En matière d’amende fiscale de contrefaçon de produits de luxe, si le juge peut en moduler le montant, eu égard à l’ampleur et à la gravité de l’infraction commise, ainsi qu’à la personnalité de son auteur, il ne peut pas prendre en considération la situation personnelle, familiale et sociale du contrevenant pour réduire cet amende.
Contrefaçons en provenance de Chine
Par jugement du 25 novembre 2020, le tribunal correctionnel a déclaré Mme [J] [F] et M. [R] [P] [I] coupables de contrefaçon et importation sans déclaration de marchandises prohibées pour avoir importé en vue de les vendre depuis la Chine diverses marchandises contrefaisant plusieurs marques de luxe et les a condamnés, Mme [F] à six mois d’emprisonnement assorti d’un sursis probatoire, M. [P] [I] à six mois d’emprisonnement.
Le tribunal a en outre condamné les prévenus solidairement à payer une amende douanière de 200 000 euros et à indemniser les sociétés parties civiles des préjudices subis.
Réduction massive de l’amende fiscale
En appel, pour réduire le montant de l’amende douanière, fixé à 200 000 euros par les premiers juges, après avoir mentionné qu’en cours de délibéré et par envoi réceptionné le 28 mars 2022, il a été versé au dossier de la cour des copies de l’extrait K bis de M. [P] [I] et de son avis d’imposition des revenus 2020 faisant apparaître des bénéfices industriels et commerciaux imposables à hauteur de 370 euros, l’arrêt attaqué énonce qu’eu égard notamment à l’impécuniosité relative des prévenus, par application de l’article 369 du code des douanes, ladite amende sera modérée à hauteur de 7 600 euros.
Cette réduction massive du montant de l’amende a été censurée par la Cour de cassation.
L’article 369 du code des douanes
En effet, il résulte ainsi des termes de l’article 369 du code des douanes que le juge qui prononce une amende fiscale, s’il peut en moduler le montant, eu égard à l’ampleur et à la gravité de l’infraction commise, ainsi qu’à la personnalité de son auteur, n’a pas à prendre en considération la situation personnelle, familiale et sociale du contrevenant.
S’il ressort des travaux préparatoires de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013, qui a modifié le second de ces textes, que le législateur a eu l’intention d’aligner les modalités d’application des amendes douanières sur celles des amendes de droit commun, il n’a, après la loi n° 2014-896 du 15 août 2014, qui a introduit le critère de la situation matérielle, familiale et sociale pour le prononcé des peines de droit commun, pas modifié les critères d’appréciation énoncés par l’article 369 du code des douanes pour la modulation de l’amende douanière.
Pour rappel, en application de l’article 369 du code des douanes, eu égard à l’ampleur et à la gravité de l’infraction commise, ainsi qu’à la personnalité de son auteur, le tribunal peut :
a) Libérer les contrevenants de la confiscation des moyens de transport, sauf dans le cas où les actes de contrebande ou assimilés ont été commis par dissimulation dans des cachettes spécialement aménagées ou dans des cavités ou espaces vides qui ne sont pas normalement destinés au logement des marchandises ;
b) Libérer les contrevenants de la confiscation des objets ayant servi à masquer la fraude ;
c) Réduire le montant des sommes tenant lieu de confiscation des marchandises de fraude ;
d) Réduire le montant des amendes fiscales jusqu’à un montant inférieur à leur montant minimal ;
e) En ce qui concerne les sanctions fiscales visées au c et au d du présent 1, limiter ou supprimer la solidarité de certains condamnés ;
f) Dispenser le coupable des sanctions pénales prévues par le présent code, ordonner qu’il soit sursis à leur exécution, décider que la condamnation ne soit pas mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire.
En cas de pluralité de contrevenants pour un même fait de fraude, le tribunal peut, en ce qui concerne les sommes tenant lieu de confiscation et les amendes fiscales, limiter l’étendue de la solidarité à l’égard de certains d’entre eux seulement. Dans ce cas, le tribunal prononce tout d’abord les sanctions fiscales applicables aux autres contrevenants et auxquelles ceux-ci seront solidairement tenus.
Lorsque les marchandises saisies ne sont pas explicitement prohibées au titre de la réglementation douanière, les tribunaux peuvent en donner mainlevée avant de juger définitivement le tout.
Les tribunaux ne peuvent dispenser le redevable du paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues ni de la confiscation des marchandises dangereuses pour la santé ou la moralité et la sécurité publiques, des marchandises contrefaisantes, ainsi que de celles qui sont soumises à des restrictions quantitatives.