L’Essentiel : La société CG Car-garantie a contesté le taux de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance, demandant un dégrèvement pour un montant de 1 025 210,50 euros pour les années 2015 à 2017. Après le rejet de ses réclamations par l’administration fiscale, la cour d’appel de Colmar a accordé le dégrèvement. Cependant, l’administration a contesté cette décision, arguant que la garantie « panne mécanique » devait être soumise au taux de 18 %. La Cour de cassation a finalement annulé la décision de la cour d’appel, soulignant que la garantie était liée à un contrat imposable au taux de 18 %.
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Contexte de l’affaireLa société CG Car-garantie Versicherungs-Aktiengesellschaft, succursale française d’une compagnie d’assurance allemande, est autorisée à commercialiser des produits d’assurance en France, notamment dans les domaines des dommages aux biens et des pertes pécuniaires diverses. Demande de dégrèvementLa société a contesté le taux de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance (TSCA) appliqué à ses contrats, soutenant qu’ils devaient être taxés au taux réduit de 9 % au lieu de 18 %. Elle a sollicité un dégrèvement pour un montant total de 1 025 210,50 euros pour les années 2015 à 2017, mais ses réclamations ont été rejetées par l’administration fiscale. Procédure judiciaireSuite au rejet de ses demandes, CG Car-garantie a saisi un tribunal pour obtenir le dégrèvement. L’affaire a été portée devant la cour d’appel de Colmar, qui a finalement accordé le dégrèvement et ordonné la restitution de la somme demandée, assortie d’intérêts moratoires. Arguments de l’administration fiscaleL’administration fiscale a contesté cette décision, arguant que la garantie « panne mécanique » devait être soumise au taux de 18 % selon le code général des impôts. Elle a soutenu que la cour d’appel n’avait pas correctement interprété les clauses des contrats en question, notamment en ce qui concerne la nature de la garantie et le rôle du vendeur. Décision de la cour d’appelLa cour d’appel a conclu que la garantie en litige ne relevait pas du taux de 18 %, en se basant sur le fait que le vendeur avait une obligation de réparation dans le cadre d’une garantie commerciale. Elle a également noté que CG Car-garantie n’était pas partie au contrat, ce qui a conduit à sa décision en faveur de la société. Analyse de la Cour de cassationLa Cour de cassation a ensuite examiné la décision de la cour d’appel, soulignant que la garantie contractuelle consentie par le vendeur était en réalité liée au contrat de garantie Comfortech proposé par CG Car-garantie. Elle a noté que la garantie jouait à l’occasion d’un sinistre impliquant un véhicule terrestre à moteur, ce qui aurait dû entraîner l’application du taux de 18 %. Conclusion de la Cour de cassationEn se fondant sur ses constatations, la Cour de cassation a annulé la décision de la cour d’appel, affirmant qu’elle avait violé le code général des impôts en ne tenant pas compte de la nature de la garantie et de son application au taux de 18 %. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance (TSCA) selon le code général des impôts ?La taxe spéciale sur les contrats d’assurance (TSCA) est régie par l’article 1001 du code général des impôts. Cet article précise que le tarif de la TSCA est fixé à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur, sauf pour les assurances relatives à l’obligation d’assurance en matière de véhicules terrestres à moteur, prévue à l’article L. 211-1 du code des assurances. Il est important de noter que cette taxe s’applique lorsque la garantie, qui n’est pas nécessairement incluse dans un contrat d’assurance relevant de l’article L. 211-1, intervient lors de tout sinistre impliquant un véhicule terrestre à moteur. Ainsi, la TSCA est un impôt spécifique qui s’applique à divers types de contrats d’assurance, en fonction de la nature des risques couverts. Quelles sont les implications de l’article 1001, 5° bis, du code général des impôts sur les contrats d’assurance ?L’article 1001, 5° bis, du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014, stipule que le tarif de la TSCA est fixé à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur. Cet article précise que cette taxation s’applique aux assurances qui ne relèvent pas de l’obligation d’assurance prévue à l’article L. 211-1 du code des assurances. Il est essentiel de comprendre que la