L’Essentiel : Le 13 mars 2017, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a signé un contrat avec Ardrom System pour l’entretien de systèmes de sécurité. Dans la nuit du 24 au 25 juillet 2019, un incendie, revendiqué par un individu animaliste, a gravement endommagé ses locaux, entraînant un relogement temporaire. En novembre 2020, la fédération a assigné Ardrom System et Axa France Iard pour résilier le contrat et obtenir des indemnités. Le 29 novembre 2022, le tribunal a résilié le contrat et condamné les sociétés à verser des indemnités, décision que Axa a contestée en appel.
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Contexte du contratLe 13 mars 2017, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a signé un contrat avec la société Ardrom System pour l’entretien et la maintenance de systèmes de détection d’intrusion et de vidéo surveillance. Ce contrat incluait une option de télésurveillance avec interventions ponctuelles. Incendie et conséquencesDans la nuit du 24 au 25 juillet 2019, un incendie a ravagé les locaux de la fédération, revendiqué par un individu se réclamant de la cause animaliste. Les locaux, gravement endommagés, ont conduit la fédération à se reloger temporairement entre août 2019 et novembre 2020. Elle a reçu des indemnités de son assureur pour couvrir les pertes matérielles et les frais de relogement. Procédure judiciaireLe 27 novembre 2020, la fédération a assigné Ardrom System et son assureur, Axa France Iard, devant le tribunal de commerce d’Aubenas pour résilier le contrat et obtenir des indemnités. Ardrom System a ensuite appelé en cause ses sous-traitants, Mutaveil et Vigie de Val de Drôme. Jugement du tribunalLe 29 novembre 2022, le tribunal a prononcé la résiliation du contrat entre la fédération et Ardrom System, condamnant les sociétés impliquées à verser 80.991,20 euros pour perte de chance et d’autres indemnités. Axa France Iard a fait appel de cette décision. Arguments de l’appelanteAxa France Iard a soutenu que les manquements reprochés à Ardrom System n’étaient pas à l’origine de l’incendie, qui a été rapidement détecté. Elle a également contesté les demandes d’indemnisation de la fédération, arguant qu’aucun lien de causalité n’existait entre les manquements et les préjudices allégués. Réponse de la fédérationLa fédération a affirmé que malgré le déclenchement des alarmes, aucune levée de doute n’avait été effectuée, engageant ainsi la responsabilité d’Ardrom System. Elle a demandé la confirmation du jugement initial et des indemnités pour préjudice moral et matériel. Position d’Ardrom SystemArdrom System a contesté les accusations, affirmant que son système de détection avait fonctionné correctement et qu’il n’était pas contractuellement tenu d’intervenir dans un délai précis. Elle a également souligné que la société Vigie de Val de Drôme n’avait pas respecté ses obligations. Arguments de MutaveilMutaveil a défendu sa position en affirmant qu’elle avait agi conformément aux instructions d’Ardrom System et qu’elle n’avait pas pu appeler les secours en l’absence de levée de doute. Elle a demandé la confirmation du jugement en sa faveur. Décision de la cour d’appelLa cour a confirmé en partie le jugement initial, condamnant Ardrom System à verser 14.262,14 euros à la fédération pour préjudice. Elle a également précisé les conditions de garantie d’Axa France Iard et a débouté les autres parties de leurs demandes d’indemnité. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de l’obligation contractuelle de la société Ardrom System envers la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche ?La société Ardrom System avait une obligation contractuelle de résultat envers la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche, en vertu des articles 1103 et 1231-1 du Code civil. L’article 1103 stipule que « les contrats doivent être exécutés de bonne foi ». Cela implique que les parties doivent respecter les engagements pris dans le contrat, en l’occurrence, la société Ardrom System devait assurer la surveillance et la sécurité des locaux de la fédération. L’article 1231-1 précise que « le débiteur est tenu de réparer le préjudice causé par son inexécution, sauf s’il prouve que celle-ci résulte d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée ». Ainsi, si la société Ardrom System n’a pas respecté ses obligations, elle pourrait être tenue responsable des dommages subis par la fédération. Quelles sont les conséquences de la résiliation du contrat entre la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche et la société Ardrom System ?La résiliation du contrat entraîne des conséquences juridiques importantes, notamment en matière d’indemnisation. Selon l’article 1217 du Code civil, la résiliation d’un contrat peut donner lieu à des dommages-intérêts si l’une des parties a manqué à ses obligations. L’article 1217 dispose que « la partie envers laquelle l’obligation n’a pas été exécutée peut : 1° refuser d’exécuter sa propre obligation ; 2° demander l’exécution forcée en nature ; 3° demander la résolution du contrat ; 4° demander des dommages-intérêts ». Dans ce cas, la Fédération a obtenu une indemnisation pour la perte de chance, ce qui signifie qu’elle a été reconnue comme ayant subi un préjudice en raison de l’inexécution des obligations par la société Ardrom System. Comment la responsabilité de la société Ardrom System est-elle engagée dans le cadre de l’incendie survenu ?La responsabilité de la société Ardrom System peut être engagée sur la base de la faute contractuelle, en vertu des articles 1231 et 1240 du Code civil. L’article 1240 stipule que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Dans ce cas, la société Ardrom System aurait manqué à son obligation de surveillance, ce qui a conduit à l’incendie. La Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a donc pu revendiquer des dommages-intérêts pour le préjudice subi. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du Code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais de justice. Cet article stipule que « la cour condamne la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ». Dans cette affaire, la société Ardrom System a été condamnée à verser des sommes à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche au titre de l’article 700, ce qui reflète la reconnaissance de la perte de chance et des frais engagés par la fédération pour faire valoir ses droits. Quel est le rôle de l’assurance dans cette affaire, notamment en ce qui concerne la société Axa France Iard ?La société Axa France Iard, en tant qu’assureur de la société Ardrom System, a un rôle crucial dans la couverture des dommages causés par l’inexécution des obligations contractuelles. Selon l’article 2110 du Code civil, l’assureur est tenu de garantir son assuré contre les conséquences pécuniaires des dommages causés à des tiers. L’article 2110 précise que « l’assureur est tenu de garantir l’assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu’il peut encourir du fait des dommages causés à autrui ». Dans ce cas, Axa France Iard pourrait être amenée à indemniser la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche, en fonction des termes de la police d’assurance souscrite par la société Ardrom System. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°5
N° RG 22/04142 – N° Portalis DBVH-V-B7G-IVHC
AV
TRIBUNAL DE COMMERCE D’AUBENAS
29 novembre 2022
RG:2020 04350
Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD
C/
S.A.S. MUTAVEIL
S.A.R.L. ARDROM SECURITE
Association FEDERATION DES CHASSEURS
S.A.S. VIGIE DU VAL DE DROME
Copie exécutoire délivrée
le 17/01/2025
à :
Me Sylvie SERGENT
Me Philippe RECHE
Me Emmanuelle VAJOU Me Laurette GOUYET POMMARET
Me Jean-michel DIVISIA
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
4ème chambre commerciale
ARRÊT DU 17 JANVIER 2025
Décision déférée à la cour : Jugement du Tribunal de Commerce d’AUBENAS en date du 29 Novembre 2022, N°2020 04350
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,
Madame Claire OUGIER, Conseillère,
Madame Agnès VAREILLES, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Isabelle DELOR, Greffière à la Chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 19 Décembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 17 Janvier 2025.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD, entreprise régie par le Code des assurances au capital de 214.799.030 euros, immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de NANTERRE, sous le n° 722 057 460, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en
cette qualité audit siège social, (ès-qualités d’assureur de la société ARDROM SECURITE),
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Alain DE ANGELIS de la SCP DE ANGELIS-SEMIDEI-VUILLQUEZ-HABART-MELKI-BARDON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉES :
