Droits d’auteur sur la forme d’un fichier de prospects
Une société à l’origine de la création d’un fichier de prospects des comités d’entreprises a tenté en vain d’en obtenir sa protection juridique, au titre du droit des bases de données et accessoirement du droit d’auteur. La société a fait valoir que les choix de présentation et de structuration de son fichier étaient spécifiques et inédits, de sorte qu’il s’agissait d’une véritable création intellectuelle originale, au sens de l’article L.112-3 du Code de la propriété intellectuelle (CPI).
L’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous (article L.111-1 du CPI). Les dispositions de l’article L.112-1 du CPI protègent ainsi par les droits d’auteur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination, pourvu qu’elles soient des créations originales. Les auteurs de données diverses telles que les bases de données, qui par le choix ou la disposition des matières constituent des créations intellectuelles, jouissent de la protection légale. Il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d’une oeuvre sans formalité du seul fait qu’elle constitue une création originale.
Néanmoins lorsque cette protection est contestée en défense, il appartient à celui qui l’invoque d’établir et de caractériser l’originalité de l’oeuvre, qui ressort notamment de partis pris esthétique et de choix arbitraires portant l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Fichier Excel dépourvu d’originalité
Or en l’espèce, le choix de sélectionner des données relatives à l’adresse du comité d’entreprise, au secteur d’activité et aux activités du comité d’entreprise relève d’un travail technique banal pour une base de données présentée sur un tableau Excel, le choix de couleurs ou de l’ordre de présentation des différentes informations dans les différentes colonnes ne caractérisant pas davantage un effort créatif et des choix arbitraires portant l’empreinte de la personnalité de son auteur de nature à lui accorder la protection d’une oeuvre de l’esprit.
Question du droit sui generis des bases de données
La société a également été déboutée de sa demande de protection spécifique au titre du droit des bases de données. L’investissement substantiel était établi mais pas les extractions qualitativement ou quantitativement substantielles du fichier. Les éléments produits (faux email pièges) par la société ne concernaient que quatre adresses e-mail, alors que la base de données revendiquée comprenait 2000 comités d’entreprises et pour chacun de ces comités de nombreuses données autres que l’adresse e-mail.
Au sens de la jurisprudence européenne, la notion d’investissement lié à la vérification du contenu de la base de données doit être comprise comme visant les moyens consacrés, en vue d’assurer la fiabilité de l’information contenue dans ladite base, au contrôle de l’exactitude des éléments recherchés, lors de la constitution de cette base ainsi que pendant la période de fonctionnement de celle-ci.
La notion d’investissement lié à la présentation du contenu de la base de données concerne, pour sa part, les moyens visant à conférer à ladite base sa fonction de traitement de l’information, à savoir ceux consacrés à la disposition systématique ou méthodique des éléments contenus dans cette base ainsi qu’à l’organisation de leur accessibilité individuelle.
L’investissement lié à la constitution de la base de données peut consister dans la mise en oeuvre de ressources ou de moyens humains, financiers ou techniques, mais il doit être substantiel d’un point de vue quantitatif ou qualitatif. L’appréciation quantitative fait référence à des moyens chiffrables et l’appréciation qualitative à des efforts non quantifiables, tels qu’un effort intellectuel ou une dépense d’énergie.
La notion d’investissement lié à l’obtention du contenu d’une base de données doit s’entendre comme désignant les moyens consacrés à la recherche d’éléments existants et à leur rassemblement dans ladite base. Elle ne comprend pas les moyens mis en oeuvre pour la création des éléments constitutifs du contenu d’une base de données.
Rappel sur les extractions illicites de base de données
L’article L. 342-1 du CPI confère au producteur de bases de données, le droit d’interdire i) l’extraction, par transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support, par tout moyen et sous toute forme que ce soit ; ii) la réutilisation, par la mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, quelle qu’en soit la forme. Il s’ensuit que l’atteinte correspond à une extraction et/ou une réutilisation d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle.
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