Validité de la signification et régularité du recouvrement des cotisations sociales

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Validité de la signification et régularité du recouvrement des cotisations sociales

L’Essentiel : Par lettre recommandée du 24 mars 2023, la société SAS a contesté une contrainte émise par l’URSSAF le 3 mars 2023, d’un montant de 24 344 euros, relative aux cotisations sociales dues pour plusieurs mois de 2022. Lors de l’audience du 4 novembre 2024, la société a sollicité l’annulation de la contrainte. Le tribunal a examiné la validité de la signification, concluant qu’elle avait été correctement délivrée à la gérante de la société. La demande de nullité a été rejetée, et la contrainte a été validée pour un montant de 20 169 euros, incluant des frais de signification.

Contexte de l’affaire

Par lettre recommandée du 24 mars 2023, la société SAS [3] a contesté une contrainte émise par l’URSSAF le 3 mars 2023, signifiée le 14 mars 2023, d’un montant de 24 344 euros, relative aux cotisations sociales dues pour plusieurs mois de 2022. L’URSSAF a demandé la validation de cette contrainte pour un montant actualisé de 20 169 euros, incluant des frais de signification.

Demande de la société SAS [3]

Lors de l’audience du 4 novembre 2024, la société SAS [3] a sollicité l’annulation de la contrainte. Les parties ont été entendues, et le tribunal a statué en l’absence d’un assesseur, conformément aux dispositions légales.

Validité de la signification de la contrainte

Le tribunal a examiné la validité de la signification de la contrainte, concluant que celle-ci avait été correctement délivrée à la gérante de la société, qui était habilitée à recevoir l’acte. Par conséquent, la demande de nullité de la société a été rejetée.

Régularité de la procédure de recouvrement

Concernant la procédure de recouvrement, le tribunal a constaté que l’URSSAF avait bien adressé une mise en demeure conforme pour certaines cotisations, mais n’avait pas justifié l’envoi d’une seconde mise en demeure pour d’autres cotisations. Ainsi, ces dernières ont été exclues de la contrainte.

Validation de la contrainte

La société SAS [3] n’ayant pas contesté le montant des cotisations et majorations de retard, le tribunal a validé la contrainte pour un montant de 20 169 euros, correspondant aux cotisations des mois d’avril, juin et juillet 2022, ainsi qu’aux majorations de retard.

Frais de signification de la contrainte

Le tribunal a également statué que les frais de signification de la contrainte, d’un montant de 73,04 euros, seraient à la charge de la société SAS [3], étant donné que la contrainte a été jugée fondée.

Décision finale du tribunal

En conclusion, le tribunal a validé la contrainte émise par l’URSSAF, condamnant la société SAS [3] à payer la somme de 20 169 euros, ainsi que les frais de signification. La décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la validité de l’acte de signification de la contrainte

L’article 654 du Code de procédure civile stipule que la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

De plus, l’article 690 du même code précise que la signification à une personne morale de droit privé doit être effectuée au lieu de son établissement.

La jurisprudence, notamment la décision de la Cour de cassation du 18 septembre 2003, indique que la signification d’un jugement à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte est délivré à toute personne habilitée, sans que le commissaire de justice ait à vérifier la qualité déclarée par la personne à qui est remise la copie de l’acte.

En l’espèce, l’acte de signification de la contrainte mentionne que le commissaire de justice s’est rendu le 14 mars 2023 au siège social de la société, où il a rencontré la gérante qui s’est déclarée habilitée à recevoir l’acte.

Ainsi, le commissaire de justice a accompli les diligences nécessaires pour considérer que l’acte a été valablement délivré à la société.

Par conséquent, la demande de nullité de l’acte formulée par la société sera déboutée.

Sur la régularité de la procédure de recouvrement

L’article L.244-2 du Code de la sécurité sociale stipule que toute action ou poursuite doit être précédée d’un avertissement par lettre recommandée, invitant l’employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois.

Si la poursuite n’est pas à la requête du ministère public, cet avertissement est remplacé par une mise en demeure, qui doit être adressée par lettre recommandée ou tout moyen donnant date certaine à sa réception.

L’article R. 244-1 alinéa 1 précise que la mise en demeure doit impérativement indiquer la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, ainsi que les majorations et pénalités applicables.

Le défaut de réception effective de la mise en demeure n’affecte pas sa validité, tant que l’organisme prouve avoir envoyé le courrier à la dernière adresse connue.

En l’espèce, l’URSSAF a justifié l’envoi d’une première mise en demeure datée du 9 novembre 2022, mentionnant les cotisations dues pour plusieurs mois, ainsi que les majorations de retard.

Cependant, l’URSSAF n’a pas justifié l’envoi d’une seconde mise en demeure pour le mois d’octobre 2022, ce qui entraîne l’exclusion des cotisations et majorations correspondantes de la contrainte.

Ainsi, la mise en demeure du 9 novembre 2022 permettait à la société de connaître la nature, l’étendue et la cause de son obligation envers l’URSSAF.