S.A.S. MUTAVEIL, Société par actions simplifiée inscrite au RCS d’AUBENAS sous le numéro 512 749 326, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social
Assignée à personne habilitée en appel provoqué le 07/06/2023
[Adresse 12]
[Adresse 12]
[Localité 10]
Représentée par Me Philippe RECHE de la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Séverine VIELH de la SELARL RONSARD AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. ARDROM SECURITE, SARL inscrite au RCS d’AUBENAS sous le n° 479 553 711, représentée par son Gérant en exercice domicilié en cette qualité en son siège social,
[Adresse 12]
[Adresse 12]
[Localité 10]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Valérie LIOTARD de l’AARPI CAP CONSEIL, Plaidant, avocat au barreau de VALENCE
Association FEDERATION DES CHASSEURS, Association immatriculée au RCS de AUBENAS sous le n° 776256109 , prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représentée par Me Laurette GOUYET POMMARET de la SELARL GOUYET POMMARET – ORARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’ARDECHE
S.A.S. VIGIE DU VAL DE DROME, Société par actions simplifiée, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de AUBENAS, sous le numéro 424 928 083 RCS AUBENAS, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Jean-michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Regis-louis BONNET de la SELAFA SOFIRAL, Plaidant, avocat au barreau de VALENCE
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 05 Décembre 2024
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 17 Janvier 2025,par mise à disposition au greffe de la cour
Vu l’appel interjeté le 22 décembre 2022 par la compagnie d’assurance Axa France Iard à l’encontre du jugement rendu le 29 novembre 2022 par le tribunal de commerce d’Aubenas, dans l’instance n° RG 2020 04350 ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 29 décembre 2023 par l’appelante, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 22 novembre 2024 par la SARL Ardrom sécurité, intimée, appelante incidente, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 22 décembre 2023 par l’association Fédération des chasseurs, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 4 septembre 2023 par la SAS Vigie du val de Drôme, intimée, appelante incidente, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 20 novembre 2024 par la SAS Mutaveil, intimée, appelante incidente, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu l’ordonnance du 24 mai 2024 de clôture de la procédure à effet différé au 5 décembre 2024.
Sur les faits
Le 13 mars 2017, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a conclu avec la société Ardrom System (devenue Ardrom Sécurité) un contrat d’entretien et de maintenance-détection intrusion et vidéo surveillance pour ses locaux situés à [Localité 9]. La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a choisi une option supplémentaire de télésurveillance avec une intervention au coup par coup incluant la remise des clés, la visite du site et la levée de doute intérieur et extérieur.
Suivant contrat du 1er octobre 2012, la société Ardrom System a confié la prestation de télésurveillance à la société Mutaveil. Le même jour, la société Ardrom System a conclu un contrat de sous-traitance ‘intervention et/ou surveillance’ avec la société Vigie de Val de Drôme.
Un incendie est survenu dans la nuit du 24 au 25 juillet 2019 dans les locaux de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche. Il a été revendiqué par un individu se prévalant de la cause animaliste et anti spéciste.
Les locaux étant lourdement endommagés, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a emménagé provisoirement, pendant les travaux de remise en état, dans des locaux pris à bail auprès de la commune de [Localité 11], du 1er août 2019 au 4 novembre 2020.
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a obtenu de son assureur des indemnités destinées à couvrir la réparation de son préjudice matériel (mobilier et immobilier) ainsi que ses frais de relogement.
Le 2 septembre 2019, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a signé avec le délégué du personnel, représentant les salariés, un accord sur l’organisation du temps de travail prévoyant que certains salariés disposeront d’un véhicule professionnel ou que leurs frais kilométriques feront l’objet d’un remboursement mensuel et que l’heure supplémentaire de déplacement engendrée par l’éloignement des locaux dans lesquels l’activité a été transférée provisoirement sera considérée comme du temps de travail.
Sur la procédure
Par exploit du 27 novembre 2020, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a fait assigner la société Ardrom System et son assureur, Axa France Iard, devant le tribunal de commerce d’Aubenas aux fins d’obtenir la résiliation du contrat qui les lie et de se voir indemniser de son préjudice ‘social’.
La société Ardrom System a appelé en cause la société Mutaveil et la société Vigie de Val de Drôme.
Par jugement du 29 novembre 2022, le tribunal de commerce d’Aubenas :
« Déboute la société Ardrom sécurité de sa demande de sursis à statuer,
Prononce la résiliation du contrat conclu le 13 mars 2017 entre la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche et la société Ardrom sécurité devenue Ardrom sécurité,
Condamne in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche la somme de 80.991,20 euros au titre de la perte de chance,
Condamne la société Ardrom sécurité qui succombe, à verser la somme de 2.500,00 euros à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Axa France Iard à relever en garantie la société Ardrom sécurité au titre de son contrat,
Condamne la société Vigie val de Drôme à relever en garantie la société Axa France Iard,
Déboute la société Ardrom sécurité et la société Axa France Iard de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société Mutaveil,
Condamne la société Ardrom sécurité à verser à la société Mutaveil la somme de 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute la société Vigie val de Drôme de ses demandes, fins et conclusions,
Condamne la société Vigie val de Drôme à payer à la société Ardrom sécurité la somme de 1.500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de Ia présente décision,
Déboute les parties de leurs plus amples demandes, fins et conclusions,
Condamne in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard aux entiers dépens d’instance dont ceux de greffe liquides à la somme de 136,58 euros TTC ».
La compagnie d’assurance Axa France Iard a relevé appel de ce jugement pour le voir annuler ou infirmer en qu’il a :
– Débouté la société Ardrom sécurité de sa demande de sursis à statuer,
– Condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie du val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération des chasseurs de l’Ardèche la somme de 80.991,20 euros au titre de la perte de chance,
– Condamné la société Ardrom sécurité qui succombe à verser la somme de 2.500 euros à la Fédération des chasseurs de l’Ardèche au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamné la société Axa France Iard à relever en garantie la société Ardrom sécurité au titre de son contrat,
– Condamné la société Ardrom sécurité à verser à la société Mutaveil la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Débouté la société Axa France Iard de ses plus amples demandes, fins et conclusions,
– Condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard aux entiers dépens d’instance, dont ceux de greffe liquidés à la somme de 136,58 euros TTC.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions, la compagnie d’assurance Axa France Iard, appelante, demande à la cour, au visa de l’article 1231 du code civil, et de l’article 1315 du même code, de :
« Statuant sur l’appel formé par la société Axa France Iard, à l’encontre de la décision rendue le par le tribunal de commerce d’Aubenas,
Le déclarant recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :
– « Déboute la société Ardrom sécurité de sa demande de sursis à statuer,
– Condamne in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie du val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération des chasseurs de la somme de 80.991,20 euros au titre de la perte de chance,
– Condamne la société Ardrom sécurité qui succombe à verser la somme de 2.500,00 euros à la Fédération des chasseurs de l’Ardèche au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamne la société Axa France Iard à relever et garantir la société Ardrom sécurité au titre de son contrat,
– Condamne la société Ardrom sécurité à verser à la société Mutaveil la somme de 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Déboute la société Axa France Iard de ses plus amples demandes, fins et conclusions,
– Condamne in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard aux entiers dépens de l’instance dont ceux de greffe, liquidés à la somme de 136,58 euros TTC. ».
