Responsabilité de l’agence de voyages

Notez ce point juridique

1. Assurez-vous de respecter les obligations d’information envers l’autre partie lors de la conclusion d’un contrat, en particulier en ce qui concerne les informations déterminantes pour son consentement. Tout manquement à ce devoir d’information peut entraîner des conséquences juridiques, y compris l’annulation du contrat.

2. En cas de vente d’un service de voyage, veillez à respecter les obligations légales en matière d’information précontractuelle, de responsabilité de l’organisateur ou du détaillant pour l’exécution des services prévus, et de remèdes en cas de non-conformité des services. Tout manquement à ces obligations peut entraîner des réclamations de la part du voyageur et des conséquences financières pour l’organisateur ou le détaillant.

3. En cas de litige, assurez-vous de bien documenter les faits et de fournir des preuves pour étayer vos demandes. Il est essentiel de démontrer que vous avez respecté vos obligations contractuelles et légales, et de réfuter toute allégation de l’autre partie. En outre, veillez à demander une indemnisation appropriée en cas de préjudice subi.


M. [Y] [G] a assigné la société PHILIPPE ESTRAN, agence de voyages, suite à un voyage en Tanzanie qui s’est déroulé dans des conditions jugées insatisfaisantes. Le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a condamné l’agence à verser des sommes à M. [G] pour réduction du prix du forfait touristique, dommages et intérêts, et remboursement de frais de taxi. Cependant, le tribunal a également condamné M. [G] à verser des dommages et intérêts à l’agence pour préjudice moral et atteinte à sa réputation. Les deux parties ont fait appel de cette décision et présenté leurs arguments devant la cour.

Sur la nullité de la déclaration d’appel

En application de l’article 901, 4°, du code de procédure civile, la déclaration d’appel doit contenir, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à la nullité du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. Selon l’article 562 du code de procédure civile, seul l’acte d’appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement. La déclaration d’appel formée par M.[G] vise les chefs du jugement qu’il critique mais ne mentionne pas qu’il en est demandé l’infirmation. Aucun des textes précédemment visés ni aucune autre disposition n’exige que la déclaration d’appel mentionne, s’agissant des chefs de jugement expressément critiqués, qu’il en est demandé l’infirmation. En conséquence, il convient de rejeter la demande de nullité de la déclaration d’appel formée par la SARL PHILIPPE ESTRAN.

Sur les manquements de la SARL PHILIPPE ESTRAN

L’article 1112-1 du code de procédure civile énonce que celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie. Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir. Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la SARL PHILIPPE ESTRAN

Le jour du départ prévu, M.[G] a envoyé un mail à une employée de l’agence, libellé en ces termes : ‘Bonjour [I], Je suis chez vous demain matin pour étranger quelqu’un. C’est la première fois de ma vie que je loupe un avion. Les horaires de vols ont été modifiés et personne ne nous prévient. Je comprends que ce matin vous ne trouviez pas le vol avec mon épouse quand vous remplissiez les documents en ligne sur le site de la Tanzanie. On était à l’aéroport à 18h30 pour le vol de 20h45 et on nous dit que l’embarquement est clos. Départ à 19h30. J’attend des explications et que 1) vous nous mettiez sur le vol de vendredi 2) trouviez une solution pour les 2 jours de perdus Merci à vous ‘ Si le début du courriel est offensif (le destinataire a pu lire ‘étrangler’), la suite est plus modérée et l’énervement manifesté par M.[G], qui n’a pas été avisé par l’agence de voyages d’un changement d’horaires du vol de départ et n’a pu partir à la bonne date, était compréhensible. La SARL PHILIPPE ESTRAN ne produit aucun élément permettant de démontrer qu’elle aurait été victime de la part de M.[G] d’une campagne de dénigrement ; le seul mail qu’elle produit au débat, écrit le jour où le vol a été annulé, à l’attention d’une employée, sans que ce courriel ait été public, n’est pas suffisant à démontrer que M.[G] aurait jeté le discrédit sur l’agence de voyages qui aurait subi un préjudice, alors même que sa responsabilité dans l’absence de départ à la date prévue est engagée. En conséquence, elle sera déboutée de sa demande tendant à obtenir des dommages et intérêts. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

La SARL PHILIPPE ESTRAN est essentiellement succombante. Elle sera condamnée aux dépens de première instance et

– 3180 euros à M.[Y] [G] pour réduction du prix du voyage.
– 63,27 euros à M.[Y] [G] pour tests PCR caducs.
– 150,20 euros à M.[Y] [G] pour frais de taxis.
– 1200 euros à M.[Y] [G] pour préjudice moral.
– 3500 euros à M.[Y] [G] pour frais irrépétibles de première instance et d’appel (article 700 du code de procédure civile).


