L’Essentiel : Monsieur [Z] [F] et son épouse, Madame [G] [F], propriétaires d’une maison à [Localité 18], ont subi des troubles de voisinage suite à un dégât des eaux provenant de l’immeuble mitoyen. Après une expertise concluant à un défaut de raccord d’alimentation, ils ont assigné Monsieur [D] [V] devant le tribunal, demandant des dommages et intérêts. Cependant, le tribunal a débouté les époux [F] et la MACIF, estimant qu’ils n’avaient pas prouvé l’existence ni l’origine du sinistre. Les demandes de garantie des autres parties ont également été rejetées, entraînant une condamnation aux dépens pour les demandeurs.
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Contexte de l’affaireMonsieur [Z] [F] et son épouse, Madame [G] [F], sont propriétaires d’une maison de ville à [Localité 18] et ont souscrit un contrat d’assurance habitation auprès de la MACIF. Les propriétaires de l’immeuble mitoyen, Monsieur et Madame [V], ont engagé des travaux de rénovation avec Monsieur [H] [E] de RENOV & DECO. Suite à des problèmes d’humidité, ils ont déclaré un sinistre dégât des eaux à leur assureur, la MACIF, le 10 juillet 2018. Expertise et constatationsUne expertise amiable a été réalisée, concluant que la fuite provenait d’un défaut de raccord d’alimentation installé par la Société DCZ, sous-traitante de RENOV & DECO, dans l’appartement de Monsieur [V]. En conséquence, Monsieur [Z] [F], Madame [G] [F] et la MACIF ont assigné Monsieur [D] [V] devant le tribunal pour obtenir des dommages et intérêts liés aux troubles de voisinage causés par le dégât des eaux. Procédures judiciairesMonsieur [D] [V] a, à son tour, assigné en intervention forcée plusieurs parties, y compris des assureurs, pour être indemnisé de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre lui. Les deux procédures ont été jointes et l’affaire a été enregistrée sous le n° de rôle 22/2747. L’audience a eu lieu le 14 novembre 2024, après plusieurs renvois. Demandes des partiesMonsieur et Madame [F] ainsi que la MACIF ont demandé au tribunal de reconnaître la responsabilité de Monsieur [D] [V] pour le dégât des eaux et de le condamner à verser des dommages et intérêts. En défense, Monsieur [D] [V] a demandé le déboutement de toutes les demandes et a sollicité une garantie de la part des autres parties impliquées. Arguments des assureursLes sociétés QBE EUROPE et COOP & BAT ont contesté la validité du rapport d’expertise amiable, arguant qu’il n’avait pas été réalisé de manière contradictoire et qu’il manquait d’éléments probants. La SADA a également demandé à être mise hors de cause, soutenant que le contrat d’assurance ne couvrait pas les travaux de rénovation en question. Décision du tribunalLe tribunal a débouté Monsieur et Madame [F] ainsi que la MACIF de toutes leurs demandes, considérant qu’ils n’avaient pas prouvé l’existence du dégât des eaux ni son origine. Les demandes de garantie et les demandes reconventionnelles des autres parties ont également été rejetées. Les époux [F] et la MACIF ont été condamnés aux dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la responsabilité engagée dans le cadre des troubles anormaux de voisinage ?La responsabilité pour troubles anormaux de voisinage est une responsabilité de plein droit, qui n’est pas subordonnée à l’établissement d’une faute. L’article 544 du code civil énonce que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Cela signifie que chaque propriétaire a le droit d’utiliser sa propriété comme il l’entend, tant que cela ne nuit pas aux autres. Cependant, ce droit est limité par l’obligation de ne pas causer à autrui un dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage. Ainsi, pour établir un trouble anormal de voisinage, il appartient à celui qui l’invoque de prouver l’existence de ce trouble. Dans le cas présent, Monsieur et Madame [F] soutiennent que le dégât des eaux dont ils ont été victimes trouve son origine dans les travaux de rénovation réalisés par Monsieur [D] [V]. Il est donc essentiel