Statuant à nouveau,
A titre principal,
– Constater l’absence de lien de causalité entre les manquements invoqués et les préjudices allégués par la Fédération des chasseurs de l’Ardèche ;
– Débouter, en conséquence, la Fédération de chasseurs de l’Ardèche de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société Axa France Iard.
– Constater l’absence de démonstration par la Fédération de chasseurs de l’Ardèche tant du principe que du montant des préjudices allégués ;
– La débouter, en conséquence et de plus fort, de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société Ardrom sécurité et de la société Axa France Iard.
A titre infiniment subsidiaire,
– Condamner la société Vigie du val de Drôme à relever et garantir indemne la société Axa France Iard, de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et accessoires.
En tout état de cause,
– Juger que toute condamnation qui serait, par impossible, prononcée à l’encontre de la société Axa France Iard ne pourra intervenir que dans les termes et limites des conditions particulières de la police souscrite par la société Ardrom sécurité et s’entendra dans le plafond de garantie prévu et après déduction de la franchise contractuelle opposable aux tiers.
– Condamner la Fédération des chasseurs de l’Ardèche au paiement de la somme de 2.500,00 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens. ».
Au soutien de ses prétentions, la société Axa France Iard, appelante, fait valoir que les manquements allégués à l’encontre de son assurée ne sont pas à l’origine du sinistre survenu le 24 juillet 2019, au préjudice de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche. L’intrusion dans le bâtiment a été immédiatement détectée par le matériel de surveillance mis en ‘uvre par la société Ardrom System. La société Mutaveil, en charge de la télésurveillance, a sollicité l’intervention de la société Vigie de Val de Drôme pour une levée de doute. La société Ardrom System a donc parfaitement rempli les obligations qui étaient les siennes dans le cadre du contrat d’entretien et de maintenance du système de surveillance la liant à la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche. Les pompiers sont intervenus dans la demi-heure qui a suivi le déclenchement de l’incendie. Il n’incombe pas à l’agent de sécurité en charge d’intervenir pour la levée de doute d’éteindre l’incendie, ni même d’appréhender les intrus. Le temps d’intervention de la société Vigie de Val de Drôme sur le site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche est d’environ une heure. Le mode opératoire des auteurs de l’acte criminel rendait vaine toute tentative des intervenants pour circonscrire l’incendie, qu’elles qu’aient pu être les modalités d’intervention de chacun des intervenants. Aucun délai d’intervention sur le site n’est prévu dans le contrat régularisé par les parties.
L’appelante expose que les mesures mises en ‘uvre procèdent d’une volonté de prendre en considération l’impact psychologique de l’agression relevant de la seule volonté de l’employeur. La détermination de l’établissement des locaux temporaires de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche sur la commune de [Localité 11], procède d’un choix délibéré de l’employeur qui avait fait reçu de nombreuses propositions d’hébergement. Les frais dont la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche sollicite aujourd’hui la prise en charge se fondent sa volonté de réparer non pas les conséquences de l’incendie, mais uniquement l’origine criminelle de celui-ci. Avec ou sans intervention de la société Vigie de Val de Drôme, le sinistre aurait eu lieu et ses conséquences auraient été strictement identiques à celles ayant entrainé les surcoûts allégués. La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche ne justifie d’aucune perte de chance en lien avec les manquements qu’elle invoque.
L’appelante fait observer que les salariés concernés par le déplacement des locaux ont bénéficié d’un véhicule professionnel ne justifiant l’octroi d’aucune indemnité kilométrique. Les horaires de travail des six salariés ont été aménagés pour compenser un temps équivalent de travail et permettre de privilégier le télétravail. Il n’est pas tenu compte des périodes de confinement qui ont nécessairement impacté les déplacements des salariés dans le courant de l’année 2020. La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche ne précise pas non plus le sort réservé aux cinq salariés dont le domicile était plus proche des nouveaux locaux et dont le temps de déplacement a, en conséquence, été réduit. La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche ne saurait solliciter le versement d’une indemnité forfaitaire au titre de l’heure supplémentaire.Aucun document objectif et probant ne permet de justifier l’assiette des préjudices.
L’appelante rappelle que toute condamnation qui serait, par impossible, prononcée à son encontre, ne pourra intervenir que dans les termes et limites des conditions particulières de la police d’assurance souscrite par la société Ardrom System.
Dans ses dernières conclusions, l’association Fédération des chasseurs, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1217 et suivants du code civil, de l’article 1103 du code civil, et de l’article 1231-1 du code civil, de :
« A titre principal
Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d’Aubenas le 29 novembre 2022 (RG 2020 004350) en toutes ses dispositions ;
y ajoutant :
Débouter la société Ardrom sécurité, Axa France Iard et la société Vigie de Val de Drôme de toutes leurs demandes contradictoires ;
Condamner la société Ardrom sécurité à verser à la Fédération départementale des chasseur de l’Ardèche la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société Ardrom sécurité aux entiers dépens de l’appel.
A titre subsidiaire (si par extraordinaire la cour réformait la décision de première instance en ne retenant pas la perte de chance) :
Dire et juger que la société Ardrom sécurité a manqué à son obligation contractuelle de résultat en ce qu’elle n’est pas intervenue et n’a pas réalisée de levée de doute intérieur et extérieur sur le site de la Fédération départementale des chasseurs d’Ardèche suite à l’intrusion sur ledit site dans la nuit du 24 au 25 juillet 2019 et partant, le déclenchement des alarmes ;
Et en conséquence,
Prononcer la résiliation du contrat conclu le 13 mars 2017 entre la Fédération départementale des chasseurs d’Ardèche et la société Ardrom system, devenue Ardrom sécurité ;
Condamner la société Ardrom sécurité à verser à la Fédération départementale des chasseurs d’Ardèche la somme de 80 000 euros au titre de son préjudice moral et matériel ;
Condamner la société Ardrom sécurité à verser à la Fédération départementale des chasseurs d’Ardèche la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société Ardrom sécurité aux entiers dépens ;
Débouter la société Ardrom sécurité, Axa France Iard et la société Vigie de Val de Drôme de toutes leurs demandes contradictoires. ».
