L’Essentiel : La société BRG Habitat a été engagée pour réaliser un ravalement et une isolation thermique extérieure de la maison de M. et Mme [B], achevés en juin 2016. En février 2018, des taches noires sont apparues, entraînant des courriers restés sans réponse. Après une expertise judiciaire ordonnée en 2019, le tribunal a condamné BRG Habitat à verser des indemnités pour préjudice matériel et moral en janvier 2022. BRG Habitat a interjeté appel, contesté sa responsabilité et appelé en garantie Millennium Insurance Company, qui a également demandé des modifications du jugement. La cour a confirmé la responsabilité de BRG Habitat.
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Contexte des TravauxLa société BRG Habitat a été engagée par M. et Mme [B] pour réaliser un ravalement et une isolation thermique extérieure de leur maison, selon un devis accepté le 26 avril 2016. Les travaux ont été facturés à 13 678,32 euros TTC et ont été achevés le 7 juin 2016. BRG Habitat est assurée par Millennium Insurance Company. Apparition des DésordresLe 15 février 2018, M. et Mme [B] ont signalé l’apparition de taches noires sur l’extérieur de leur maison, mais leurs courriers ont été retournés avec la mention « destinataire inconnu » pour BRG Habitat et « pli avisé et non réclamé » pour Millennium Insurance Company. Après avoir obtenu un accusé de réception, ils ont renouvelé leur plainte le 24 mars 2018. Procédure JudiciaireLe 6 février 2019, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire, et le 15 juillet 2020, cette expertise a été étendue à Millennium Insurance Company. Le rapport de l’expert a été déposé le 25 novembre 2020. M. et Mme [B] ont assigné BRG Habitat et Millennium Insurance Company en janvier 2021 pour obtenir réparation de leurs préjudices. Jugement du TribunalLe tribunal judiciaire de Meaux a rendu son jugement le 6 janvier 2022, condamnant BRG Habitat à verser 28 743,12 euros pour préjudice matériel et 1 500 euros pour préjudice moral, tout en rejetant les demandes contre Millennium Insurance Company pour le préjudice matériel. Le tribunal a également statué sur les dépens et l’exécution provisoire. Appel de la Société BRG HabitatLe 2 mars 2022, BRG Habitat a interjeté appel du jugement, demandant l’infirmation de la décision et contestant sa responsabilité. Elle a également appelé en garantie Millennium Insurance Company pour toute condamnation éventuelle. Prétentions des PartiesBRG Habitat a demandé l’infirmation du jugement et le déboutement de M. et Mme [B]. En revanche, M. et Mme [B] ont demandé la confirmation du jugement et la condamnation solidaire de BRG Habitat et Millennium Insurance Company pour des frais de procédure. Millennium Insurance Company a demandé la confirmation du jugement en ce qui concerne le préjudice matériel et l’infirmation pour le reste. Motivations de la CourLa cour a examiné la responsabilité de BRG Habitat, concluant que les désordres étaient dus à une exécution défectueuse des travaux. Elle a confirmé le préjudice matériel et moral des époux [B], tout en rejetant les demandes de BRG Habitat concernant la garantie de Millennium Insurance Company. Décisions de la CourLa cour a infirmé certaines parties du jugement initial, notamment en ce qui concerne le préjudice moral et la garantie de Millennium Insurance Company. Elle a condamné BRG Habitat aux dépens et a statué sur les frais de procédure, tout en rejetant les demandes de la société BRG au titre de l’article 700 du code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la responsabilité de la société BRG Habitat dans le cadre des travaux réalisés ?La responsabilité de la société BRG Habitat est de nature contractuelle, comme le stipulent les articles 1134 et 1147 du Code civil. Ces articles précisent que : – **Article 1134** : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. » – **Article 1147** : « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée. » Ainsi, la société BRG Habitat est tenue d’une obligation de résultat et ne peut s’exonérer de sa responsabilité qu’en prouvant une cause étrangère, comme la force majeure ou le fait d’un tiers. Dans cette affaire, les juges ont constaté que les désordres étaient dus à une exécution matérielle mal réalisée, ce qui engage la responsabilité contractuelle de la société BRG Habitat envers M. et Mme [B]. Les préjudices matériels et moraux des époux [B] sont-ils justifiés ?Les préjudices matériels et moraux des époux [B] ont été examinés par le tribunal, qui a confirmé leur existence. Concernant le préjudice matériel, le tribunal a statué que : – Les époux [B] ont subi un préjudice matériel de 28 743,12 euros, qui a été discuté