Responsabilité et indemnisation : enjeux de la faute dans les accidents de la circulation

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Responsabilité et indemnisation : enjeux de la faute dans les accidents de la circulation

L’Essentiel : Le 21 septembre 2019, M. [D] a été impliqué dans un accident de la circulation avec M. [T], conducteur d’une Audi A3. Après des procédures judiciaires, le tribunal correctionnel a condamné M. [T] pour conduite en état d’ivresse, mais M. [D] a été débouté de ses demandes d’indemnisation. En février 2023, la MACIF a refusé de l’indemniser, invoquant une faute de sa part. M. [D] a alors assigné les assureurs en liquidation de ses préjudices, demandant 214.162,85 euros. Le tribunal a finalement conclu à la faute de M. [D], rejetant toutes ses demandes et le condamnant aux dépens.

Accident de la circulation

Le 21 septembre 2019, M. [N] [D] a été impliqué dans un accident de la circulation alors qu’il conduisait une Volkswagen Polo. Son véhicule a été percuté par une Audi A3 conduite par M. [T] [W]. Les deux conducteurs étaient assurés respectivement par MAPA et MACIF. L’accident s’est produit à [Adresse 4] à [Localité 7].

Procédures judiciaires initiales

M. [D] a engagé des procédures judiciaires en octobre 2021, citant la MACIF, la MAPA et la CPAM pour obtenir une expertise médicale et des provisions sur son indemnisation. Le juge des référés a ordonné une expertise médicale mais a rejeté les demandes de provisions, invoquant une contestation sérieuse concernant la responsabilité de M. [D].

Jugement correctionnel

Le 7 décembre 2021, le tribunal correctionnel de Poitiers a condamné M. [T] [W] pour conduite sous l’emprise de l’alcool, mais M. [D] a été débouté de ses demandes de dommages-intérêts en raison de la relaxe pour blessures involontaires.

Expertise médicale et refus d’indemnisation

Une expertise médicale a été réalisée le 10 juin 2022, et le rapport a été déposé le 5 septembre 2022. En février 2023, la MACIF a refusé d’indemniser M. [D], arguant qu’il avait commis une faute qui excluait son droit à réparation.

Assignation en liquidation des préjudices

En février 2024, M. [D] a assigné la MACIF, la MAPA et la CPAM en liquidation de ses préjudices, demandant une indemnisation totale de 214.162,85 euros, ainsi que des intérêts et des frais d’expertise.

Arguments de M. [D]

M. [D] soutient que les circonstances de l’accident ne prouvent pas qu’il a commis une faute. Il affirme que l’enquête de police était insuffisante et que les éléments de preuve montrent la responsabilité de M. [T] [W] en raison de son alcoolémie et de sa vitesse.

Arguments de la MACIF

La MACIF a demandé le débouté de M. [D], affirmant qu’il avait commis une faute en effectuant un demi-tour interdit, ce qui exclut son droit à indemnisation. Elle a également demandé une réduction de 95% de son droit à indemnisation si la faute n’était pas totalement exclue.

Décision du tribunal

Le tribunal a conclu que M. [D] avait effectivement commis une faute qui excluait son droit à indemnisation. Toutes ses demandes ont été rejetées, et il a été condamné aux dépens, y compris les frais d’expertise. La MACIF a également été accordée une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 3 de la loi n°85-677 du 05 juillet 1985 concernant le droit à indemnisation des victimes d’accidents de la circulation ?

L’article 3 alinéa 1er de la loi n°85-677 du 05 juillet 1985 stipule que :

« Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident. »

Cet article établit un principe fondamental en matière d’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation, en précisant que les victimes, à l’exception des conducteurs, ne peuvent voir leur droit à indemnisation limité par leur propre faute, sauf si cette faute est inexcusable et a causé l’accident.

Dans le cas de M. [N] [D], en tant que conducteur, il ne peut pas bénéficier de cette protection.

Ainsi, si une faute de sa part est prouvée, cela peut limiter ou exclure son droit à indemnisation, conformément à l’article 4 de la même loi.

Comment l’article 4 de la loi n°85-677 du 05 juillet 1985 s’applique-t-il dans le cadre de la responsabilité des conducteurs ?

L’article 4 de la loi n°85-677 précise que :

« La faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis. »

Cet article établit clairement que les conducteurs impliqués dans un accident de la circulation peuvent voir leur droit à indemnisation réduit ou totalement exclu en raison de leur propre faute.