Réglementation applicable

– Article L 211-16 du Code du Tourisme : Responsabilité de plein droit de l’agence de voyages pour l’exécution des services prévus par le contrat de forfait touristique.
– Article L 211-17 du Code du Tourisme : Droit du voyageur à demander une réduction de prix et, en cas de dommage distinct, des dommages et intérêts en cas de non-conformité des services.
– Article 700 du Code de Procédure Civile : Permet à une partie de demander une indemnisation pour les frais non couverts par les dépens qu’elle a dû engager au cours du procès.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Philippe BRUZZO
– Me Myriam ETTORI

Mots clefs associés

– Déclaration d’appel
– Nullité
– Code de procédure civile
– Dévolution des chefs critiqués
– Manquements
– Devoir d’information
– Contrat de voyage
– Responsabilité du professionnel
– Non-conformité
– Réduction de prix
– Dommages et intérêts
– SARL PHILIPPE ESTRAN
– Préjudice
– Responsabilité de l’agence de voyages
– Remboursement
– Préjudice moral
– Dommages et intérêts
– Campagne de dénigrement
– Dépens
– Frais irrépétibles
– Article 700 du code de procédure civile

– Motifs de la décision : Raisons et justifications légales sur lesquelles un juge ou un tribunal s’appuie pour rendre une décision judiciaire.

Expertise judiciaire : Évaluation ou analyse réalisée par un expert dans un domaine spécifique, mandaté par un tribunal, pour éclairer les juges sur des points techniques du litige.

– Imputabilité médicale : Lien de cause à effet établi entre un acte médical et un dommage subi par le patient, permettant de déterminer la responsabilité médicale.

– Discopathie : Terme médical désignant une pathologie affectant les disques intervertébraux.

– Accident : Événement soudain et imprévu causant des dommages physiques ou matériels.

– Lésions arthrosiques : Dégénérescences articulaires caractérisées par l’usure du cartilage, souvent liées à l’âge ou à des sollicitations répétées des articulations.

– Entorse cervicale : Lésion des ligaments du cou, souvent résultant d’un mouvement brusque ou d’un traumatisme.

– Dolorisation post-traumatique : Douleurs persistantes qui surviennent après un traumatisme, sans nécessairement avoir de lien direct avec des lésions physiques évidentes.

– Préjudice corporel : Dommage physique subi par une personne, pouvant inclure des douleurs physiques, des handicaps et des perturbations de la vie quotidienne.

– Réparation intégrale : Principe selon lequel une victime de dommage doit être intégralement compensée pour retrouver, autant que possible, la situation qui était la sienne avant le dommage.

– Prédisposition pathologique : État antérieur de la santé d’une personne qui peut influencer l’évolution ou la gravité d’une maladie ou d’un dommage subi.

– Discopathie dégénérative : Forme de discopathie caractérisée par la dégradation progressive des disques intervertébraux, souvent due au vieillissement.

– Expertise médicale : Évaluation réalisée par un médecin expert pour évaluer l’étendue des dommages corporels, les causes des lésions ou les capacités fonctionnelles d’une personne.

– Caisse primaire d’assurance-maladie : Organisme de sécurité sociale en France chargé de l’assurance maladie des travailleurs salariés, gérant notamment les remboursements de soins et les indemnisations des accidents du travail.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 22 FEVRIER 2024

N° 2024/ 93

Rôle N° RG 22/07740 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJPJ5

[Y] [G]

C/

S.A.R.L. PHILIPPE ESTRAN ‘PLEIN CIEL VOYAGES’

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Philippe BRUZZO

Me Myriam ETTORI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de proximité d’Aix-en-Provence en date du 29 Avril 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 1121001266.

