L’Essentiel : M. et Mme [O], propriétaires d’un terrain à [Localité 4], ont engagé la SARL Babi pour construire une maison. Après un acompte de 600 euros et un second versement, ils ont résilié le contrat. La société Babi a alors réclamé 12 689,76 euros pour les travaux effectués. Les époux ont demandé la nullité du contrat pour dol, arguant d’un manquement de la société. Cependant, le tribunal a constaté que Babi avait respecté ses engagements et a débouté les époux de leurs demandes, les condamnant à payer des sommes pour les travaux et un préjudice moral.
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Contexte de l’affaireM. [Y] [O] et Mme [D] [O], propriétaires d’un terrain à [Localité 4], ont engagé la SARL Babi pour construire une maison d’environ 150 m². Un contrat a été signé le 20 novembre 2020, avec un budget de 227 000 euros TTC pour les travaux, et une enveloppe totale de 300 000 euros TTC. Versements et résiliation du contratLes époux [O] ont versé un acompte de 600 euros le 25 novembre 2020, suivi d’un second versement de 1 620 euros le 31 mars 2021. Le 6 juin 2021, la société Babi a pris acte de la résiliation du contrat par M. et Mme [O]. Demande de paiement par la société BabiLe 6 octobre 2021, la société Babi a mis en demeure M. et Mme [O] de payer 12 689,76 euros TTC pour les travaux effectués et les frais liés à la rupture du contrat. Le 21 janvier 2022, elle a assigné les époux devant le tribunal judiciaire de Dijon pour obtenir le paiement de diverses sommes. Réclamations des époux [O]Dans leurs écritures du 14 août 2024, M. et Mme [O] ont demandé la nullité du contrat pour dol, ainsi que des dommages et intérêts. Ils ont également soutenu que la société Babi avait manqué à ses obligations contractuelles, entraînant un retard d’un an dans leur projet. Arguments de la société BabiLa société Babi a défendu sa position en affirmant avoir respecté ses engagements et avoir fait face aux changements de budget et de projet demandés par M. et Mme [O]. Elle a soutenu que la résiliation unilatérale du contrat par les époux constituait une faute. Analyse de la nullité du contrat pour dolLe tribunal a examiné la demande de nullité pour dol, précisant que M. et Mme [O] devaient prouver que la société Babi avait usé de manœuvres frauduleuses pour les tromper. Les échanges entre les parties ont montré que les époux avaient été informés des évolutions budgétaires et avaient accepté les modifications. Demande de résiliation du contratConcernant la résiliation, le tribunal a constaté que la société Babi avait fourni des efforts considérables pour répondre aux attentes des époux. M. et Mme [O] n’avaient pas signalé de manquements significatifs de la part de la société, ce qui a conduit à leur déboutement de cette demande. Demandes de paiement et indemnitésLa société Babi a demandé le paiement de 7 296,74 euros pour les travaux réalisés. Le tribunal a déterminé que M. et Mme [O] devaient payer 5 076,74 euros pour les diligences effectuées. En revanche, la demande d’indemnité de résiliation a été rejetée. Préjudice moral et frais de justiceLa société Babi a également réclamé des dommages pour préjudice moral, qui a été reconnu à hauteur de 2 000 euros. M. et Mme [O] ont été condamnés à payer les dépens et une somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles. Décision finale du tribunalLe tribunal a débouté M. et Mme [O] de leurs demandes de nullité et de résiliation, tout en condamnant les époux à verser des sommes à la société Babi pour les travaux réalisés et le préjudice moral. L’exécution provisoire de la décision a été maintenue. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences juridiques de la résiliation unilatérale du contrat par M. et Mme [O] ?La résiliation unilatérale d’un contrat par l’une des parties peut entraîner des conséquences juridiques significatives, notamment en matière d’indemnisation. Selon l’article 1217 du Code civil, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté ou l’a été imparfaitement peut : – Refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ; Il est important de noter que les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées, et des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter. En l’espèce, la société Babi a demandé des dommages et intérêts en raison de la rupture unilatérale du contrat par M. et Mme [O]. Le tribunal a constaté que M. et Mme [O] n’avaient pas prouvé