devant l’expert et n’est pas contesté en appel. Pour le préjudice moral, la cour a rappelé que : – Le préjudice moral doit réparer le préjudice personnel des époux [B], qui ont été déçus par les travaux réalisés et ont dû faire face à des désagréments liés à l’apparition des taches. La cour a donc confirmé que les premiers juges avaient fait une juste appréciation du préjudice moral, même si celui-ci était de nature esthétique, en tenant compte des désagréments subis par les époux [B]. La société Millennium Insurance Company peut-elle opposer sa franchise contractuelle aux époux [B] ?La cour a décidé que la société Millennium Insurance Company ne pouvait pas opposer sa franchise contractuelle aux époux [B]. Cette décision repose sur le fait que : – Les conditions générales de la police d’assurance précisent que seuls les dommages immatériels consécutifs et non consécutifs sont garantis, mais le préjudice moral des époux [B] ne rentre pas dans cette catégorie. En conséquence, la cour a infirmé le jugement des premiers juges sur ce point, statuant que la franchise n’était pas opposable aux époux [B] en raison de l’absence de garantie pour le préjudice moral. La demande d’appel en garantie de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company est-elle recevable ?La demande d’appel en garantie de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company a été jugée irrecevable. Selon l’article 564 du Code de procédure civile : – « À peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers. » La société BRG Habitat n’ayant pas formulé de demande de garantie en première instance, sa demande en appel constitue une nouvelle prétention, ce qui la rend irrecevable. Ainsi, la cour a décidé de ne pas statuer sur le fond de la demande de garantie de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company. |
AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 6
ARRÊT DU 10 JANVIER 2025
(n° /2025, 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/04754 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFM3J
Décision déférée à la Cour : jugement du 06 janvier 2022 – tribunal judiciaire de MEAUX- RG n° 21/00442
APPELANTE
S.A.S.U. BRG HABITAT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentée par Me Joachim SCAVELLO, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 56
INTIMÉS
Monsieur [R] [B]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Romain NORMAND, avocat au barreau de MELUN, toque : PC 299
Madame [Z] [T] épouse [B]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Romain NORMAND, avocat au barreau de MELUN, toque : PC 299
S.A. MIC INSURANCE venant aux droits de MILLENNIUM INSURANCE COMPANY dont le siège est situé au [Adresse 2], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
Ayant pour avocat plaidant Me Charles DE CORBIERE, avocat au barreau de PARIS, substitué à l’audience par Me Johanna LADOUCE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 17 octobre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Sylvie DELACOURT, présidente de chambre
Mme Laura TARDY, conseillère
Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Sylvie Delacourt dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Madame Manon CARON
ARRÊT :
– contradictoire.
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Laura TARDY, conseillère faisant fonction de présidente pour la présidente empêchée et par Tiffany CASCIOLI, greffière, présente lors de la mise à disposition.
Suivant devis du 26 avril 2016 accepté par M. et Mme [B], la société BRG Habitat a réalisé sur la maison de ces derniers un ravalement et la mise en ‘uvre d’une isolation thermique extérieure.
La société BRG habitat est assurée auprès de la société Millennium Insurance Company.
Suivant facture en date du 7 juin 2016, les travaux ont été réalisés moyennant un prix de 13 678,32 euros TTC.
Le 15 février 2018, par courriers séparés, M. et Mme [B] se sont plaints auprès de la société BRG Habitat et de la société Millennium Insurance Company de l’apparition de taches noires sur l’extérieur de leur maison. Ces courriers sont revenus avec la mention » destinataire inconnu à l’adresse » pour la société BRG Habitat et » pli avisé et non réclamé » pour la société Millennium Insurance Company.
Le 24 mars 2018, par courriers séparés dont il a cette fois été accusé réception, M. et Mme [B] se sont de nouveau plaints de désordres auprès de la société BRG Habitat et de la société Millennium Insurance Company.
Suivant ordonnance du 6 février 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Meaux, à la demande de M. et Mme [B], a ordonné une expertise judiciaire au contradictoire de la société BRG Habitat et désigné M. [S].