d’examiner si les éléments de preuve fournis par les époux [F] sont suffisants pour établir la responsabilité de Monsieur [D] [V] sur ce fondement. Quelles sont les implications de l’article 1240 du code civil dans cette affaire ?L’article 1240 du code civil stipule que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Cet article établit le principe de la responsabilité délictuelle, qui repose sur la notion de faute. Dans le cadre de cette affaire, Monsieur [D] [V] conteste la responsabilité qui pourrait lui incomber, arguant qu’aucun élément objectif ne prouve les préjudices allégués par les époux [F]. Il est important de noter que, pour engager la responsabilité de Monsieur [D] [V] sur le fondement de l’article 1240, il faudrait prouver qu’il a commis une faute ayant causé le dommage. Cependant, le tribunal a constaté que les époux [F] n’ont pas produit de preuves suffisantes pour établir l’existence d’un dégât des eaux et son origine. Ainsi, même si l’article 1240 pourrait théoriquement s’appliquer, l’absence de preuve rend difficile l’engagement de la responsabilité de Monsieur [D] [V]. Comment le tribunal a-t-il évalué la preuve du dégât des eaux ?Le tribunal a examiné le rapport d’expertise amiable diligenté par la MACIF, qui a été établi à l’issue d’une expertise réalisée en présence de Monsieur [D] [V]. Cependant, il a noté que ce rapport n’était pas suffisant pour établir la responsabilité de Monsieur [D] [V]. En effet, le tribunal a rappelé que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties. Il a également souligné que, bien qu’un rapport d’expertise amiable puisse constituer un mode de preuve admissible, il doit être corroboré par d’autres éléments, tels que des diagnostics ou des factures de réparation. Dans cette affaire, les époux [F] n’ont pas produit de pièces permettant de corroborer les conclusions du rapport d’expertise amiable. Ainsi, le tribunal a conclu qu’il n’était pas démontré que les époux [F] avaient été victimes d’un dégât des eaux causé par Monsieur [D] [V]. Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal sur les demandes de la MACIF ?La MACIF, en tant qu’assureur des époux [F], a également été déboutée de son recours subrogatoire. Cela signifie que, n’ayant pas réussi à prouver la responsabilité de Monsieur [D] [V], elle ne peut pas se retourner contre lui pour obtenir le remboursement des sommes qu’elle a versées à ses assurés. Le tribunal a statué que, puisque les époux [F] n’avaient pas établi l’existence d’un dégât des eaux et son origine, la MACIF ne pouvait pas prétendre à une indemnisation. Cette décision est conforme aux principes de la responsabilité civile, qui exigent que le dommage soit prouvé pour engager la responsabilité de l’auteur présumé. En conséquence, la MACIF ne pourra pas récupérer les montants qu’elle a versés aux époux [F] en raison de l’absence de preuve de la responsabilité de Monsieur [D] [V]. Cela illustre l’importance de la preuve dans les litiges d’assurance et de responsabilité civile. |
64B
PPP Contentieux général
N° RG 22/02747 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XCEU
[G] [F], [Z] [F], Société MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE ET DES CADRES ET SALARIES DE L’INDUST
C/
[D] [V], [H] [E], [X] [W], S.A. SADA, Société COOP&BAT, S.A. QBE EUROPE
– Expéditions délivrées à
– FE délivrée à
Le 14/01/2025
Avocats : Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL
Me Guy NOVO
Me RAFFIN
la SELAS SALVIAT + JULIEN-PIGNEUX + PUGET ET ASSOCIES
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
Pôle protection et proximité
[Adresse 5]
JUGEMENT EN DATE DU 14 janvier 2025
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
JUGE : Madame Sandrine SAINSILY-PINEAU, Magistrate
GREFFIER : Madame Françoise SAHORES
DEMANDEURS :
Madame [G] [F]
née le [Date naissance 7] 1976 à [Localité 22]
[Adresse 14]
[Localité 18]
Représentée par Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL (Avocat au barreau de BORDEAUX)