Dans le litige en question, le tribunal a constaté que M. [N] [D] avait commis une faute en effectuant une manœuvre de demi-tour interdite sur un boulevard, ce qui a été corroboré par les éléments de l’enquête de police.

Ainsi, la faute de M. [N] [D] a été jugée suffisamment grave pour exclure son droit à indemnisation, conformément à l’article 4.

Quelles sont les implications de l’article 9 du code de procédure civile sur la charge de la preuve dans ce litige ?

L’article 9 du code de procédure civile dispose que :

« Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

Dans le cadre de ce litige, cela signifie que M. [N] [D] avait la charge de prouver qu’il n’avait pas commis de faute ou que les circonstances de l’accident étaient indéterminées.

Cependant, les éléments de preuve présentés par la MACIF, notamment les constatations de l’enquête de police, ont démontré que M. [N] [D] avait effectivement commis une faute en réalisant une manœuvre interdite.

Ainsi, M. [N] [D] n’a pas réussi à établir que son droit à indemnisation devait être maintenu, ce qui a conduit le tribunal à rejeter ses demandes.

Quels sont les effets de la décision du tribunal sur les demandes de M. [N] [D] concernant ses préjudices ?

Le tribunal a rejeté toutes les demandes de M. [N] [D], y compris celles relatives à ses préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux.

En effet, le tribunal a constaté que M. [N] [D] avait commis une faute excluant son droit à indemnisation, ce qui a eu pour effet de rendre ses demandes infondées.

Les préjudices, qu’ils soient liés à l’incidence professionnelle, à la perte de droits à la retraite ou à des préjudices extrapatrimoniaux, n’ont pas été retenus, car la faute de M. [N] [D] a été jugée suffisamment grave pour exclure toute indemnisation.

Ainsi, toutes ses demandes ont été rejetées, et il a été condamné à payer les dépens, y compris les frais d’expertise judiciaire.

Comment l’article L211-9 du code des assurances s’applique-t-il à la demande de M. [N] [D] concernant le doublement des intérêts ?

L’article L211-9 du code des assurances stipule que :

« En cas de non-respect des délais d’offre de l’assureur, la victime peut demander le doublement des intérêts. »

M. [N] [D] a soutenu que la MACIF n’avait pas fait d’offre provisionnelle dans les délais impartis, ce qui aurait dû entraîner le doublement des intérêts.

Cependant, la MACIF a contesté sa responsabilité et a indiqué qu’elle n’avait pas eu accès à tous les éléments nécessaires pour faire une offre.

Le tribunal a donc dû examiner si la contestation de la responsabilité par la MACIF était suffisante pour écarter l’application de l’article L211-9.

En l’espèce, le tribunal a jugé que la MACIF avait des raisons valables de contester sa responsabilité, ce qui a conduit à rejeter la demande de M. [N] [D] concernant le doublement des intérêts.

MINUTE N° :
DOSSIER : N° RG 24/00551 – N° Portalis DB3J-W-B7I-GI2P

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE POITIERS

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU 26 Novembre 2024

DEMANDEUR :

Monsieur [N] [D]
demeurant [Adresse 8]
représenté par Me Emmanuel GIROIRE REVALIER, avocat au barreau de POITIERS,

DÉFENDERESSES :

MAPA MUTUELLE D’ASSURANCE es qualité d’assureur de M. [N] [D],
dont le siège social est sis [Adresse 9]

défaillant

MACIF,
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Marianne PENOT, avocat au barreau de POITIERS,

Caisse CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA VIENNE,
dont le siège social est sis [Adresse 2]

défaillant

LE :

Copie simple à :
– Me GIROIRE REVALIER
– Me PENOT

Copie exécutoire à :
– Me PENOT

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

PRÉSIDENT : Sébastien VANDROMME-DEWEINE, Juge

Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux avocats.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Thibault PAQUELIN
GREFFIER LORS DE LA MISE A DISPOSITION : Tara MAUBOURGUET

Débats tenus publiquement à l’audience à juge unique du 01 Octobre 2024.

EXPOSE DU LITIGE

Le 21 septembre 2019, M. [N] [D] a été victime d’un accident corporel de la circulation à bord de son véhicule Polo Volkswagen dont il était conducteur, assuré auprès de la compagnie d’assurance mutuelle MAPA, après avoir été percuté par le véhicule Audi A3 de M. [T] [W] quant à lui assuré auprès de la société d’assurance mutuelle MACIF, les faits étant survenus sur le [Adresse 4] à [Localité 7].