Le tribunal retient donc l’irrégularité de la procédure de recouvrement uniquement pour les cotisations d’octobre 2022.

Sur le bien-fondé de la contrainte

La société n’a pas contesté sérieusement le montant des cotisations sociales et des majorations de retard recouvrées par la contrainte.

Il convient donc de valider la contrainte émise par l’URSSAF le 3 mars 2023, signifiée le 14 mars 2023, pour un montant actualisé de 20 169 euros.

Ce montant comprend 19 174 euros au titre des cotisations et contributions sociales pour les mois d’avril, juin et juillet 2022, ainsi que 995 euros pour les majorations de retard.

Sur les frais de signification de la contrainte

L’article R. 133-6 du Code de la sécurité sociale stipule que les frais de signification de la contrainte sont à la charge du débiteur, sauf si l’opposition a été jugée fondée.

Étant donné que la contrainte est fondée, les frais de signification, d’un montant de 73,04 euros, ainsi que les frais de recouvrement nécessaires à l’exécution de la contrainte, seront mis à la charge de la société.

Ainsi, le tribunal condamne la société à payer ces frais, en plus des sommes dues à l’URSSAF.

MINUTE N° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL – CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :

DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

3 février 2025

Jérôme WITKOWSKI, président

Fabienne AMBROSI, assesseur collège employeur

assistés lors des débats et du prononcé du jugement par Sophie RAOU, greffière

tenus en audience publique le 4 novembre 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 3 février 2025 par le même magistrat

URSSAF [Localité 4] C/ Société SAS [3]

N° RG 23/01243 – N° Portalis DB2H-W-B7H-YFK3

DEMANDERESSE

URSSAF [Localité 4],
dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par la SELAS ACO AVOCATS, avocats au barreau de LYON, vestiaire : 487

DÉFENDERESSE

Société SAS [3],
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par la SCP JAKUBOWICZ & ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, vestiaire : 350

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

URSSAF [Localité 4]
Société SAS [3]
la SCP JAKUBOWICZ & ASSOCIES, vestiaire : 350
la SELAS ACO AVOCATS, vestiaire : 487
Une copie revêtue de la formule exécutoire :

URSSAF [Localité 4] ,la SELAS ACO AVOCATS, vestiaire : 487
Une copie certifiée conforme au dossier

EXPOSE DU LITIGE

Par lettre recommandée du 24 mars 2023 réceptionnée le 27 mars 2023, la société SAS [3] a, par l’intermédiaire de son conseil, saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon d’une opposition à la contrainte émise à son encontre par l’Union de recouvrement des cotisations sociales et d’allocations familiales (URSSAF) [Localité 4] le 3 mars 2023 et signifiée le 14 mars 2023.

Cette contrainte d’un montant de 24 344 euros vise les cotisations et contributions sociales dues au titre des mois d’avril, juin, juillet et octobre 2022.

Aux termes de ses conclusions déposées lors de l’audience du 4 novembre 2024, l’URSSAF [Localité 4] demande au tribunal de valider la contrainte susvisée pour un montant actualisé de 20 169 euros et de condamner la société SAS [3] à lui payer cette somme, outre la somme de 73,04 euros au titre des frais de signification de la contrainte.

Aux termes de sa requête déposée lors de l’audience du 4 novembre 2024, la société SAS [3] demande au tribunal d’annuler la contrainte émise à son encontre.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.

En l’absence d’un assesseur, le président a statué seul avec l’accord des parties et après avoir recueilli l’avis de l’assesseur présent, en application des articles L.218-1 et L.211-16 du code l’organisation judiciaire.

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la validité de l’acte de signification de la contrainte

L’article 654 du code de procédure civile prévoit notamment que la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

Selon l’article 690 du code de procédure civile, la signification à personne morale de droit privé doit être faite au lieu de son établissement.

La signification d’un jugement à une personne morale est faite à personne lorsque l’acte est délivré à toute personne habilitée, sans que le commissaire de justice ait à vérifier la qualité déclarée par la personne à qui est remise la copie de l’acte (Cass., 2ème civ., 18 septembre 2003).

Enfin, l’acte de signification du commissaire de justice, officier ministériel, fait foi jusqu’à inscription de faux, cette force probante s’appliquant notamment aux mentions contenues dans l’acte.
En l’espèce, l’acte de signification de la contrainte mentionne que le commissaire de justice s’est rendu le 14 mars 2023 au siège social de la société SAS [3] sis [Adresse 1], qu’il y a rencontré madame [R] [W] qui s’est présentée en sa qualité de gérante et qui s’est déclarée habilitée à recevoir une copie de l’acte et l’a accepté.

Ainsi, le commissaire de justice, qui n’avait pas à vérifier la qualité de gérante déclarée par madame [R] [W], a accompli les diligences permettant de considérer que l’acte a été valablement délivré à la personne de la société SAS [3].

En conséquence, il y a lieu de débouter la société SAS [3] de sa demande de nullité dudit acte.

