Suspension d’une mesure d’exécution : enjeux et limites juridiques

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Suspension d’une mesure d’exécution : enjeux et limites juridiques

L’Essentiel : Le 10 septembre 2024, un commissaire de justice a signifié à M [M] [R] et Mme [W] [R] un commandement de payer de 7114,04 euros, émis par la SA banque postale financement suite à une ordonnance d’injonction de payer. En réponse, le 10 octobre 2024, ils ont assigné la banque, demandant la suspension du commandement, arguant d’une opposition à l’injonction et d’un plan de surendettement. Le juge a rejeté leur demande, précisant que le commandement ne constituait pas un acte d’exécution forcée et qu’il ne pouvait suspendre une décision de justice. Les deux parties ont été condamnées aux dépens.

Contexte de l’affaire

Le 10 septembre 2024, un commissaire de justice a signifié à M [M] [R] et Mme [W] [R] un commandement de payer émis par la SA banque postale financement, en vertu d’une ordonnance d’injonction de payer rendue le 21 juin 2024. Ce commandement visait à recouvrer une somme de 7114,04 euros, incluant le principal, les frais et les intérêts.

Demande d’assignation

Le 10 octobre 2024, M [M] [R] et Mme [W] [R] ont assigné la SA banque postale financement devant le juge de l’exécution, demandant la suspension des effets du commandement de payer. Ils ont également demandé que chaque partie conserve la charge de ses frais et dépens, arguant qu’ils avaient formé opposition à l’injonction de payer et qu’ils avaient bénéficié d’un plan de surendettement en 2019.

Réponse de la SA banque postale financement

La SA banque postale financement a contesté les demandes de M [M] [R] et Mme [W] [R], soutenant que leur opposition était irrecevable car formée hors délai. Elle a également demandé à ce que M [M] [R] et Mme [W] [R] soient condamnés à lui verser 1000 euros au titre des frais irrépétibles, en raison de l’échec de leur opposition.

Décision du juge de l’exécution

Le juge a examiné la demande de suspension des effets du commandement de payer. Il a rappelé que le commandement de payer ne constitue pas un acte d’exécution forcée en soi et que la demande de M [M] [R] et Mme [W] [R] devait être analysée comme une demande de sursis à statuer. Cependant, le juge a conclu qu’il ne pouvait pas suspendre l’exécution d’une décision de justice, ce qui a conduit au rejet de leur demande.

Conséquences financières

En ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles, le juge a condamné M [M] [R] et Mme [W] [R] aux dépens de l’instance, sans toutefois donner suite à la demande de la SA banque postale financement concernant les frais irrépétibles.

Conclusion du jugement

Le jugement a été prononcé publiquement, déboutant M [M] [R] et Mme [W] [R] de leur demande de suspension et la SA banque postale financement de sa demande au titre des frais irrépétibles. Les deux parties ont été informées que le jugement était exécutoire de plein droit.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’application de la clause résolutoire dans un bail commercial ?

La clause résolutoire dans un bail commercial est régie par l’article L 145-41 du Code de commerce, qui stipule que le bailleur peut résilier le bail de plein droit en cas de défaut de paiement des loyers.

Pour que cette clause soit applicable, plusieurs conditions doivent être réunies :

1. **Défaut de paiement manifestement fautif** : Le locataire doit avoir manqué à son obligation de paiement de manière évidente.

2. **Bonne foi du bailleur** : Le bailleur doit agir de bonne foi en invoquant la clause résolutoire.

3. **Clarté de la clause** : La clause résolutoire doit être formulée de manière claire et sans ambiguïté, afin d’éviter toute interprétation.

Ainsi, dans l’affaire en question, le juge a constaté que le commandement de payer était conforme aux exigences légales, ce qui a permis de valider l’acquisition de la clause résolutoire.

Quels sont les pouvoirs du juge des référés en matière de bail commercial ?

Le juge des référés dispose de pouvoirs étendus en matière de bail commercial, comme le précise l’article 834 du Code de procédure civile.

Il peut ordonner toutes les mesures nécessaires en cas d’urgence, même en présence d’une contestation sérieuse.

L’article 835, alinéa 2, précise que le juge peut accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Dans le cas présent, le juge a pu constater l’acquisition de la clause résolutoire et ordonner des mesures conservatoires, tout en tenant compte de l’accord entre les parties pour accorder des délais de paiement.

Comment se déroule la procédure de référé en matière de loyers impayés ?

La procédure de référé pour loyers impayés est régie par les articles 834 et 835 du Code de procédure civile.

Le créancier, en l’occurrence le bailleur, doit saisir le juge des référés par une assignation, comme cela a été fait par la S.C.I. YAM.

Le juge examine alors la demande en tenant compte de l’urgence et de la nature des contestations.

Dans cette affaire, le juge a constaté que le commandement de payer était resté sans effet, ce qui a permis de statuer sur la provision demandée et d’accorder des délais de paiement au preneur.

Quelles sont les conséquences d’un défaut de paiement dans le cadre d’un bail commercial ?

Le défaut de paiement dans le cadre d’un bail commercial entraîne plusieurs conséquences, notamment l’application de la clause résolutoire.

Selon l’article L 145-41 du Code de commerce, si le locataire ne s’acquitte pas des sommes dues dans le délai imparti, le bailleur peut résilier le bail de plein droit.

En cas de non-paiement, le juge peut ordonner l’expulsion du locataire et la restitution des locaux.

Dans l’affaire en question, la S.A.S. GRILL HOUSE a été condamnée à verser une provision pour loyers impayés, avec des conséquences d’expulsion en cas de non-respect des délais de paiement convenus.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles.

