commodités, à proximité de la mairie, se compose également de quatre caves en sous-sol ;

‘ 12 juin 2022 : commerce, [Adresse 27] à [Localité 51], 36 m², 129’000 euros, 3 583 euros/m², murs occupés, dans un immeuble en briques de 1930, vitrine et porte sur rue, porte d’accès secondaire sur cour.

L’expert indique que les valeurs métriques semblent cohérentes au vu des transactions et que l’on voit en effet des valeurs métriques comprises entre 2 000 et 2 800 euros pour des locaux situés en dehors des principaux axes commerçants.

Ces annonces ne correspondant pas à des mutations effectives seront écartées.

Le rapport cite enfin des statistiques de la Cote Annuelle des Valeurs Vénales Immobilières et Foncières (page 32) qui ne correspondant pas à des mutations effectives seront donc écartées.

b) les références de la SASU Heir Invest

Elle invoque des références de jurisprudence

‘Cour d’appel de Paris du 30 juin 2011 : [Adresse 30] à [Localité 63], 1 350 euros/m² ;

‘TGI de Bobigny du 27 novembre 2008 : [Adresse 2] à [Localité 55], 450 euros/m² ;

‘TGI de Créteil du 27 mars 2008 : [Adresse 10] à [Localité 52], 1 550 euros/m² ;

‘TGI de Bobigny du 14 mai 2008 : [Adresse 14] à [Localité 54], 700 euros/m² ;

‘TGI de Créteil du 26 février 2009 : [Adresse 45] à [Localité 64], 1800 euros/m² ;

‘TGI de Bobigny du 18 juin 2008 : 134 et 201 m² de pavillon situé [Adresse 59] et [Adresse 62] à [Localité 58], 1850 euros/m².

Ces références datant de plus de cinq ans sont trop anciennes et seront donc écartées.

Elle invoque ensuite des mutations plus récentes dans un secteur proche du bien lui appartenant : source DVF avec les références cadastrales et DVF :

N° du terme

Date de vente

Adresse

localisation

montant hors droits de mutation en euros

surfaces locales m²

montant au m² hors droits euros/m²

T1

4 mai 2018

[Adresse 43]

260 m

1’130’000

565

2000

T2

21 juillet 2020

[Adresse 16]

600 m

361’000

110

3281,8

T3

6 novembre 2019

[Adresse 20]

1,1 km

3’465’000

1243

2780

T4

23 mars 2016

[Adresse 20]

1,1 km

3’150’000

1243

2534

T5

4 juillet 2018

[Adresse 8]

867 m

350’000

285

1228

T6

29 décembre 2021

[Adresse 7]

771’324

477

1617

moyenne

2240,13 euros/m²

Si ces termes comportent les références DVF, elles ne sont pas accompagnées des références de publication, permettant d’accéder à l’acte de vente et de connaître les caractéristiques de la mutation ; ces termes seront donc écartés.

Elle invoque également une mutation du 29 décembre 2021 au [Adresse 6], 410 m², 771’324 euros, soit 1 117 euros/m².

Ce terme sera écarté pour les mêmes motifs.

Elle verse aux débats un rapport Colomer expertises (pièce n°1) qui propose deux études de marché, la première pour une méthode « sol et construction » qui permet d’évaluer le terrain nu des constructions séparément, la seconde pour une méthode terrain intégré : vente de terrain à proximité (source : base BIEN des notaires pour les références avec un numéro de fiches et Etalab):

‘1106 euros/m² : en novembre 2019 pour 904 m², [Adresse 40], 1 000 000 d’euros ;

‘1512 euros/m² : d’octobre 2018 pour 1092 m², [Adresse 4], 1’651’130 euros, droits à construire ;

‘1862 euros/m² : en février 2018 pour 376 m², 48, [Adresse 57], 700’000 euros ;

‘2147 euros/m² : juillet 2020 pour 1217 m², [Adresse 25], 2’113’000 euros ;

‘2291 euros/m² : en janvier 2019 pour 371 m², [Adresse 36], 850’000 euros ;

‘2632 euros/m² : [Adresse 37], 1 000 000 euros ;

‘2683 euros/m² : en octobre 2018 pour 511 m², [Adresse 3], 1’371’000 euros, droits construire ;

‘premier 44 euros/m² : en janvier 2017, 1123 m², [Adresse 23], 3’418’000 euros ;

‘3782 euros/m² : en janvier 2019, 200 m², [Adresse 38], 720’000 euros.

