Responsabilité des intervenants dans un projet de construction : enjeux d’expertise et garanties d’assurance

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Responsabilité des intervenants dans un projet de construction : enjeux d’expertise et garanties d’assurance

L’Essentiel : La SARL L’OASIS a acquis une villa à [Localité 9] et construit une résidence de six appartements. La maîtrise d’œuvre a été confiée à Monsieur [N] [D], assuré par la MAF. Quatre appartements ont été vendus entre juillet et août 2017, mais les acheteurs ont signalé des malfaçons, notamment des infiltrations. En octobre 2018, ils ont assigné la SARL L’OASIS et d’autres parties en référé pour désigner un expert. Le juge a nommé Monsieur [Y] [B] pour examiner les désordres, élargissant la mission à d’autres parties et désordres, entraînant des décisions judiciaires complexes.

Acquisition et Construction

La SARL L’OASIS a acquis une villa et un terrain sur la commune de [Localité 9] et a entrepris la construction d’une résidence comprenant deux bâtiments de trois appartements chacun, en plus de la villa existante. La maîtrise d’œuvre a été confiée à Monsieur [N] [D], assuré par la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF). Plusieurs sociétés ont été impliquées dans la phase de conception, notamment GEOTERRIA, BET HM et ENERXIA, chacune ayant son propre assureur.

Vente des Appartements

Quatre appartements ont été vendus entre juillet et août 2017, avec des livraisons s’étalant de décembre 2017 à août 2018. Les acheteurs incluent Monsieur et Madame [U], Monsieur et Madame [I], Madame [A], ainsi que Monsieur et Madame [T].

Réclamations des Acheteurs

Les acheteurs ont signalé diverses malfaçons, inachèvements et non-conformités, notamment des infiltrations au niveau des toitures-terrasses. En octobre 2018, ils ont assigné en référé la SARL L’OASIS, Monsieur [N] [D] et le syndic de la copropriété pour demander la désignation d’un expert et la consignation d’une somme représentant 5 % du solde du prix.

Expertise Judiciaire

Le juge des référés a désigné un expert, Monsieur [Y] [B], pour examiner les désordres. Plusieurs ordonnances ont suivi, élargissant la mission de l’expert et impliquant d’autres parties, y compris des assureurs et des entreprises ayant participé à la construction.

Extension de Mission et Mises en Cause

Des ordonnances successives ont élargi la mission de l’expert pour inclure des désordres supplémentaires et des parties communes. En février 2023, une nouvelle extension a été demandée concernant l’implantation de l’immeuble et d’autres éléments de conception.

Demandes des Assureurs

La MAF a assigné plusieurs sociétés, dont GEOTERRIA et BET HM, pour que les opérations d’expertise soient déclarées communes et opposables. La compagnie ALBINGIA a contesté sa mise en cause, arguant de l’absence de garantie mobilisable.

Décisions du Tribunal

Le tribunal a constaté que la SARL ENERXIA n’avait pas été citée et a ordonné sa mise hors de cause. La compagnie ALBINGIA a également été mise hors de cause, tandis que les ordonnances de référé précédentes ont été déclarées communes et opposables aux autres parties. Les dépens ont été laissés à la charge de la MAF, sans application de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour ordonner des mesures d’instruction en référé selon l’article 145 du code de procédure civile ?

L’article 145 du code de procédure civile stipule que :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Ainsi, pour qu’une mesure d’instruction soit ordonnée en référé, il faut :

1. **Un motif légitime** : Cela implique qu’il doit y avoir une raison valable de conserver ou d’établir la preuve avant le procès.

2. **Des faits dont dépend la solution d’un litige** : Les faits à prouver doivent être directement liés à la résolution du litige en question.

3. **Demande d’un intéressé** : La demande doit être formulée par une personne ayant un intérêt à agir dans le litige.