Par actes d’huissiers de justice des 20, 21 et 22 octobre 2021, M. [D] a respectivement cité la société MACIF, la société MAPA et la Caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne (ci-après  » MACIF « ,  » MAPA  » et  » CPAM « ) à comparaître devant le juge des référés du Tribunal judiciaire de POITIERS aux fins de solliciter une expertise médicale, et de condamner la MACIF à lui verser les sommes de 25.000 euros à titre de provision sur l’indemnisation définitive et de 5.000 euros à titre de provision ad litem.

Par ordonnance du 01 décembre 2021, le juge des référés a ordonné une mesure d’expertise médicale. En revanche, il a dit ne pas avoir lieu à référé sur les demandes de condamnations provisionnelles, au motif notamment que l’obligation de réparation à l’endroit de la MACIF se heurte à une contestation sérieuse au sens de l’article 835 du code de procédure civile s’agissant de la commission d’une faute de la victime de nature à exclure ou à limiter la responsabilité du conducteur du véhicule impliqué.

Par jugement du tribunal correctionnel de POITIERS du 07 décembre 2021, M. [T] [W] a été condamné pour des faits requalifiés en récidive de conduite d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique. M. [N] [D], partie civile, a été débouté de ses demandes du fait de la relaxe du chef de blessures involontaires duquel le prévenu était renvoyé.

L’expertise médicale a été réalisée par le Docteur [K] le 10 juin 2022 au contradictoire de la MACIF, et l’expert a déposé son rapport définitif le 05 septembre 2022.

Par courrier du 23 février 2023, la MACIF n’a pas fait droit à la demande de M. [D], opposant à ce dernier une faute de nature à exclure son droit à indemnisation.

Par actes de commissaires de justice, signifiés à personne morale les 26, 27 et 28 février 2024, M. [D] a respectivement fait assigner la MACIF, la MAPA et la CPAM de la Vienne en liquidation de ses préjudices.

En demande, M. [N] [D], suivant ses assignations introductives valant dernières conclusions, demande au tribunal de notamment :
Juger que son droit à indemnisation est intégral ;Condamner la MACIF à lui payer la somme de 214.162,85 euros au titre de l’indemnisation de ses préjudices subis en lien avec l’accident du 21 septembre 2019 selon décompte à l’assignation ;Condamner la MACIF au paiement du double des intérêts du taux légal à compter du 21 mai 2020 ;Juger que la capitalisation des intérêts sera due par période annuelle et pour la première fois le 21 mai 2021 ;Condamner la MACIF au paiement de la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Condamner la MACIF aux dépens dont les frais d’expertise ;Juger qu’il n’y a lieu à écarter l’exécution provisoire de droit ;Déclarer le jugement opposable à la CPAM et à la MAPA, assureur mutuelle de M. [N] [D].
Au soutien de sa position, M. [N] [D] expose que les circonstances de l’accident ne sont pas suffisamment établies pour qu’il puisse être prouvé qu’il a commis une faute de nature à limiter ou exclure son droit à indemnisation, de sorte que l’assureur lui doit une réparation intégrale du préjudice à défaut de preuve contraire. Il fait notamment valoir que l’enquête de police a été sommaire, que les constats sur l’état du véhicule n’apportent aucun élément déterminant quant à une éventuelle faute de sa part, et qu’au contraire les éléments à la procédure révèlent la faute du conducteur au vu de son alcoolémie et de sa vitesse excessive.

Au titre de ses préjudices, S’agissant de l’incidence professionnelle, poste de préjudice patrimonial permanent, M. [N] [D] met en évidence que la cessation de son activité professionnelle dans le milieu de la restauration rapide est en lien direct et causal avec l’accident. Selon lui et contrairement aux conclusions de l’expert excluant toute indemnisation de ce chef, les pièces médicales non réunies au stade du pré-rapport et émises tant par le médecin traitant que par le médecin conseil de l’assurance maladie démontrent que sa mise en retraite anticipée pour inaptitude n’est pas  » multifactorielle  » mais secondaire à l’accident. Monsieur [D] ajoute que l’impossibilité de poursuivre son emploi sans nuire gravement à sa santé a été médicalement établie, aucun antécédent n’étant relevé. Enfin, le demandeur sollicite une indemnisation au titre de la perte de ses droits à la retraite.

Par rapport aux préjudices extrapatrimoniaux permanents, M. [N] [D] sollicite un déficit fonctionnel permanent d’au moins 10%, estimant que l’évaluation de l’expert de 8% est sous-estimée au vu des séquelles physiques relevées par le médecin expert et des troubles dans les conditions d’existence, puis fixe la valeur du point à 1.500 compte tenu de son âge à la date de consolidation et de l’obsolescence du barème usité. S’agissant du préjudice d’agrément, le demandeur soutient être dans l’impossibilité médicale de poursuivre l’équitation, sachant qu’il s’est investi durablement dans cette pratique.