Suivant ordonnance de référé du 15 juillet 2020, les opérations d’expertise judiciaire ont été rendues communes à la société Millennium Insurance Company.
Le 25 novembre 2020, l’expert a déposé son rapport.
Les 22 et 26 janvier 2021, M. et Mme [B] ont assigné la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company, représentée par la société Leader Underwriting, son mandataire en indemnisation de leurs préjudices.
Par jugement du 6 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Meaux a statué en ces termes :
Condamne la société BRG Habitat à payer à M. et Mme [B] la somme de 28 743,12 euros au titre du préjudice matériel,
Rejette la demande de M. et Mme [B] à l’encontre de la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting, au titre du préjudice matériel,
Condamne in solidum la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting à payer à M. et Mme [B] la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral,
Dit que la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting, ne peut opposer sa franchise contractuelle à M. et Mme [B] ;
Condamne in solidum la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting à payer la somme de 4 000 euros à M. et Mme [B] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes de la société BRG Habitat et de la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting aux dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire,
Rappelle que le présent jugement bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Par déclaration en date du 2 mars 2022, la société BRG Habitat a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :
– la société Millennium Insurance Company,
– M. et Mme [B].
Par ordonnance du 1er décembre 2022, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement de la demande d’incident du 25 octobre 2022 de M. et Mme [B].
EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 avril 2022, la société BRG Habitat demande à la cour de :
L’infirmation totale du jugement du 6 janvier 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Meaux ;
Constater que l’apparition de taches noires sur les murs de la maison de M. et Mme [B], postérieurement aux travaux d’isolation thermique extérieure et de ravalement, ne relève pas de la responsabilité contractuelle de la société BRG Habitat en tant que constitutive d’un cas de force majeure ;
Débouter M. et Mme [B] de toutes leurs demandes indemnitaires ;
A titre subsidiaire :
Appeler en garantie la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting, pour toute éventuelle condamnation en responsabilité civile de la société BRG Habitat pour lesdits travaux ;
En tout état de cause :
Condamner M. et Mme [B] à payer la somme de 3 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 5 décembre 2022 M. et Mme [B] demandent à la cour de :
Débouter la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company de l’intégralité de leurs demandes ;
Confirmer le jugement rendu le 6 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Meaux ;
A titre reconventionnel,
Condamner solidairement la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company en qualité d’assureur, à payer à M. et Mme [B] la somme de :
– au titre des frais de procédure : 2 290 euros
– au titre du timbre d’appel : 225 euros
Condamner solidairement la société BRG Habitat et la société Millennium Insurance Company en qualité d’assureur en tous les dépens.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 juillet 2022 la société Millennium Insurance Company demande à la cour de :
Confirmer le jugement rendu le 6 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil en ce qu’il a:
– condamné la société BRG Habitat à payer à M. et Mme [B] la somme de 28 743,12 euros TTC au titre du préjudice matériel,
– rejeté la demande de M. et Mme [B] à l’encontre de la société Millennium Insurance Company, représentée par la société Leader Underwriting, au titre du préjudice matériel ;
Infirmer le jugement rendu le 6 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil, pour le surplus ;
Et statuant à nouveau :
A titre principal,
Juger que la garantie responsabilité civile contractuelle de la société Millennium Insurance Company n’est pas mobilisable au titre du préjudice moral allégué par M. et Mme [B],
Débouter en conséquence M. et Mme [B] de leurs demandes de condamnation formulées à l’encontre de la société Millennium Insurance Company,
A titre subsidiaire,
Déclarer la franchise opposable et déductible à M. et Mme [B],
En conséquence, les débouter de leur demande au titre du préjudice moral ;
En tout état de cause,
Condamner tout succombant à verser à la société Millennium Insurance Company la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner M. et Mme [B] et la société BRG Habitat aux dépens de l’instance de la procédure d’appel et de la procédure de première instance.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 19 septembre 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 17 octobre 2024, à l’issue de laquelle elle a été mise en délibéré.