APPELANT

Monsieur [Y] [G]

né le 23 Janvier 1967 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO DUBUCQ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant

INTIMEE

S.A.R.L. PHILIPPE ESTRAN ‘PLEIN CIEL VOYAGES’ prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Myriam ETTORI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Décembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Février 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Février 2024

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

EXPOSÉ DU LITIGE

La société PHILIPPE ESTRAN, agence de voyages, a organisé un voyage en Tanzanie, du 04 au 19 août 2021, moyennant la somme de 25.445 euros pour M.[Y] [G].

Par acte du 20 octobre 2021, M. [Y] [G], qui évoquait les mauvaises conditions dans lesquels le voyage s’était déroulé et se prévalait des manquements de l’agence de voyages, a fait assigner la SARL PHILIPPE ESTRAN, exerçant sous l’enseigne PLEIN CIEL, aux fins principalement de la voir condamner à une réduction du prix du forfait touristique, à des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et à lui verser diverses sommes au titre des billets d’avion de départ et de retour, au titre de frais de taxis et de PCR caducs.

Par jugement contradictoire en date du 29 avril 2022, le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence, a :

– condamné la SARL PHILIPPE ESTRAN « PLEIN CIEL VOYAGES » à payer à M. [G] les sommes de :

* 3000 euros au titre de la réduction du prix du forfait touristique,

* 500 euros à titre de dommages- intérêts en réparation de son préjudice moral,

* 150,20 euros en remboursement des frais de taxi ;

– débouté M. [G] de ses plus amples demandes,

– condamné M. [G] à payer à la SARL PHILIPPE ESTRAN « PLEIN CIEL VOYAGES » la somme de 3650,20 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’elle subit et de l’atteinte à sa réputation ;

– dit n’y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire,

– dit qu’il sera fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre chaque partie.

Le premier juge a estimé que l’agence de voyages devait être tenue pour responsable de n’avoir pas avisé M.[G] de l’avancement de l’avion de départ, ce qui avait engendré une arrivée en Tanzanie avec deux jours de retard. Il a ainsi condamné l’agence de voyages à lui verser la somme de 3000 euros en réparation de ce préjudice, limité au vol et aux jours perdus, ainsi qu’à la somme de 500 euros au titre du préjudice moral.

Il a rejeté la demande au titre des billets d’avion en notant que le surclassement était un choix propre de M.[G] qui avait déjà été indemnisé de son préjudice.

Il a fait droit aux demandes au titre des frais de taxis, conséquence du vol d’avion que M.[G] n’avait pu prendre.

Il a rejeté la demande au titre des tests PCR en indiquant qu’il n’était pas démontré que ceux aient été réalisés inutilement.

Il a estimé que les reproches formés par M.[G] à l’égard de l’agence de voyages (marées de l’océan ; présence d’algues et d’oursins sur la plage ; feuilles dans la piscine extérieure; présence de singes sur la terrasse d’un hôtel en Tanzanie ; température basse le matin et le soir à plus de 1000 mètres d’altitude ; tests PCR en période de COVID) confinait à l’abus de droit. Il a ainsi condamné M.[G] à verser à la SARL Philippe ESTRAN’PLEIN CIEL VOYAGES’ la somme de 3650,20 euros en réparation du préjudice moral de celle-ci et de l’atteinte à sa réputation.

Par déclaration 30 mai 2022, M. [G] a relevé appel de tous les chefs de cette décision.

La SARL PHILIPPE ESTRAN ‘PLEIN CIEL VOYAGES ‘ a constitué avocat et formé un appel incident.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 27 mars 2023 auxquelles il convient de se référer, M. [G] demande à la cour:

– d’infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence sauf en ce qu’elle a condamné la SARL PHILIPPE ESTRAN PLEIN CIEL VOYAGES à lui verser la somme de 150,20 euros en remboursement des frais de taxi

– de condamner la SARL PHILIPPE ESTRAN « PLEIN CIEL VOYAGES » à lui verser somme *5000 euros au titre de la réduction du prix du forfait touristique ;

*5000 euros au titre du préjudice moral,

*63, 17 euros au titre des tests PCR caducs ;

– de débouter la SARL PHILIPPE ESTRAN « PLEIN CIEL VOYAGES » de sa demande reconventionnelle tendant à faire condamner M. [G] en réparation du préjudice moral qu’elle a subi et de l’atteinte à la réputation.