une inexécution fautive de la part de la société Babi, ce qui a conduit à leur déboutement de la demande de résiliation. Comment le dol est-il défini et quelles sont ses implications dans ce litige ?Le dol est défini par l’article 1137 du Code civil comme « le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges ». Il peut également inclure la dissimulation intentionnelle d’une information déterminante pour l’autre partie. Pour qu’il y ait dol, il faut que les manœuvres aient été déterminantes pour le consentement de la partie lésée. L’article 1130 précise que l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsque, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Dans le cas présent, M. et Mme [O] ont allégué que la société Babi avait usé de manœuvres frauduleuses pour les convaincre de contracter. Cependant, le tribunal a jugé qu’ils n’avaient pas apporté la preuve de telles manœuvres, ce qui a conduit à leur déboutement de la demande de nullité du contrat pour dol. Quelles sont les obligations de la société Babi en vertu du contrat et ont-elles été respectées ?Les obligations de la société Babi sont régies par le contrat signé le 20 novembre 2020, qui stipule que l’architecte doit exécuter ses missions conformément aux termes convenus. L’article 1104 du Code civil impose que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Le tribunal a examiné si la société Babi avait respecté ses obligations contractuelles. Il a constaté que la société avait fourni plusieurs plans et options pour répondre aux attentes de M. et Mme [O], tout en essayant de respecter le budget initial. M. et Mme [O] n’ont pas prouvé que la société Babi avait manqué à ses obligations, notamment en ce qui concerne le respect des délais et des coûts. Par conséquent, le tribunal a conclu que la société Babi avait agi de manière diligente et a débouté M. et Mme [O] de leur demande de résiliation du contrat. Quels sont les critères pour l’attribution de dommages et intérêts en cas d’inexécution d’un contrat ?L’article 1231-1 du Code civil stipule que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, sauf s’il justifie que l’exécution a été empêchée par la force majeure. L’article 1231-2 précise que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé. Le préjudice doit être réparé intégralement, sans perte ni profit. Dans cette affaire, la société Babi a demandé des dommages et intérêts pour l’inexécution du contrat par M. et Mme [O]. Le tribunal a jugé que M. et Mme [O] devaient indemniser la société Babi pour les diligences réalisées, car ils n’avaient pas prouvé que la société avait manqué à ses obligations contractuelles. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles exposés pour la défense de ses droits. Cette disposition vise à compenser les frais engagés par la partie qui a dû défendre ses intérêts en justice. Dans le cas présent, le tribunal a condamné M. et Mme [O] à verser à la société Babi la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700, en raison de leur statut de partie succombante. Cela signifie que M. et Mme [O] ont été reconnus responsables des frais de justice engagés par la société Babi pour faire valoir ses droits dans le cadre de ce litige. |
JUDICIAIRE
de DIJON
2ème Chambre
MINUTE N°
DU : 14 Janvier 2025
AFFAIRE N° RG 22/00207 – N° Portalis DBXJ-W-B7G-HO2U
Jugement Rendu le 14 JANVIER 2025
AFFAIRE :
S.A.R.L. BABI, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 798 442 703, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice
C/
[D] [O]
[Y] [O]
ENTRE :
La SARL BABI, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 798 442 703, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Jean-Philippe SCHMITT, avocat au barreau de DIJON postulant et par Maître Thibault DE PIDOMAN de la SELARL BLACKSTONE, avocats au barreau de PARIS, plaidant
DEMANDERESSE
ET :
1°) Madame [D] [O]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représentée par Maître Fabien KOVAC de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de DIJON plaidant
2°) Monsieur [Y] [O]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
représenté par Maître Fabien KOVAC de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de DIJON plaidant
DEFENDEURS
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Madame Claire FOUCAULT, Vice-Présidente, statuant à Juge Unique, conformément aux dispositions des articles 812 et suivants du Code de Procédure Civile.
