Responsabilité et indemnisation : enjeux d’une évaluation provisionnelle des préjudices corporels

·

·

Responsabilité et indemnisation : enjeux d’une évaluation provisionnelle des préjudices corporels

L’Essentiel : Le 20 janvier 2024, Mme [O] [L], infirmière, a été victime d’un accident de la circulation causé par Mme [K] [N], assurée par la Mutuelle Saint-Christophe, entraînant l’amputation de sa jambe gauche. Malgré deux provisions de 50.000 euros versées par l’assureur, un litige persiste, poussant Mme [L] à engager des procédures judiciaires. Elle a assigné la Mutuelle et la CPAM, demandant une provision de 500.000 euros pour un préjudice estimé à plus d’un million. Lors de l’audience du 24 octobre 2024, le tribunal a ordonné une expertise médicale et accordé une provision de 300.000 euros à Mme [L].

Accident de la circulation

Le 20 janvier 2024, Mme [O] [L], infirmière, a subi un accident de la circulation causé par le véhicule conduit par Mme [K] [N], assuré par la Mutuelle Saint-Christophe. Cet accident a entraîné de graves séquelles pour Mme [L], notamment l’amputation de sa jambe gauche.

Provisions versées et litige non résolu

Suite à l’accident, la Mutuelle Saint-Christophe a versé à Mme [L] deux provisions totalisant 50.000 euros, en date des 17 mai et 17 août 2024. Malgré ces versements, les parties n’ont pas réussi à trouver un accord amiable, ce qui a conduit Mme [L] à engager des procédures judiciaires.

Assignation en référé

Le 16 juillet et le 02 août 2024, Mme [L] a assigné la Mutuelle Saint-Christophe et la CPAM de Maine-et-Loire devant le tribunal judiciaire d’Angers, demandant une provision de 400.000 euros, la désignation d’un expert, le remboursement des frais d’expertise, ainsi qu’une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Par la suite, elle a réévalué sa demande de provision à 500.000 euros, justifiant son préjudice à plus d’un million d’euros.

Réponse de la Mutuelle Saint-Christophe

En réponse, la Mutuelle Saint-Christophe a demandé le rejet de la demande de provision de 500.000 euros, tout en offrant de verser une provision complémentaire de 50.000 euros. Elle a contesté le montant demandé par Mme [L], arguant que les éléments fournis n’avaient pas été soumis à un contradictoire.

Position de la CPAM

La CPAM a informé le tribunal qu’elle ne souhaitait pas intervenir dans l’affaire, précisant que Mme [L] avait été prise en charge au titre du risque maladie, avec des débours s’élevant à 60.733,53 euros.

Audience et délibéré

Lors de l’audience du 24 octobre 2024, Mme [L] et la Mutuelle Saint-Christophe ont réitéré leurs demandes, tandis que la CPAM n’a pas comparu. L’affaire a été mise en délibéré pour le 21 novembre 2024.

Décision du tribunal

Le tribunal a ordonné une expertise médicale pour évaluer les préjudices de Mme [L]. Il a également statué sur la demande de provision, concluant que le droit à indemnisation de Mme [L] n’était pas contestable, et a accordé une provision de 300.000 euros, tout en déboutant Mme [L] du surplus de sa demande.

Dépens et frais irrépétibles

La Mutuelle Saint-Christophe a été condamnée aux dépens, et à verser 5.000 euros à Mme [L] au titre des frais irrépétibles, en raison de l’inéquité de laisser ces frais à sa charge.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 145 du code de procédure civile dans le cadre de la demande d’expertise ?

L’article 145 du code de procédure civile stipule que :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. »

Cet article permet donc à une partie de demander des mesures d’instruction avant même qu’un procès ne soit engagé, à condition de justifier d’un motif légitime.

Dans le cas présent, Mme [L] a justifié sa demande d’expertise par la nécessité d’établir la réalité de ses préjudices suite à l’accident.

Les éléments de son dossier médical, ainsi que la gravité des blessures, constituent un motif légitime pour ordonner une expertise.

Ainsi, le juge a considéré que la mesure d’instruction sollicitée ne se heurtait à aucune opposition légitime, permettant ainsi d’établir la preuve des faits en lien avec le litige potentiel.

Quelles sont les conditions d’octroi d’une provision selon l’article 835 du code de procédure civile ?