– de condamner SARL PHILIPPE ESTRAN « PLEIN CIEL VOYAGES » au versement de la somme de 4 500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner la SARL PHILIPPE ESTRAN « PLEIN CIEL VOYAGES » aux entiers dépens.

Il estime que l’agence de voyages lui a vendu un forfait touristique et qu’elle est en conséquence responsable de plein droit, au visa de l’article L 211-16 du code du tourisme, de l’exécution des services prévus par ce contrat. Il soutient pouvoir demander une réduction de prix, et, en cas de dommage distinct, de dommages et intérêts, en application de l’article L 211-17 du même code.

Il indique que l’agence de voyages était tenue d’une obligation précontractuelle et lui reproche de ne l’avoir pas informé du lieu, du nombre et de la durée des escales, des frais à régler sur place, des conditions climatiques, des possibilités de baignade, de la nécessité ou non d’effectuer des tests PCR et de la qualité des prestations, notamment hôtelières et de la manière dont le voyage devait se dérouler.

Il explique avoir perdu deux jours de voyage en raison de l’absence d’information sur le changement de l’horaire du vol aller. Il note que l’agence de voyages ne peut se prévaloir à son égard de la faute commise par la compagnie aérienne Ethiopian Airlines tout comme elle ne peut se retrancher derrière la responsabilité de cette dernière en ce qui concerne les escales non prévues.

Il reproche à l’agence de voyage de n’avoir pas été en mesure de lui fournir un reclassement en première classe sur leur vol aller du 06 août 2021, alors qu’il existait de nombreuses places.

Il soutient que l’agence de voyage a commis une faute lourde. Il en conclut que son dommage réparable ne se limite pas au gain manqué ou à la perte faite.

Il fait état de son préjudice moral et de son préjudice matériel lié aux frais supplémentaires pour pallier la carence de l’agence de voyages (vols d’avion; frais de taxi, frais PCR caduc).

Il conteste tout préjudice subi par l’agence de voyages et note bénéficier d’une liberté d’expression. Il conteste tout abus de droit, d’autant plus que le premier juge a reconnu certains manquements de l’agence de voyage. Il estime qu’il n’existe aucune atteinte à la réputation de l’agence de voyages. Il précise n’avoir jamais menacé qui que ce soit et fait valoir que les termes de son courriel du 04 août 2021 n’est qu’une figure de style.

Il relève que l’agence de voyages ne peut s’exonérer de sa responsabilité de plein droit, faute de démontrer un cas de force majeure ou une faute qu’il aurait commise. Il déclare s’être présenté à l’heure à l’aéroport en se conformant aux indications de l’agence de voyages.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 25 octobre 2022 auxquelles il convient de se référer, la SARL PHILIPPE ESTRAN demande à la cour:

A titre liminaire,

– de prononcer la nullité de la déclaration d’appel du 30 mai 2022,

Subsidiairement,

A titre principal,

– de débouter M. [G] de l’ensemble de ses demandes

A titre subsidiaire,

Si la Cour venait à prononcer une condamnation à son encontre:

– de confirmer la décision entreprise concernant les condamnations prononcées à l’encontre de la société Plein ciel

– de réformer la décision entreprise sur les condamnations retenues à l’encontre de la Société plein ciel et statuant à nouveau :

– de condamner M. [G] à la somme de 8000 euros au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’elle subi et de l’atteinte à sa réputation.

– de condamner M. [G] à la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître ETTORI Myriam, Avocat à la Cour, sur son affirmation de droit.

Elle sollicite la nullité de la déclaration d’appel au motif que celle-ci ne précise pas si l’appelant sollicite la réformation ou l’annulation de la décision déférée.