Sur la responsabilité
Moyens des parties
La société BRG Habitat conteste toute responsabilité dans le dommage des époux [B] et à l’appui reprend la chronologie des faits. Elle confirme ainsi qu’elle est intervenue pour la mise en peinture de l’ensemble de la façade, dix jours après la réception des travaux qu’elle fixe au 7 juin 2016. Elle affirme ensuite qu’elle est intervenue 45 jours après la fin des travaux tout en effectuant le nettoyage nécessaire avant l’application de la peinture. Elle fait valoir qu’elle a exécuté les travaux conformément aux règles de l’art.
La société BRG Habitat ne conteste pas l’existence de taches noires dues à des micro-organismes végétaux mais elle indique qu’ayant respecté les règles de l’art dans son travail, l’apparition relève d’un cas de force majeure.
Elle soutient ses demandes sur les fondements contractuel et délictuel à la fois.
Les époux [B] rappellent que la société BRG Habitat est intervenue une première fois sur les taches noires apparues très rapidement après la fin des travaux et qu’elle a procédé à une peinture complète 45 jours après la fin des travaux.
Ils soutiennent que l’information pertinente est que les souches de micro-organismes se sont développées après la fin des travaux et que l’application de la peinture sans travaux de préparation adéquats a piégé ces micro-organismes dans le mur.
La société Millennium Insurance Company fait valoir que sa garantie décennale n’est pas mobilisable s’agissant de simples désordres esthétiques.
Réponse de la cour
Selon les articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 compte tenu de la date des travaux, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
La responsabilité contractuelle de droit commun est résiduelle par rapport aux garanties légales. Elle s’applique notamment quand les travaux ne concernent pas un ouvrage ou n’étaient pas apparents à la réception.
Les premiers juges ont ainsi correctement relevé que seule la responsabilité contractuelle et non la responsabilité délictuelle de la société BRG Habitait pouvait être retenue en l’espèce. Ils ont également repris la chronologie des faits admis par les parties en ce que les taches sont apparues après la fin des travaux et après une mise en peinture complète des façades par la société BRG.
Ainsi, la société BRG Habitat et les époux [B] sont liés par un contrat d’entreprise en vertu duquel la société BRG Habitat est tenue d’une obligation de résultat dont elle ne peut s’exonérer qu’en établissant une cause étrangère laquelle s’entend de la force majeure, du fait d’un tiers ou du fait du maître de l’ouvrage.
En l’espèce, les désordres constatés ne sont pas de nature décennale et sont apparus après la réception. Il s’agit de désordres de nature esthétique.
Comme les premiers juges l’ont justement constaté, les parties s’accordent sur le fait que la peinture a été appliquée après l’enduit en juin 2016.
La société BRG Habitat ne conteste pas que ces taches noires sont dues à des micro-organismes végétaux mais elle indique qu’ayant respecté les règles de l’art dans son travail, cette apparition relève d’un cas de force majeure puisqu’elles sont apparues de manière imprévisible, irrésistible et sont extérieures à son travail.
Cette microfissure de l’enduit a permis, après les travaux, à l’eau de pluie de s’infiltrer et de laisser entrer des micro-organismes présents dans la zone lesquels sont restés enfermés à la suite de la remise en peinture.
La société BRG Habitat n’apporte aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l’analyse exercée par les premiers juges quant à l’origine des désordres provenant d’une exécution matérielle mal réalisée dans la mise en ‘uvre de l’enduit puis de la peinture dont elle était chargée et non d’une cause étrangère qu’elle échoue à démontrer.
En l’absence de cause étrangère, la responsabilité contractuelle de la société BRG Habitat est engagée à l’égard des époux [B], ainsi que l’ont décidé les premiers juges.
Sur les préjudices des époux [B]
Moyens des parties
La société BRG Habitat soutient que les époux [B] n’ont pas de préjudice moral.
Les époux [B] sollicitent la confirmation du jugement et reviennent sur leurs préjudices matériels consistant dans le ravalement pour lequel ils ont été dans l’impossibilité de produire les devis sollicités par l’expert du fait que les entreprises contactées n’ont pas accepté de reprendre un chantier sur une isolation existante mais réalisée par une autre entreprise et de surcroit faisant l’objet d’un contentieux. C’est pourquoi, l’expert a finalement sollicité des devis de travaux sur la base d’une réfection totale comprenant la dépose de l’isolant.
Ils font valoir que pour assurer les travaux, il est indispensable d’effectuer une dépose / repose des climatiseurs pour un montant de 1 414,60 euros.