L’article 835 du code de procédure civile dispose que :

« Dans les cas où l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire statuant en référé peut toujours accorder une provision au créancier. »

Pour qu’une provision soit accordée, il faut que l’obligation soit non sérieusement contestable.

Cela signifie que le juge doit d’abord vérifier l’existence d’une obligation claire et indiscutable avant d’accorder une provision.

Dans cette affaire, la Mutuelle Saint-Christophe a reconnu l’existence d’une obligation en ayant déjà versé une première provision de 50.000 euros.

De plus, les pièces fournies par Mme [L], notamment son dossier médical, attestent de la gravité de ses blessures, justifiant ainsi l’octroi d’une provision complémentaire.

Le juge a donc décidé d’accorder une provision de 300.000 euros, considérant que le préjudice de Mme [L] était non sérieusement contestable.

Comment sont déterminés les dépens selon l’article 696 du code de procédure civile ?

L’article 696 du code de procédure civile précise que :

« La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. »

Cela signifie que, en règle générale, la partie qui succombe dans ses prétentions doit supporter les frais de la procédure.

Dans le cas présent, la Mutuelle Saint-Christophe, ayant été condamnée à verser une provision à Mme [L], est considérée comme la partie perdante.

Par conséquent, elle sera condamnée à payer les dépens, conformément à l’article 696, sauf décision motivée du juge en sens contraire, ce qui n’est pas le cas ici.

Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile concernant les frais irrépétibles ?

L’article 700 du code de procédure civile stipule que :

« La partie condamnée aux dépens ou qui perd son procès peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme destinée à compenser les frais exposés pour le procès et non compris dans les dépens. »

Cet article permet donc au juge d’accorder une indemnité à la partie qui a dû engager des frais pour faire valoir ses droits, en plus des dépens.

Dans cette affaire, le tribunal a jugé qu’il serait inéquitable de laisser Mme [L] supporter seule les frais engagés pour faire valoir ses droits.

Ainsi, la Mutuelle Saint-Christophe a été condamnée à verser à Mme [L] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700, afin de compenser les frais irrépétibles qu’elle a engagés dans le cadre de la procédure.

LE 21 NOVEMBRE 2024

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ ANGERS
-=-=-=-=-=-=-=-

N° RG 24/467 – N° Portalis DBY2-W-B7I-HTEW
N° de minute : 24/496

O R D O N N A N C E
———-

Le VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE, Nous, Benoît GIRAUD, Président du Tribunal Judiciaire d’ANGERS, assisté de Aurore TIPHAIGNE, Greffière présente lors des débats et lors de la mise à disposition, avons rendu la décision dont la teneur suit :

DEMANDERESSE :

Madame [O] [L]
Née le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 9] (59)
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Maître Jacques SIRET de la SCP SIRET & ASSOCIÉS, Avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON, Avocat plaidant et par Maître Lauren BERRUE de la SCP LBR, Avocate au barreau D’ANGERS, Avocate postulante,

DÉFENDERESSES :

MUTUELLE SAINT CHRISTOPHE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Maître Nathalie VALADE de la SELARL LEXCAP, Avocate au barreau D’ANGERS, substituée par Maître Reshmi BIO-TOURA, Avocate au barreau d’ANGERS,

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE (CPAM) du MAINE ET LOIRE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 4]
[Localité 8]
Non comparante, ni représentée,

*************

Vu l’exploit introductif du présent Référé en date du 16 Juillet et 02 Août 2024; les débats ayant eu lieu à l’audience du 24 Octobre 2024 pour l’ordonnance être rendue ce jour, ce dont les parties comparantes ont été avisées ;

C.EXE : Maître Lauren BERRUE
Maître Nathalie VALADE
C.C :
1 Copie défaillant (1) par LS
1 Copie Serv. Expertises
1 Copie régie
Copie Dossier
le

EXPOSE DU LITIGE

Le 20 janvier 2024, Mme [O] [L], infirmière, a été victime d’un accident de la circulation impliquant le véhicule conduit par Mme [K] [N], assurée par la Mutuelle Saint-Christophe.

Il a en a résulté pour Mme [L] de graves séquelles, notamment l’amputation de sa jambe gauche.