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche réplique que, malgré le déclenchement des détecteurs de mouvements et de l’alarme incendie, aucune visite du site, ni levée de doute n’ont été réalisées soit par la société Ardrom System elle-même, soit par ses sous-traitants. Ainsi, la responsabilité de la société Ardrom System est pleinement engagée pour avoir manqué à ses obligations contractuelles de résultat. L’option de « télésurveillance » impliquait une visite du site et la levée de doute intérieur et extérieur. La société Mutaveil qui n’avait aucun accès à la vidéo surveillance s’est contentée de contacter la société Vigie de Val de Drôme, en sachant pertinemment que cette dernière n’interviendrait pas. La société Mutaveil n’a pas jugé pertinent d’avertir la la société Ardrom System ainsi que les forces de l’ordre et de secours alors même que l’alarme intrusion et l’alarme incendie avaient été déclenchées. Si aucun délai d’intervention n’est précisé sur le contrat, la télésurveillance implique une immédiateté de l’appel des forces de l’ordre/secours dès détection d’une intrusion/ incendie. Les pompiers n’ont été alertés par des tiers que plus d’une demi-heure après le déclenchement de la première alarme alors même qu’ils auraient pu intervenir rapidement car leur caserne n’est basée qu’à quinze kilomètres du local incendié et qu’ils mettent, bien évidemment, moins de temps que les automobilistes pour se déplacer lorsqu’ils se rendent en intervention.
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche souligne que la société Ardrom System a été avertie par la société Mutaveil, avant l’incendie, que la société Vigie de Val de Drôme ne souhaitait plus intervenir au col de l’Escrinet. Les agents de sécurité de la société Vigie de Val de Drôme auraient pu appréhender les auteurs de l’incendie. Ils auraient également pu tenter d’éteindre le feu avec des extincteurs. L’intervention de la société Vigie de Val de Drôme aurait nécessairement permis de limiter, voire d’empêcher l’incendie.
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche précise que le manquement de la société Ardrom System justifie, par sa gravité, la résiliation judiciaire du contrat aux torts exclusifs de cette dernière. L’inexécution par la société Ardrom System de ses obligations contractuelles lui a fait perdre la chance de maintenir des conditions de travail normales à ses salariés. Un incendie est un dommage parfaitement prévisible pour un contrat visant justement à assurer la surveillance d’un bien. La compagnie d’assurance de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche ne prend aucunement en charge l’aspect social qui est découlé de cet incendie. La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a supporté de lourds frais pour que ses salariés aillent travailler sur le site de Sernin. Elle a pris en charge à la fois l’usure des véhicules professionnels mis à disposition de ses salariés et rémunéré leur temps supplémentaire de trajet comme du temps de travail.
À titre subsidiaire, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche fait valoir qu’elle a découvert avec stupéfaction que son contrat était totalement ineffectif et que son matériel de détection et de vidéo surveillance était inutile. Elle a donc subi un préjudice matériel et moral particulièrement conséquent.
Dans ses dernières conclusions, la société Ardrom sécurité, intimée, appelante incidente, demande à la cour de :
« Sommer la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche de justifier de son dépôt de plainte et de l’état de l’instruction en cours,
Sursoir à statuer dans l’attente de l’issue de la mesure d’instruction en cours,
Recevoir l’appel incident de la société Ardrom sécurité et infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d’Aubenas du 29 novembre 2022, sauf en ce qu’il :
Condamner la société Axa France Iard à relever en garantie la société Ardrom sécurité au titre de son contrat d’assurance dans l’hypothèse où la cour confirmerait le principe de la responsabilité de la société Ardrom sécurité et en ce qu’il a condamné solidairement la société Vigie du val de Drôme à réparer le préjudice et à payer à la société Ardrom sécurité la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.
Infirmer le jugement rendu dans ses autres dispositions, des chefs ayant :
Débouté la société Ardrom sécurité de sa demande de sursis à statuer,
Prononcé la résiliation du contrat conclu le 13 mars 2017 entre la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche et la société Ardrom system devenue Ardrom sécurité,
Condamné in solidum les sociétés Aardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche la somme de 80.991,20 euros au titre de la perte de chance,
Condamné la société Ardrom sécurité qui succombe, à verser la somme de 2.500,00 euros à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Débouté la société Ardrom sécurité et la société Axa France Iard de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société Mutaveil,
Condamné la société Ardrom sécurité à verser à la société Mutaveil la somme de 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,
Débouté la société Ardrom sécurité de ses plus amples demandes, fins et conclusions,
Condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard aux entiers dépens d’instance dont ceux de greffe liquidés à la somme de 136,58 euros TTC,
et juger à nouveau :
Vu les articles 548 et suivants du code de procédure civile,
Voir recevoir la requérante en son appel provoqué à l’encontre de la SAS Mutaveil,
Juger que la société Ardrom sécurité a rempli son obligation de résultat de surveillance à distance du bâtiment, et débouter la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07 de toute demande à ce titre,
Plus subsidiairement, juger l’absence de lien de causalité entre l’absence de déplacement sur site pour une levée de doute et les préjudices allégués par la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07,
Débouter en conséquence la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07 de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions à l’encontre de la société Ardrom sécurité,
Juger que la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07 ne rapporte pas la preuve tant du principe que du montant des préjudices allégués, qu’il s’agisse d’un préjudice social ou moral,
La débouter en conséquence et au plus fort de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions à l’encontre de la société Ardrom sécurité,
À titre subsidiaire,
Condamner la compagnie d’assurance Axa France Iard à relever et garantir la société Ardrom sécurité de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre y compris l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
Juger que la franchise applicable est celle relative à la « RC après livraison des produits ou réception des travaux » à savoir pour les dommages corporels, matériels, et immatériels consécutifs confondus soit 2 200 000 euros par année d’assurance et 10 % par sinistre minimum soit 800 euros minimum et 3000 euros maximum.
Juger que la société Mutaveil a manqué à ses obligations contractuelles et notamment aux stipulations de l’article 5.2.5 et 5.2.4 du contrat de sous-traitance
Par voie de conséquence,
Condamner la société Mutaveil à relever et garantir la société Ardrom sécurité de l’intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées y compris au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
Vu le contrat de sous-traitance signé avec la société Vigie du val de Drôme,
Vu la discordance des mentions manuscrites portées sur les conditions particulières,
Juger que seules les conditions particulières non modifiées de façon manuscrite sont valables,
Par voie de conséquence,
Juger que faute de dénonciation par lettre recommandée avec avis de réception, le contrat de sous-traitance signé entre la société Vigie du val de Drôme et la société Ardrom sécurité venant aux droits de la société Ardrom system est toujours en cours,
Juger que l’absence d’intervention de la société Vigie du val de Drôme lors du sinistre constitue un manquement à ses obligations contractuelles,
Condamner la société Vigie du val de Drôme à relever et garantir la société Ardrom sécurité de l’intégralité des condamnations mises à sa charge y compris l’article 700 du nouveau code de procédure civile,
Dans l’hypothèse où la cour jugeait qu’aucun manquement contractuel de la société Ardrom sécurité ne peut être caractérisé,
Condamner la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07 à relever et garantir la société Ardrom sécurité de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au titre de l’article 700 telle que sollicitée par la société Mutaveil et la société Vigie du val de Drôme,
Condamner in solidum la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07, la société Mutaveil et la société Vigie du val de Drôme à payer la somme de 5 000 euros à la société Ardrom sécurité au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.
En tout état de cause,
Débouter la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche 07, la SA Axa France Iard, la Vigie du val de Drôme, la société Mutaveil de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, outre appel incident à l’encontre de la concluante. ».
