Exploitation d’un concept de Fitness Court
L’ancien joueur de rugby Sébastien Chabal a remporté une première manche judiciaire dans le litige l’opposant à la société de droit américain National Fitness Campaign. Le rugbyman avait été autorisé par la société, à importer en France le concept d’achat par des collectivités publiques ou des sociétés privées de plateformes « Fitness Court ». Celles-ci rassemblant différents agrès destinés à la mise en oeuvre d’exercices physiques, installées en plein air dans des zones urbaines et librement accessibles au public. Les parties avaient présenté le projet en France au cours de l’édition 2014 du salon des maires.
Licence d’exploitation en France
Les parties ont conclu une licence d’exploitation aux termes duquel la société National Fitness Campaign LLC concédait à la société constituée à l’initiative du rugbyman, le droit d’utiliser les droits de propriété intellectuelle du concept, en ce comprises les marques de la société National Fitness Campaign devant être apposées sur les plateformes, pour une durée de 10 ans. La société française s’était alors engagée en contrepartie, à développer un réseau de 375 plateformes d’agrès sur le territoire français. Ce contrat contenait également une clause de non-concurrence stipulant que le licencié et Sébastien Chabal s’engagaient à ne pas participer à la fabrication ou à la vente de Fitness Courts ou d’installations similaires incluant l’installation de Fitness Courts dans un cadre autre que celui du projet, pendant toute la durée du contrat et durant trente-six (36) mois après l’expiration ou la résiliation de la licence.
Sécurité des installations
Suite à l’installation d’une première plateforme d’agrès, le représentant de la société américaine NFC a dénoncé les conditions d’installation et de sécurité de la plateforme et a sollicité la confirmation de la souscription d’une assurance. Par la suite, la licence a été dénoncée en raison de ce manquement et l’absence d’utilisation conforme des marques de la société NFC.
Action en contrefaçon
Saisis en référé d’une action en trouble manifestement illicite (contrefaçon des droits de la société américaine sur son concept), les juges se sont prononcés en faveur de Sébastien Chabal. Constitue un trouble manifestement illicite, entre autres, le fait de reproduire, sans le consentement de son auteur, une oeuvre de l’esprit protégée par un droit de propriété intellectuelle. Or, la preuve de la titularité des droits de propriété de la société américaine n’était par rapportée. II ne résultait pas avec l’évidence requise en référé que la société NFC a commercialisé sans équivoque sous son nom la plate-forme « Fitnesss Court » et les agrès la composant. En effet, figurait sur les plans et dessins remis à Sébastien Chabal un cartouche de copyright portant la dénomination d’un tiers (le bureau technique de conception). Cette mention a suffi à faire échec à la présomption de titularité des droits.
Preuve de la titularité des droits d’auteur
Aux termes de l’article L. 111-3 du CPI, la propriété incorporelle est indépendante de la propriété de l’objet matériel. L’acquéreur de l’objet n’est investi, du fait de cette acquisition, d’aucun des droits prévus par le CPI.. S’il est constant qu’une personne morale ne peut avoir la qualité d’auteur (Cass. 1è civ., 15 janv. 2015, n° 13-23.566), en revanche, en l’absence de revendication de cette qualité par une personne physique, fût-elle identifiée, la personne morale qui exploite sous son nom et de manière non équivoque une oeuvre est présumée, à l’égard des tiers recherchés pour contrefaçon, être titulaire des droits de propriété incorporelle de l’auteur (Cass. Com. 20 juin 2006, pourvoi n° 04-320.776). En l’espèce, la société NFC revendiquait la présomption de titularité, issue de l’article L 111-3 du CPI, des droits d’auteur sur la « Fitness Court » divulguée et exploitée sous son nom, en tant qu’oeuvre architecturale et donc sur les plans et dessins esthétiques qui la représentent. Il appartient à la personne morale qui se prévaut d’une commercialisation non équivoque d’identifier précisément l’oeuvre qu’elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation.
Rappel sur l’opportunité du référé
Aux termes de l’article 809 alinéa 1er du code de procédure civile, la juridiction des référés peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Le dommage imminent s’entend du « dommage qui n’est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer’ et le trouble manifestement illicite résulte de ‘toute perturbation résultant d’un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit ». Il s’ensuit que pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit nécessairement être constaté, à la date à laquelle le premier juge a statué et avec l’évidence qui s’impose à la juridiction des référés, l’imminence d’un dommage, d’un préjudice ou la méconnaissance d’un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines, qu’un dommage purement éventuel ne saurait donc être retenu pour fonder l’intervention du juge des référés ; la constatation de l’imminence du dommage suffit à caractériser l’urgence afin d’en éviter les effets.
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