Comme l’indique exactement le commissaire du gouvernement, pour la méthode « sol et constructions », il s’agit de termes de comparaison de terrains nus extraits de la base BIEN des notaires, sans référence de publication au service de la publicité foncière ; en conséquence, en l’absence des références de publication, permettant d’accéder à l’acte de vente, et de connaître les caractéristiques des mutations, ces termes seront écartés.

L’expert utilise ensuite une approche : « terrain intégré » : vente de boutiques à [Localité 51], pour des faible surfaces (source : base BIEN des notaires) :

‘2875 euros/m² : en décembre 2019 pour 40 m², [Adresse 47], 115’000 euros ;3026 euros/m² : en août 2019 pour 38 m², 2, rue Marcel Sembat, 115’000 euros ;

‘3243 euros/m² : en septembre 2020 pour 37 m², [Adresse 33], 120’000 euros ;

‘3288 euros/m² : en février 2020 % 32 m², [Adresse 5], 434’000 euros ;

‘3617 euros/m² : juillet 2000 1947 m², [Adresse 22], 170’000 euros ; 4170 euros/m² ;

‘en janvier 2018 pour 47 m², [Adresse 22], 196’000 euros ;

‘5200 euros/m² : en juillet 2017 pour 90 m², [Adresse 48], 469’000 euros ;

‘3014 euros/m² : en février 2020 pour 36 m², [Adresse 27], 108’500 euros ;

‘3871 euros/m² : en juillet 2020 aux 31 m², [Adresse 24],

120’000 euros.

S’agissant de la méthode terrain intégrée, comme l’indique exactement le commissaire du gouvernement, les termes de comparaison ne sont pas référencés (base BIEN) ne présentent pas de surface comparable au bien exproprié ; ils seront donc écartés.

c) Les références du commissaire du gouvernement

Le commissaire du gouvernement propose de retenir la même étude de marché qu’en première instance, soit une étude de marché portant sur des mutations récentes de locaux commerciaux, situés sur toute la commune d'[Localité 51], en indiquant que ce type de mutation reste assez rare sur cette zone géographique avec peu de références sur ce centre commercial, avec les références d’enregistrement et cadastrales, pour des biens libres d’occupation :

N° du terme

Date de vente

Adresse

surface Carrez

Prix en euros

Prix en euros/m²

année de construction

Observations

CG1

9 novembre 2021

[Adresse 49]

52

70’000

1346

1966

boutique, vitrine, local sanitaire

CG2

26 février 2020

[Adresse 29]

62, 88

130’000

2135

1967

une boutique située au rez-de-chaussée, ayant une entrée privative sur le [Adresse 56] avec 3 pièces à usage d’atelier à la suite, droit à l’usage des water-closets communs situés dans

la cour,

un atelier

CG3

18 juillet 2018

[Adresse 41]

68,88

138’680

2019

1890

une boutique dite numéro 2 en façade sur la [Adresse 60], située au rez-de-chaussée gauche, comportant : boutique, arrière boutique, water-closets, lavabo, réserve, 2 accès vers la cour, un accès vers une cave

CG4

4 mai 2018

[Adresse 34]

42,81

115’000

2686

1914

rez-de-chaussée porte gauche de l’entrée commune.

Un local comprenant : une salle avec accès sur rue, une autre salle, WC et une chambre sur rue.

Une cave accessible par trappe.