Monsieur [Z] [F]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 21]
[Adresse 14]
[Localité 18]
Représenté par Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL (Avocat au barreau de BORDEAUX)
MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE ET DES CADRES ET SALARIES DE L’INDUSTRIE ET DU COMMERCE –
RCS de NIORT N° 781 452 511
[Adresse 2]
[Localité 16]
Représentée par Me Delphine BARTHELEMY-MAXWELL (Avocat au barreau de BORDEAUX)
DEFENDEURS :
Monsieur [D] [V]
[Adresse 4]
[Localité 18]
Représenté par Maître Caroline SALVIAT de la SELAS SALVIAT + JULIEN-PIGNEUX + PUGET ET ASSOCIES, Avocat au barreau de BORDEAUX
Monsieur [H] [E]
[Adresse 3]
[Localité 12]
Absent
Monsieur [X] [W]
[Adresse 6]
[Localité 10]
Absent
S.A. SADARCS Nîmes 580 201 127
[Adresse 13]
[Localité 9]
Représentée par Me Guy NOVO (Avocat au barreau de BORDEAUX)
Société COOP&BAT RCS Bordeaux 533 106 159
[Adresse 8]
[Localité 11]
Représentée par Me RAFFIN (Avocat au barreau de PARIS)
S.A. QBE EUROPE RCS Nanterre 842 689 556 dont le siège social est sis [Adresse 19] BELGIQUE
[Adresse 20]
[Localité 17]
Représentée par Me RAFFIN (Avocat au barreau de PARIS)
DÉBATS :
Audience publique en date du 14 Novembre 2024
Articles 480 et suivants du code de procédure civile.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Monsieur [Z] [F] et son épouse, Madame [G] [F], sont propriétaires d’une maion de ville située au [Adresse 14] à [Localité 18].
Ils ont souscrit un contrat d’assurance d’habitation auprès de la MACIF.
Monsieur et Madame [V] sont propriétaires de l’immeuble mitoyen sis au [Adresse 15] à [Localité 18].
Suivant facture en date du 28 février 2018, ils ont confié la réalisation de travaux de rénovation de leur immeuble à Monsieur [H] [E], exerçant sous l’enseigne RENOV &DECO.
Soutenant avoir constaté une forte humidité en façade et dans plusieurs pièces de leur immeuble, ils ont effectué une déclaration de sinistre dégât des eaux, le 10 juillet 2018, auprès de leur assureur multirisque habitation, la MACIF.
Cette dernière a diligenté une expertise amiable et un procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances et à l’évaluation des dommages a été établi à l’issue de la réunion d’expertise du 7 janvier 2019. Ce dernier conclu que «l’origine de la fuite est un défaut sur un raccord d’alimentation installé par la Société DCZ, sous traitant de la Société RENOV&DECO, dans un appartement appartenant à Monsieur [V]».
C’est dans ces circonstances, que par acte de commissaire de justice délivré le 23 septembre 2022, Monsieur [Z] [F], Madame [G] [F] et la MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE ET DES CADRES ET SALARIES DE L’INDUSTRIE ET DU COMMERCE (la MACIF) a fait assigner Monsieur [D] [V] devant le tribunal judiciaire de ce siège, principalement, aux fins de le voir condamner à leur payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts en réparation des troubles de voisinage qu’ils ont subis à la suite du dégât des eaux survenu au domicile des époux [F].
L’affaire a été enregistrée sous le n° de rôle 22/2747.
Monsieur [D] [V] a, par acte de commissaire de justice délivré les 13, 16 et 26 janvier 2023, fait assigner en intervention forcée devant le même tribunal, Monsieur [H] [E], la Société Anonyme de défense des assurances (SADA), son assureur, Monsieur [X] [W], agissant sous l’enseigne DCZ, estimant qu’il est associé de la Société COOP&BAT, et cette dernière société dont il prétend qu’elle est sous-traitante de la Société» RENOV &DECO, ainsi que son assureur, la Société QBE EUROPE aux fins de les voir condamner à le relever indemne de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre au profit des époux [F].
L’affaire a été enrôlée sous le n° 23/560.
Le 19 février 2023, les deux procédures ont été jointes par mention au dossier, l’affaire se poursuivant sous le n° de rôle 22/2747.
L’affaire a été retenue à l’audience du 14 novembre 2024, après plusieurs renvois justifiés par la nécessité pour les parties d’échanger leurs conclusions et pièces.