Sur le fond, elle relève n’avoir pas été informée du changement d’horaires du vol aller et affirme que si M.[G] s’était présenté trois heures avant l’heure du décollage prévu, il aurait été en mesure d’embarquer le jour même.

Elle conteste tout manquement à l’égard du surclassement sollicité et note qu’aucun surclassement n’était disponible. Elle déclare avoir fait toute diligence pour permettre à M.[G] de partir dans les meilleurs délais.

Elle soutient avoir rempli son obligation pré-contractuelle d’informations, notamment en matière de conditions climatiques et de marées. Elle fait état des prestations hôtelières notamment en matière de baignade et d’activités nautiques. Elle souligne que les procédures étaient changeantes en matière de test PCR. Elle relève que les clients étaient informés de l’existence de pourboires.

Elle conteste tout manquement contractuel. Elle souligne que le préjudice évoqué n’est pas démontré.

Elle sollicite reconventionnellement des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et de l’atteinte à sa réputation.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 7 décembre 2023.

MOTIVATION

Sur la nullité de la déclaration d’appel

En application de l’article 901, 4°, du code de procédure civile, la déclaration d’appel doit contenir, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à la nullité du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Selon l’article 562 du code de procédure civile, seul l’acte d’appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement.

La déclaration d’appel formée par M.[G] vise les chefs du jugement qu’il critique mais ne mentionne pas qu’il en est demandé l’infirmation.

Aucun des textes précédemment visés ni aucune autre disposition n’exige que la déclaration d’appel mentionne, s’agissant des chefs de jugement expressément critiqués, qu’il en est demandé l’infirmation.

En conséquence, il convient de rejeter la demande de nullité de la déclaration d’appel formée par la SARL PHILIPPE ESTRAN.

Sur les manquements de la SARL PHILIPPE ESTRAN

L’article 1112-1 du même code énonce que celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

L’article L 211-8 du code du tourisme dispose que l’organisateur ou le détaillant informe le voyageur au moyen d’un formulaire fixé par voie réglementaire, préalablement à la conclusion du contrat, des caractéristiques principales des prestations proposées relatives au transport et au séjour, des coordonnées du détaillant et de l’organisateur, du prix et des modalités de paiement, des conditions d’annulation et de résolution du contrat, des informations sur les assurances ainsi que des conditions de franchissement des frontières. Ces informations sont présentées d’une manière claire, compréhensible et apparente. Lorsque ces informations sont présentées par écrit, elles doivent être lisibles.

Selon l’article L 211-16 du code du tourisme, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l’article L. 211-1 est responsable de plein droit de l’exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d’autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Le professionnel qui vend un service de voyage mentionné au 2° du I de l’article L. 211-1 est responsable de plein droit de l’exécution du service prévu par ce contrat, sans préjudice de son droit de recours contre le prestataire de service.

Toutefois le professionnel peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que le dommage est imputable soit au voyageur, soit à un tiers étranger à la fourniture des services de voyage compris dans le contrat, soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables (…).

Si l’un des services de voyage n’est pas exécuté conformément au contrat, l’organisateur ou le détaillant remédie à la non-conformité, sauf si cela est impossible ou entraîne des coûts disproportionnés, compte tenu de l’importance de la non-conformité et de la valeur des services de voyage concernés.

Si l’organisateur ou le détaillant ne remédie pas à la non-conformité, conformément à l’alinéa précédent, le voyageur peut demander une réduction de prix et, en cas de dommage distinct, des dommages et intérêts en application de l’article L. 211-17.

IV.-Sans préjudice des exceptions énoncées au III, si l’organisateur ou le détaillant ne remédie pas à la non-conformité dans un délai raisonnable fixé par le voyageur, celui-ci peut y remédier lui-même et réclamer le remboursement des dépenses nécessaires. Il n’est pas nécessaire que le voyageur précise un délai si l’organisateur ou le détaillant refuse de remédier à la non-conformité ou si une solution immédiate est requise (…)

La SARL PHILIPPE ESTRAN a vendu à M. [G] un service de voyages sur portant sur le transport, le logement, et d’autres services de voyage qu’elle ne produit pas elle-même.