Au soutien de sa demande en doublement du taux d’intérêt légal, M. [N] [D] allègue, au visa des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, que faute d’offre provisionnelle ou définitive transmise par la MACIF dans les délais impartis, la sanction prévue par les textes doit s’appliquer à son égard, peu important qu’elle conteste sa responsabilité et qu’une instance soit en cours entre la victime et la personne tenue à réparation et son assureur. La pénalité est due à compter de l’expiration du délai -sans offre- de huit mois après l’accident.

En défense, la MACIF, suivant dernières conclusions notifiées par RPVA le 10 mai 2024, demande au tribunal de notamment :
A titre principal,
Débouter M. [N] [D] de toutes ses demandes ;A titre subsidiaire,
Dire que les préjudices de M. [N] [D] seront évalués comme détaillé aux conclusions ;Dire que le droit à indemnisation de M. [N] [D] sera réduite de 95% concernant les sommes susvisées ;Débouter M. [N] [D] du surplus de ses demandes ;Condamner M. [N] [D] à payer à la MACIF 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Condamner M. [N] [D] aux dépens avec distraction.

Au soutien de sa position, la MACIF invoque l’article 4 de la loi n°85-677 du 05 juillet 1985 et allègue que M. [N] [D] a commis une faute ayant pour effet d’exclure totalement son droit à indemnisation, de sorte que les circonstances de l’accident ne sont pas indéterminées. En ce sens, elle fait remarquer que le conducteur a manqué aux règles de conduite en réalisant un demi-tour interdit sur le boulevard, ce qui ressort des propres déclarations de M. [N] [D] et d’un témoin lors de l’enquête pénale, cette même faute ayant ensuite été retenue à la fois par le juge des référés et par le tribunal correctionnel. Enfin, la MACIF indique que la faute de la victime s’apprécie indépendamment du comportement de l’autre conducteur et que l’alcoolisation de M. [T] [W] est sans lien avec l’accident, la faute personnelle de M. [D] lui étant ainsi opposable.

À l’appui de sa demande subsidiaire, la MACIF estime qu’à défaut d’exclusion du droit à indemnisation intégrale de M. [N] [D], celui-ci soit réduit à hauteur de 95% et que l’évaluation des préjudices soit revue à la baisse pour les motifs exposés.

Sur les préjudices patrimoniaux, s’agissant de l’incidence professionnelle et de la perte des droits à la retraite, la MACIF demande le débouté de M. [N] [D] en arguant de ce que ce poste de préjudice n’a pas été retenu par l’expert judiciaire dès lors que les seules séquelles imputables ne fondent pas de contre-indication médicale avec la poursuite de son activité professionnelle, au demeurant limitée à une gestion administrative depuis son domicile.

Sur les préjudices extrapatrimoniaux, la MACIF expose s’agissant du préjudice d’agrément que M. [N] [D] ne justifie pas d’une pratique régulière de l’équitation.

Enfin, pour s’opposer aux demandes en doublement du taux d’intérêt légal et en capitalisation des intérêts, la MACIF soutient, sur le fondement de l’article L211-9 du Code des assurances, qu’elle a contesté sa responsabilité, qu’elle n’avait toujours pas en sa possession la copie de la procédure pénale impliquant son assuré en décembre 2020, et que la MAPA lui a fait part de la responsabilité exclusive de M. [N] [D] fin décembre 2020 également.

En défense, la société MAPA ASSURANCES et la CPAM de la Vienne, régulièrement assignées, n’ont pas constitué avocat. Par courrier du 15 mars 2024, la CPAM de la Charente-Maritime, agissant pour le compte de la CPAM de la Vienne, a indiqué ne pas entendre intervenir à l’instance, a informé de la prise en charge de la victime au titre du risque maladie et a chiffré le montant de ses propres débours à la somme provisoire de 13.533,33 euros.

La clôture a été prononcée par ordonnance au 23 mai 2024 et l’affaire a été fixée, après report, à l’audience du 1er octobre 2024.

Avis a été donné que la décision était mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 26 novembre 2024.

MOTIFS DU JUGEMENT

1. Sur le droit à indemnisation de M. [N] [D].

La loi n°85-677 du 05 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation dispose, en son article 3 alinéa 1er, que :  » Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident.  »

L’article 4 précise que  » la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis.  »

Il est constant que pour l’application de l’article 4 de la loi précitée, le droit à indemnisation du conducteur victime est intégral si aucune faute de sa part n’est démontrée, mais également si les circonstances de l’accident sont indéterminées. Dans les ceux cas, les effets sont identiques.

L’article 9 du code de procédure civile dispose que :  » Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.  »

Dans le présent litige, il est donc question de savoir si M. [N] [D] a ou non commis une faute de nature à exclure ou limiter son droit à indemnisation ou si, les circonstances de l’accident étant indéterminées ou n’étant pas fautif, son droit à indemnisation sera intégral.

En l’espèce, en premier lieu, il résulte de l’enquête de police telle que produit aux débats (pièce demandeur n°1) que les enquêteurs ont conclu au fait que M. [N] [D] avait engagé une manoeuvre de demi-tour en sortant de sa place de stationnement, manoeuvre interdite au vu de la configuration des lieux à savoir un boulevard en deux fois deux voies avec terre plein central (voir résumé de l’affaire suivant compte-rendu d’enquête après identification et PV d’accident corporel de la circulation simplifié). Ce fait est déjà énoncé dans le PV de transport sur les lieux et de premières constatations des policiers dressé le 21 septembre 2019 à 01h20. Il doit en outre être relevé que Mme [G] [F] mentionne également que le véhicule était en travers de la chaussée, en raison d’un demi-tour, au moment de l’impact (audition du 21 septembre 2019 à 11h05, pièce demandeur n°1).

En deuxième lieu, il résulte des constatations par les enquêteurs sur les points d’impact sur les véhicules, ainsi que des photographies jointes à cette occasion, que le véhicule AUDI A3 conduit par M. [T] [W] a été accidenté de manière frontale (pare-choc avant et capot), tandis que le véhicule VOLKSWAGEN POLO conduit par M. [N] [D] a été accidenté essentiellement sur son côté gauche notamment au niveau de la porte avant conducteur, en faisant abstraction des modifications apportées au véhicule par la désincarcération par les secours. Or, ainsi que déjà relevé quoique de manière hypothétique par le tribunal correctionnel (pièce demandeur n°2), ces éléments tenant aux points d’impact sont incompatibles avec le récit actuel de M. [N] [D] selon lequel il serait simplement sorti d’une place de stationnement en bataille le long de la chaussée alors que M. [T] [W] arrivait sur la voie de gauche dans le même sens de circulation en direction de la porte de [Localité 6]. Au contraire, ces éléments sont seulement compatibles avec un choc à angle droit, conformément à un demi-tour effectué par le véhicule de M. [N] [D] au moment de l’impact, manoeuvre prohibée par la configuration des lieux.

En troisième lieu, il résulte de la configuration des lieux de l’accident (vis-à-vis du collège du [5], [Adresse 3]) telle que reproduite au procédure par un extrait de photographies satellite (pièce procédure n°1) que le terre plein central comporte une ouverture au niveau du carrefour avec la [Adresse 10] soit à proximité immédiate du lieu de l’impact, et qu’en outre le terre plein central ne comporte qu’un rebord de hauteur modeste et qu’il n’est pas démonté que la végétation centrale empêchait tout demi-tour.

Par conséquent, il résulte des éléments aux débats que M. [N] [D] a commis une faute excluant tout droit à indemnisation de son préjudice en lien avec l’accident.

Toutes ses demandes sont rejetées.

2. Sur les autres demandes et les dépens.

2.1. Sur les dépens.

M. [N] [D] supporte les dépens, dont les frais d’expertise judiciaire (RG 21/305), sans recouvrement direct au profit d’aucun conseil.

2.2. Sur l’article 700 du code de procédure civile.

M. [N] [D] doit payer à la MACIF une somme que l’équité commande de modérer à 1.000 euros. Toute autre demande est rejetée sur ce fondement.

2.3. Sur l’exécution provisoire.

Rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de l’article 514-1 du code de procédure civile au vu du sens de la décision.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, rendu après débats en audience publique par mise à disposition au greffe,

REJETTE toutes les demandes de M. [N] [D] ;

CONDAMNE M. [N] [D] aux dépens dont les frais d’expertise judiciaire (RG 21/305) sans recouvrement direct au profit d’aucun conseil ;

CONDAMNE M. [N] [D] à payer à la MACIF la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que le présent jugement est commun et opposable à MAPA ASSURANCES et la CPAM de la Vienne ;

REJETTE toute autre demande ;

MAINTIENT l’exécution provisoire en totalité ;

Le Greffier Le Président


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