En l’espèce, la SARL L’OASIS a justifié un motif légitime en raison de l’évolution des missions de l’expert, impliquant plusieurs intervenants dans la phase de conception, ce qui a conduit à la demande d’extension de la mission de l’expert.

Comment se justifie la mise en cause des différents intervenants dans le cadre de l’expertise judiciaire ?

La mise en cause des différents intervenants, tels que la SASU GEOTERRIA, le BET HM et ENERXIA, se justifie par l’article 145 du code de procédure civile, qui permet d’ordonner des mesures d’instruction lorsque des motifs légitimes existent.

Dans cette affaire, la requérante a démontré que :

1. **L’évolution des missions de l’expert** : Cela a conduit à la nécessité d’impliquer les différents intervenants, car leurs actions ou inactions pourraient avoir un impact sur les désordres constatés.

2. **Absence de garantie mobilisable** : La compagnie ALBINGIA a été mise en cause en tant qu’assureur subséquent, malgré l’absence de preuve d’une police d’assurance couvrant la société GEOTERRIA au moment de la réclamation.

3. **Responsabilité potentielle** : Les désordres constatés pourraient être attribués aux travaux réalisés par ces intervenants, justifiant ainsi leur mise en cause dans le cadre de l’expertise.

Quelles sont les implications de l’article L.124-5 du code des assurances dans cette affaire ?

L’article L.124-5 du code des assurances stipule que :

« La garantie de l’assureur est exclue lorsque le sinistre est survenu après la résiliation du contrat d’assurance. »

Dans le cadre de cette affaire, la compagnie ALBINGIA a tenté de se soustraire à sa responsabilité en invoquant cet article, arguant que la police d’assurance avait été résiliée avant la survenance du sinistre.

Cependant, il est important de noter que :

1. **Nature des garanties** : La garantie en litige couvrait uniquement la responsabilité civile exploitation et non la responsabilité civile professionnelle, ce qui est crucial dans le cadre des travaux de construction.

2. **Mise hors de cause** : La mise hors de cause de la compagnie ALBINGIA a été justifiée par le fait qu’elle ne pouvait pas être considérée comme l’assureur mobilisable pour les désordres constatés, étant donné la nature des garanties souscrites.

Ainsi, l’article L.124-5 a joué un rôle dans la détermination de la responsabilité des assureurs, mais n’a pas permis à ALBINGIA de se soustraire à ses obligations en raison de la spécificité des garanties.

Quelles sont les conséquences de l’absence de citation à l’instance pour la SARL ENERXIA ?

L’article 472 du code de procédure civile précise que :

« Le juge ne peut statuer que sur les demandes formées par les parties régulièrement citées. »

Dans cette affaire, il a été constaté que la SARL ENERXIA n’avait pas été citée à la présente instance. Par conséquent, les conséquences sont les suivantes :

1. **Absence de demande valable** : Aucune demande ne peut être valablement formée contre la SARL ENERXIA, ce qui signifie qu’elle ne peut pas être tenue responsable des désordres en question.

2. **Droit à un procès équitable** : L’absence de citation garantit le droit de la SARL ENERXIA à un procès équitable, car elle n’a pas eu l’opportunité de se défendre ou de présenter ses arguments.

3. **Impact sur les décisions judiciaires** : Les décisions rendues dans cette instance ne peuvent pas avoir d’effet sur la SARL ENERXIA, ce qui limite la portée des ordonnances rendues à son encontre.

Ainsi, l’absence de citation a des implications significatives sur la procédure et sur les droits de la SARL ENERXIA dans le cadre de ce litige.