Les services compris dans le prix concernaient :

– les vols internationaux,

– les taxes,

– le safari avec guide/chauffeur anglophone,

– les hébergements,

– la pension complète sur le safari et sur Zanzibar,

– les vols intérieurs,

– les transferts.

Le détail des prestations était mentionné dans le courriel du 05 mai 2021, avec un changement accepté par M.[G] concernant le dernier hôtel (courriel du 14 mai 2021). Le détail était également mentionné dans les documents de voyage (pièce 3 de l’intimée) remis à M.[G].

Les informations ne faisaient pas état du nombre d’escales. Toutefois, M.[G] ne justifie pas du préjudice qu’il aurait subi du fait de cette absence d’informations.

Il n’est pas contesté par la SARL PHILIPPE ESTRAN que le vol réservé pour M.[G] et devant partir à 20h45 a été annulé. Dès lors, l’argument selon lequel il était mentionné sur le document de voyage qu’il fallait se rendre à l’aéroport trois heures avant, alors que M.[G] expliquait s’y être rendu à 18h30 pour un vol de 20h45 mentionné au devis n’est pas opportun puisque l’agence de voyages ne démontre pas que M.[G] aurait pu partir, même en tenant compte de cette recommandation. M.[G] n’a pas été informé d’un changement d’horaires et il n’a pu voyager dès le 04 août 2021, comme convenu contractuellement. La SARL PHILIPPE ESTRAN a donc engagé sa responsabilité de plein droit, à défaut pour elle de démontrer que ce dommage était imputable soit à M.[G], soit à un tiers étranger à la fourniture des services de voyage compris dans le contrat, soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables.

M.[G] ne démontre pas le préjudice qu’il aurait subi du fait d’un défaut d’information sur le nombre d’escales.

Il ne démontre pas non plus que la SARL PHILIPPE ESTRAN aurait manqué à son obligation de conseil en ne lui apportant pas d’informations plus précises sur les conditions climatiques, alors même qu’il bénéficiait d’un document de voyage lui permettant d’avoir connaissances de températures envisageables.

Il ne démontre pas que les prestations hôtelières dont il a disposé ne correspondaient pas au standing attendu, alors qu’il avait accepté d’aller à l’hôtel Frangipani Garden Pool et qu’un lien lui avait été envoyé afin qu’il puisse accepter ou non la réservation faite dans cet hôtel.

Il ne peut reprocher à l’agence de voyages un défaut d’informations sur la présence de singes, aux abords de l’hôtel, puisqu’il était avisé de la présence de ces animaux à Zanzibar. Il ne peut pas plus reprocher à l’agence un défaut d’information sur l’existence de marées puisqu’il ne démontre pas qu’il ne lui aurait pas été possible de pouvoir bénéficier de baignades.

M.[G] ne peut pas non plus reprocher à l’agence de voyages l’absence de démarches pour obtenir un surclassement dans l’avion, qui n’est pas un dû, alors même que sa demande avait été prise en compte et que l’agence de voyages indiquait avoir tenté de le faire sans succès.

M.[G] avait été informé du coût des tests PCR (par courriel du 25 mai 2021) tout comme il lui avait été indiqué qu’il devrait débourser des pourboires, notamment pour le guide (sur le document de voyage).

Ainsi, la responsabilité de l’agence de voyages est uniquement engagée de plein droit pour le vol de départ qui n’a pu être honoré et qui a fait perdre deux jours de voyage à M.[G] et sa famille.

Le préjudice subi par ce dernier consiste dans la diminution de son temps de voyages, dans le versement de frais de taxi qu’il a dû acquitter pour partir puis revenir à l’aéroport et dans le coût de frais de test PCR qui étaient caducs à l’aller (préjudice financier).

Il ne démontre pas avoir dû lui-même acquitter les frais de billets d’avion aller, alors même que l’agence de voyage indique avoir pris en charge la somme correspondant au changement de vol. Il devait repartir en France par avion le 19 août 2021 et ne justifie pas que ce vol (compris dans le voyage touristique qui lui a été vendu) n’aurait pas été disponible. La cour ignore à quoi correspondent les pièces 6 et 7 qu’il produit au débat pour étayer sa demande de remboursement.