La société Ardrom System, intimée, rétorque que le matériel de détection d’inclusion dans le bâtiment a été efficace. La prestation principale était d’assurer la surveillance du bâtiment et non pas de procéder à une levée de doute si aucun doute ne subsistait quant à une intrusion et/ou à un début d’incendie. C’est cette obligation qui doit être qualifiée d’obligation de résultat et non la levée de doute qui vise à vérifier et confirmer l’origine d’une alerte. Le système de télésurveillance a parfaitement fonctionné et il n’y avait pas de doute sur l’intrusion d’individus et le déclenchement concomitant de l’incendie. Il n’existe aucune obligation contractuelle faite à la société Ardrom System d’intervenir dans un délai maximal sur site, l’objectif de l’intervention étant de faire une levée de doute et son rôle n’était pas d’alerter les pompiers. Le déplacement de la société Vigie de Val de Drôme n’aurait pas eu d’impact sur le préjudice lié à l’incendie, dans la mesure où l’incendie était volontaire et s’est déclenché concomitamment à l’intrusion des individus dans le bâtiment. Si la société Vigie de Val de Drôme s’était déplacée, elle serait arrivée après l’intervention des pompiers qui étaient sur place dans la demi-heure qui a suivi le déclenchement de l’incendie. Il n’y a donc aucun lien de causalité entre le préjudice et le prétendu manquement contractuel. Il appartient à la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche de justifier de l’issue de l’enquête ouverte par la gendarmerie d'[Localité 5], suite à la plainte qu’elle a déposée.Un sursis à statuer est demandé dans la mesure où l’action pénale en cours peut révéler des informations sur le mode opératoire de l’incendiaire et, de fait, démontrer que la levée de doute n’aurait eu aucun impact sur l’incendie du bâtiment.
La société Ardrom System indique que la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche ne peut pas lui faire supporter les conséquences d’un accord dérogeant au droit commun qu’elle a pris pour tenter de réparer non pas les conséquences de l’incendie mais la cause de l’incendie, à savoir le caractère criminel de celui-ci. Les fiches de paie versées au débat ne permettent pas de démontrer la réalité des surcoûts. Le poste des indemnités kilométriques est d’autant plus critiquable, que la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a reconnu que des véhicules professionnels ont été mis à disposition des salariés pour effectuer les trajets entre leur domicile et le lieu de travail. En outre, le calcul forfaitaire ne prend pas en compte les périodes de congés, de télétravail, d’arrêt maladie. La société Ardrom System ne saurait être condamnée à réparer un préjudice moral alors que le système de détection incendie a parfaitement fonctionné et que l’incendie est d’origine criminel.
La société Ardrom System précise que la demande de résiliation du contrat n’est pas fondée dans la mesure où elle n’a pas manqué à son obligation de résultat.
À titre subsidiaire, la société Ardrom System expose que la société Vigie de Val de Drôme ne s’est pas déplacée, méconnaissant de fait ses obligations contractuelles. La société Vigie de Val de Drôme a été parfaitement identifiée comme mandatée pour intervenir sur le site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche. L’ensemble des instructions avaient été données quant à l’adresse du site, la personne à contacter chez la société Vigie de Val de Drôme, notamment le numéro de téléphone portable de la personne à joindre. Ce type d’information ne peut pas été obtenu sans validation de la société Vigie de Val de Drôme. Cette dernière était intervenue sur le site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche en avril et mai 2019.
La société Ardrom System indique que la franchise applicable en exécution de la garantie due par Axa France est celle relative à la « RC après livraison des produits ou réception des travaux » à savoir pour les dommages corporels, matériels, et immatériels consécutifs confondus soit 2 200 000 euros par année d’assurance et 10 % par sinistre minimum soit 800 euros minimum et 3000 euros maximum.
La société Ardrom System reproche à la société Mutaveil de n’avoir pris aucune mesure concomitamment au refus d’intervention de la société Vigie de Val de Drôme, alors que conformément à l’article 5.2.5 du contrat, elle aurait dû l’en informer immédiatement, voir procéder à l’appel des forces de l’ordre ou de secours. Le mail du 24 juillet 2019 n’est pas suffisant pour démontrer que, le jour du sinistre, la société Mutaveil a informé la société Ardrom System de la défectuosité du système de videosurveillance. La retranscription d’un échange téléphonique qui est versée au débat devra être écartée, faute pour la société Mutaveil de rapporter la preuve de son caractère authentique et légal. La circulaire du 25 mars 2015 démontre que la société Mutaveil aurait du alerter les forces de l’ordre.
Dans ses dernières conclusions, la société Mutaveil, intimée, appelante incidente, demande à la cour, au visa de l’article 1231-1 du code civil, de :
« – Confirmer le jugement rendu le 29 novembre 2022 par le tribunal de commerce d’Aubenas, RG n°2020 004350 en ce qu’il a :
Débouté la société Ardrom sécurité et la société Axa France Iard de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société Mutaveil ;
Condamné la société Ardrom sécurité à verser à la société Mutaveil la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard aux entiers dépens d’instance dont ceux de greffe liquidé à la somme de 136, 58 euros TTC.
Subsidiairement, et dans l’éventualité où une faute serait retenue à l’encontre de la société Mutaveil :
– Infirmer le jugement rendu le 29 novembre 2022 par le tribunal de commerce d’Aubenas RG n° 2020 00450 en ce qu’il a
– Condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération départementale des chasseurs d’Ardèche la somme de 80.991, 20 euros au titre de la perte de chance,
En conséquence et statuant à nouveau :
– Débouter la société Ardrom sécurité et la société Axa France Iard de toutes leurs demandes à l’encontre de la société Mutaveil.
– Débouter la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche de sa demande d’indemnisation à hauteur de 80.911, 20 euros à titre de la perte de chance.
– Fixer le préjudice subi par la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche à de plus juste proportions
– Condamner la société Ardrom et Axa Farnce Iard à payer à la société Mutaveil la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– Condamner la société Ardrom et Axa France Iard aux entiers dépens dont recouvrement en application de l’article 699 du code de procédure civile en faveur de la SELARL Chabanes Reche Banuls ».
La société Mutaveil réplique qu’elle n’a commis aucune faute dans le cadre de la mission confiée. Conformément aux consignes données par la société Ardrom System, elle a sollicité la société Vigie de Val de Drôme, à plusieurs reprises, la nuit du sinistre. Aucune levée de doute n’ayant pu être effectuée, la société Mutaveil ne pouvait pas appeler les forces de l’ordre ou de secours. Elle ne pouvait pas non plus contacter la
1) Sur la demande de sursis à statuer
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche verse au débat une copie de de son dépôt de plainte du 26 juillet 2019 et de la procédure pénale ayant donné lieu à un classement sans suite par le Parquet, le 18 avril 2020.
Dès lors, c’est à bon droit que les premiers juges ont débouté la société Ardrom System de sa demande de sommation de communication de pièces devenue sans objet et de sa demande de sursis à statuer, non conforme à l’intérêt d’une bonne administration de la justice.
2) Sur la responsabilité contractuelle de la société Ardrom System
En l’occurrence, la détection de l’intrusion grâce au système d’alarme mis en place a bien fonctionné puisque les douze détecteurs présents dans les locaux de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche se sont déclenchés en moins de trois minutes, à la suite de l’incendie volontaire du 25 juillet 2019. En revanche, la société Ardrom System n’a pas rempli son obligation de résultat de procéder à une levée de doute et à une visite du site. En effet, il résulte de l’historique fourni par la société Mutaveil que le système de vidéo a été inutilisable du fait de la coupure d’électricité provoquée par l’incendie mais que, pour autant, aucun déplacement sur le site n’a eu lieu.