S’agissant du préjudice moral, ils font valoir qu’ils ont une maison particulièrement bien entretenue, à la décoration soignée et moderne et un jardin qui l’est tout autant, très joliment agencé et que l’apparition de taches peu élégantes, dont l’origine est longtemps restée indéterminée, sur leur résidence les a naturellement tracassés, tout en leur prenant du temps de gestion logistique pour résoudre ce souci.
En outre, ils indiquent que l’entreprise est intervenue de nouveau en juin 2016, montant de nouveaux échafaudages, abimant naturellement les plantations et troublant la quiétude du quotidien, et ce en vain puisque les taches sont rapidement réapparues.
Ils font encore valoir que leur temps n’a pas été ménagé par la procédure qui s’est ensuivie.
La société Millennium Insurance Company fait valoir que la somme réclamée au titre du préjudice moral est une somme forfaitaire qui n’est justifiée par aucun élément de preuve et que le préjudice moral ne peut être fixé de manière forfaitaire sans que son existence ne soit démontrée.
Réponse de la Cour
Le propre de la responsabilité civile est de rétablir, aussi exactement que possible, l’équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l’acte dommageable n’avait pas eu lieu (1re Civ., 9 mai 1996, pourvoi n° 94-16.114 ; 2e Civ., 13 janvier 1988, pourvoi n° 86-16.046 ; Com., 10 janvier 2012, pourvoi n° 10-26.837).
Les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni profit (2e Civ., 23 janvier 2003, pourvoi n° 01-00.200, Bull n° 20 ; 2e Civ., 29 mars 2006, n° 04-15.776 ; 3e Civ., 8 juillet 2009, pourvoi n° 08-10.869, Bull n° 20).
En l’espèce, le préjudice matériel des époux [B] a été discuté devant l’expert et n’est pas discuté par les parties en appel. La décision du tribunal judiciaire de Meaux sera donc confirmée en ce qu’il condamne la société BRG Habitat à leur payer la somme de 28 743,12 euros à ce titre.
S’agissant du préjudice moral qui est contesté, il s’agit de réparer le préjudice personnel des époux [B] qui ont cherché à améliorer leur habitat en faisant exécuter des travaux et ont été non seulement déçus par le résultat mais ennuyés par les procédures qui ont fait suite aux désordres même si ceux-ci étaient seulement de nature esthétique.
A défaut d’éléments nouveaux, les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice moral des époux [B] qu’il y a lieu de confirmer.
Sur la garantie de la société Millennium Insurance Company
Moyens des parties
La société BRG Habitat sollicite d’appeler en garantie la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting, pour toute éventuelle condamnation en responsabilité civile pour les travaux et elle conteste l’application d’une clause d’exclusion de garantie.
Les époux [B] demandent la confirmation du jugement et forment une demande reconventionnelle à l’encontre de la société BRG Habitat et de la société Millennium Insurance Company en sa qualité d’assureur, à leur payer les sommes de 2 290 euros au titre des frais de procédure et 225 euros au titre du timbre d’appel.
Ils font valoir que dans son dire n°2, le conseil de la société BRG Habitat affirme que celle-ci est assurée par la société Leader Underwriting pour les travaux de ravalement et d’isolation acoustique et thermique, tant par l’intérieur que l’extérieur et ils sollicitent donc de la cour qu’elle confirme la condamnation solidaire de l’entreprise et de son assureur.
La société Millennium Insurance Company soutient que l’appel en garantie de la société BRG Habitat à son encontre est irrecevable car celle-ci n’a pas formé de demande à ce titre devant le tribunal puisqu’elle s’était contentée de solliciter le rejet des demandes des époux [B].
En tout état de cause, elle fait valoir que les conditions générales précisent que seuls sont garantis les dommages immatériels consécutifs et non consécutifs tels que définis aux articles 2.11 et 2.12 de la police et que le préjudice moral ne résulte pas d’un préjudice économique entendu comme une perte d’argent, qu’il n’est donc pas couvert par les garanties.
Elle fait valoir que sa garantie n’est pas mobilisable et qu’elle peut opposer sa franchise aux époux [B].
Réponse de la cour
L’irrecevabilité de la demande de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company
Selon l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
Selon l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge si leur fondement juridique est différent.