La Matmut, agissant pour le compte de la Mutuelle Saint-Christophe, a adressé à Mme [L] deux provisions d’un montant total de 50.000 euros, suivant quittances provisionnelles des 17 mai et 17 août 2024.

Les parties ne sont pas parvenues à résoudre amiablement le litige.

*

C’est dans ce contexte que, par actes de commissaire de justice en date du 16 juillet et 02 août 2024, Mme [L] a fait assigner la Mutuelle Saint-Christophe et la CPAM de Maine-et-Loire devant le président du tribunal judiciaire d’Angers statuant en référé, sur le fondement des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de voir :
– condamner la Mutuelle Saint-Christophe à lui verser une provision de 400.000 euros ;
– désigner un expert avec une mission se conformant à la nomenclature Dintilhac ;
– condamner la Mutuelle Saint-Christophe à payer les frais d’expert immobiliers et de médecins;
– condamner la Mutuelle Saint-Christophe à lui verser une somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la Mutuelle Saint-Christophe aux dépens.

Par voie de conclusions n°2, Mme [L] réévalue à la somme de 500.000 euros la somme qu’elle sollicite à titre de provision. Elle réitère le surplus de ses demandes introductives d’instance.

A l’appui de ses prétentions, Mme [L] soutient que son préjudice définitif devrait être évalué à plus d’un million d’euros compte tenu des frais de véhicule adapté, d’assistance d’une tierce personne, d’achat d’une prothèse avec pied mécanique, d’un fauteuil et autres frais de logement adapté, outre des pertes de gains professionnels.

*

Par voie de conclusions n°2, la Mutuelle Saint-Christophe sollicite du juge des référés, au visa des dispositions des articles 145 et 835 du code de procédure civile, de :
– débouter Mme [L] de sa demande de provision à hauteur de 500.000 euros ;
– décerner acte de ce qu’elle est offrante de payer à Mme [L] une provision complémentaire de 50.000 euros ;
– décerner acte de ce qu’elle s’en rapporte concernant la demande d’expertise et de ce qu’elle émet des protestations et réserves d’usage ;
– débouter Mme [L] de ses demandes formulée au titre des frais irrépétibles et des dépens.

A l’appui de ses prétentions, la Mutuelle Saint-Christophe, qui ne conteste pas l’implication du véhicule assuré dans l’accident, soutient que la provision demandée serait excessive et ne serait pas justifiée. Elle reproche notamment à la demanderesse de produire des éléments qui n’auraient pas fait l’objet d’un contradictoire et qui ne lui auraient pas permis de constater l’étendue des besoins alléguées.

*

Par courrier reçu au greffe civil du tribunal judiciaire d’Angers le 1er août 2024, la CPAM a informé le président du tribunal qu’elle n’entendait pas intervenir dans la présente instance, que la victime avait été prise en charge au titre du risque maladie et que le montant provisoire de ses débours s’élève à la somme de 60.733,53 euros.

A l’audience du 24 octobre 2024, Mme [L] et la Mutuelle Saint-Christophe ont réitéré leurs demandes, tandis que la CPAM de Maine-et-Loire, partie défenderesse régulièrement assignée, n’a pas comparu ni constitué avocat.

L’affaire a été mise en délibéré au 21 novembre 2024.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée, notamment au regard des dispositions d’ordre public régissant la matière.

I.Sur la demande d’expertise

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Ce texte suppose l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée. L’application de cet article n’implique aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

*

En l’espèce, la mesure d’instruction sollicitée ne se heurte à aucune opposition légitime. Elle s’impose dès lors qu’il résulte des éléments de la cause et des pièces produites, notamment du dossier médical de Mme [L], que seule l’intervention d’un professionnel peut permettre de vérifier la réalité des faits et les incidences de la situation litigieuse évoquée dans l’acte introductif d’instance.

Par ailleurs, aucune instance n’est en cours pour le même litige.

De ce fait, Mme [L] justifie d’un motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile à conserver ou établir la preuve de ses allégations.

Le coût de l’expertise sera avancé par Mme [L], demanderesse à cette mesure d’instruction ordonnée dans son intérêt.
II.Sur la demande de provision

Aux termes des dispositions de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire statuant en référé peut toujours accorder une provision au créancier.

L’octroi d’une provision suppose le constat préalable par le juge de l’existence d’une obligation non sérieusement contestable, au titre de laquelle la provision est demandée et ne peut l’être qu’à hauteur du montant non sérieusement contestable de cette obligation.