A l’audience, Monsieur et Madame [F] et la MACIF, représentés par leur conseil, demandent au tribunal, sur le fondement des dispositions des articles 544 et 1346 du code civil et L. 121-12 du code des assurances de :
– juger que le dégât des eaux survenu à leur domicile le 10 juillet 2018 trouve sa cause dans les travaux de rénovation entrepris par Monsieur [D] [V] au sein de son immeuble,
– juger que la responsabilité de Monsieur [D] [V] est engagée à leur égard sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage,
– condamner Monsieur [D] [V] à payer à Monsieur et Madame [F] :
– 2.805 € de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice matériel au titre des désordres concernant la structure immobilière de leur maison,
– 120 € au titre de la franchise restée à leur charge,
– 500 € en réparation de leur préjudice de jouissance,
– juger que la MACIF est subrogée dans les droits de ses assurés, Monsieur et Madame [F] en sa qualité d’assureur multirisques habitation,
– condamner Monsieur [D] [V] à payer à la MACIF la somme de 2.229,05 € au tite du préjudice subi au titre de l’indemnisation des travaux d’embellissements nécessaires,
– condamner Monsieur [D] [V] à payer à Monsieur et à Madame [F] 2.500 € au visa de l’article 700 du code de procédure civile,
– juger que le montant des condamnations sera assorti des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation avec capitalisation,
– condamner Monsieur [D] [V] à supporter les dépens de l’instance,
– rejeter toute autre demande plus ample ou contraire.
En défense, Monsieur [D] [V], représenté par son conseil, demande au tribunal, sur le fondement des articles 1240 et 1103 du code civil :
– à titre principal : de débouter les époux [F] et la MACIF de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
– à titre subsidiaire : de condamner in solidum Monsieur [H] [E], Monsieur [X] [W], la SADA, la Société COOP&BAT et la Société QBE EUROPE à le garantir et relever indemne de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre,
– en toute hypothèse :
– de débouter les consorts [F], la MACIF, Monsieur [H] [E], Monsieur [X] [W], la SADA, la Société COOP&BAT et la Société QBE EUROPE de toutes leurs demandes plus amples ou contraires,
– de condamner in solidum les consorts [F], la MACIF, Monsieur [H] [E], Monsieur [X] [W], la SADA, la Société COOP&BAT et la Société QBE EUROPE à lui payer la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure,
– de condamner les consorts [F] ou toute partie perdante aux dépens.
La Société QBE EUROPE SA/NV et la Société COOP&BAT, représentées par leur conseil, demandent au tribunal, sur le fondement des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile de :
– débouter Monsieur [D] [V] de sa demande de garantie formulée à leur encontre et de les mettre hors de cause
– condamner Monsieur [D] [V] à payer à la Société QBE EUROPE SA/NV la somme de 5.000 € pour procédure abusive et injustifiée,
– condamner Monsieur [D] [V] à payer à la Société QBE EUROPE SA/NV la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
La SADA, représentée par son conseil, demande au tribunal :
– de la mettre hors de cause pour résiliation du contrat d’assurance au 31 mai 2015,
– subsidiairement, de juger que le contrat d’assurance invoqué par attestation produite aux débats, non signée, émane d’un courtier, ainsi qu’établit, ne pouvant engager la société,
– de juger qu’au mieux, Monsieur [D] [V] et Madame [C] [V] n’étaient pas assurés à compter du 1er juin 2015 et jusqu’au 2 mai 2019, la résiliation étant intervenue le 6 août 2019 suivant et que le dégât des eaux dont se plaint les consorts [F] est intervenu en 2018, date à laquelle le contrat n’aurait pas eu d’effet,
– de juger, subsidiairement, dès lors que le contrat serait retenu par interprétation, que ledit contrat de SADA ne prévoit en aucune façon une quelconque garantie pour des travaux de rénovation sur l’immeuble assuré qui ne peut intégrer un dégât des eaux accidentel, d’une part, que s’il est en bon état d’entretien et qu’aucune garantie n’est prévue pour les dommages d’un tiers
– subsidiairement, si par impossible, le tribunal retenait le contrat d’assurance SADA, de juger que Monsieur [X] [W], responsable dudit dommage soutenu par les époux [F] relèvera la SADA de toute condamnation qui pourrait intervenir contre elle,
– partant, de débouter Monsieur [D] [V] et Madame [C] [V] de leurs demandes de relever indemne subsidiairement invoquées,
– de condamner Monsieur [D] [V] et Madame [C] [V] et Monsieur [X] [W], in solidum à lui payer la somme de 3.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge, ayant engagé des dépenses pour sa défense,
– de condamner Monsieur [D] [V] et Madame [C] [V] et Monsieur [X] [W] in solidum aux dépens.
Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.
Monsieur [X] [W] n’a ni comparu ni été représenté, bien que régulièrement cité en l’étude.
Monsieur [H] [E], n’a ni comparu ni été représenté. Il n’a pas pu être localisé et un procès-verbal de recherches infructueuses a été établi conformément aux dispositions de l’article 659 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré au 14 janvier 2025.
La présente décision, susceptible d’appel, sera réputée contradictoire en application des dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.
L’article 472 du code de procédure civile prévoit que «si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée».
I – Sur le trouble anormal de voisinage :
L’article 544 du code civil énonce que «la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements».
Aux termes des dispositions de l’article 1240 du code civil, «tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer».
Le droit pour un propriétaire de jouir de sa chose de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par la loi ou les règlements, est limité par l’obligation qu’il a de ne pas causer à la propriété d’autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage.
La responsabilité pour troubles anormaux de voisinage est une responsabilité de plein droit qui n’est pas subordonnée à l’établissement d’une faute.
Il appartient, toutefois, à celui qui invoque un trouble anormal de le prouver.
Monsieur et Madame [F] soutiennent que le dégât des eaux dont ils ont été victimes trouve son origine dans les travaux de rénovation réalisés par les entreprises mandatées par Monsieur [D] [V].
Ce dernier ne conteste pas que la cause du sinistre subi par les époux [F] provient d’un défaut de raccord de l’alimentation du mitigeur installé dans son appartement par Monsieur [X] [W], agissant sous l’eseigne DCZ, et associé de la Société COOP&BAT, elle-même sous-traitante de Monsieur [H] [E], exerçant sous l’enseigne RENOV&DECO. Il conteste, en revanche, les préjudices allégués, aucun élément objectif ne les prouvant, le rapport d’expertise amiable versé aux débats, totalement subjectif étant insuffisant à les démontrés.
QBE EUROPE SA/NV et la Société COOP&BAT demandent au tribunal d’écarter le rapport d’expertise amiable diligentée par la MACIF, lequel n’a pas été réalisé à leur contradictoire et ses conclusions n’étant corroborées par aucun autre élément. Elles ajoutent, au surplus, que ce rapport est excessivement bref et lacunaire, aucune pièce ne justifiant cette position laissant planer des doutes sur l’imputabilité de la fuite, notamment, et aucune photographie des désordres n’étant produites.
En l’espèce, il échet de constater que les époux [F] et la MACIF ne produisent au soutien de leurs prétentions que le procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances et à l’évaluation des dommages et l’accord conclu le 13 septembre 2019 entre Madame [G] [F] et la MACIF sur le montant des dommages, afin de prouver le trouble de voisinage qu’ils allèguent.
Il convient, cependant, de constater que le procès-verbal de constatations a été établi à l’issue d’une expertise amiable diligentée par la MACIF, en sa qualité d’assureur des époux [F], réalisée en présence de Monsieur [D] [V], assisté d’un expert mandaté par la SADA et de Monsieur [X] [W], lequel a refusé de signer le procès-verbal. Il apparaît, en outre, que Monsieur [H] [E], bien que convoqué ne s’est pas présenté aux opérations d’expertise, aucun élément ne permettant d’établir sa présence. Il y a lieu de noter que QBE EUROPE SA/NV et la Société COOP&BAT n’ont pas été convoquées aux opérations d’expertise amiable, de sorte que ses conclusions ne leur sont pas contradictoires.
Seul ce rapport d’expertise amiable, établi à la demande de la MACIF, partie à la procédure, permet, en l’espèce, d’établir l’existence d’une fuite et de déterminer son originecomme étant «un défaut sur un raccord d’alimentation installé par la Société DCZ, sous traitant de la Société RENOV&DECO dans un appartement appartenant à Monsieur [V]».
Or, il est nécessaire de rappeler qu’il est de principe que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, combien même ses conclusions ont été soumises dans le cadre de la procédure à la libre discussion des parties.
S’il est, toutefois, admis qu’un rapport d’expertise amiable, peut constituer un mode de preuve admissible, il doit en revanche être corroboré par d’autres éléments, notamment des diagnostics et/ou des factures de réparation établies avant l’expertise confirmant l’existence des désordres retenues par l’expert amiable. Ce qui n’est pas le cas en l’espèce, aucune pièce permettant de corroborer les conclusions du rapport d’expertise amiable n’étant produite au soutien.
Il y a lieu, ainsi, de constater que les époux [F] et la MACIF ne communiquent aucune pièce permettant d’établir qu’ils ont été victimes d’un dégat des eaux et son origine.
A supposer ce dégât des eaux établis, il n’est pas plus prouvé que les travaux de rénovation réalisés au domicile de Monsieur [D] [V] l’ont causé. Pour toutes ces raisons, il n’est pas démontré qu’ils ont été victimes d’un trouble de voisinage causé par Monsieur [D] [V].
Ils seront, en conséquence, déboutés de l’ensemble de leur demande à l’encontre de Monsieur [D] [V]. La MACIF sera, également, pour les mêmes raisons déboutées de son recours subrogatoire.
II- Sur le surplus des demandes :
Les époux [F] et la MACIF ayant été déboutés de leurs demandes, il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subrogatoire de Monsieur [D] [V] et sur les demandes reconventionnelles de la SADA, de QBE EUROPE SA/NV et de la Société COOP&BAT concernant l’appel en garantie.
S’agissant plus particulièrement de la demande de condamnation pour procédure abusive et injustifiée formulée par QBE EUROPE SA/NV, il apparaît que Monsieur [D] [V] l’appelée en garantie en raison des moyens allégués par les époux [F] et la MACIF au soutien de leurs demandes en justice, laquelle mettait en cause les travaux qu’il prétend réalisés à son domicile, notamment par l’assuré de cette société d’assurance. Il ne peut, donc, lui être reproché d’avoir agi à son encontre de manière abusive et injustifiée. Dans ces conditions, QBE EUROPE SA/NV sera déboutée de sa demande d’indemnisation à l’encontre de Monsieur [D] [V] pour procédure abusive et injustifiée.
III – Sur les demandes accessoires :
Les époux [F] et la MACIF, parties perdantes, seront condamnés aux dépens.
Il apparaît équitable, en l’espèce, de laisser à chacune des parties la charge de leurs propres frais irrépétibles.
Le tribunal, après en avoir délibéré, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et mis à disposition au greffe :
DEBOUTE Monsieur [Z] [F], Madame [G] [F] et la MACIF de l’ensemble de leurs demandes ;
DIT n’y avoir lieu à statuer sur l’appel en garantie de Monsieur [D] [V] à l’égard de Monsieur [H] [E], la Société Anonyme de défense des assurances (SADA), Monsieur [X] [W], la Société COOP&BAT et de la Société QBE EUROPE SA/NV ;
DIT n’y avoir lieu à statuer sur les demandes reconventionnelles de la Société Anonyme de défense des assurances (SADA), de la Société COOP&BAT et de la Société QBE EUROPE SA/NV concernant l’appel en garantie de Monsieur [D] [V] ;
DEBOUTE la Société QBE EUROPE SA/NV de sa demande d’indemnisation pour procédure abusive et injustifiée ;
DEBOUTE Monsieur [D] [V], la Société Anonyme de défense des assurances (SADA), la Société COOP&BAT et la Société QBE EUROPE SA/NV du surplus de leurs demandes ;
DIT n’y avoir lieu à indemnités sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [Z] [F], Madame [G] [F] et la MACIF aux dépens.
En foi de quoi, le présent jugement a été signé par Sandrine SAINSILY-PINEAU, Présidente, et le Greffier présent.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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