GREFFIER : Madame Catherine MORIN,
L’avocat de la demanderesse a déposé son dossier de plaidoirie conformément à l’article 799 du code de procédure civile ;
DEBATS :
Vu l’avis en date du 24 juillet 2024 ayant fixé l’affaire à l’audience de plaidoiries à juge unique du 15 Octobre 2024 date à laquelle l’affaire a été appelée en audience publique ;
Vu l’ordonnance de clôture en date du 27 août 2024 ;
Le prononcé du jugement a été mis en délibéré au 21 janvier 2025 et avancé au 14 Janvier 2025 ;
JUGEMENT :
– Prononcé publiquement par mise à disposition du jugement au greffe du Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– Contradictoire
– en premier ressort
– rédigé par Claire FOUCAULT
– signé par Claire FOUCAULT, Présidente et Catherine MORIN, greffière principale, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;
Copie certifiée conforme et copie revêtue de la formule exécutoire délivrée le
à
Maître Thibault DE PIDOMAN de la SELARL BLACKSTONE
Maître Fabien KOVAC de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES
Me Jean-philippe SCHMITT
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [Y] [O] et Mme [D] [O], propriétaires d’un terrain constructible situé [Adresse 2] à [Localité 4], ont sollicité la SARL Babi pour la construction d’une maison d’une superficie d’environ 150 m² habitables.
Suivant contrat du 20 novembre 2020 rédigé sur la base d’un premier devis du 10 septembre 2020, M. et Mme [O] ont confié à la société Babi une mission complète, avec un budget travaux – hors travaux de raccordement
aux réseaux publics – de 227 000 euros TTC, auxquels s’ajouteront les honoraires de l’architecte et de l’ingénieur structure, et d’autres dépenses, et pour une enveloppe financière globale de 300 000 euros TTC.
M. et Mme [O] ont versé un premier acompte de 600 euros TTC le 25 novembre 2020, puis effectué un second versement de 1 620 euros le 31 mars 2021.
Le 6 juin 2021, la société Babi a pris acte de la résiliation du contrat par M. et Mme [O].
Par lettre recommandée avec accusé réception du 6 octobre 2021, la société Babi a mis M. et Mme [O] en demeure de payer la somme globale de 12 689,76 euros TTC au titre des diligences accomplies, de la rupture fautive du contrat et des frais de conseil, déduction faite des deux paiements intervenus.
Par acte d’huissier du 21 janvier 2022, la société Babi a fait assigner M. et Mme [O] devant le tribunal judiciaire de Dijon, au visa des articles 1103 et 1231-1 et suivants du code civil, aux fins de :
– Condamner M. et Mme [O] à lui verser la somme de 7 296,74 euros TTC au titre de l’exécution du contrat,
– Condamner M. et Mme [O] à lui verser la somme de 9 713,02 euros au titre de la rupture du contrat,
– Condamner M. et Mme [O] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
– Prononcer l’exécution provisoire du jugement.
En ses dernières écritures notifiées le 14 août 2024, M. et Mme [O] demandent au tribunal, au visa des articles 1137 et 1240, 1103 et suivants, 1134, 1219 et 1231-1 du Code civil, de :
A titre principal,
– Juger nul et de nul effet le contrat régularisé entre les parties en raison du dol de la société Babi,
En conséquence,
– Condamner la société Babi à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– Condamner la société Babi à leur rembourser la somme de 2 220 euros,
A titre subsidiaire,
– Juger que la société Babi a manqué à ses obligations contractuelles,
– Juger la société Babi mal-fondée en ses demandes,
– Juger que leur projet a été retardé d’une année en raison des manquements de la société Babi.
En conséquence,
– Débouter la société Babi de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
– Condamner la société Babi à leur payer la somme de 17 200 euros à titre de dommages et intérêts,
En tout état de cause,
– Débouter la société Babi de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions, – Ecarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– Condamner la société Babi à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la même aux entiers dépens de l’instance.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 août 2024, la société Babi maintient ses prétentions initiales.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, à leurs conclusions sus-visées.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 27 août 2024.
La société Babi sollicite l’indemnisation de la rupture unilatérale, sans fondement, du contrat par M. et Mme [O].
Elle fait valoir que chargée par M. et Mme [O] de la conception de leur future maison, elle a dû régulièrement faire face à l’indécision du couple sur les travaux et le budget, et s’adapter en ébauchant plusieurs projets, pour in fine développer deux esquisses de plan destinées à se rapprocher des souhaits du couple, le dernier budget travaux arrêté par les clients étant de 291 869,92 euros.
Elle considère qu’en renonçant à poursuivre la mission, pour privilégier un constructeur de maisons individuelles, alors qu’elle-même n’a pas ménagé ses efforts pour travailler sur le projet et le budget changeants, M. et Mme [O] ont commis une faute en rompant unilatéralement le contrat.