Par ailleurs, il appartient au demandeur de prouver l’existence de l’obligation, puis au défendeur de démontrer, le cas échéant, qu’il existerait une contestation sérieuse susceptible de faire échec à la demande.

Il y a lieu de rappeler que l’attribution d’une telle provision s’effectue aux risques du demandeur, qu’elle ne préjuge en rien de l’issue du litige et qu’elle peut être sujette à restitution.

*

En l’espèce, le droit à indemnisation de Mme [L] au titre de l’accident survenu le 20 janvier 2024 n’est pas contestable, ni même contesté par la Mutuelle Saint-Christophe, laquelle a déjà versé une provision de 50.000 euros à ce titre et laquelle est offrante de verser une provision complémentaire de 50.000 euros.

En outre, les pièces produites par Mme [L], notamment son dossier médical, font état de graves blessures, cette dernière ayant dû être amputée de sa jambe gauche.

Ainsi, en considération de la nature et de la gravité de séquelles résultant de l’accident, Mme [L] apporte la preuve d’un préjudice non sérieusement contestable justifiant l’octroi d’un complément de provision qui peut être évalué à la somme de 300.000 euros.

Par conséquent, la Mutuelle Saint-Christophe sera condamnée à payer à Mme [L] une somme de 300.000 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices.

Mme [L] sera déboutée du surplus de sa demande de provision, en raison de contestations sérieuses.

III.Sur les demandes accessoires

1-Sur les dépens

L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, la Mutuelle Saint-Christophe, qui succombe, sera condamnée aux dépens.

2-Sur les frais irrépétibles

L’article 700 du code de procédure civile prévoit que la partie condamnée aux dépens ou qui perd son procès peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme destinée à compenser les frais exposés pour le procès et non compris dans les dépens.

En l’espèce, il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [L] les sommes engagées par elle pour faire valoir ses droits. Par conséquent, la Mutuelle Saint-Christophe sera condamnée à lui payer à une somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Nous, Benoît Giraud, président du tribunal judiciaire d’Angers, statuant en référé, publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort :

Vu les dispositions des articles 145 et 835 alinéa 2 du code de procédure civile ;

DONNONS ACTE à la Mutuelle Saint-Christophe de ses protestations et réserves d’usage ;

ORDONNONS une expertise médicale de Mme [O] [L] au contradictoire de la Mutuelle Saint-Christophe et de la CPAM de Maine et Loire ;

COMMETTONS pour y procéder le Dr [B] [M] – CHU [Localité 8] – Département de chirurgie osseuse – [Adresse 5], expert judiciaire auprès de la Cour d’appel d’Angers, avec pour mission de :

– Informer par courrier, dans le respect des textes en vigueur, et dans le délai minimum de 15 jours, le sujet de la date de l’examen médical auquel il devra se présenter.

– Convoquer les parties par lettre recommandée avec accusé de réception et leurs avocats par lettre simple, les avisant de la faculté qu’elles ont de se faire assister par le médecin-conseil de leur choix et recueillir contradictoirement leurs observations ainsi que celles de tout tiers susceptible d’apporter des éléments utiles à la manifestation de la vérité ;

– Se faire communiquer par la victime, son représentant légal ou tout tiers détenteur tous documents médicaux, en particulier le certificat médical initial, les comptes rendus d’hospitalisation, le dossier d’imagerie…

– Prendre connaissance de l’identité de la victime, fournir le maximum de renseignements sur son mode de vie, ses conditions d’activités professionnelles, son statut.

– Recueillir et retranscrire en leur entier les doléances exprimées par la victime (ou son entourage si nécessaire) en lui faisant préciser les conditions d’apparition, l’importance des douleurs et de la gêne fonctionnelle et leurs conséquences sur la vie quotidienne.

– Dans le respect du code de la déontologie médicale, interroger le sujet sur ses antécédents médicaux, ne les rapporter et en discuter que s’ils constituent un état antérieur susceptible d’avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles.

– Reconstituer l’ensemble des faits ayant conduits à la présente procédure en faisant une chronologie des différentes interventions.

– Entendre les médecins soignants en leurs explications ainsi que tout intervenant si nécessaire.

