Responsabilité du vendeur en cas de vice caché : conditions et conséquences

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Responsabilité du vendeur en cas de vice caché : conditions et conséquences

Le 12 mai 2018, M. [H] [D] a acheté un jet ski Kawasaki ultra 66 pour 6 000 € auprès de la SAS Auto Premium 66. Le 14 septembre 2018, M. [D] a informé le vendeur par courrier recommandé que le jet ski était en panne depuis le 16 juin 2018 et a demandé le remboursement ou la prise en charge des réparations, sans succès. Il a assigné la société en justice le 18 février 2019 pour obtenir la résolution du contrat pour vices cachés. Le tribunal a ordonné une expertise, dont le rapport a été déposé le 16 octobre 2021. Par jugement du 13 mai 2022, le tribunal a prononcé la résolution de la vente, condamné la société à rembourser 6 000 € avec intérêts, à payer des dommages-intérêts et des frais d’expertise. La SAS Auto Premium 66 a fait appel de ce jugement le 13 juin 2022, demandant l’annulation de la décision et la condamnation de M. [D] à lui verser des sommes pour les frais de justice. M. [D] a également demandé la confirmation du jugement et le remboursement de frais supplémentaires.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 septembre 2024
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
22/03131
ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2024

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 22/03131 – N° Portalis DBVK-V-B7G-POL6

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 mai 2022

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN – N° RG 11-19-000449

APPELANTE :

S.A.S. Auto Premium 66 – inscrite au RCS n° 811 582 667 prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée sur l’audience par Me Frédérique ROGER de la SCP FARRIOL-VIEU BARTHES-ROGER, avocat au barreau de PYRÉNÉES-ORIENTALES

INTIME :

Monsieur [H] [D]

né le 29 Juillet 1990 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 4],

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représenté sur l’audience par Me Lola JULIE substituant Me Julie CARRERE de la SCP BEY, CARRERE, avocats au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Marie-José FRANCO, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

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FAITS ET PROCÉDURE

Le 12 mai 2018, M. [H] [D] a acquis auprès de la SAS Auto Premium 66, un véhicule jet ski modèle Kawasaki ultra 66, pour le prix de 6 000 € payé comptant.

Le 14 septembre 2018, par courrier recommandé avec accusé de réception, M. [D] soutenant que le véhicule était en panne depuis le 16 juin 2018, a mis en demeure en vain le vendeur d’avoir soit à payer les réparations d’un coût de 8 178,72 € soit lui rembourser le prix de vente, et a réitéré sans succès sa demande suivant courrier recommandé du 17 octobre 2018.

C’est dans ce contexte que par acte du 18 février 2019, M.[D] a fait assigner la SAS Auto Premium 66 au visa des articles 1134, 1625 et 1641 du code civil afin d’obtenir la résolution du contrat de vente pour vices cachés.

Par jugement du 30 avril 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a ordonné, avant-dire droit, une expertise judiciaire relative au jet ski et a commis M. [B] [L], en qualité d’expert, pour y procédé. Le 16 octobre 2021, l’expert a déposé son rapport.

Par jugement contradictoire du 13 mai 2022, le tribunal judiciaire de Perpignan a :

Prononcé, par application des articles 1641 et suivants du code civil, la résolution de la vente du véhicule jet ski en litige par la société Auto Premium 66 à M. [D] en date du 12 mai 2018 ;

Condamné la société Auto Premium 66 à payer à M. [D], en remboursement du prix de la vente, la somme de 6 000 € avec intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2018 ;

Dit que M. [D] est tenu de laisser le jet ski objet de la vente résolue, à la disposition de la société Auto Premium 66 afin que celle-ci puisse venir le reprendre, à ses propres frais, pendant un délai de 30 jours à compter de la signification qui lui sera faite du présent jugement, à défaut de quoi, M. [D] pourra disposer librement de ce jet ski si la société ne l’a pas repris à l’issue de ce délai ;

Condamné la société Auto Premium 66 à payer à M. [D] la somme totale de 1 343,02 € à titre de dommages-intérêts ;

Condamné la société Auto Premium 66 à payer à M. [D] la somme de 1 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance, qui incluent les frais de l’expertise ordonnée par jugement du 30 avril 2021.