Selon l’article 566 du code de procédure civile, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En l’espèce, devant le tribunal, la société Millennium Insurance Company a été mise en cause par les époux [B], et la société BRG, dans ses dernières conclusions notifiées le 10 septembre 2021, n’a pas formulé de demande à l’égard de son assureur. Il est en effet noté dans le jugement qu’elle sollicite le rejet des demandes de Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B] et de les condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Sa demande de garantie en appel incident constitue bien une demande nouvelle à l’égard de l’intimée en ce qu’elle ne tend pas aux mêmes fins que la demande de rejet présentée en première instance dont elle ne constitue pas davantage l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
En conséquence, l’appel en garantie de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company est irrecevable et il ne sera pas statué au fond sur la demande de garantie de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company.
L’exclusion de garantie du préjudice moral
S’agissant du préjudice moral, c’est à bon droit que la société Millennium Insurance Company fait valoir que si les conditions générales de la police précisent que sont garantis les dommages immatériels consécutifs et non consécutifs tels que définis aux articles 2.11 et 2.12 de la police, le préjudice moral des époux [B] ne rentre pas dans cette catégorie de préjudice immatériel s’agissant d’une gêne et non d’un préjudice économique au sens des conditions générales.
Selon les définitions des conditions générales, les dommages immatériels consécutifs sont les préjudices économiques, tels que la perte d’usage, l’interruption d’un service, la cessation d’activité, la perte d’un bénéfice ou d’une clientèle, qui sont consécutifs à un des dommages matériels garantis.
Les dommages immatériels non consécutifs sont les préjudices économiques, tels que la perte d’usage, l’interruption d’un service, la cessation d’activité, la perte d’un bénéfice ou d’une clientèle qui seraient consécutifs à des dommages corporels ou matériels non garantis ou qui ne seraient consécutifs à aucun dommage corporel ou matériel.
La décision des premiers juges sera donc infirmée sur ce point et en l’absence de garantie du préjudice moral, il n’y a pas lieu de statuer sur l’opposabilité de la franchise aux époux [B].
Sur les frais du procès
Lorsqu’ils ne sont pas compris dans les dépens, les frais exposés pour les besoins d’un procès ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être pris en considération, éventuellement, qu’au titre du remboursement des frais irrépétibles.
Les demandes des époux [B] au titre des frais de procédure et du timbre fiscal ne sont pas des demandes nouvelles d’indemnisation de préjudice.
Le sens de l’arrêt conduit à infirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur la condamnation de la société Millennium Insurance Company à verser la somme de 4 000 euros à M. et Mme [B]. Statuant à nouveau, la cour condamne la société BRG Habitat aux dépens et rejette les demandes de condamnation de la société Millennium Insurance Company de ce chef.
En cause d’appel, la société BRG Habitat sera condamnée aux dépens et à payer à Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles et la somme de 2 000 euros à la société Millennium Insurance Company. La demande de la société BRG au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejetée.
Le coût du timbre d’appel est compris dans les dépens.
Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.
La cour,
Infirme le jugement en ce qu’il :
condamne la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting, in solidum avec la société BRG Habitat, à payer à Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B] la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral,
dit que la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting ne peut opposer sa franchise contractuelle à Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B],
condamne la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting in solidum avec la société BRG Habitat à payer à Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
condamne la société Millennium Insurance Company représentée par la société Leader Underwriting in solidum avec la société BRG Habitat à payer les dépens.
Le confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette la demande de condamnation de la société Millennium Insurance Company formée par Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B], à les indemniser de leur préjudice moral
Rejette la demande de M. et Mme [B] formées à l’encontre de la société Millennium Insurance Company au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Dit que l’appel incident en garantie de la société BRG Habitat à l’égard de la société Millennium Insurance Company est irrecevable ;
Condamne la société BRG Habitat aux dépens de première instance et d’appel,
Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de ce chef formées à l’encontre de la société Millennium Insurance Company et condamne la société BRG Habitat à payer à Mme [Z] [T] épouse [B] et M. [R] [B] la somme de 2 000 euros, ensemble et la somme de 2 000 euros à la société Millennium Insurance Company.
La greffière, La conseillère faisant fonction de présidente pour la présidente empêchée,
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