– Procéder à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées et retranscrire ces constatations dans le rapport. A l’issue de cet examen, en application du principe du contradictoire, informer les parties et leurs conseils de façon circonstanciée de ses constatations et de leurs conséquences.

– Décrire tous les soins médicaux et paramédicaux mis en œuvre jusqu’à la consolidation, en précisant leur imputabilité, leur nature, leur durée et en indiquant les dates exactes d’hospitalisation avec, pour chaque période la nature et le nom de l’établissement, le ou les services concernés.

– Déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine, directe et exclusive avec l’accident ou ses suites, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou ses activités habituelles, en précisant, si possible le taux dû aux conséquences de l’accident ; Si l’incapacité fonctionnelle n’a été que partielle, en préciser le taux ; Préciser la durée des arrêts de travail au regard des organismes sociaux au vu des justificatifs produits ; si cette durée est supérieure à l’incapacité temporaire retenue, dire si ces arrêts sont liés au fait dommageable.

– Fixer la date de consolidation, qui est le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent tel qu’un traitement n’est plus nécessaire, si ce n’est pour éviter une aggravation.

* Au titre des préjudices patrimoniaux :

A) Au titre des préjudices patrimoniaux temporaires avant consolidation :

Dépenses de Santé Actuelles (DSA) :
– au vu des décomptes et des justificatifs fournis, donner leur avis sur d’éventuelles dépenses de santé ou de transport exposées par la victime avant la consolidation de ses blessures qui n’auraient pas été prises en charge par les organismes sociaux ou par des tiers payeurs, en précisant, le cas échéant, si le coût ou le surcoût de tels frais se rapportent à des soins ou plus généralement à des démarches nécessitées par l’état de santé de la victime et s’ils sont directement en lien avec les lésions résultant des faits à l’origine des dommages ;
– au vu des débours de la CPAM, qui devront être adressés à l’expert sans délai par cette dernière, se prononcer sur l’imputabilité des prestations versées par elle en relation directe et certaine avec les faits à l’origine des dommages en prenant soin d’exclure les conséquences de l’état de santé antérieur du patient ;

Frais divers (FD) :
– au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, donner son avis sur d’éventuels besoins ou dépenses en les quantifiant et, le cas échéant, en indiquant si ceux-ci sont directement en lien avec les lésions résultant des faits à l’origine des dommages, tels que notamment des frais de garde d’enfants, de soins ménagers, des appareillages, des fournitures complémentaires, des frais d’adaptation temporaire, soit d’un véhicule, soit d’un logement, la nécessité pour la victime d’être assistée par une tierce personne (cette assistance ne devant pas être réduite en cas d’assistance familiale) ; dans l’affirmative, préciser si cette tierce personne a dû ou non être spécialisée, ses attributions exactes ainsi que les durées respectives d’intervention de l’assistant spécialisé et de l’assistant non spécialisé ; donner à cet égard toutes précisions utiles ;

Perte de gains professionnels actuels (PGPA) :
– indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été, avant sa consolidation et du fait de son incapacité fonctionnelle résultant directement des lésions consécutives aux faits à l’origine des dommages, dans l’incapacité d’exercer totalement ou partiellement une activité professionnelle ou économique ;

B) Au titre des préjudices patrimoniaux permanents après consolidation :

Dépenses de santé futures (DSF) :
– au vu des décomptes et des justificatifs fournis, donner son avis sur d’éventuelles dépenses de santé futures y compris des frais de prothèses ou d’appareillage, en précisant s’il s’agit de frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, mêmes occasionnels mais médicalement prévisibles et rendus nécessaires par l’état pathologique de la victime après consolidation ;

Frais de logement adapté (FLA) :
– au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, donner son avis sur d’éventuelles dépenses ou frais nécessaires pour permettre le cas échéant à la victime d’adapter son logement à son handicap ;

Frais de véhicule adapté (FVA) :
– au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, donner son avis sur d’éventuelles dépenses nécessaires pour permettre le cas échéant à la victime d’adapter son véhicule à son handicap en précisant leur coût ou leur surcoût, ainsi que la nature et la fréquence de renouvellement des frais d’adaptation ;

