L’Essentiel : Monsieur [E] [O], assuré auprès de l’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS, a été impliqué dans un accident le 14 septembre 2015. Suite à cet incident, il a bénéficié d’un rapatriement sanitaire organisé par Inter Mutuelle Assistance. Le 11 juillet 2023, l’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS a assigné la SA Prudence Créole pour obtenir le remboursement de 33 796,06 euros, en raison d’un recours subrogatoire. Le tribunal a reconnu le droit de l’assureur d’exercer ce recours, rejetant les arguments de Prudence Créole, et a condamné cette dernière à verser la somme demandée, ainsi que des frais supplémentaires.
|
Contexte de l’AffaireMonsieur [E] [O] était assuré auprès de la compagnie ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS dans le cadre d’un contrat d’assurance multirisques pour divers types de véhicules, incluant les motos et scooters, selon un avenant daté du 7 mai 2014. Le 14 septembre 2015, il a été impliqué dans un accident de la circulation avec un véhicule appartenant à Monsieur [X] [G], assuré par la compagnie PRUDENCE CREOLE. Accident et RapatriementSuite à l’accident, Monsieur [O] a bénéficié d’un rapatriement sanitaire en métropole, organisé par Inter Mutuelle Assistance, qui gérait les prestations d’assistance pour le compte de l’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS. Ce rapatriement a été décidé par les médecins en charge de son cas. Procédure JudiciaireLe 11 juillet 2023, l’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS a assigné la SA Prudence Créole devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis, réclamant le paiement de 33 796,06 euros en raison de son recours subrogatoire lié à l’indemnité versée à Monsieur [O] suite à l’accident. La compagnie a également demandé des intérêts et des frais irrépétibles. Arguments des PartiesL’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS a soutenu sa demande en invoquant la subrogation légale spéciale prévue par l’article L. 121-12 du code des assurances, affirmant que les conditions étaient remplies. En revanche, la Prudence Créole a demandé le rejet de la demande, arguant que celle-ci relevait de la loi Badinter, qui exclut certaines prestations d’assistance du recours de l’assureur. Décision du TribunalLe tribunal a reconnu que l’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS avait le droit d’exercer son recours subrogatoire, car les prestations d’assistance avaient été réglées en vertu de son contrat d’assurance. Il a également précisé que la jurisprudence ne soumet pas ce recours aux limitations de la loi Badinter. Condamnations et FraisEn conséquence, le tribunal a condamné la SA PRUDENCE CREOLE à verser à l’ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS la somme de 33 796,06 euros, ainsi qu’à payer les dépens et 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision a été rendue avec exécution provisoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de la subrogation légale de l’assureur selon l’article L. 121-12 du code des assurances ?La subrogation légale de l’assureur est régie par l’article L. 121-12 du code des assurances, qui stipule : “L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.” Cette disposition permet à l’assureur de récupérer les sommes versées à son assuré en se substituant à lui dans ses droits contre le tiers responsable. Dans le cas présent, l’Assurance Mutuelle des Motards a versé une indemnité de 33 796,06 euros à son assuré, Monsieur [O], suite à un accident causé par un tiers, Monsieur [G]. Ainsi, l’assureur peut exercer un recours subrogatoire contre l’assureur du responsable, en vertu de l’article L. 121-12, car les conditions de la subrogation sont remplies. Il est important de noter que la jurisprudence a confirmé que ce recours n’est pas soumis aux limitations de l’article 29 de la loi Badinter, qui concerne uniquement les préjudices corporels. En conséquence, l’Assurance Mutuelle des Motards a le droit de demander le remboursement des sommes versées à son assuré. Comment la loi Badinter influence-t-elle les recours subrogatoires des assureurs ?La loi Badinter, notamment son article 29, a pour objectif de réguler les recours des tiers payeurs en matière d’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation. Cet article précise que : “Les prestations d’assistance versées par un assureur ne peuvent donner lieu à un recours subrogatoire contre l’assureur du responsable de l’accident.” Cependant, il est crucial de comprendre que cette disposition ne s’applique pas à tous les cas de recours subrogatoire. Dans l’affaire en question, l’Assurance Mutuelle des Motards a invoqué la subrogation légale en vertu de l’article L. 121-12 du code des assurances, qui lui permet de récupérer les sommes versées à son assuré. La jurisprudence a établi que l’article 29 de la loi Badinter ne limite pas le recours subrogatoire pour les prestations d’assistance, mais uniquement pour les indemnités relatives au préjudice corporel. Ainsi, l’assureur peut toujours exercer son droit de recours subrogatoire pour les sommes versées au titre de l’assistance, indépendamment des dispositions de la loi Badinter. Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal sur les dépens et les frais irrépétibles ?La décision du tribunal a des implications claires sur les dépens et les frais irrépétibles, conformément à l’article 700 du code de procédure civile, qui stipule : “Le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles.” Dans cette affaire, la SA Prudence Créole, en tant que partie perdante, a été condamnée à verser à l’Assurance Mutuelle des Motards la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700. De plus, elle est également condamnée aux dépens de l’instance, ce qui signifie qu’elle devra couvrir les frais de justice engagés par l’Assurance Mutuelle des Motards. Ces décisions visent à compenser les frais engagés par la partie gagnante et à dissuader les comportements litigieux. Ainsi, la Prudence Créole doit non seulement rembourser l’indemnité versée, mais également assumer les coûts liés à la procédure judiciaire. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS
MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/02372 – N° Portalis DB3Z-W-B7H-GM4X
NAC : 60A
JUGEMENT CIVIL
DU 26 NOVEMBRE 2024
DEMANDERESSE
ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Diane MARCHAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Rep/assistant : Me Charles ZWILLER, avocat au barreau de MONTPELLIER
DÉFENDERESSE
S.A. PRUDENCE CREOLE
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Thibaut BESSUDO de BOURBON AVOCATS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Copie exécutoire délivrée le : 26.11.2024
CCC délivrée le :
à Maître Thibaut BESSUDO de BOURBON AVOCATS, Me Diane MARCHAU, Me Charles ZWILLER
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Le Tribunal était composé de :
Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
LORS DES DÉBATS
L’affaire a été évoquée à l’audience du 14 Octobre 2024.
LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ
A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 26 Novembre 2024.
JUGEMENT : Contradictoire, du 26 Novembre 2024 , en premier ressort
Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :
Monsieur [E] [O] était assuré auprès de la compagnie ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS dans le cadre d’un contrat d’assurance multirisques » moto / scooter / cyclo / side / trike / quad « , selon avenant du 7 mai 2014.
Le 14 septembre 2015, il a été victime d’un accident de la circulation impliquant un véhicule appartenant à Monsieur [X] [G], assuré auprès de la compagnie PRUDENCE CREOLE.
Dans le cadre de la garantie assistance souscrite auprès de la concluante, Monsieur [O] a fait l’objet d’un rapatriement sanitaire en métropole, sur décision des médecins de Inter Mutuelle Assistance, ayant en charge l’exécution des prestations d’assistance pour le compte de la compagnie ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS .
Par acte de commissaire de justice en date du 11 juillet 2023, l’Assurance Mutuelle des Motards a fait assigner la SA Prudence Créole devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis afin de la voir condamnée à lui payer la somme de 33 796,06 euros au titre de son recours subrogatoire, dans le cadre de l’indemnité payée en exécution du contrat d’assurance de Monsieur [O], du fait de l’accident du 14 septembre 2015, avec intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2022, outre les entiers dépens et la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées électroniquement le 5 avril 2024, elle maintient ses demandes initiales.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir qu’elle exerce la subrogation légale spéciale qu’elle tient de l’article L. 121-12 du code des assurances, dont les conditions sont remplies puisqu’elle verse aux débats l’attestation de paiement d’INTER MUTUELLE ASSISTANCE, qui a réglé pour son compte, et que ces sommes ont été réglées en exécution du contrat au titre de la garantie assistance aux personnes, et qu’en outre le recours de son assuré contre l’assureur du responsable de l’accident n’est pas éteint. En réponse à la défenderesse, elle soutient qu’il est inopérant d’invoquer les dispositions de l’article 29 de la loi Badinter, qui n’ont vocation qu’à régir l’imputation de la créance des tiers payeurs sur l’indemnité revenant à la victime.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées électroniquement le 5 mars 2024, la Prudence Créole demande au tribunal de:
– débouter la société ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS de l’ensemble de ses demandes ;
– condamner la société ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS à verser à la S.A. PRUDENCE CREOLE la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
En défense, elle fait valoir que la demande formulée contre elle relève de l’application exclusive de la loi du 5 juillet 1985 dite loi Badinter, et que l’article 29 de cette loi exclut du champ du recours de l’assureur en demande les prestations d’assistance concernées.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures pour un plus ample exposé des moyens développés au soutien des prétentions.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2024. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier au greffe le 14 octobre 2024.
Les conseils des parties ont été informés que le jugement serait mis à disposition au greffe à la date du 26 novembre 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.
Sur la demande au titre de la subrogation légale de l’assureur
Aux termes de l’article L. 121-12 du code des assurances: “L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.”
En l’espèce, il est établi que le GIE Inter Mutuelles Assistance a réglé, pour le compte de l’‘Assurance Mutuelle des Motards, des prestations à hauteur de 33 796,06 euros, en exécution de la garantie d’assistance aux personnes prévue à l’article 6 des conditions générales du contrat souscrit par Monsieur [O]. Il est en outre établi par l’arrêt de la cour d’appel de Saint-Denis en date du 26 février 2021 que la responsabilité du conducteur de la moto assuré auprès de la Prudence Créole dans l’accident de la circulation dont a été victime Monsieur [O] est établie. L’assuré de la Prudence Créole est donc bien celui qui a causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’Assurance Mutuelle des Motards et ayant donné lieu au versement des prestations d’assistance aux personnes dont il est demandé le remboursement.
La jurisprudence ne soumet nullement dans ce cas le recours subrogatoire de l’assureur aux cas visés à l’article 29 de la loi n° dite loi Badinter, cet article ayant pour seul objet de limiter les recours subrogatoires des tiers payeurs s’agissant des indemnités relatives au préjudice corporel. Au contraire, il est de longue date jugé que l’assureur qui, en vertu de l’article L.121-12 précité, invoque la subrogation dans les droits et actions de son assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à sa garantie, peut exercer les droits et actions que cet assuré tient des articles 1 à 6 de la loi du 5 juillet 1985 (Civ. 2e, 25 novembre 1992, pourvoi n 90-11.280, Bull. II,n°289).
Par conséquent, il sera fait droit à la demande soumise au tribunal.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
La défenderesse, qui perd son procès, sera condamnée aux dépens, ainsi qu’à verser à la défenderesse la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal,
CONDAMNE la SA PRUDENCE CREOLE à verser à la société ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS la somme de 33 796,06 € (trente trois mille sept cent quatre-vingt-seize euros et six centimes),
CONDAMNE la SA PRUDENCE CREOLE aux dépens de l’instance ;
CONDAMNE la SA PRUDENCE CREOLE à verser à la société ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS la somme de 3 500 (trois mille cinq cents) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute demande plus ample ou contraire,
RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire,
La greffière La présidente
Laisser un commentaire