M. et Mme [O] soulèvent à titre principal la nullité du contrat pour dol, au motif que la société Babi leur a proposé un contrat conforme à leurs attentes, à savoir pour un budget de 227 000 euros, mais n’a cessé de faire grimper ce budget pour aboutir à un montant de 400 000 euros, totalement disproportionné à leurs capacités, usant de manoeuvres pour obtenir leur consentement en leur proposant un contrat de construction qu’elle savait irréalisable compte tenu du budget indiqué.
A titre subsidiaire, ils sollicitent la résiliation du contrat pour faute. Ils font valoir que la société Babi n’a pas respecté les termes du contrat, d’une part en présentant plusieurs projets ne prenant pas en compte le budget indiqué, de plus en plus onéreux allant jusqu’à quasiment le double du montant défini intialement qui correspondrait à leur “maison idéale”, mais hors de proportion par rapport à leur capacité financière, d’autre part en ne respectant pas le délai fixé dans le contrat, la phase d’études devant s’étendre sur une période de 33 semaines.
Ils estiment que la société Babi ne justifie pas de la réalisation complète de la phase APD, dans la mesure où il est indiqué “dossier APD provisoire” en objet du mail du 7 mai 2021, étant observé qu’aucun consensus n’a été trouvé en phase APS compte tenu des projets trop onéreux et que c’est la société Babi qui a décidé de finaliser d’office la phase APD et de prendre rendez-vous à la mairie lorsque l’hypothèse d’une fin de collaboration a été évoquée.
Sur la demande de nullité du contrat pour dol
Il résulte des dispositions de l’article 1103 du code civil que “les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits”.
L’article 1104 du code civil précise que “les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi”.
Selon l’article 1130, “l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné”.
L’article 1137 définit le dol comme “le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges”.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation”.
En l’espèce, il appartient à M. et Mme [O] de rapporter la preuve que la société Babi a usé de manoeuvres frauduleuses, que ces manoeuvres avaient pour objectif de les tromper et qu’elles ont été déterminantes pour les convaincre de contracter.
Il ressort des pièces versées au débat que suite à des échanges préalables, M. et Mme [O] ont sollicité la société Babi le 21 juin 2021, précisant désirer construire une maison individuelle pour une famille de quatre personnes avec, “dans l’idéal”, environ 150 m² habitables comprenant notamment une suite parentale, trois chambres, un espace cuisine salon, deux terrasses, un grand sous-sol.
Ils ont transmis l’esquisse réalisée par un architecte de l’Atelier de [Localité 4], précisant que “la forme générale et l’organisation de la maison [leur] plaisait beaucoup même s’il s’agissait uniquement d’une première esquisse et que certaines surfaces auraient dû évoluer”.
Les informations transmises par mail concernaient essentiellement la configuration de la maison idéale, les plans du confrère local donnant satisfaction, sauf à modifier certaines surfaces. Aucun budget n’était précisé dans ce mail, seul le document de l’architecte faisant figurer une estimation du coût du projet, à savoir 249 600 euros TTC (hors frais annexes de maîtrise d’oeuvre, architecte, géomètre, …), pour 156 m² habitables.
Le devis établi le 10 septembre 2020 reprend les attentes de M. et Mme [O], récapitulées dans le paragraphe intitulé “Eléments de programme” et précise que le maître de l’ouvrage dispose d’une enveloppe financière de 250 000 euros TTC hors travaux de raccordement aux réseaux publics, honoraires de l’architecte et de l’ingénieur structure, outre autres dépenses éventuelles.
Le 20 novembre, suite à une réunion, la société Babi a transmis le contrat corrigé avec le programme détaillé et indiqué le montant de l’enveloppe financière totale incluant tous les travaux, honoraires d’études, assurances et taxes, à savoir 300 000 euros TTC.
Il précise que l’enveloppe pour les travaux hors raccordements aux réseaux publics est de 190 000 euros HT (227 000 euros TTC), que la prochaine étape consistera à faire l’analyse du site, du terrain et du PLU, à détailler le programme pour commencer les esquisses de projet et qu’ils vont en parallèle se rapprocher d’artisans locaux pour travailler sur le chiffrage.