Assistance par tierce personne (ATP) :
– au vu des justificatifs fournis et des constatations médicales réalisées, donner son avis sur la nécessité d’éventuelles dépenses liées à l’assistance permanente d’une tierce personne. Dans l’affirmative, préciser si cette tierce personne doit ou non être spécialisée, ses attributions exactes ainsi que les durées respectives d’intervention de l’assistant spécialisé et de l’assistant non spécialisé ; donner à cet égard toutes précisions utiles ;

Perte de gains professionnels futurs (PGPF) :
– au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, indiquer, si en raison de l’incapacité permanente dont la victime reste atteinte après sa consolidation, celle-ci va subir une perte ou une diminution des gains ou des revenus résultant de son activité professionnelle, du fait soit d’une perte de son emploi, soit d’une obligation d’exercer son activité professionnelle à temps partiel ;

Incidence professionnelle (IP) :
– au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, indiquer, si en raison de l’incapacité permanente dont la victime reste atteinte après sa consolidation, celle-ci va subir des préjudices touchant à son activité professionnelle autres que celui résultant de la perte de revenus liée à l’invalidité permanente ;

Préjudice scolaire, universitaire ou de formation (PSU) :
– au vu des justificatifs produits, dire, si en raison des lésions consécutives aux faits à l’origine des dommages, la victime a subi une perte d’année(s) de formation en précisant, le cas échéant, si celle-ci a dû se réorienter ou renoncer à certaines ou à toutes formations du fait de son handicap ;

* Au titre des préjudices extra-patrimoniaux :

A) Au titre des préjudices extra-patrimoniaux temporaires avant consolidation :

Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :
– indiquer si la victime a subi un déficit fonctionnel temporaire, en préciser sa durée, son importance et au besoin sa nature ;

Souffrances endurées (SE) :
– décrire les souffrances physiques et psychiques endurées par la victime, depuis les faits à l’origine des dommages jusqu’à la date de consolidation, du fait des blessures subies et les évaluer sur une échelle de 1 à 7 degrés ;

Préjudice esthétique temporaire (PET) :
– décrire la nature et l’importance du dommage esthétique subi temporairement jusqu’à la consolidation des blessures et l’évaluer sur une échelle de 1 à 7 degrés ;

B) Au titre des préjudices extra-patrimoniaux permanents après consolidation :

Déficit fonctionnel permanent (DFP) :
– indiquer si la victime a subi un déficit fonctionnel permanent subsistant après la consolidation des lésions, en évaluer l’importance et au besoin en chiffrer le taux ;

Préjudice d’agrément (PA) :
– au vu des justificatifs produits, si la victime allègue l’impossibilité de se livrer à des activités spécifiques de sport et de loisir, donner un avis médical sur cette impossibilité et son caractère définitif, sans prendre position sur l’existence ou non d’un préjudice afférent à cette allégation ;

Préjudice esthétique permanent (PEP) :
– décrire la nature et l’importance du préjudice esthétique subi de façon définitive après la consolidation des blessures et l’évaluer sur une échelle de 1 à 7 degrés ;

Préjudice sexuel et préjudice d’établissement (PS) (PE) :
– indiquer s’il existe un préjudice sexuel, de procréation ou d’établissement ;

– établir un état récapitulatif de l’évaluation de l’ensemble des postes énumérés dans la mission et dire si l’état de la victime est susceptible de modification en aggravation ou en amélioration. Dans l’affirmative fournir au tribunal, toutes précisions utiles sur cette évolution, son degré de probabilité, et, dans le cas où un nouvel examen apparaîtrait nécessaire, indiquer le délai dans lequel il devra être procédé,

– relater toutes les constatations ou observations n’entrant pas dans le cadre des rubriques mentionnées ci-dessus que l’expert jugera nécessaires pour l’exacte appréciation des préjudices subis par le patient et en tirer toutes les conclusions médico-légales.