T R I B U N A L JUDICIAIRE
D E D R A G U I G N A N
____________

O R D O N N A N C E D E R É F É R É
CONSTRUCTION

RÉFÉRÉ n° : N° RG 24/07083 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KKM5

MINUTE n° : 2025/ 60

DATE : 22 Janvier 2025

PRÉSIDENT : Monsieur Frédéric ROASCIO

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT

DEMANDERESSE

S.A. MAF en sa qualité d’assureur de M. [D], dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Danielle ROBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN (avocat postulant) et Me Virginie POURTIER, avocat au barreau de PARIS (avocat plaidant)

DEFENDERESSES

S.A.S.U. BET HM, dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Sébastien GUENOT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Mutuelle AUXILIAIRE, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Sébastien GUENOT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

S.A. AXA FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par Me Sébastien GUENOT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

S.A.S. GEOTERRIA, dont le siège social est sis [Adresse 6]
non comparante

Société AR-CO ès qualité d’assureur de la SAS GEOTERRIA, dont le siège social est sis [Adresse 8] BELGIQUE
non comparante

Société ALBINGIA ès qualité d’assureur de la SAS GEOTERRIA, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Alain DE ANGELIS, avocat au barreau de MARSEILLE

DÉBATS : Après avoir entendu à l’audience du 11 Décembre 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, l’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.

copie exécutoire à
Me Alain DE ANGELIS
Me Sébastien GUENOT
Me Virginie POURTIER
Me Danielle ROBERT

2 copies service des expertises
1 copie dossier

délivrées le :

Envoi par Comci à Me Alain DE ANGELIS
Me Sébastien GUENOT
Me Virginie POURTIER
Me Danielle ROBERT

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La SARL L’OASIS a acquis une villa et un terrain situés [Adresse 2] sur la commune de [Localité 9] et elle a entrepris la construction d’une résidence composée de deux bâtiments de trois appartements chacun s’ajoutant à la villa existante.

La SARL L’OASIS a confié la maîtrise d’œuvre de l’opération à Monsieur [N] [D], assuré auprès de la société d’assurance mutuelle MUTELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), et il a été recouru en phase conception aux sociétés suivantes :
la SASU GEOTERRIA, assurée auprès de la société étrangère AR-CO, puis de la SA ALBINGIA, et intervenue en tant que géotechnicien ;la SASU BET HM, assurée auprès de la SA AXA FRANCE IARD, en qualité que bureau d’étude structure ;la SAS ENERXIA, assurée auprès de la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE, et intervenue au titre du bureau d’étude thermique.
Il a été confié :
le lot gros œuvre et carrelage à la SA UMIT, assurée auprès de la SA SMA SA ;le lot étanchéité à l’EURL [Z] [V], assurée auprès de la SA AXA FRANCE IARD ;le lot ferronnerie à la SAS LEO ;le lot concernant les ascenseurs à la SAS SEALIFT COTE D’AZUR, assurée auprès de la SA AXA FRANCE ;le lot menuiseries extérieures à la SARL TSE BATIMENT, assurée auprès de la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE ;le lot plomberie / VMC / climatisation à la SARL CARROZA GENIE CLIMATIQUE, assurée auprès de la société étrangère AXELLIANCE CREATIVE SOLUTIONS.
La SA SOCOTEC est intervenue en qualité de contrôleur technique.

Une garantie d’achèvement a en outre été souscrite auprès de la CAISSE D’EPARGNE COTE D’AZUR.

Quatre appartements ont été vendus en état d’achèvement entre juillet et août 2017, puis livrés entre décembre 2017 et août 2018 à Monsieur [G] [U] et Madame [R] [C] épouse [U] (lots 2 et 7), à Monsieur [S] [I] et Madame [X] [F] épouse [I] (lots 1, 4 et 16), à Madame [A] [J] (lots 1 et 11), ainsi qu’à Monsieur [W] [T] et Madame [L] [H] épouse [T] (lots 5, 6, 9 et 14).