2. Sur la régularité de la procédure de recouvrement

Il résulte de l’article L.244-2 du Code de la sécurité sociale que  » Toute action ou poursuite effectuée en application de l’article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d’un avertissement par lettre recommandée de l’autorité compétente de l’Etat invitant l’employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n’a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l’employeur ou le travailleur indépendant.
Le contenu de l’avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. « .

L’article R. 244-1 alinéa 1 précise à propos de la mise en demeure que celle-ci doit impérativement préciser, à peine d’irrégularité de l’acte, la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

Le défaut de réception effective par l’intéressé de la mise en demeure qui lui est adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception n’affecte pas sa validité, tant que l’organisme démontre avoir régulièrement envoyé le courrier au cotisant à la dernière adresse connue de ses services.

Comme la mise en demeure, la contrainte émise par l’URSSAF doit préciser, à peine de nullité, la nature, l’étendue et la cause de l’obligation du débiteur, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice, étant précisé que la contrainte peut cependant se contenter de renvoyer à la mise en demeure concernant la nature de la cotisation ou la cause de recouvrement.

En l’espèce, l’URSSAF [Localité 4] justifie avoir adressé à la société cotisante une première mise en demeure datée du 9 novembre 2022, visant les cotisations sociales dues au titre des mois d’avril, juin et juillet 2022 (19 174 euros) outre les majorations de retard (995 euros) pour un montant total de 20 169 euros, ainsi que de la réception de cette mise en demeure par la cotisante le 12 novembre 2022 (pièce n°1 de l’URSSAF).

En revanche, elle ne justifie pas de l’envoi de la seconde mise en demeure datée du 2 décembre 2022 visant les cotisations sociales dues au titre du mois d’octobre 2022 (3 969 euros), outre les majorations y afférentes (206 euros) pour un montant de total de 4 175 euros (pièce n°2 de l’URSSAF), de sorte que ces cotisations et majorations ne pouvaient faire l’objet de la contrainte litigieuse et en seront donc exclues.

Par ailleurs, le tribunal relève que la mise en demeure du 9 novembre 2022, comme la contrainte litigieuse qui y fait expressément référence, mentionne la cause des sommes réclamées ( » rejet du titre de paiement par la banque « ), la nature des cotisations réclamées ( » régime général incluses contribution d’assurance chômage, cotisations AGS « ), la période à laquelle ces cotisations se rapportent ( » avril, juin et juillet 2022 « ), ainsi que le montant des sommes réclamées au titre de chacun des mois susvisés.

Il en résulte que les mentions figurant dans la mise en demeure du 9 novembre 2022, à laquelle la contrainte litigieuse fait expressément référence, permettaient à la société SAS [3] de connaitre la nature, l’étendue et la cause de son obligation envers l’URSSAF [Localité 4].

Le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure de recouvrement sera donc retenu uniquement en ce qui concerne les cotisations sociales et majorations de retard recouvrées au titre du mois d’octobre 2022.

3. Sur le bien-fondé de la contrainte

La société SAS [3] n’émet aucune contestation sérieuse quant au montant des cotisations sociales et majorations de retard recouvrées par la contrainte litigieuse.

Il y a donc lieu de valider la contrainte émise par l’URSSAF [Localité 4] le 3 mars 2023 et signifiée à la société SAS [3] le 14 mars 2023 pour un montant actualisé de 20 169 euros, comprenant 19 174 euros au titre des cotisations et contributions sociales afférentes aux mois d’avril, juin et juillet 2022, outre 995 euros au titre des majorations de retard y afférentes.

4. Sur les frais de signification de la contrainte

Selon l’article R. 133-6 du code de la sécurité sociale,  » Les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions prévues à l’article R. 133-3, ainsi que de tous actes de procédures nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur sauf lorsque l’opposition a été jugée fondée « .

La contrainte litigieuse étant fondée, il y a lieu de mettre à la charge de la société SAS [3] les frais de signification de la contrainte, dont il est justifié pour un montant de 73,04 euros, ainsi que les frais de recouvrement nécessaires à la bonne exécution de la contrainte.

PAR CES MOTIFS

Le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

VALIDE la contrainte émise par l’URSSAF [Localité 4] le 3 mars 2023 et signifiée à la société SAS [3] le 14 mars 2023 pour un montant actualisé de 20 169 euros, comprenant 19174 euros au titre des cotisations et contributions sociales afférentes au mois d’avril, juin et juillet 2022, outre 995 euros au titre des majorations de retard y afférentes.

CONDAMNE en conséquence la société SAS [3] à payer à l’URSSAF [Localité 4] la somme de 20 169 euros ;

MET A LA CHARGE de la société SAS [3] les frais de signification de la contrainte, d’un montant de 73,04 euros, outre les frais de recouvrement nécessaires à la bonne exécution de la contrainte ;

CONDAMNE la société SAS [3] aux dépens ;

RAPPELLE que la décision du tribunal est exécutoire de droit à titre provisoire ;

Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 3 février 2025 et signé par le président et la greffière.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


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