CG5

13 décembre 2017

[Adresse 12]

64,87

90’000

1387

1922

au rez-de-chaussée,

le local commercial,

2 pièces en arrière boutique, une cuisine, 2 caves une remise

CG6

4 mai 2018

[Adresse 18]

131,75

145’000

1101

1968

un magasin dans un ensemble immobilier comprenant

un ensemble commercial

CG7

30 juin 2020

[Adresse 19]

238,64

380’000

1592

1968

au rez-de-chaussée, magasins,

le bien est actuellement

à usage professionnel de bureaux

CG8

25 janvier 2021

[Adresse 35]

342,1

575’000

1681

Un bâtiment élevé sur 2 étages, et en façade sur le [Adresse 57], comprenant : rez-de-chaussée : un accueil, une arrière-boutique ; au premier étage : de bureaux sur la rue des Gardons ; dans la cour arrière, deux bâtiments à usage d’atelier, construit en équerre, comprenant : le premier, un atelier, une douche, WC et le second,

un atelier,

une réserve

CG1 : le commissaire du gouvernement propose de privilégier cette mutation qui se trouve dans le même centre commercial et qui est la plus récente.

La SPLA AD – GPSEAA indique que le commissaire du gouvernement a fondé ses conclusions au regard de huit termes de référence révélant une moyenne de prix de 1 721 euros/m² avec une médiane de 1 637 euros/m² en valeur libre , considérant comme privilégié un terme de référence relatif à la vente d’un local de 52 m² au sein du centre commercial du Grand Ensemble.

La SASU Heir invest indique qu’au sein de la copropriété la répartition des tantièmes de copropriété est très déséquilibrée, et que si ce terme devait être retenu, il ne pourrait que dans le cadre d’un calcul « sol + construction » portant exclusivement sur la valeur du terrain bâti.

Ce terme récent est comparable en consistance et en localisation, puisque situé dans le même centre commercial que le bien exproprié et sera donc retenu.

Les autres termes du commissaire du gouvernement n’étant pas critiqués seront donc retenus.

Les termes retenus correspond donc à un prix moyen de 1 743 euros/m².

Il convient de privilégier le terme CG1, puisqu’il s’agit d’une mutation récente au sein du même centre commercial que le bien exproprié pour une valeur de 1 350 euros/m².

5° sur l’ abattement pour occupation commerciale

Le premier juge indique qu’en l’absence de moins-value rapportée du fait de la situation d’occupation, il n’y a pas lieu d’appliquer un abattement pour occupation.

La SPLA AD – GPSEAA demande l’infirmation en indiquant que le cabinet EXPERCIA préconise l’application d’un abattement de 30% et que la moins-value apportée par l’occupation du bien justifie l’application de celui-ci.

La SASU Heir Invest n’a pas conclu sur ce point.

Le commissaire du gouvernement indique que l’étude de marché présente des termes de comparaison libre et propose de retenir un abattement de 30% pour occupation commerciale.

Un abattement est habituellement pratiqué sur la valeur libre d’un bien immobilier pour obtenir sa valeur occupée, en raison du fait qu’un bien occupé vaut généralement moins cher qu’un bien libre ; que toutefois, il ne s’agit pas d’une règle absolue, le juge de l’expropriation pouvant estimer que dans le cas d’espèce qui lui est soumis, il n’y a pas lieu de procéder à un abattement.

En l’espèce, la SASU Heir Invest ne démontre pas par des références pertinentes qu’il n’y a pas de différence de valeur entre un bien libre et un bien occupé ; les termes retenus par la cour étant en valeur libre, il y a donc lieu d’appliquer l’abattement d’usage de 30 %.

6°Sur l’abattement pour grande surface

Le commissaire du gouvernement demande de pratiquer un abattement de 25% pour grande surface en raison de la grande différence de surface Carrez entre le terme de comparaison privilégié et la surface Carrez du bien exproprié.

La SPLA AD – GPSEAA ne demande pas d’appliquer cet abattement supplémentaire.

La SASU Heir Invest n’a pas conclu sur ce point.

S’agissant d’une supérette, elle ne peut être qualifiée de grande surface.

Le jugement qui n’a pas appliqué d’abattement pour grande surface sera donc confirmé sur ce point.

7° sur la fixation de l’indemnité principale

Il convient également de tenir compte des éléments suivants :

‘éléments de moins-value :

– enclave du centre commercial qui a motivé la création de la Zac en 2017,

-local situé au sein d’un centre commercial vétuste,

-mauvais entretien des parties communes.