Se plaignant de diverses malfaçons, inachèvements, non-conformités au permis de construire et infiltrations au niveau des toitures-terrasses, et par exploits d’huissier de justice du 24 octobre 2018, Monsieur [G] [U], Madame [R] [C] épouse [U], Monsieur [S] [I], Madame [X] [F] épouse [I], Madame [A] [J], Monsieur [W] [T], Madame [L] [H] épouse [T] ont fait assigner en référé la SARL L’OASIS, Monsieur [N] [D] et le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 10], pris en la personne de son syndic en exercice la SARL CAP IMMO SUD aux fins principales de désignation d’un expert et, pour les époux [U], d’être autorisés à procéder à la consignation d’une somme représentant les 5 % du solde du prix.

Par ordonnance de référé rendue le 18 novembre 2018 (RG 18/07215, minute 2018/415), le juge des référés de la présente juridiction a fait droit à la seule demande de désignation d’expert, commettant Monsieur [Y] [B] en qualité d’expert chargé notamment d’examiner les désordres en litige.

Par ordonnance de référé du 23 août 2019, les opérations d’expertise ont été déclarées communes et opposables à la SA SOCOTEC, attraite en la cause le 31 mai 2019 par les consorts [K]-[P], et il a été ordonné la mise hors de cause de la SA SMABTP, attraite en la cause le 23 juillet 2019 par la SARL L’OASIS, alors que l’intervention volontaire de SA SMA a été reçue en sa qualité assureur en responsabilité professionnelle de la SA UMIT.
Par ordonnance de référé du 18 décembre 2019, il a été rectifié l’omission de statuer affectant l’ordonnance du 23 août 2019 en prévoyant que les opérations d’expertises soient déclarées communes et opposables à l’ensemble des parties assignées par la SARL L’OASIS, à savoir l’EURL [Z] [V], son assureur la SA AXA FRANXE IARD, la SA UMIT et son assureur la SA SMA.

Par ordonnance de référé du 18 novembre 2020, la mission de l’expert judiciaire a été étendue à la demande des consorts [K]-[P], suite à l’apparition d’autres désordres constatés notamment par procès-verbal de constat d’huissier du 5 novembre 2019 et par courriers des 27 juillet 2018, 7 février 2019, 1er décembre 2019, 21 janvier 2020 et 18 avril 2020 (absence d’accès aux climatiseurs extérieurs, infiltrations et coulures en façade et dans le couloir, réserves non réparées, conformité à la sécurité incendie, nuisances acoustiques).

Par ordonnances de référé des 14 octobre 2020 et 6 janvier 2021, les opérations d’expertises ont été déclarées communes et opposables à la CAISSE EPARGNE COTE D’AZUR, la SAS LEO, la compagnie d’assurances MAF, la SAS SEALIFT COTE D’AZUR, la SARL TSE BATIMENT et la SARL CARROZZA GENIE CLIMATIQUE.

Par ordonnance du 18 mai 2021, le magistrat chargé des opérations du contrôle des expertises a également étendu la mission confiée à l’expert judiciaire aux non-conformités et malfaçons affectant les parties communes, selon liste réactualisée le 23 avril 2021.

Par ordonnance du 17 novembre 2021, la mission confiée à l’expert judiciaire, selon ordonnance du 28 novembre 2018 complétée par ordonnance du 18 novembre 2020, a été étendue à l’appartement et au garage constituant les lots 10 et 13 de la copropriété, étant précisé que ces lots vendus en état futur d’achèvement à Monsieur [W] [T] seul et qu’ils ont été livrés le 28 juin 2021 après rejet de la demande de ce dernier tendant à la résolution judiciaire de la vente par arrêt définitif rendu le 6 avril 2021 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Par ordonnance de référé du 15 février 2023, le juge des référés a fait droit à la demande d’extension de mission sollicitée par les consorts [K]-[P] aux désordres concernant l’implantation de l’immeuble, l’altimétrie, l’emprise au sol et divers éléments de conception concernant les accès et stationnements.

Par exploits de commissaire de justice des 12, 15, 16, 18, 19 juillet 2024, la compagnie MAF a fait assigner en référé la SASU GEOTERRIA et ses deux assureurs successifs AR-CO et ALBINGIA, la SASU BET HM et son assureur AXA FRANCE IARD, ainsi que la compagnie L’AUXILIAIRE en qualité d’assureur des sociétés ENERXIA et TSE BATIMENT aux fins principales de voir les opérations d’expertise judiciaire lui être déclarées communes et opposables.

Suivant ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 décembre 2024, reprenant ses dernières écritures et auxquelles elle se réfère à l’audience du 11 décembre 2024, la société d’assurance mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), en sa qualité d’assureur de Monsieur [N] [D], sollicite, au visa des articles 145 et 245 du code de procédure civile, de :
La DECLARER recevable et bien fondée en sa demande,
RENDRE COMMUNE ET OPPOSABLE l’ordonnance rendue par le tribunal judiciaire de Draguignan le 28 novembre 2018 portant le numéro RG 18/07215, à :
• la société GEOTERRIA,
• la société AR-CO, ès-qualités d’assureur de GEOTERRIA,
• la société ALBINGIA, ès-qualités d’assureur de GEOTERRIA,
• le BET HM,
• AXA FRANCE IARD, ès-qualités d’assureur du BET HM,
• la société ENERXIA,
• la société L’AUXILIAIRE, ès-qualités d’assureur de la société ENERXIA,
• la société L’AUXILIAIRE ès qualités d’assureur de la société TSE BATIMENT ;
Débouter ALBINGIA de sa demande de mise hors de cause ;
Débouter ALBINGIA de sa demande au titre de l’article 70 (en réalité 700 dans le corps des écritures) du code de procédure civile ;
Réserver les dépens de l’instance.

Suivant ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 décembre 2024, auxquelles elle se réfère à l’audience du 11 décembre 2024, la SA ALBINGIA, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA, sollicite, au visa des articles L.124-5 du code des assurances, 145 et 835 du code de procédure civile, de :
A titre principal, DEBOUTER la MAF de ses demandes à son encontre eu égard à l’absence de motif légitime de sa participation aux opérations expertales en l’état de l’absence de toute garantie mobilisable ;
CONDAMNER la MAF à lui verser à la société ALBINGIA la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire et reconventionnel, CONDAMNER la société GEOTERRIA à produire aux débats ses attestations d’assurance ainsi que toutes les stipulations contractuelles de responsabilité civile professionnelle postérieures au 31 décembre 2022 et en cours à la date de la réclamation, soit le 16 juillet 2024, au besoin sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir ;
A titre subsidiaire, lui DONNER ACTE de ses plus expresses protestations et réserves, notamment de responsabilité, de prescription, de garantie, de fait et de droit à la demande de la MAF de lui déclarer les opérations d’expertise confiées à Monsieur [B] par ordonnance de référé du 28 novembre 2018 communes et opposables ;

En tout état de cause, METTRE à la charge de la MAF les dépens de l’instance.

A l’audience du 11 décembre 2024, la SASU BET HM, la SA AXA FRANCE IARD, ès-qualités d’assureur de la SASU BET HM, et la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE, ès-qualités d’assureur des SARL ENERXIA et TSE BATIMENT, ont formulé des protestations et réserves sur les demandes présentées.

La SASU GEOTERRIA, citée à personne, et la société de droit étranger AR-CO, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA, citée à l’étranger conformément aux dispositions de l’article 684 du code de procédure civile, n’ont pas constitué avocat ni présenté leurs observations.

Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, il est renvoyé aux écritures des parties conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Sur la procédure

A l’audience du 11 décembre 2024, le président a fait application des dispositions de l’article 445 du code de procédure civile pour autoriser le conseil de la requérante à produire jusqu’à la date du 18 décembre 2024 les justificatifs de la citation à la présente instance de la SARL ENERXIA.

Par courrier daté du 19 décembre 2024, reçu le 23 décembre 2024 par voie électronique, le conseil de la requérante a adressé une note en délibéré d’une part confirmant l’absence de délivrance de l’assignation à la présente instance de la SARL ENERXIA, d’autre part indiquant en pièce jointe (non présente au courrier) la demande formée auprès de Monsieur [O], expert judiciaire désigné, afin de donner son accord sur les mises en cause.

Il sera cependant écarté des débats cette note, non transmise dans les délais indiqués à l’audience par le président, et de plus ne répondant pas pour partie à la demande portant uniquement sur la SARL ENERXIA.

En l’absence de citation à l’instance délivrée à son égard, aucune demande ne peut être valablement formée contre la SARL ENERXIA, non citée à la présente instance.

S’agissant des autres défenderesses non comparantes, il est relevé que l’article 472 du code de procédure civile, applicable en référé, impose au juge de statuer sur la demande et de n’y faire droit que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée. Aucune difficulté de recevabilité ne se posant manifestement en l’espèce, il n’y a pas lieu de rappeler que la requérante est recevable en ses demandes.

De plus, par application de l’article 474 du même code, la présente décision, rendue en premier ressort, sera réputée contradictoire à l’égard de l’ensemble des parties.

Sur la demande principale

La requérante fonde ses prétentions sur l’article 145 du code de procédure civile selon lequel « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »
Elle indique que l’évolution des missions de l’expert conduit à ce que soient impliquées le géotechnicien (GEOTERRIA), le BET structure (BET HM) et le BET chargé de l’étude thermique (ENERXIA).
En réponse à la compagnie ALBINGIA, elle souligne qu’elle a intérêt à sa mise en cause en tant qu’assureur subséquent et alors qu’aucune police couvrant la société GEOTERRIA au moment de la réclamation n’est produite.

La compagnie ALBINGIA soutient sa mise hors de cause sur l’absence de mobilisation des garanties compte tenu de l’exclusion de la garantie « responsabilité civile professionnelle » présente dans sa police d’assurance. Elle prétend à titre surabondant que la police a été résiliée antérieurement à la réclamation, ce qui exclut toute possibilité de mobilisation de sa garantie par application de l’article L.124-5 du code des assurances.

En l’espèce, la requérante justifie, par les différentes extensions de mission et les pièces relatives aux opérations d’expertise judiciaire réalisées jusqu’à présent, d’un motif légitime à mettre en cause les différents intervenants à la phase de conception GEOTERRIA, BET HM et ENERXIA, ainsi que leurs assureurs au moment du chantier les compagnies AR-CO, AXA FRANCE IARD et L’AUXILIAIRE.

Au titre du lot menuiseries extérieures, la SARL TSE BATIMENT a été mise en cause au titre d’une ordonnance de référé, non versée aux débats, du 6 janvier 2021 et en tout état de cause les désordres sont susceptibles de concerner le lot qui lui était confié. Il est ainsi justifié d’un motif légitime de mettre en cause son assureur la compagnie L’AUXILIAIRE.

Il est encore relevé que, par ordonnance du 12 septembre 2024, le juge chargé du contrôle des expertises a désigné Monsieur [E] [O] en remplacement de Monsieur [B], décédé en avril 2023. Ainsi, il ne peut être reproché à la requérante d’avoir tardé à former des appels en cause alors que l’extension de mission réalisée le 15 février 2023 justifie les mises en cause des sociétés GEOTERRIA, BET HM et ENERXIA et qu’après cette date, aucun expert n’a été désigné pendant plus d’une année.

L’avis de l’expert n’a pas à être recueilli puisque, même s’il est loisible d’informer l’expert de la procédure tendant à mettre en cause de nouvelles personnes, les demandes de ce chef ne relèvent pas du régime prévu aux articles 149 et 245 alinéa 3 du code de procédure civile imposant l’avis de l’expert en cas de demande d’extension de mission.

Sur le contrat d’assurance liant la société GEOTERRIA à la compagnie ALBINGIA, cette dernière ne peut valablement exciper des dispositions de l’article L.124-5 du code des assurances et des seules dates de couverture du contrat d’assurance pour se soustraire à toute possible mobilisation de garantie alors qu’elle pourrait le cas échéant être considérée comme l’assureur subséquent.

Néanmoins, un tel raisonnement ne s’applique qu’au titre des garanties facultatives et ainsi en l’espèce à l’assurance de responsabilité civile professionnelle de la société GEOTERRIA.

Par les dispositions particulières de la compagnie ALBINGIA versées aux débats, il est établi que la garantie en litige couvre la seule responsabilité civile exploitation, et non la responsabilité civile professionnelle, notamment après livraison, qui concerne des garanties devant être souscrites par ailleurs par l’assurée.

C’est ainsi sans interprétation du contrat, mais par la nature même des garanties, que la mise hors de cause de la compagnie ALBINGIA s’impose.

Il sera donné acte de ses protestations et réserves émises par les sociétés BET HM, L’AUXILIAIRE et AXA FRANCE IARD, lesquelles n’impliquent aucune reconnaissance de responsabilité ou de garantie.

Il sera fait droit à la demande tendant à déclarer communes et opposables l’ordonnance de référé du 18 novembre 2018 et les ordonnances subséquentes aux défenderesses, à l’exception de la compagnie ALBINGIA. La compagnie MAF sera déboutée du surplus de sa demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires

Les dépens de l’instance de référé ne peuvent être réservés dans l’attente d’une instance au fond dont le principe n’est pas certain. Ils seront laissés à la charge de la requérante à la présente instance, ayant intérêt à la mesure sollicitée.

Par ailleurs, aucune considération tirée de l’équité ne commande en l’espèce de condamner l’une des parties à payer les frais irrépétibles de l’autre par application de l’article 700 du code de procédure civile. La SA ALBINGIA sera déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire mise à disposition au greffe, exécutoire de droit et en premier ressort :

CONSTATONS que la SARL ENERXIA n’a pas été citée à la présente instance et qu’ainsi aucune demande ne peut être formée contre elle.

ECARTONS des débats la note en délibéré datée du 19 décembre 2024 et transmise par voie électronique le 23 décembre 2024 par le conseil de la société d’assurance mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF) en sa qualité d’assureur de Monsieur [N] [D].

ORDONNONS la mise hors de cause de la SA ALBINGIA, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA.

DECLARONS communes et opposables à :
la SASU GEOTERRIA,la société de droit étranger AR-CO, ès-qualités d’assureur de la SASU GEOTERRIA,la SASU BET HM,la SA AXA FRANCE IARD, ès-qualités d’assureur de la SASU BET HM,la société d’assurance mutuelle L’AUXILIAIRE, ès-qualités d’assureur des SARL ENERXIA et TSE BATIMENT,l’ordonnance rendue le 18 novembre 2018 par le juge des référés du tribunal de grande instance, devenue tribunal judiciaire, de Draguignan (RG 18/07215, minute 2018/415) ayant désigné Monsieur [Y] [B] en qualité d’expert, outre les différentes ordonnances subséquentes rendues en référé et par le juge chargé du contrôle des expertises ayant notamment désigné en dernier lieu Monsieur [E] [O] en qualité d’expert.

DISONS que l’expert commis devra poursuivre ses opérations contradictoirement à l’égard des sociétés désignées ci-dessus.

DISONS que les mises en cause devront être régulièrement convoquées par l’expert et que son rapport leur sera opposable.

DISONS que, dans l’hypothèse où la présente ordonnance est portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ces dispositions seront caduques.

DONNONS acte de ses protestations et réserves émises par les sociétés BET HM, L’AUXILIAIRE et AXA FRANCE IARD.

LAISSONS les dépens de la présente instance à la charge de la société d’assurance mutuelle MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF) en sa qualité d’assureur de Monsieur [N] [D].

DISONS n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

REJETONS le surplus des demandes.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois, an susdits.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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