Le contrat du 20 novembre 2020, accepté par M. et Mme [O] qui ont versé un premier acompte de 600 euros TTC et n’ont adressé aucune observation ou critique, tient manifestement compte des échanges entre les parties, quelques précisions et/ou modifications dans les éléments de programme ayant été apportées.
Demeurent les contraintes budgétaires, le contrat faisant apparaître un budget travaux hors travaux de raccordement et honoraires, de 227 000 euros TTC (190 000 euros HT) et une enveloppe globale de 300 000 euros.
La société Babi a travaillé le projet et proposé cinq plans à partir de la “maison idéale”, chaque plan comprenant plusieurs options, à savoir l’estimation de base, le chiffrage avec économies (travaux réservés au maître d’ouvrage et matériaux économiques), l’estimation avec réduction de la surface habitable, et enfin le chiffrage sans garage.
Les deux derniers plans envoyés le 17 avril 2021 tendent à chercher des solutions répondant aux attentes tout en faisant des économies, sont chiffrés à un montant de base de 365 000 euros et économique de 307 000 euros, la société Babi proposant de faire un nouveau point pour faire une estimation détaillée et voir comment réduire le budget à environ 270 000 euros TTC.
En réponse, M. et Mme [O] ont confirmé le rendez-vous téléphonique, ne faisant aucun retour négatif, notamment sur ces nouveaux plans ou le budget prévisible, et ont transmis la photographie de la maison qui leur avait donné l’idée de la terrasse couverte et de la coursive, précisant que cela les laissait penser qu’il était possible de réduire un peu la surface.
Un avenant au contrat a été rédigé le 29 avril 2021 modifiant l’enveloppe financière, à savoir 330 000 euros TTC tout compris. Il n’a fait l’objet d’aucune observation ou contestation, ce qui laisse supposer que les parties étaient d’accord sur le montant du budget consacré au projet.
Le 4 mai, la société Babi a réalisé un avant projet définitif (APD) qu’elle a transmis par mail à M. et Mme [O] le 7 mai, précisant s’approcher de l’enveloppe des travaux à hauteur de 330 000 euros, qu’elle atteindra en développant le volume de manière un peu plus compacte, les autres critères (pièces, distribution et esthétique de la maison, surface habitable notamment) étant respectés.
Il résulte de ce qui précède qu’il y a manifestement eu de nombreux échanges constructifs entre les parties, au cours desquels M. et Mme [O] sont intervenus pour donner des indications sur leurs attentes et suggérer des réductions de coût tout en maintenant leur souhait de s’approcher de l’esquisse de la maison idéale.
A aucun moment, la société Babi n’a fait miroiter à M. et Mme [O] qu’ils pourraient avoir la maison de leur rêve avec leur budget, mais elle a au contraire tenté de s’en approcher au maximum en cherchant des alternatives plus économiques, M. et Mme [O] ayant également concédé une augmentation de l’enveloppe budgétaire pour atteindre leur objectif.
En conséquence, faute d’établir des manoeuvres destinées à provoquer une erreur de nature à vicier leur consentement, le dol n’est pas caractérisé, M. et Mme [O] seront déboutés de leur demande tendant à prononcer la nullité du contrat.
Sur la demande de résiliation du contrat
Selon l’article 1217 du Code civil, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.
En vertu de l’article 1219, une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave”.
En l’espèce, il ressort des éléments développés dans le paragraphe précédent que la société Babi a tout mis en oeuvre pour répondre aux attentes et demandes de ses clients et proposer un plan répondant au plus près aux exigences de conception, de surface et esthétiques par référence à la maison idéale, tout en l’adaptant à un budget contraint, qui a toutefois évolué.
Elle n’a pas ménagé ses efforts, allant jusqu’à proposer pas moins de cinq plans, comprenant chacun quatre versions pour exploiter toutes les solutions permettant de s’approcher de la commande, inspirée par l’esquisse réalisée par un architecte local, dont M. et Mme [O] ont transmis le plan ainsi que les chiffrages qui ont servi de base à la relation contractuelle avec la société Babi.
Cette première ébauche prévoyait une estimation du coût du projet à 249 600 euros TTC (hors frais annexes de maîtrise d’oeuvre, architecte, géomètre, …), pour 156 m² habitables.