La société Ardrom System fait valoir qu’aucun délai d’intervention n’a été défini contractuellement. Cependant, elle s’est vantée sur son site interne d’offrir un accompagnement réactif et efficace avec un service d’astreinte effectif dès lors que l’entreprise est fermée, y compris les soirs et week-end, afin d’offrir une qualité de service optimale. Il est donc incontestable que la société Ardrom System s’est engagée à intervenir dans les plus brefs délais, faute de quoi ses services auraient été dénués de toute efficacité et de tout intérêt.
La société Ardrom System ne saurait s’exonérer de sa responsabilité en invoquant la carence de ses sous-traitants dont elle doit répondre vis à vis de sa cocontractante qu’est la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche. Il ressort d’ailleurs des stipulations du contrat conclu avec la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche que la société Ardrom System s’est obligée à apporter tous les soins et toutes les diligences nécessaires à l’exécution des services choisis et à y affecter le personnel nécessaire et qualifié. Or, elle a été avisée par message électronique du 21 juillet 2019 de la société Mutaveil de ce que la société Vigie de Val de Drôme refusait d’intervenir sur le site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche. Il lui appartenait donc de résoudre immédiatement la difficulté, de donner des consignes claires à la société Mutaveil et de s’assurer que la société Vigie de Val de Drôme allait assurer effectivement la prestation confiée.
De plus, en sous-traitant la prestation de visite du site à une société éloignée géographiquement qui ne pouvait pas se rendre sur place avant au moins 54 minutes, la société Ardrom System n’a pas mis en place un dispositif efficace répondant aux promesses faites à sa cliente de lui offrir un accompagnement réactif en matière de sécurité.
Au vu de la gravité des manquements contractuels de la société Ardrom System, le prononcé de la résiliation du contrat conclu le 13 mars 2017 avec la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche est justifié et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Il n’est pas contesté que la première alarme s’est déclenchée le 25 juillet 2019 à 3 heures 02, la deuxième à 3 heures 04 et l’alarme incendie à 3 heures 05. Il résulte de la procédure pénale que les pompiers d'[Localité 5] ont été avisés à 3 heures 28 par un tiers; la caserne étant située à 15 kilomètres du lieu du sinistre et il leur a fallu au moins 18 minutes pour venir sur les lieux. Ils sont donc intervenus au mieux à 3 heures 46.
Si la société Ardrom System avait correctement rempli ses obligations en sous-traitant la prestation de levée de doute à une société susceptible de se rendre rapidement sur les lieux, les pompiers auraient pu être avisés avant 3 heures 28 et intervenir plus rapidement que ce qu’ils ont fait pour tenter de circonscrire l’incendie. En raison des manquements de la société Ardrom System, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a donc perdu la chance de voir limiter l’étendue de l’incendie et la durée du déménagement dans d’autres locaux pendant les travaux de remise en état.
En revanche, même si les agents de sécurité de la société Vigie de Val de Drôme s’étaient déplacés au siège de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche dès le déclenchement de l’alarme incendie, ils n’auraient pas interpellé l’auteur qui a immédiatement pris la fuite, par une sortie de secours après son méfait, et il n’entrait pas dans leur mission de tenter d’éteindre l’incendie violent avec des extincteurs, au péril de leur vie ; leur rôle aurait été limité à l’appel des pompiers qui seraient arrivés avec un délai incompressible de 18 minutes.
Les constatations techniques ont mis en évidence deux départs de feu et l’individu qui a revendiqué en être l’auteur a indiqué avoir positionné des tables, chaises et cartons pour les faire brûler ; il a utilisé de l’essence comme accélérateur de sorte que le feu s’est propagé très rapidement et qu’il a fallu plusieurs heures pour que les pompiers en viennent à bout vers 7 heures du matin. Dans ces circonstances, la perte de chance de voir réduire l’étendue de l’incendie et donc des dommages si les pompiers avaient été prévenus un peu plus tôt doit être évaluée à 20 %. Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche la somme de 80.991,20 euros au titre de la perte de chance.
Aux termes de l’article 1231-3 du code civil, le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l’inexécution est due à une faute lourde ou dolosive.
Il n’était nullement imprévisible, lors de la conclusion du contrat de détection intrusion et vidéo surveillance, que les locaux concernés fassent l’objet d’actes de malveillance aboutissant à leur destruction et donc au transfert provisoire de l’activité de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche sur un autre site, aboutissant ainsi à la dégradation temporaire des conditions de travail des salariés.
Dans un courrier électronique adressé le 19 août 2019, le médecin du travail a recommandé au président de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche de prendre en compte dans l’organisation du travail (modification des horaires, télétravail…) l’impact du déplacement géographique des locaux sur une partie de l’effectif, l’allongement des temps de trajet retentissant fortement sur la vie personnelle et familiale des salariés. Le ‘préjudice social’ invoqué ne résulte donc pas d’une initiative arbitraire du dirigeant de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche mais de sa décision légitime de prendre des mesures afin de limiter les conséquences du sinistre sur la santé de ses salariés en signant le 2 septembre 2019 un accord avec le délégué du personnel sur l’organisation du temps de travail. Ce ‘préjudice social’ qui est réparable aurait existé quand bien même l’incendie n’aurait pas été criminel mais accidentel puisqu’il aurait également impliqué un déplacement temporaire de l’activité dans un autre site.
Il n’est pas démontré que la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche aurait été en mesure de trouver d’autres locaux disponibles, adaptés à son activité et à moindre distance de [Localité 9] que ceux donnés à bail par la commune de [Localité 11].
3) Sur l’étendue du préjudice
L’accord conclu le 2 septembre 2019 concerne six salariés domiciliés dans le bassin de [Localité 8]
pour lesquels il a été convenu que l’heure supplémentaire de déplacement engendrée par l’éloignement des locaux dans lesquels l’activité a été transférée provisoirement serait considérée comme du temps de travail. L’accord prévoit également que quatre d’entre eux disposeront d’un véhicule professionnel et que, pour les deux autres, leurs frais kilométriques feront l’objet d’un remboursement mensuel.
Le temps de trajet
Que les salariés domiciliés dans le bassin de [Localité 8] disposent ou non d’un véhicule professionnel, il a été décidé que la durée supplémentaire de trajet d’une heure par jour de travail serait imputée sur le temps de travail.
Pour évaluer son préjudice, la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche verse au débat les bulletins de paie des salariés concernés ainsi qu’une attestation de son expert-comptable confirmant que le coût horaire retenu correspond bien aux salaires bruts chargés sur douze mois, proratisés et ramenés à l’heure.
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche effectue des calculs sur une base de 21 jours de travail par mois et par salarié et donc de 21 heures par mois et par salarié, rémunérées sans contrepartie de travail. Ce calcul n’est valable que pour les quatre agents techniques qui ont travaillé durant cinq jours par semaine sur le nouveau site et non pas pour les deux agents administratifs qui ont bénéficié d’aménagements pour limiter les déplacements.
En effet, il résulte de l’accord conclu le 2 septembre 2019 que Madame [P] a travaillé sur le site de [Localité 11], durant quatre jours par semaine; elle a donc effectué 16,8 heures par mois au lieu de 21, rémunérées sans contrepartie de travail.
