Cour d’appel de Paris, 15 avril 2019
Cour d’appel de Paris, 15 avril 2019

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Évaluation des droits d’auteur par le Fisc : Affaire Asterix

Résumé

L’héritière de Goscinny a remporté une victoire judiciaire contre le Fisc concernant l’évaluation de ses droits d’auteur sur l’œuvre Asterix. Alors que l’administration fiscale avait estimé sa participation à près de 14 millions d’euros, elle avait initialement déclaré environ 4 millions. Les juges ont statué que la transmission d’un patrimoine professionnel par héritage ne supprime pas son caractère professionnel. L’héritière a prouvé qu’elle exploitait activement les droits d’auteur hérités, justifiant ainsi sa demande d’exonération d’impôt sur la fortune. Ses activités incluaient l’écriture de préfaces et la gestion des œuvres de son père, renforçant son statut d’auteur à part entière.

Évaluation des droits d’auteur par le Fisc

L’héritière de Goscinny a remporté une manche judiciaire contre le Fisc concernant sa déclaration  d’impôt de solidarité sur la fortune (2006 à 2008). La participation détenue par celle-ci dans les  droits d’auteur provenant de son père, coauteur de l’oeuvre Asterix, avait été évaluée à la somme de près de 4 millions d’euros alors que par proposition de rectification, l’administration fiscale a porté cette somme a près de 14 millions d’euros (y incluant les valeurs déclarées au titre de la participation détenue par l’héritière dans la société Éditions Albert-René).

Article 885 I alinéa 3 du code général des impôts

L’administration fiscale avait considéré que l’héritière ne bénéficiait pas de l’exonération prévue pour les biens professionnels (article 885N du code général des impôts). En défense, il était plaidé que l’article 885-N du code général des impôts pose quatre conditions cumulatives afin de permettre l’exonération des biens servant une activité professionnelle : i) les biens doivent être nécessaires à l’exercice d’une profession ; ii) les biens doivent être utilisés dans le cadre d’une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ; iii) l’activité professionnelle doit être exercée à titre principal ; iv) l’activité professionnelle doit être exercée par le propriétaire des biens ou son conjoint.

Transmission d’un patrimoine professionnel

Sur l’exercice d’une profession au sens de l’article 885-N du CGI, les juges ont considéré que la  transmission d’un patrimoine professionnel par voie de succession ne fait pas disparaître le caractère professionnel de ce patrimoine, l’article 885-N du CGI ne distinguant pas entre les biens professionnels crées ou acquis ou hérités et l’héritière justifiait d’une exploitation professionnelle de l’oeuvre de son père.  Or, au sens de l’article 885 N du code général des impôts (dans sa rédaction applicable au litige), les biens nécessaires à l’exercice, à titre principal, tant par leur propriétaire que par le conjoint de celui-ci, d’une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont considérés comme des biens professionnels.

Exonération et ISF

Le fait d’hériter d’un auteur qui bénéficie de l’exonération d’ISF en qualité d’auteur en application de l’article 885 I du code général des impôts, n’induit pas que l’héritier soit obligatoirement soumis à l’imposition à l’ISF du chef des droits hérités de son père. En l’occurrence, l’héritière pouvait solliciter le bénéfice des dispositions de l’article 885 N du code général des impôts sous réserve de justifier qu’elle exploite les droits d’auteur hérités de son père aux conditions posées par l’article 885 N. Précisément, l’héritière justifiait poursuivre personnellement, de façon continue, habituelle et constante l’exploitation du monopole de droits d’auteur dont elle a hérité de son père dans le cadre d’une profession libérale au sens de l’article 885 N ; pendant les années elle avait notamment écrit de nombreuses préfaces des rééditions d’albums de son père et des éditions de nouveaux albums des personnages créés par Goscinny.

Les revenus de l’héritière découlaient donc de ses initiatives et des exploitations réalisées dans le cadre de son activité libérale exercées à titre indépendant et personnel, d’une part, en sa qualité d’auteur de ses propres oeuvres et, d’autre part, comme ayant droit de l’oeuvre de son père;  les droits d’auteur qu’elle détient de son père constituent le fondement de sa propre activité et lui sont ainsi nécessaires. A ce titre, elle avait adhéré à une association de gestion agréée et était immatriculée au répertoire national des entreprises.

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