DISONS qu’au cas où l’expert constaterait que l’état de la victime n’est pas consolidé, il en avisera le juge charge du contrôle de l’expertise et demeurera saisi ; qu’il reconvoquera les parties pour l’expertise définitive à la date qui lui apparaîtra utile ;

DISONS que l’expert désigné pourra, en tant que de besoin, s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir avisé les conseils des parties ; que dans cette hypothèse, il donnera connaissance aux parties du résultat des travaux de ce technicien et les joindront à son rapport ;

DISONS que l’expert adressera une note de synthèse aux conseils qui, dans les cinq semaines de la réception, lui feront connaître leurs observations ;

DISONS que l’expert répondra de manière précise et circonstanciée à ces dernières observations ou réclamations qui devront être annexées au rapport définitif dans lequel devront figurer impérativement :
– la liste exhaustive des pièces par lui consultées ;
– le nom des personnes convoquées aux opérations d’expertise en précisant pour chacune d’elle la date d’envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation;
– le nom des personnes présentes à chacune des réunions d’expertise ;
– la date de chacune des réunions tenues ;
– les déclarations des tiers entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leurs liens éventuels avec les parties ;
– le cas échéant, l’identité du technicien dont il s’est adjoint le concours, ainsi que le document qu’il aura établi de ses constatations et avis (lequel devra également être joint à la note de synthèse) ;

ENJOIGNONS aux parties de remettre à l’expert toutes les pièces qu’elles détiennent et qui sont nécessaires aux opérations d’expertise ;

DISONS que l’expert s’assurera, à chaque réunion d’expertise, de la communication aux parties des pièces qui lui sont remises, dans un délai permettant leur étude, conformément au principe de la contradiction ; que les documents d’imagerie médicale pertinents seront analysés de façon contradictoire lors des réunions d’expertise ; Que les pièces seront numérotées en continu et accompagnées d’un bordereau récapitulatif ;

DISONS que l’original du rapport définitif (un exemplaire) sera déposé au greffe du service des expertises de la présente juridiction, tandis que l’expert en adressera un exemplaire aux parties et à leurs conseils accompagné de sa demande de rémunération, dans les CINQ MOIS suivant le dépôt de la consignation sauf prorogation expresse ;

DISONS que pour le cas où, à la suite de la première réunion d’expertise il apparaîtrait que ce délai ne peut être respecté, ou que la provision consignée est insuffisante, l’expert devra en informant le juge du contrôle des expertises de ce tribunal des difficultés particulières qu’il rencontre, indiquer le programme de ses investigations, la date à laquelle son rapport sera remis aux parties et déposé au greffe du tribunal, et le cas échéant, le montant prévisible de ses honoraires et débours accompagné d’une demande de consignation complémentaire destinée à garantir en totalité le recouvrement de ses frais et honoraires ;

DISONS qu’en cas d’empêchement de l’expert désigné ou d’inobservation par lui des délais prescrits, il pourra être pourvu à leur remplacement par ordonnance rendue par le Président de ce Tribunal, sur requête ou d’office ;

FIXONS à la somme de 2.000 € (deux mille euros) le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que Mme [O] [L] devra consigner auprès du régisseur du tribunal judiciaire d’Angers dans le délai de deux mois à compter de la date de la notification de la présente ordonnance, par virement ou par chèque établis à l’ordre de la régie des avances et recettes du tribunal judiciaire d’Angers en indiquant le n° RG et le nom de parties ;

DISONS qu’à défaut de consignation dans ce délai et selon les modalités imparties, la désignation de l’expert sera caduque,

RAPPELONS que :

1) le coût final des opérations d’expertise ne sera déterminé qu’à l’issue de la procédure, même si la présente décision s’est efforcée de fixer le montant de la provision à une valeur aussi proche que possible du coût prévisible de l’expertise.

2) la partie qui est invitée par cette décision à faire l’avance des honoraires de l’expert n’est pas nécessairement celle qui en supportera la charge finale, à l’issue du procès.

DISONS qu’en cas de difficulté, il en sera référé par simple requête au juge chargé du contrôle des expertises par la partie la plus diligente ;

CONDAMNONS la Mutuelle Saint-Christophe à payer à Mme [O] [L] la somme de 300.000 euros à titre de provision ;

DEBOUTONS Mme [O] [L] du surplus de sa demande de provision ;

CONDAMNONS la Mutuelle Saint-Christophe aux dépens ;

CONDAMNONS la Mutuelle Saint-Christophe à payer à Mme [O] [L] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELONS que la présente décision est, de plein droit, exécutoire à titre provisoire.

Ainsi fait et prononcé à la date ci-dessus par mise à disposition au greffe, la présente ordonnance a été signée par Benoît Giraud, président, juge des référés, et par Aurore Tiphaigne, greffière,

Aurore Tiphaigne, Benoît Giraud,


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon