L’Essentiel : Madame [O] [X] a signalé un retrait frauduleux de 500 euros sur son compte à la Caisse d’Epargne, qui a refusé son remboursement. Après avoir déposé une plainte et saisi le Tribunal Judiciaire de Lille, l’audience a eu lieu le 29 octobre 2024. Le tribunal a reconnu le retrait comme non autorisé, mais a constaté une négligence grave de la part de Madame [O] [X] pour avoir divulgué ses données de sécurité. En conséquence, sa demande de remboursement et de dommages et intérêts a été rejetée, et elle a été condamnée à supporter les dépens.
|
Contexte de l’affaireMadame [O] [X] détient un compte bancaire à la S.A. Caisse d’Epargne et de Prévoyance des Hauts de France. Elle a signalé un retrait frauduleux de 500 euros sur son compte le 11 février 2023 et a demandé un remboursement à la Caisse d’Epargne, qui a refusé sa demande par lettre du 10 mars 2023. Démarches judiciairesLe 30 août 2023, Madame [O] [X] a déposé une plainte à la gendarmerie. Un conciliateur de justice a constaté l’échec de la conciliation le 12 septembre 2023, car la Caisse d’Epargne ne s’était pas présentée. Par la suite, Madame [O] [X] a saisi le Tribunal Judiciaire de Lille le 21 septembre 2023, demandant le remboursement de 500 euros et 300 euros de dommages et intérêts. Déroulement de l’audienceLes parties ont été convoquées à une audience le 16 avril 2024, qui a été renvoyée à plusieurs dates, jusqu’à celle du 29 octobre 2024. Lors de cette audience, Madame [O] [X] a réitéré sa demande, soutenant que la Caisse d’Epargne devait lui rembourser la somme en vertu de l’article L133-18 du code monétaire et financier, en raison d’un retrait frauduleux. Arguments de la Caisse d’EpargneLa Caisse d’Epargne, représentée par son conseil, a demandé le rejet des demandes de Madame [O] [X] et a réclamé 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Elle a soutenu que Madame [O] [X] devait prouver qu’elle n’était pas l’auteur du retrait et qu’elle avait fait preuve de négligence en divulguant ses données de sécurité. Analyse juridiqueLe tribunal a examiné les articles L133-3, L133-6, L133-18 et L133-19 du code monétaire et financier, précisant que le prestataire de services de paiement doit rembourser en cas d’opération non autorisée, sauf si la responsabilité du payeur est engagée. La Caisse d’Epargne devait prouver que Madame [O] [X] avait agi frauduleusement ou par négligence grave. Décision du tribunalLe tribunal a conclu que le retrait de 500 euros était non autorisé, car Madame [O] [X] n’avait pas consenti à son montant. Cependant, il a également constaté que Madame [O] [X] avait commis une négligence grave en suivant les instructions de l’escroc et en divulguant ses données de sécurité. Par conséquent, elle a été déboutée de sa demande de remboursement et de dommages et intérêts. Conséquences financièresMadame [O] [X] a été condamnée à supporter les dépens, tandis que la Caisse d’Epargne a été déboutée de sa demande d’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La décision a été rendue exécutoire à titre provisoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la responsabilité de la Caisse d’Epargne en cas de retrait frauduleux sur le compte de Madame [O] [X] ?La responsabilité de la Caisse d’Epargne dans le cadre d’un retrait frauduleux est régie par les articles L133-18 et L133-19 du code monétaire et financier. Ces articles stipulent que, en cas d’opération de paiement non autorisée, le prestataire de services de paiement, ici la Caisse d’Epargne, doit rembourser le montant de l’opération non autorisée, sauf si la responsabilité du payeur est engagée selon l’article L133-19. L’article L133-19, II, précise que la responsabilité du payeur n’est pas engagée si l’opération a été effectuée à son insu, par détournement de l’instrument de paiement ou des données qui lui sont liées. En revanche, selon l’article L133-19, IV, le payeur supporte toutes les pertes si celles-ci résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il a manqué à ses obligations de sécurité, comme stipulé dans les articles L133-16 et L133-17. Ainsi, la Caisse d’Epargne doit prouver que Madame [O] [X] a agi avec négligence grave ou de manière frauduleuse pour ne pas être tenue de rembourser le montant du retrait. Quelles sont les obligations de Madame [O] [X] en matière de sécurité de ses données bancaires ?Les obligations de Madame [O] [X] en matière de sécurité de ses données bancaires sont définies par les articles L133-16 et L133-17 du code monétaire et financier. L’article L133-16 impose au payeur de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisées. Cela inclut la protection de son code secret et de toute autre information sensible liée à son instrument de paiement. L’article L133-17, quant à lui, oblige le payeur à informer sans tarder son prestataire de services de paiement en cas de perte, de vol, de détournement ou d’utilisation non autorisée de son instrument de paiement ou des données qui lui sont liées. En cas de manquement à ces obligations, la responsabilité du payeur peut être engagée, ce qui pourrait entraîner le refus de remboursement par la Caisse d’Epargne. Comment la jurisprudence influence-t-elle l’interprétation des obligations de sécurité des utilisateurs de services de paiement ?La jurisprudence, notamment l’arrêt n°23-16.267 de la Cour de cassation, a un impact significatif sur l’interprétation des obligations de sécurité des utilisateurs de services de paiement. Cet arrêt a établi que la négligence grave ne peut être imputée à un titulaire de compte qui, contacté par une personne se faisant passer pour un préposé de sa banque, utilise son dispositif de sécurité pour éviter des opérations malveillantes. La Cour a précisé que, bien que l’utilisateur ait l’obligation de prendre des mesures raisonnables pour sécuriser ses données, c’est au prestataire de services de paiement de prouver que l’utilisateur a agi de manière frauduleuse ou a manqué intentionnellement à ses obligations. Ainsi, la jurisprudence renforce la protection des utilisateurs en leur permettant de contester la responsabilité qui pourrait leur être imputée en cas de fraude, tant que le prestataire ne prouve pas leur négligence grave. Quels sont les critères pour établir la non-autorisation d’une opération de paiement ?Les critères pour établir la non-autorisation d’une opération de paiement sont précisés dans les articles L133-3 et L133-6 du code monétaire et financier. Selon l’article L133-3, une opération de paiement est considérée comme autorisée uniquement si le payeur a consenti à l’opération et au montant de celle-ci. L’article L133-6 précise que le consentement doit être clair et explicite, ce qui signifie que toute opération réalisée sans ce consentement est réputée non autorisée. Dans le cas de Madame [O] [X], bien qu’elle ait initié une opération de retrait, elle n’a pas consenti au montant qui a été déterminé par l’escroc. Ainsi, le retrait d’espèces par sms est considéré comme une opération de paiement non autorisée, car il a été effectué à l’insu de Madame [O] [X]. Quelles sont les conséquences d’une négligence grave sur la demande de remboursement ?Les conséquences d’une négligence grave sur la demande de remboursement sont clairement établies dans l’article L133-19, IV, du code monétaire et financier. Cet article stipule que le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si celles-ci résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations de sécurité. Dans le cas de Madame [O] [X], la Caisse d’Epargne a soutenu qu’elle avait commis des négligences graves en divulguant ses données de sécurité et en suivant les instructions de l’escroc. Si la Caisse d’Epargne parvient à prouver cette négligence grave, Madame [O] [X] pourrait se voir refuser le remboursement de la somme de 500 euros, car elle aurait alors manqué à ses obligations de sécurité. Ainsi, la négligence grave peut avoir des conséquences significatives sur la capacité d’un utilisateur à obtenir un remboursement en cas de fraude. |
de LILLE
[Localité 4]
☎ :[XXXXXXXX01]
N° RG 23/08737 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XR32
N° de Minute : 25/00001
JUGEMENT
DU : 14 Janvier 2025
[O] [X]
C/
S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE HAUTS DE FRANCE
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUGEMENT DU 14 Janvier 2025
DANS LE LITIGE ENTRE :
DEMANDEUR
Madame [O] [X], demeurant [Adresse 3]
comparante en personne
ET :
DÉFENDEUR
S.A. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE HAUTS DE FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 5]
représentée par Maître Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 29 Octobre 2024
Maxime KOVALEVSKY, Juge, assisté de Chelbia HADDAD, Greffier
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ
Par mise à disposition au Greffe le 14 Janvier 2025, date indiquée à l’issue des débats par Maxime KOVALEVSKY, Juge, assisté de Chelbia HADDAD, Greffier
RG n°8737/23 – Page KB
Madame [O] [X] est titulaire d’un compte bancaire ouvert dans les livres de la S.A. Caisse d’Epargne et de Prévoyance des Hauts de France (ci-après la Caisse d’Epargne).
Se prévalant d’un retrait d’espèces frauduleux de 500 euros sur son compte bancaire le 11 février 2023, Madame [O] [X] a sollicité de la Caisse d’Epargne le remboursement de cette somme.
Par lettre du 10 mars 2023, la Caisse d’Epargne le lui a refusé.
Le 30 août 2023, Madame [O] [X] a déposé plainte à la gendarmerie de [Localité 7] pour ces faits.
Par procès-verbal du 12 septembre 2023, Monsieur [G] [P], conciliateur de justice, a constaté l’échec de la tentative préalable de conciliation, la Caisse d’Epargne ne s’étant pas présentée au rendez-vous fixé à la mairie de [Localité 7].
Par requête reçue au greffe le 21 septembre 2023, Madame [O] [X] a saisi le Tribunal Judiciaire de LILLE afin de voir condamner la Caisse d’Epargne à lui rembourser la somme de 500 euros ainsi qu’à lui payer celle de 300 euros de dommages et intérêts.
Les parties ont été convoquées à l’audience du 16 avril 2024.
L’affaire a été renvoyée aux audiences des 25 juin et 29 octobre 2024, date à laquelle elle a été retenue.
A cette audience, Madame [O] [X] a comparu en personne.
Elle a réitéré les termes de sa requête.
Sur le fondement de l’article L133-18 du code monétaire et financier, elle soutient que la Caisse d’Epargne est tenue de lui rembourser la somme qui a été frauduleusement retirée de son compte bancaire. Elle explique avoir reçu un appel d’un faux conseiller bancaire l’informant d’opérations frauduleuses sur son compte. Celui-ci l’a invitée à se rendre à un distributeur automatique de billets pour faire opposition à sa carte bancaire. Ayant déjà été victime de fraudes, elle s’exécuta et, à l’issue de diverses manipulations, découvrit que l’escroc avait viré la somme de 500 euros de son livret A à son compte bancaire pour procéder à son retrait dans une agence en région parisienne.
La Caisse d’Epargne a comparu représentée par son conseil.
Aux termes de ses conclusions déposées à l’audience, auxquelles elle se réfère, elle sollicite, sur le fondement des articles 1103 et suivants du code civil et L133-4 et suivants du code monétaire et financier, le rejet des prétentions adverses et la condamnation de la requérante à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient, d’abord, sur le fondement des articles 5 et 7 des conditions générales d’utilisation du service de retrait par sms, qu’il appartient à Madame [O] [X] de prouver qu’elle n’est pas l’auteur du retrait d’espèces litigieux et, ensuite, sur le fondement des articles L133-16, L133-4 et L133-19 du code monétaire et financier, qu’elle a manqué, par négligences graves, à son obligation de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses données de sécurité personnalisée. En effet, aux termes de la plainte et de la requête, elle constate que Madame [O] [X] a exécuté l’ensemble des instructions de l’escroc : qu’elle s’est rendue à un distributeur automatique de billets, qu’elle a inséré sa carte bancaire et procédé aux manipulations requises sur son application bancaire pour un retrait d’espèces par sms ; qu’elle a communiqué au tiers le code de transaction à neuf chiffres ainsi que son code secret à quatre chiffres. Elle en conclut que l’intéressée doit supporter les conséquences de l’opération frauduleuse.
S’agissant des dommages et intérêts, elle fait valoir que le préjudice n’est pas démontré. Elle rappelle également avoir traité avec diligence la réclamation qui lui était faite.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 14 janvier 2025.
Sur la demande en remboursement :
Il résulte des articles L133-3 et L133-6 du code monétaire et financier qu’une opération de paiement initiée par le payeur, qui donne un ordre de paiement à son prestataire de services de paiement, est réputée autorisée uniquement si le payeur a également consenti au montant de l’opération (Com. 30 novembre 2022, n°21-17.614).
Il résulte des articles L133-18 et L133-19 du code monétaire et financier qu’en cas d’opération de paiement non autorisée, réalisée au moyen d’un instrument de paiement doté de données de sécurité personnalisées, et signalée par l’utilisateur dans les conditions prévues à l’art. L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée, sauf si la responsabilité du payeur est engagée en application de l’art. L. 133-19.
L’article L133-19, II, du code monétaire et financier précise que la responsabilité du payeur n’est pas engagée si l’opération de paiement non autorisée a été effectuée en détournant, à l’insu du payeur, l’instrument de paiement ou les données qui lui sont liées.
A l’inverse, le payeur supporte, en application de l’article L133-19, IV, du code monétaire et financier, toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L133-16, qui l’oblige à prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité des données de sécurité personnalisées de son instrument de paiement, et L. 133-17, qui l’oblige à informer sans tarder le prestataire de service de paiement de la perte, du vol, du détournement ou de toute utilisation non autorisée de son instrument de paiement ou des données qui lui sont liées.
Dans son arrêt n°23-16.267, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé qu’aucune négligence grave ne pouvait être imputée au titulaire d’un compte qui, contacté téléphoniquement par une personne se faisant passer pour un préposé de sa banque dont le numéro s’affichait (spoofing), utilise à sa demande le dispositif de sécurité personnalisé pour supprimer puis réinscrire des bénéficiaires de virements dans le but d’éviter des opérations malveillantes.
Au visa des articles L133-16, L133-17, L133-19, IV, et L133-23 du code monétaire et financier, la Cour de cassation juge que s’il appartient à l’utilisateur de service de paiement de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés et d’informer sans tarder son prestataire de tels services de toute utilisation non autorisée de l’instrument de paiement ou des données qui lui sont liées, c’est à ce prestataire qu’il incombe de rapporter la preuve que l’utilisateur, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, a agi frauduleusement ou n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations.
Cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont lies ont été effectivement utilisées (Com. 18 janvier 2017, n°15-18.102).
Enfin, l’article L133-19, V, du code monétaire financier ajoute que, sous réserve de la fraude, le payeur ne supporte aucune conséquence financière si l’opération de paiement non autorisée a été effectuée sans que le prestataire de services de paiement du payeur n’exige une authentification forte du payeur prévue à l’article L133-44.
L’article L133-4, f, du code monétaire et financier définit une authentification forte comme une authentification reposant sur l’utilisation de deux éléments ou plus appartenant aux catégories « connaissance », « possession » et « inhérence » et indépendants, en ce sens que la compromission de l’un ne remet pas en question la fiabilité des autres, et qui est conçue de manière à protéger la confidentialité des mesures d’authentification.
L’article L133-44 du code monétaire et financier l’exige pour l’accès au compte de paiement en ligne, l’initiation d’une opération de paiement électronique et l’exécution d’une opération par le biais d’un moyen de communication à distance, susceptible de comporter un risque de fraude en matière de paiement ou de toute autre utilisation frauduleuse.
Les pièces versées aux débats permettent d’établir l’existence du retrait litigieux, à savoir un retrait par sms n°[Numéro identifiant 2] du 11 février 2023 à 15h57 d’un montant de 500 euros au distributeur automatique de billets de l’agence Caisse d’Epargne [Localité 6].
Madame [O] [X] nie avoir autorisé cette opération de paiement. En effet, elle explique dans ses échanges avec la banque consécutifs à son signalement du 17 février 2023, sa plainte et sa requête qu’elle a été contactée par un faux conseiller bancaire qui connaissait l’identité de sa conseillère bancaire habituelle. Celui-ci l’a informée d’opérations frauduleuses sur son compte bancaire et l’a invitée à faire opposition à sa carte de paiement. Sur ses instructions, elle s’est rendue au distributeur automatique de billets de l’agence d’[Localité 7] et l’y a insérée. Elle conteste lui avoir dévoilé les numéros de sa carte bancaire ou son code confidentiel de carte bleue mais reconnait avoir exécuté les manipulations qu’il commandait, c’est-à-dire, fort des explications techniques fournies par la Caisse d’Epargne, avoir initié une opération de retrait d’espèces par sms à partir de son application mobile et communiqué à l’escroc le code de retrait à neuf chiffres reçu sur son téléphone personnel ainsi que le code confidentiel à quatre chiffres choisi lors de l’activation du service.
Si Madame [O] [X] a bien donné un ordre de paiement en communiquant les codes ayant permis de valider l’opération, elle n’a pas consenti à son montant qui a été composé par l’escroc au distributeur de l’agence [Localité 6].
Ce retrait d’espèces par sms constitue donc une opération de paiement non autorisée, effectuée en détournant, à l’insu du payeur, les données liées à l’instrument de paiement.
En défense, la Caisse d’Epargne soutient, d’une part, qu’il appartient à Madame [O] [X] de démontrer qu’elle n’a pas effectué le retrait d’espèces, ce qui, au regard des faits de l’espèce, revient, en réalité, à soutenir la fraude de l’utilisatrice, et, d’autre part, qu’elle a commis des négligences graves en divulguant ses données de sécurité personnalisées et en suivant les instructions du tiers. Dans un cas comme dans l’autre, il appartient à la banque d’en rapporter la preuve.
Aucun élément ne permet de caractériser la fraude, a fortiori avec un retrait d’espèce dans un département éloigné de son lieu de vie.
En revanche, la négligence grave de Madame [O] [X] est caractérisée. En effet, si sa vigilance a pu être amoindrie par l’usage d’une fausse qualité ainsi que la communication de l’identité de sa conseillère bancaire habituelle, Madame [O] [X] s’est, néanmoins, rendue, sur les instructions de l’escroc, à un distributeur automatique de billets pour faire opposition à sa carte mais a initié un service différent – de retrait d’espèces par sms – à partir de son application bancaire, dont l’accès requiert une authentification forte, et lui a communiqué les mesures de sécurité fortes requises pour finaliser l’opération, c’est-à-dire le code de retrait à neuf chiffres et le code confidentiel à quatre chiffres.
En conséquence, les pertes de l’opération frauduleuse seront supportées par Madame [O] [X] qui sera donc déboutée de sa demande.
De ce fait, elle sera également déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires :
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, Madame [O] [X], partie perdante, supportera la charge des dépens.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
En l’espèce, l’équité commande de débouter la Caisse d’Epargne de sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont, de droit, exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
Le Tribunal, statuant publiquement par décision contradictoire mise à disposition au greffe, rendue en dernier ressort,
DEBOUTE Madame [O] [X] de sa demande en remboursement de la somme de 500 euros ;
DEBOUTE Madame [O] [X] de sa demande de dommages et intérêts ;
DEBOUTE la Caisse d’Epargne de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame [O] [X] aux dépens ;
RG n°8737/23 – Page KB
RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.
Ainsi jugé et prononcé à Lille, le 14 janvier 2025.
LE GREFFIER LE JUGE
Laisser un commentaire