M. et Mme [O] se sont inspirés du travail de ce professionnel local et ont visiblement toujours maintenu cette réalisation, transmettant courant mai une photographie de la maison qui leur avait donné l’idée de la terrasse couverte et de la coursive, qui évoque d’ailleurs l’esquisse de l’architecte de l’Atelier de [Localité 4], en imaginant pouvoir réduire la surface de la coursive pour restreindre le coût.
La société Babi a dû faire un travail conséquent pour répondre aux sollicitations de M. et Mme [O] et tenter de s’y adapter, ce qui a nécessairement pris du temps. Dès le 22 février 2021, la société Babi a informé M. et Mme [O] avoir terminé le travail sur les esquisses et débuté le travail de chiffrage avec les entreprises locales, dont elle attendait le retour pour vérifier l’adéquation entre le projet et le budget et, le cas échéant, proposer des solutions.
Pour autant, M. et Mme [O] n’ont jamais adressé d’observations ou doléances écrites sur un non respect du budget ou de leurs exigences après l’envoi des esquisses puis des plans. Ils n’ont pas davantage reproché à la société Babi un quelconque retard dans le programme d’études, ayant largement contribué à l’allongement des délais.
Dès lors, M. et Mme [O] ne rapportent pas la preuve d’une faute de la société Babi dans l’exécution de ses obligations et ne sauraient valablement exciper de l’exception d’inexécution pour échapper à leur obligation.
En conséquence, ils seront déboutés de leur demande de résiliation du contrat et devront indemniser la société Babi suite à la rupture unilatérale de leur engagement.
Sur les demandes en paiement
En vertu de l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
En outre, l’article 1231-2 dispose que les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé.
Enfin, le préjudice doit être réparé intégralement, sans perte ni profit.
1- Sur la demande au titre des diligences exécutées
La société Babi sollicite la somme de 7 296,74 euros TTC au titre de l’exécution du contrat. Elle considère que M. et Mme [O] sont redevables des honoraires correspondant au travail effectué, sur la base du dernier budget travaux de 291 869,92 euros arrêté par les clients.
M. et Mme [O] considèrent que cette somme est totalement disproportionnée et reflète la manière dont la société a gonflé les coûts dans le chiffrage du projet. Ils font observer que la somme réclamée par la société Babi n’a cessé de croître et ne respecte pas le cadre contractuel dans la mesure où la société Babi posait ses conditions pour une résiliation d’un commun accord.
Ils estiment en tout état de cause que la société Babi sollicite près des 2/3 de la rémunération totale alors que ses diligences se sont limitées aux étapes ESQ, APE et APD de la phase d’études, et ne pourrait prétendre qu’à 5 700 euros -dont à déduire les deux versements – si elle justifiait de l’achèvement des trois phases, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, la société Babi ne justifiant pas de la réalisation complète de la phase APD dans la mesure où il est indiqué “dossier APD provisoire” en objet du mail du 7 mai 2021, étant enfin observé qu’aucun consensus n’a été trouvé en phase APS compte tenu des projets trop onéreux.
Les bases de calcul des indemnités sollicitées, détaillées par la société Babi dans son mail du 6 juin 2021 prenant acte de la résiliation, ne seront pas prises en considération dans la mesure où elles ne reposent pas sur des éléments contractualisés.
En revanche, les parties sont liées par le contrat du 20 novembre 2020, objet le 29 avril 2021 d’un avenant relatif à l’enveloppe financière du maître d’ouvrage et à la rémunération. Les clauses de ce contrat sont par conséquent applicables.
Selon l’article 14, le contrat peut être résilié d’un commun accord, sans faute ou pour faute. En cas de résiliation sans faute ou pour faute, sur initiative du maître d’ouvrage ou de l’architecte, “l’architecte a droit au paiement :
– des honoraires correspondant aux missions exécutées et frais au jour de cette résiliation, conformément à l’article 9 du présent contrat,
– des intérêts moratoires visés à l’article 9.”
L’article 9 relatif à la rémunération prévoit que le maître d’ouvrage s’engage à verser à l’architecte un montant de rémunération ferme et forfaitisée pour chaque élément de mission, sur la base d’un pourcentage de l’enveloppe financière pour travaux outre TVA à 20%.
La composition par phase est détaillée dans un tableau, avec un pourcentage distinct pour chaque phase réalisée.