Dans cette affaire, la S.A.S. GRILL HOUSE a été condamnée à verser 2 500 euros à la S.C.I. YAM en application de cet article.

Cette somme vise à compenser les frais engagés par le bailleur pour faire valoir ses droits en justice.

Il est important de noter que cette disposition vise à garantir l’équité entre les parties en matière de frais de justice, et son application est laissée à l’appréciation du juge.

N° RG 24/03257 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GOVK

Minute n° 24/00112

AFFAIRE : [W] [R], [M] [R] / S.A. BANQUE POSTALE FINANCEMENT
Code NAC : 78F Nature particulière :0A

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

LE JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT DU 26 NOVEMBRE 2024

JUGE DE L’EXÉCUTION : Madame Agnès DEIANA, Juge,

GREFFIER : Madame Anne Sophie BIELITZKI

DEMANDEURS

Mme [W] [F] épouse [R], née le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 7], demeurant [Adresse 5]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/005196 du 10/10/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Valenciennes)

M. [M] [R], né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1] ;
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/005163 du 10/10/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Valenciennes) ;

Représentés par Me Virginie LHUSSIEZ, avocat au barreau de VALENCIENNES, vestiaire : 26 ;

DÉFENDERESSE

La S.A. BANQUE POSTALE FINANCEMENT, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège ;

Représentée par Maître Frédéric MASSIN de la SCP TIRY-DOUTRIAUX, avocats au barreau de VALENCIENNES, vestiaire : 4 ;

Le juge de l’exécution après avoir entendu les parties et leurs avocats en leurs conclusions à l’audience du 05 novembre 2024 a mis l’affaire en délibéré et indiqué que le jugement sera prononcé par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024, date à laquelle a été rendu le jugement dont la teneur suit:

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Le 10 septembre 2024, Me [L], commissaire de justice à [Localité 8], agissant à la requête de la SA banque postale financement, a procédé en vertu d’une ordonnance d’injonction de payer rendue par le juge des contentieux de la protection de Valenciennes le 21 juin 2024 à la signification au domicile commun M [M] [R] et Mme [W] [R] d’un commandement aux fins de saisie-vente de payer 7114,04 euros en principal, frais et intérêts.

Le 10 octobre 2024, la SA banque postale financement a été assignée à comparaître par M [M] [R] et Mme [W] [R] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Valenciennes en l’audience du 5 novembre 2024 par acte signifié à personne morale.

À l’audience M [M] [R] et Mme [W] [R], représentés par leur conseil, sollicite le bénéfice de leur acte introductif d’instance aux termes duquel ils demandent au juge de l’exécution de  » suspendre les effets du commandement de payer aux fins de saisie vente du 10 septembre 2024  » et  » dire que chacune des parties conservera la charge de ses frais et dépens « .

Ils font valoir qu’ils ont formé opposition à l’injonction de payer fondant la mesure et qu’ils ont bénéficié d’un plan de surendettement le 22 novembre 2019 avec rééchelonnement avec effacement partiel du solde.

La SA banque postale financement, représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de ses écritures déposées aux termes desquels elle demande au juge de l’exécution de débouter M [M] [R] et Mme [W] [R] de l’ensemble de leurs demandes et les condamner à lui payer la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l’opposition est vouée à l’échec pour avoir été formée hors délai et être irrecevable et qu’en tout état de cause l’opposition a suspendu la mesure d’exécution.

L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 26 novembre 2024.

MOTIVATION

Sur la demande de  » suspension de la mesure d’exécution  » :

Aux termes de l’article 378 du Code de procédure civile, la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine.

Il est constant que le juge doit apprécier l’opportunité d’un sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice et dans le cas où le résultat de la procédure à venir a une conséquence sur l’affaire en cours.

En l’espèce, M [M] [R] sollicite de voir ordonner  » la suspension des effets du commandement de payer aux fins de saisie vente « . Il convient de rappeler que le commandement de payer engage la mesure d’exécution forcée mais ne constitue pas en lui-même un acte d’exécution forcée. En l’absence de tout procès verbal de saisie, aucun bien mobilier n’a été saisie.
La demande doit donc s’analyse comme une demande sursis à statuer conformément aux dispositions de l’article 12 du code de procédure civile;

Cependant, il convient de rappeler qu’il est interdit au juge de l’exécution de suspendre l’exécution d’une décision de justice en application de l’article R121-1 du Code des procédures civiles d’exécution précité. Or, surseoir à statuer correspondrait à suspendre l’exécution d’un titre exécutoire provisoirement et serait contradictoire avec les règles précitées puisque la décision qui tranchera l’opposition n’aura aucune conséquence sur le présent litige.

En effet, M [M] [R] et Mme [W] [R] justifient avoir formé opposition à l’encontre de deux ordonnances portant injonction de payer rendues les 31 mai 2024 et 10 juillet 2024 à la requête de la SA banque postale financement.
Or le commandement de payer aux fins de saisie vente contesté est fondé sur une ordonnance d’injonction de payer rendue le 21 juin 2024.

Dans ces conditions, il convient de rejeter la demande de sursis à statuer formée par M [M] [R] et Mme [W] [R].

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Vu les articles 696 et 700 du Code de procédure civile ;

En l’espèce, M [M] [R] et Mme [W] [R] qui succombent au principal seront condamnés aux dépens de l’instance.

Il n’y a pas lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution statuant publiquement par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort :

Le dit jugement étant exécutoire de plein droit en vertu de l’article R. 121-21 du code des procédures civiles d’exécution et de l’article 504 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE M [M] [R] et Mme [W] [R] de leur demande de suspension ;

DÉBOUTE la SA banque postale financement de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE M [M] [R] et Mme [W] [R] aux dépens de l’instance;

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION


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