De même, Madame [L] a bénéficié d’horaires aménagés dans les locaux de [Localité 11], durant trois jours par semaine; elle a donc effectué 12,6 heures par mois au lieu de 21, rémunérées sans contrepartie de travail.
Chaque salarié bénéficie de 2,5 jours de congés par mois qui doivent être retranchés. Il convient, par conséquent, d’arrêter le préjudice résultant du temps de trajet de la manière suivante :
-pour Monsieur [G] : 18,5X 40 euros = 740 euros
-pour Monsieur [N]: 18,5X49 euros = 906,50 euros
-pou Monsieur [W] : 18,5X 30 euros = 555 euros
-pour Monsieur [S] : 18,5 X 38 euros = 703 euros.
-pour Madame [P] : 14,3 X 24 euros = 343,20 euros
-pour Madame [L] : 10,1 X 25 euros = 252,50 euros,
soit 3500,20 euros par mois.
Le total mensuel de 4 326 euros qui figure dans le tableau dressé par la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche sera donc ramené à 3 500,20 euros s’agissant de la compensation du temps de trajet. La durée de 14 mois sera réduite à 12 mois pour tenir compte du premier confinement de l’année 2020 pendant lequel les salariés ne se sont pas rendus sur leur lieu de travail. Il s’en suit un préjudice total de 42 002,40 euros.
Les frais kilométriques
Les quatre agents techniques ont utilisé les véhicules de service pour effectuer les trajets entre leur domicile et leur lieu de travail tandis que les deux agents administratifs se sont vus rembourser les frais kilométriques exposés avec leurs véhicules personnels.
La fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche a évalué, à juste titre, son préjudice sur la base du barème fiscal intégrant la dépréciation des véhicules, les frais de réparation et d’entretien, les dépenses de pneumatiques, la consommation de carburant.
Pour les quatre agents techniques, le nombre d’heures par mois sera ramené à 18,5 au lieu de 21 pour tenir compte des congés payés. Il s’en suit un coût de 2 052,58 euros par mois.
Pour les deux agents administratifs qui ont covoituré, le nombre d’heures par mois sera ramené à 14,3 au lieu de 21 pour tenir compte du télétravail et des congés payés. Il s’en suit un coût de 389,78 euros par mois.
Au total, les frais kilométriques exposés s’élèvent à 2 442,36 euros par mois, soit à 29 308,32 euros sur la période considérée ramenée à douze mois, compte-tenu du premier confinement de 2020.
Le préjudice global résultant du temps de trajet et des frais kilométriques sera donc arrêté à 71 310,72 euros. Eu égard à la perte de chance évaluée à 20%, la société Ardrom System sera condamnée à verser à la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche la somme de 14 262,14 euros.
4) Sur les appels en garantie
L’appel en garantie dirigé contre la société Mutaveil
La société Ardrom System invoque à l’encontre de la société Mutaveil le non respect des stipulations des articles 5.2.4 et 5.2.5 du contrat de sous-traitance signé le 1er octobre 2012 et lui reproche de ne pas l’avoir prévenue ou de ne pas avoir prévenu les pompiers.
Pour prouver qu’elle a appelé, lors du déclenchement de l’alarme incendie, le technicien d’astreinte de la société Ardrom System pour l’informer de la situation et lui demander s’il détenait le numéro de téléphone d’un responsable de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche à prévenir, la société Mutaveil verse au débat une retranscription d’enregistrement audiovisuel d’une conversation téléphonique; toutefois, il est impossible d’authentifier le jour et l’heure de l’appel et l’identité les interlocuteurs; ce document ne constitue donc pas un élément probant.
L’article 5.2.4 impose au sous-traitant de respecter scrupuleusement les modalités (et éventuellement les délais) d’exécution de la prestation, telles qu’elles ont été déterminées en accord avec lui et dont le détail est mentionné à l’article 5.1. Toutefois, il lui incombe compte tenu de sa compétence et de sa connaissance des règles de l’art, d’aviser le titulaire du marché de toutes défectuosités, insuffisances anomalies etc., qu’il relèverait et qui auraient des conséquences éventuellement défavorables sur la bonne exécution de la prestation.
L’article 5.2.5 prévoit que le sous-traitant s’oblige à informer immédiatement le titulaire du marché de toute incapacité à exercer la prestation ou tout retard dans l’accomplissement de celle-ci, sans préjudice des conséquences de sa défaillance qui pourront lui être opposées. En cas de défaillance de sa station principale de [Localité 10], la continuité de la gestion des alarmes d’effectuera sur la station de secours du sous-traitant.
Ces stipulations sont d’ordre général et tendent à ce que le sous-traitant prévienne le donneur d’ordre des difficultés matérielles qui seraient susceptibles d’entraver le bon exercice de sa mission.
La société Mutaveil a respecté ses obligations en avisant son donneur d’ordre le 21 juillet 2019 de ce qu’en cas d’intrusion ou d’incendie le week-end ou la nuit, il n’y avait aucun responsable de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche à appeler et que la société Vigie de Val de Drôme ne voulait plus se rendre au col de l’Escrinet. Or, si la société Ardrom System fait observer que l’incendie ne s’est pas produit durant un week-end, il est bien survenu durant la nuit de sorte que la société Ardrom System a bien été informée à l’avance que la société Mutaveil serait dans l’impossibilité de joindre un interlocuteur pour faire la levée de doute. La société Ardrom System n’a pas répondu à la société Mutaveil qui lui demandait ce qu’elle devait faire en cas d’alarme incendie (prévenir les pompiers ou au contraire, ne rien faire ‘).
L’article 5.1 du contrat de sous-traitance ‘détail des modalités d’exécutions et/ou consignes’ renvoie à la fiche de consignes. Ce sont bien les consignes spécifiques et particulières contenues dans cette fiche que la société Mutaveil devait suivre en cas de déclenchement d’une alarme ; elles prévalent sur les autres stipulations plus générales du contrat.
L’alarme s’étant déclenchée dans au moins deux zones différentes, les consignes données à la société Mutaveil étaient de faire une levée de doute vidéo et d’envoyer la société Vigie de Val de Drôme en intervention en utilisant les numéros spécifiques pour le secteur.
L’électricité étant coupée du fait de l’incendie survenu le 25 juillet 2019, la société Mutaveil a été dans l’impossibilité de faire une levée de doute vidéo ; en produisant l’historique des événements de la nuit, elle justifie avoir exécuté ses obligations en contactant la société Vigie de Val de Drôme ainsi qu’en appelant la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche au numéro de téléphone fixe mentionné dans la fiche de consignes. Aucune faute de la société Mutaveil n’est donc caractérisée puisque les consignes particulières qui lui ont données par la société Ardrom System ne contenaient pas celle de prévenir cette dernière en cas de déclenchement des alarmes dans deux zones différentes.
Aux termes de l’article L.613-6 du code de la sécurité intérieure, est injustifié tout appel des services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale par les personnes physiques ou morales exerçant des activités de surveillance à distance des biens meubles ou immeubles qui entraîne l’intervention indue de ces services, faute d’avoir été précédé d’une levée de doute consistant en un ensemble de vérifications, par ces personnes physiques ou morales, de la matérialité et de la concordance des indices laissant présumer la commission d’un crime ou délit flagrant concernant les biens meubles ou immeubles.