Il n’est pas sérieusement contesté que la société Babi a réalisé les trois premières phases, à savoir ESQ (esquisses), APS (avant projet sommaire) et APD (avant projet définitif), même si M. et Mme [O] tentent de s’appuyer sur une erreur d’intitulé dans le mail du 7 mai 2021 (“APD” provisoire) pour laisser entendre que la troisième phase n’était pas atteinte.
Dès lors, la rémunération de la société Babi doit être fixée selon les règles précisées dans l’avenant au contrat qui prévoit une rémunération TTC correspondant à 13% du budget travaux (alors que le contrat initial fixait le taux à 14 %), outre application du pourcentage correspondant aux missions exécutées, en l’espèce 17,75 % (6,19 % + 6,34 % + 5,22 %).
M. et Mme [O] sont ainsi redevables de la somme de 7 614,75 euros TTC, ramenée à la somme de 7 296,74 euros TTC conformément à la demande de la société Babi, au titre des diligences réalisées par cette dernière, dont il convient de déduire la somme de 2 220 euros déjà versée.
En conséquence, il convient de condamner M. et Mme [O] à payer à la société Babi la somme de 5 076,74 euros TTC à ce titre.
2- Sur les demandes au titre de l’indemnité de rupture du contrat
La société Babi réclame, sur la base du dernier budget travaux de 291 869,92 euros arrêté par les clients, la somme de 6 713,02 euros TTC correspondant à 20 % des sommes qu’elle aurait dû percevoir si elle avait été en mesure de mener à bien sa mission, conformément au pourcentage usuel dans le secteur.
M. et Mme [O] ont conclu au débouté.
Comme énoncé ci-dessus, il convient de faire application du contrat, qui prévoit dans son article 14 que l’architecte a droit au paiement des intérêts moratoires visés à l’article 9 en cas de résiliation. Or, l’article 9 ne prévoit aucune indemnité de résiliation.
En conséquence, la société Babi sera déboutée de sa demande.
3- Sur les dommages et intérêts au titre du préjudice moral
La société Babi sollicite la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral qu’elle estime avoir subi du fait de la rupture brutale de la relation de confiance patiemment construite.
M. et Mme [O] ont conclu au débouté.
La société Babi a accompli un travail conséquent pour l’élaboration des esquisses et plans, dans le souci d’adapter au mieux les solutions aux demandes changeantes de M. et Mme [O]. Comme précédemment son confrère de l’Atelier de [Localité 4], ses documents ont servi de base de réflexion aux époux [O] dans leur projet et dans leurs échanges avec le constructeur de maisons individuelles qu’ils ont ensuite sollicité.
La rupture unilatérale du contrat a engendré un préjudice moral imputable directement à M. et Mme [O], qui devront l’indemniser à hauteur de 2 000 euros.
En conséquence, il convient de condamner M. et Mme [O] à payer à la société Babi la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Sur les demandes accessoires
M. et Mme [O], partie succombante, seront tenus aux entiers dépens de l’instance.
Il ne serait par ailleurs pas équitable de laisser à la société Babi la charge de l’ensemble des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer pour voir consacrer ses droits.
Il convient en conséquence de condamner M. et Mme [O] à payer à la société Babi la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Enfin, conformément aux dispositions de l’article 514, la présente décision est exécutoire de plein droit et compte tenu de l’ancienneté du litige, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire.
Le Tribunal,
– Déboute M. et Mme [O] de leur demande reconventionnelle tendant à la nullité du contrat pour dol ;
– Déboute M. et Mme [O] de leur demande de résiliation du contrat ;
– Condamne M. et Mme [O] à payer à la société Babi la somme de 5 076,74 euros (cinq mille soixante-seize euros et soixante-quatorze centimes) TTC au titre des diligences réalisées ;
– Déboute la société Babi de sa demande au titre de l’indemnité de résiliation ;
– Condamne M. et Mme [O] à verser à la société Babi la somme de 2 000 (deux mille euros) TTC au titre du préjudice moral ;
– Condamne M. et Mme [O] aux entiers dépens ;
– Condamne M. et Mme [O] à verser à la société Babi la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
– Dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire ;
– Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
En foi de quoi le présent jugement a été signé par le Greffier et la Présidente.
Le Greffier La Présidente
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