Le 13 juin 2022, la SAS Auto Premium 66 a relevé appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 21 mai 2024, la SAS Auto Premium 66 demande à la cour d’annuler à tout le moins infirmer et réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :

Débouter M. [D] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner M. [D] à payer à la SAS Auto Premium la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 pour la procédure de première instance et la même somme de 3 500 € pour la présente procédure d’appel ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel en ce compris les frais d’expertise ;

A titre subsidiaire, en cas de résolution :

Ordonner à M. [D] de restituer le jet litigieux dans les locaux de la SAS Auto Premium sous astreinte de 500 € par semaine de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

Juger en toutes hypothèses que la restitution du prix ne pourra être faite que lors et contre restitution du jet par M. [D] à la SAS Auto Premium ;

Débouter M. [D] de toutes demandes au titre des dommages et intérêts, de la taxe annuelle (764 €), de toutes autres demandes, et de l’article 700 et partager les dépens par moitié.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 6 mai 2024, M. [D] demande en substance à la cour de :

Débouter la SAS Auto Premium 66 de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Condamner la SAS Auto Premium 66 à payer à M. [D] la somme de 764 € en remboursement du droit annuel de francisation et de navigation dû en 2022 ;

Condamner la SAS Auto Premium 66 à payer à M. [D] la somme de 3 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile aux entiers dépens de l’instance.

Vu l’ordonnance de clôture du 30 mai 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

L’article 1641 du code civil dispose que : « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ».

L’acquéreur agissant contre son vendeur sur le fondement de ces dispositions doit établir :

l’existence d’un vice ;

la gravité du vice ;

et l’antériorité du vice par rapport à la vente.

L’existence et la gravité du vice son établies par les observations non contestées sur ce point par l’expert selon lesquelles le cylindre 1 du jet-ski a été endommagé, ce qui a entraîné le bris du moteur qui est hors service et rend le jet-ski impropre à son usage.

S’agissant de la cause des désordres, l’expert a relevé qu’elle était due au dévissage d’un des deux boulons du chapeau de bielle du cylindre 1 et que ce défaut n’est pas visible sans démontage spécifique et par conséquent n’était pas connu du vendeur.

L’appelante fait grief au premier juge d’avoir fait droit aux demandes de M. [D] alors que l’antériorité des désordres à la vente n’est ni prouvée par ce dernier, ni n’est établie par l’expert qui se borne à l’affirmer, alors d’une part que des interventions mécaniques ont été faites postérieurement à la vente notamment par la société F2R Mecaloisirs pour les besoins de l’établissement du devis de réparation produit par l’intimé, et que d’autre part, l’absence de traces d’eau de mer relevée par l’expert établit précisément la réalité d’une intervention sur le moteur postérieure à la vente.

La cour estime cependant l’antériorité du vice suffisamment établie par les attestations produites par M. [D] en pièces 11 et 13 dont la première, établie par M. [V], qui accompagnait l’intimé lors d’une sortie avec le jet ski litigieux et qui indique que celui-ci est tombé en panne ce jour-là, alors que son compteur affichait 130 heures, et la deuxième, établie par la société Mecaloisirs le 13 décembre 2019, aux termes de laquelle ce professionnel a constaté le 20 juin 2018 que le jet avait un trou dans la carter moteur et que son compteur affichait 130 heures.

L’expert ayant relevé le même affichage lors de ses opérations expertales, il est établi que le véhicule n’avait pas navigué entre le jour de sa panne initiale et le jour de l’expertise réalisée le 31 juillet 2021, l’absence de traces d’eau dans le moteur n’étant pas de nature à imputer le dévissage de l’ écrou du chapeau de bielle, cause de la panne, à la société F2R Mecaloisirs alors même que l’engin n’avait pas été mis à l’eau depuis trois ans.

Les trois conditions de mise en oeuvre des dispositions sus-visées de l’article 1641 du code civil étant réunies, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la résolution de la vente ainsi que les restitutions réciproques du prix de vente et du jet ski celle-ci devant s’effectuer ainsi que jugé à bon droit par le premier juge aux frais de la société Auto Premium.

Le premier juge ayant par ailleurs justement apprécié le préjudice subi par M. [D] du fait de cette vente à hauteur de 1343,02 €, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions. Il sera ajouté à cette condamnation de la société Auto Premium celle de 764 € dont le règlement est justifié par l’intimé postérieurement à la date du jugement déféré du fait du recouvrement le 6 juillet 2022 par la direction générale des affaires maritimes du droit annuel de francisation et de navigation au titre de l’année 2022.

Partie sucommbante, la société Auto Premium 66 sera condamnée aux dépens d’appel par application de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Auto Premium 66 à payer à M. [D] la somme de 764 €.

Condamne la société Auto Premium 66 aux dépens d’appel.

Condamne la société Auto Premium 66 à payer à M. [D] la somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


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