‘éléments de plus-value :

-bonne localisation du site au milieu d’habitation,

-seule superette du secteur .

Au regard de la moyenne des références retenues, en privilégiant le terme CG1 correspondant à mutations récentes dans le même centre commercial que le bien exproprié, en tenant compte des éléments de moins-value et de plus value et de l’évolution de l’évolution du marché et enfin en prenant en compte l’importance des parties communes pour le lot exproprié, il convient de retenir une valeur unitaire de 1 600 euros/m² en valeur libre.

L’indemnité principale en valeur occupée est donc de :

1 600 euros/m² X 0,70 (abattement pour occupation) X 584 m² = 654 080 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

– Sur les indemnités accessoires

1° Sur l’indemnité de remploi

Elle est calculée selon la jurisprudence habituelle comme suit :

20% entre 0 et 5 000 euros : 1 000 euros

15% entre 5 001 et 15 000 euros : 1 500 euros

10% sur le surplus soit : ( 654 080 – 15 000 ) x 10% = 63 908 euros

soit un total de 66 408 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens

2° Indemnité pour perte de revenus locatifs

Le premier juge a alloué à l’exproprié une indemnité pour perte de revenus locatifs correspondant à 12 mois de loyers soit la somme de 76 000 euros.

La SPLA GPSEAD demande l’infirmation en retenant une indemnité correspondant à 6 mois de loyers en indiquant qu’il ne ressort pas du marché une rareté particulière des locaux commerciaux sur la commune d'[Localité 51] comme cela ressort du rapport EXPERCIA.

La SASU Heir Invest demande l’infirmation et une indemnité pour perte de revenus locatifs correspondant à deux ans de loyers.

Le commissaire du gouvernement retient six mois de loyers sur justificatifs.

Au regard du marché sur [Localité 51], il convient de retenir comme il est d’usage une indemnité pour perte de loyers portant sur une année.

En conséquence, la perte de revenus locatifs est fixée au regard des loyers hors-taxes soit la somme de 76 000 euros HT/HC.

Le jugement sera confirmé en ce sens.

3° indemnité pour frais divers

La SASU Heir Invest indique qu’elle a dû faire appel à un expert pour valoriser son bien et qu’elle a dû engager des frais qui s’élèvent à la somme de 2 000 euros TTC ; elle demande une indemnité accessoire à ce titre.

La SPLA AD-GPSEAA rétorque qu’une telle indemnité est déjà couverte par les frais irrépétibles fixés par le tribunal à 10’000 euros.

Cette indemnité demandée correspond aux frais irrépétibles de l’article 700 du code de procédure civile ; en conséquence la SASU Heir Invest sera déboutée de ce chef.

L’indemnité totale de dépossession en valeur occupée est donc de :

654 080 euros (indemnité principale)+ 66 408 euros (indemnité de remploi) +

76 000 euros (indemnité pour perte de revenus locatifs) = 796 488 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

– Sur l’article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la SPLA GPSEAD à payer à la SASU Heir Invest la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de débouter la SASU Heir Invest de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel et de la condamner sur ce fondement à payer la somme de 3 000 euros à la SPLA GPSEAD.

– Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l’expropriant conformément à l’article L 312-1 du code de l’expropriation.

La SASU Heir Invest perdant le procès sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Statuant dans la limite des appels ;

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Infirme partiellement le jugement entrepris sur l’indemnité principale et sur l’indemnité de remploi ;

Statuant à nouveau,

Fixe l’indemnité due par la SPLA GPSEA à la SASU Heir Invest au titre de la dépossession des locaux situés dans le centre commercial grand ensemble lot numéro 1 sis à [Localité 51] à la somme de 796 488 euros en valeur occupée se décomposant comme suit :

– 654 080 euros (indemnité principale)

– 66 408 euros (indemnité de remploi)

– 76 000 euros (indemnité pour perte de revenus locatifs) ;

Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Déboute la SASU Heir Invest de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SASU Heir Invest à verser la somme de 3000 euros à la Société AVENIR DEVELOPPEMENT – GPSEA AMENAGEMENT au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SASU Heir Invest aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 

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