Il a également subi un préjudice moral tenant à son incompréhension et à sa déception face à une impossibilité de partir le jour convenu, alors qu’il était en famille, qu’il avait financé un voyage d’un coût non négligeable et qu’il ignorait la date à laquelle il pourrait partir.

Dès lors, il convient de lui allouer la somme de 3180 euros au titre de la réduction du prix du voyage, 63, 17 euros au titre du remboursement des tests PCR devenus caducs et 150,20 euros au titre des frais de taxi.

Il sera également indemnisé de son préjudice moral par l’allocation de la somme de 1200 euros qui répare intégralement son préjudice.

Le jugement déféré sera infirmé sur le montant des sommes dues par la SARL PHILIPPE ESTRAN à M.[G].

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la SARL PHILIPPE ESTRAN

Le jour du départ prévu, M.[G] a envoyé un mail à une employée de l’agence, libellé en ces termes :

‘Bonjour [I],

Je suis chez vous demain matin pour étranger quelqu’un. C’est la première fois de ma vie que je loupe un avion.

Les horaires de vols ont été modifiés et personne ne nous prévient. Je comprends que ce matin vous ne trouviez pas le vol avec mon épouse quand vous remplissiez les documents en ligne sur le site de la Tanzanie.

On était à l’aéroport à 18h30 pour le vol de 20h45 et on nous dit que l’embarquement est clos. Départ à 19h30.

J’attend des explications et que

1) vous nous mettiez sur le vol de vendredi

2) trouviez une solution pour les 2 jours de perdus

Merci à vous ‘

Si le début du courriel est offensif (le destinataire a pu lire ‘étrangler’), la suite est plus modérée et l’énervement manifesté par M.[G], qui n’a pas été avisé par l’agence de voyages d’un changement d’horaires du vol de départ et n’a pu partir à la bonne date, était compréhensible.

La SARL PHILIPPE ESTRAN ne produit aucun élément permettant de démontrer qu’elle aurait été victime de la part de M.[G] d’une campagne de dénigrement ; le seul mail qu’elle produit au débat, écrit le jour où le vol a été annulé, à l’attention d’une employée, sans que ce courriel ait été public, n’est pas suffisant à démontrer que M.[G] aurait jeté le discrédit sur l’agence de voyages qui aurait subi un préjudice, alors même que sa responsabilité dans l’absence de départ à la date prévue est engagée.

En conséquence, elle sera déboutée de sa demande tendant à obtenir des dommages et intérêts. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

La SARL PHILIPPE ESTRAN est essentiellement succombante. Elle sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel. Elle sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Il n’est pas équitable de laisser à la charge de M.[G] les frais qu’il a exposés pour faire valoir ses droits en première instance et en appel. La SARL PHILIPPE ESTRAN sera condamnée à lui verser la somme de 3500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré qui a fait masse des dépens, les a partagés par moitié entre les parties et a dit n’y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile sera infirmé.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

REJETTE la demande de la SARL PHILIPPE ESTRAN tendant à voir déclarer nulle la déclaration d’appel de M.[Y] [G],

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a retenu la responsabilité de plein droit de la SARL PHILIPPE ESTRAN,

INFIRME pour le surplus,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SARL PHILIPPE ESTRAN à verser à M.[Y] [G] la somme de 3180 euros au titre de la réduction du prix du voyage,

CONDAMNE la SARL PHILIPPE ESTRAN à verser à M.[Y] [G], à titre de dommages et intérêts, les sommes suivantes :

– 63,27 euros au titre des tests PCR caducs,

-150,20 euros au titre des frais de taxis,

-1200 euros en réparation de son préjudice moral,

REJETTE le surplus des demandes indemnitaires de M.[Y] [G]

REJETTE la demande de dommages et intérêts formée par la SARL PHILIPPE ESTRAN

REJETTE la demande faite par la SARL PHILIPPE ESTRAN au titre des frais irrépétibles

CONDAMNE la SARL PHILIPPE ESTRAN à verser à M.[Y] [G] la somme de 3500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

CONDAMNE la SARL PHILIPPE ESTRAN aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENTE,

 

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x
Scroll to Top