L’autorité administrative peut prononcer à l’encontre des personnes physiques ou morales mentionnées à l’alinéa précédent qui appellent sans justification les services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale une sanction pécuniaire d’un montant qui ne peut excéder 450 euros par appel injustifié.
La circulaire INTD1502555C du ministre de l’intérieur du 26 mars 2015 confirme qu’en raison de l’extrême sensibilité des détecteurs utilisés pour les systèmes d’alarmes ‘passifs’ engendrant de nombreux déclenchements intempestifs, la levée de doute pourrait répondre à la procédure suivante : en l’absence d’images non équivoques, si les tentatives de prise de contact avec le client se soldent par un échec, il appartient à l’entreprise de surveillance de réaliser une vérification effective des causes du déclenchement des détecteurs par au moins deux éléments parmi les suivants : images, vidéo, écoute des sons, interaction phonique, concordance entre différentes alarmes ou en l’absence d’éléments concordants apparaissant à l’usage de ces procédés par l’envoi d’un agent sur place.
Or, en l’espèce, la levée ne pouvait être réputée effectuée alors qu’il n’y avait pas deux éléments concordants, en l’absence d’images ou de sons issus de la vidéosurveillance.
La société Mutaveil qui a été dans l’impossibilité matérielle, en raison de la coupure d’électricité et du refus de la société Vigie de Val de Drôme de se déplacer, de procéder à une levée de doute s’exposait à des sanctions si elle faisait appel aux forces de l’ordre ou aux services de secours. Elle n’a donc commis aucune faute.
Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes formées à l’encontre de la société Mutaveil.
L’appel en garantie dirigé contre la société Vigie de Val de Drôme
La société Vigie de Val de Drôme ne se prévaut plus de la stipulation écrite mentionnant que le contrat aurait été conclu pour un « an renouvelable 2 fois » et ne conteste plus être liée contractuellement à la société Ardrom System.
Le jugement critiqué sera confirmé en ce qu’il a déclaré recevable l’action en intervention forcée dirigée à l’encontre de la société Vigie de Val de Drôme par la société Ardrom System qui avait bien intérêt à l’appeler en cause.
La demande de production forcée de pièces formée par la société Vigie de Val de Drôme sera rejetée dans la mesure où il n’est pas justifié que la société Ardrom System détienne un ordre de mission, un document restranscrivant des consignes spécifiques, des factures, documents comptables concernant le site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche.
Le contrat de sous-traitance du 1er octobre 2012 renvoie aux conditions particulières en ce qui concerne les sites faisant l’objet du contrat. Les conditions particulières précisent que les services de la société Vigie de Val de Drôme se rendront sur site suivant ordre de mission écrit et transmis par la société Ardrom System comprenant l’adresse d’intervention (coordonnées GPS, la qualification du personnel demandé, l’effectif, la fréquence et l’horaire d’intervention, la durée de la mission). Or, aucun ordre de mission n’est versé au débat s’agissant du site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche qui n’a été confié à la société Ardrom System qu’en 2017 alors que le contrat de sous-traitance avec la société Vigie de Val de Drôme était déjà en cours.
La société Ardrom System ne communique pas de factures émanant de la société Vigie de Val de Drôme ou des paiements effectués à cette dernière au cours des années 2017 à 2019; la société Ardrom System ne fournit pas non plus des instructions écrites qu’elle aurait données à la société Vigie de Val de Drôme pour effectuer sa prestation de service, comme prévu aux conditions générales du contrat.
Cependant, la société Ardrom System avait communiqué à la société Mutaveil, son autre sous-traitant, le nom et le numéro de téléphone portable d’une personne à joindre de la société Vigie de Val de Drôme. Surtout, il résulte des fiches d’intervention versées au débat que la société Vigie de Val de Drôme s’était rendue, à deux reprises, en avril et mai 2019 sur le site de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche, sans ordre de mission signé. De plus, dans son message électronique du 21 juillet 2019, la société Mutaveil avait avisé la société Ardrom System de ce que la société Vigie de Val de Drôme ne voulait plus intervenir, ce qui sous-entendait qu’elle couvrait bien le site auparavant.
Si la société Vigie de Val de Drôme avait rempli sa mission d’intervention et de levée de doute, elle ne serait pas arrivée sur le site avant 54 minutes au moins, à partir de la ville de départ la plus proche de [Localité 7] qu’elle propose dans son offre de services ; elle n’aurait donc pas pu prévenir les pompiers avant 4 heures du matin, soit bien après que ceux-ci aient été appelés par un passant. L’intervention de la société Vigie de Val de Drôme n’aurait donc pas permis une meilleure prise en charge du sinistre. Il s’en suit que le refus fautif d’intervention de la société Vigie de Val de Drôme n’a pas contribué à la survenance du dommage.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a condamné Ia société Vigie val de Drôme à relever en garantie la société Axa France Iard et à payer à la société Ardrom System une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile .
La garantie due par l’assureur de la société Ardrom System
La société Axa France Iard doit sa garantie, dans les termes et limites des conditions particulières de la police souscrite par la société Ardrom sécurité. Il convient d’appliquer la franchise contractuelle opposable aux tiers, prévue dans le cadre de la garantie responsabilité civile après livraison des produits ou réception des travaux, de 10 % par sinistre avec un minimum de 800 euros et un maximum de 3 000 euros.
Le jugement critiqué sera donc confirmé en ce qu’il a condamné la société Axa France Iard à relever et garantir la société Ardrom System sauf à préciser que la garantie sera dans les termes et limites des conditions particulières de la police souscrite par la société Ardrom sécurité, soit dans le plafond de garantie prévu et avec application de la franchise susvisée.
5) Sur les frais du procès
La société Ardrom System qui est responsable du préjudice subi par la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile mais uniquement en faveur de la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche et de lui allouer une indemnité de 2 500 euros, à ce titre.
LA COUR,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard à payer à la Fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche la somme de 80.991,20 euros au titre de la perte de chance, condamné la société Vigie val de Drôme à relever en garantie la société Axa France Iard, condamné la société Vigie val de Drôme à payer à la société Ardrom sécurité la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamné in solidum les sociétés Ardrom sécurité, Vigie val de Drôme et Axa France Iard aux entiers dépens d’instance dont ceux de greffe liquides à la somme de 136,58 euros TTC,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne la société Ardrom System à verser à la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche la somme de 14 262,14 euros en réparation de son préjudice,
Déboute la société Ardrom System et Axa France Iard de leur demande de garantie à l’encontre de la société Vigie de Val de Drôme,
Y ajoutant,
Dit que la garantie due par la société Axa France Iard à la société Ardrom System sera dans les termes et limites des conditions particulières de la police souscrite par la société Ardrom sécurité, dans le plafond de garantie prévu et après déduction de la franchise contractuelle prévue dans le cadre de la garantie responsabilité civile après livraison des produits ou réception des travaux, de 10 % par sinistre avec un minimum de 800 euros et un maximum de 3 000 euros,
Déboute la société Vigie de Val de Drôme de sa demande de production forcée de pièces par la société Ardrom System,
Condamne la société Ardrom System aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction pour ceux d’appel au profit de l’avocat de la société Mutaveil, qui en a fait la demande, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne la société Ardrom System à payer à la fédération départementale des chasseurs de l’Ardèche une indemnité de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Déboute les autres parties de leur demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile .
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
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