qualification d’un contrat d’assurance dépend de la nature de la garantie fournie et de la relation entre les parties impliquées. La jurisprudence a établi que la garantie « panne mécanique » est soumise à ce taux lorsque le bénéficiaire est l’acquéreur du véhicule et que la garantie couvre les conséquences d’un risque lié à l’usage du véhicule. Comment la jurisprudence a-t-elle interprété l’application de l’article 1001 dans le cas de la société CG Car-garantie ?Dans l’affaire concernant la société CG Car-garantie, la cour d’appel a jugé que la garantie en litige ne relevait pas du taux de 18 % en raison de la nature du contrat de garantie Comfortech. La cour a constaté que le contrat stipulait que le vendeur avait l’obligation de réparer à ses frais une pièce défectueuse, ce qui impliquait une garantie commerciale consentie à l’acheteur. Cependant, la cour a également noté que la société CG Car-garantie n’était pas partie à ce contrat, ce qui a conduit à une interprétation erronée de la nature de la garantie. En se fondant sur ces motifs, la cour d’appel a accordé le dégrèvement demandé par la société CG Car-garantie, ce qui a été contesté par l’administration fiscale. La Cour de cassation a finalement annulé cette décision, affirmant que la garantie en question jouait à l’occasion d’un sinistre impliquant un véhicule terrestre à moteur, et devait donc être soumise au taux de 18 %. Quelles sont les conséquences de la décision de la Cour de cassation sur la société CG Car-garantie ?La décision de la Cour de cassation a des conséquences significatives pour la société CG Car-garantie. En annulant l’arrêt de la cour d’appel, la Cour de cassation a réaffirmé l’application de l’article 1001, 5° bis, du code général des impôts, qui impose un taux de 18 % pour les assurances relatives aux véhicules terrestres à moteur. Cela signifie que la société CG Car-garantie ne pourra pas bénéficier du dégrèvement de la TSCA qu’elle avait sollicité, ce qui représente un montant total de 1 025 210,50 euros. Cette décision souligne l’importance d’une analyse précise des contrats d’assurance et des relations entre les parties pour déterminer la nature des garanties et les taux d’imposition applicables. En conséquence, la société devra se conformer aux obligations fiscales en vigueur et payer la TSCA au taux applicable. |
MB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 22 janvier 2025
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 36 F-D
Pourvoi n° K 22-21.855
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2025
1°/ Le directeur régional des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris, dont le siège est [Adresse 5], [Localité 2], agissant sous l’autorité du directeur général des finances publiques,
2°/ le directeur général des finances publiques, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 3],
ont formé le pourvoi n° K 22-21.855 contre l’arrêt rendu le 16 juin 2022 par la cour d’appel de Colmar (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la société CG Car-Garantie Versicherungs Aktiengelsellschaft, compagnie d’assurance de droit allemand, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 4] (Allemagne), défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris et du directeur général des finances publiques, de la SARL Boré,Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société CG Car-Garantie Versicherungs Aktiengelsellschaft, après débats en l’audience publique du 26 novembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Colmar, 16 juin 2022) et les productions, la société CG Car-garantie Versicherungs-Aktiengesellschaft (la société CG Car-garantie), succursale française de la société CG Car Garantie Versicherungs AG, compagnie d’assurance de droit allemand, est autorisée à commercialiser en France des produits d’assurances des branches 9 « autres dommages aux biens» et 16 « pertes pécuniaires diverses » énumérées à l’article R. 321-1 du code des assurances.
2. Soutenant que les contrats devaient être taxés au taux réduit de 9 % prévu à l’article 1001, 6°, du code général des impôts et non au taux de 18 % prévu à l’article 1001, 5° bis, la société CG Car-garantie a, par lettres des 1er septembre 2016, 10 février et 3 mai 2017, sollicité de l’administration fiscale le dégrèvement de la moitié de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance (TSCA) versée au titre des années 2015 à 2017, à hauteur d’un montant total de 1 025 210,50 euros.
3. Ces réclamations ayant été rejetées, elle a saisi un tribunal d’une demande de dégrèvement.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. L’administration fiscale fait grief à l’arrêt de déclarer non-fondées les décisions de rejet du 12 mars 2019, accorder à la société CG Car-Garantie le dégrèvement des droits correspondants et ordonner la restitution à cette société de la somme de 1 025 210,50 euros assortie des intérêts moratoires, alors « qu’il résulte des dispositions de l’article 1001, 5° bis, du code général des impôts que le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance est fixé à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur ; que selon une jurisprudence constante, la garantie « panne mécanique » entre dans le champ d’application de cet article lorsque le bénéficiaire de la garantie est l’acquéreur du véhicule, que l’objet de l’assurance est ce même véhicule et que la prestation qui est offerte par la garantie consiste en la prise en charge par l’assureur des conséquences matérielles de la réalisation d’un risque (la panne mécanique) né directement de l’usage d’un véhicule terrestre à moteur ; que la Cour de cassation écarte en revanche l’application du taux de 18 % lorsque le bénéficiaire de la garantie est le vendeur de véhicule et que la garantie couvre les pertes financières générées par la mise en oeuvre de la garantie commerciale que ce vendeur accorde lui-même au client acquéreur ; qu’en pratique, compte tenu de la diversité des conventions établies en matière de panne mécanique, seule une analyse détaillée des clauses des différents contrats permet de déterminer, au cas par cas, si les dispositions de l’article 1001, 5° bis, du code général des impôts peuvent ou non trouver application ; qu’en l’espèce, pour juger que la garantie en litige ne relevait pas du taux de 18 %, la cour d’appel a déduit du « contrat de garantie Comfortech » et de ses conditions de garantie, d’abord que le vendeur avait l’obligation personnelle de réparer à ses frais une pièce défectueuse couverte par la garantie voire de la remplacer dans le cadre d’une garantie commerciale consentie à l’acheteur, ensuite que la société CG Car-Garantie n’était pas partie à ce contrat, « fût-il établi sur un document à son en-tête » ; qu’aucune des constatations opérées par la cour d’appel ne permettait pourtant de démontrer l’existence d’une garantie commerciale consentie par le vendeur à l’acquéreur ; qu’au contraire, il résultait des constatations de la cour d’appel que le « contrat de garantie », contrat que la société Car-Garantie présentait comme la garantie commerciale proposée par le concessionnaire à l’acquéreur, était en réalité le contrat de garantie Comfortech (G17AA) à l’origine du présent litige et commercialisé par la société Car-Garantie ; que ce constat contredisait la thèse de l’existence d’une garantie commerciale accordée par le vendeur à l’acquéreur ; qu’en se fondant néanmoins sur ces motifs inopérants, la cour d’appel de Colmar a violé l’article 1001 du code général des impôts. »
Vu l’article 1001, 5° bis, du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 :
5. Selon ce texte, le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance est fixé à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur autres que les assurances relatives à l’obligation d’assurance en matière de véhicules terrestres à moteur prévue à l’article L. 211-1 du code des assurances.
6. Ces dispositions s’appliquent lorsque la garantie, qui n’est pas nécessairement incluse dans un contrat d’assurance relevant de l’article L. 211-1 du code des assurances, joue à l’occasion de tout sinistre mettant en cause un véhicule terrestre à moteur.
7. Pour déclarer non-fondées les décisions de rejet du 12 mars 2019, accorder à la société CG Car-Garantie le dégrèvement des droits correspondants et ordonner la restitution à cette société la somme de 1 025 210,50 euros assortie des intérêts moratoires, l’arrêt, après avoir relevé que le contrat de garantie Comfortech, remis à l’acquéreur du véhicule, signé par lui et le vendeur/concessionnaire, stipule que « l’acheteur reçoit du vendeur une garantie, dont le contenu résulte du présent accord de garantie (…) et des conditions de garantie détaillées ci-après ou en annexe. Cette garantie est assurée par CG Car-garantie Versicherungs-AG », prévoit à l’article 1 intitulé « contenu de la garantie » que « le vendeur/donneur de garantie délivre à l’acheteur/preneur de garantie, conformément aux conditions sous § 4, une garantie s’étendant au bon fonctionnement des composants cités dans le § 2, chiffre 1 pour la durée de validité convenue. Cette garantie est assurée par CG Car-garantie Versicherungs-AG (ci-après dénommée CG) » et, à l’article 1.2 que « si, durant la validité de la garantie, un de ces composants perd instantanément sa fonctionnalité et non pas à la suite du défaut d’un composant non couvert, l’acheteur/preneur de garantie a droit à une réparation professionnelle par le remplacement ou la remise en état du composant. (…) », retient qu’il en résulte que le vendeur a l’obligation personnelle de réparer à ses frais une pièce défectueuse couverte par la garantie voire de la remplacer, au titre de la garantie commerciale qu’il a consentie à l’acheteur, la société CG Car-garantie n’étant pas partie à ce contrat fût-il établi sur un document à son en-tête. L’arrêt en déduit que l’objet de « l’assurance garantie » consentie par la société CG Car-garantie est d’assurer l’exécution de réparations rendues nécessaires par un vice interne du véhicule vendu, dans les limites de la garantie contractuelle consentie par le vendeur.
8. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que la garantie contractuelle consentie par le vendeur correspondait au contrat de garantie Comfortech proposé par la société CG Car-garantie, et que la garantie en cause, portant sur le bon fonctionnement de composants d’un véhicule, jouait à l’occasion d’un sinistre mettant en cause un véhicule terrestre à moteur, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
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