L’Essentiel : Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ont signé un contrat avec la société LGW pour la construction de leur maison, livrée avec des réserves en septembre 2019. Face à des manquements constatés, ils ont sollicité une expertise judiciaire en décembre 2020. En avril 2021, ils ont assigné LGW en réparation, demandant des dommages-intérêts pour préjudice de jouissance. Le tribunal a reconnu le retard dans la levée des réserves et a condamné LGW à verser 2.000 euros pour ce préjudice, ainsi qu’à couvrir les frais de justice, confirmant ainsi la décision en faveur des propriétaires.
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Exposé du litigeMonsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ont signé un contrat le 14 décembre 2017 avec la société LGW, sous l’enseigne Maisons Arlogis, pour la construction d’une maison individuelle. Les travaux ont été livrés le 6 septembre 2019, mais avec des réserves. Les propriétaires ont constaté que certaines réserves n’avaient pas été levées et ont fait appel à un huissier le 23 juillet 2020 pour constater ces manquements. En réponse, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire le 15 décembre 2020, confiée à Madame [M] [J]. Pendant l’expertise, la société LGW a entrepris des travaux de reprise des désordres, et l’expert a remis son rapport le 7 juin 2022. Procédures judiciairesLe 7 avril 2021, Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ont assigné la société LGW en réparation devant le tribunal judiciaire de Lille. En août 2021, la société LGW a exercé des recours contre les constructeurs et leurs assureurs. Le 7 mai 2024, le juge de la mise en état a rejeté une demande de jonction des procédures et a condamné LGW aux dépens. Dans leurs écritures du 4 mai 2023, les demandeurs ont demandé 12.000 euros de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance et 2.000 euros pour les frais de justice. En réponse, la société LGW a demandé le déboutement des demandes et a réclamé 5.000 euros pour ses frais. Motifs de la décisionConcernant le préjudice de jouissance, les demandeurs ont affirmé que, bien qu’ils ne subissent plus de préjudice matériel, la reprise des désordres a été tardive. Ils ont également mentionné des bruits anormaux causés par des mouvements des plaques. La société LGW a contesté l’existence de ce préjudice, arguant qu’elle avait agi rapidement pour corriger les désordres. Le tribunal a reconnu que le bien avait été livré avec réserves et que la levée des dernières réserves avait été retardée par la procédure judiciaire. En conséquence, la société LGW a été condamnée à verser 2.000 euros pour le préjudice de jouissance. Demandes accessoiresLa société LGW, en tant que partie perdante, a été condamnée aux dépens, y compris les frais d’expertise judiciaire. De plus, elle a été condamnée à verser 2.000 euros à Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] en vertu de l’article 700 du code de procédure civile pour couvrir les frais non compris dans les dépens. ConclusionLe tribunal a statué en faveur de Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C], condamnant la société LGW à verser des indemnités pour préjudice de jouissance et à couvrir les frais de justice. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature du préjudice de jouissance et comment est-il évalué ?Le préjudice de jouissance se définit comme l’impossibilité pour un propriétaire d’utiliser son bien pendant une période déterminée. Dans le cas présent, Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ont subi un préjudice de jouissance en raison des désordres constatés dans leur maison, qui ont nécessité des travaux de reprise par la société LGW. L’article 1792 du Code civil stipule que « tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit à l’égard du maître de l’ouvrage des dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropre à sa destination ». Ainsi, la responsabilité de la société LGW est engagée, car les désordres ont affecté l’usage normal de la maison. De plus, l’expert judiciaire a constaté que les mouvements anormaux des plaques de placoplâtre engendraient un bruit anormal en cas de vent, ce qui a contribué à la gêne des demandeurs. En conséquence, le tribunal a reconnu l’existence d’un préjudice de jouissance et a condamné la société LGW à verser une somme de 2.000 euros à Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] pour ce préjudice. Quelles sont les conséquences des dépens dans cette affaire ?Les dépens sont les frais engagés pour la procédure judiciaire, y compris les frais d’expertise. L’article 696 du Code de procédure civile précise que « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ». Dans cette affaire, la société LGW, ayant été condamnée, est considérée comme la partie perdante. Ainsi, elle est tenue de rembourser les dépens, y compris les frais d’expertise judiciaire, conformément à l’article précité. Cette disposition vise à garantir que la partie qui a causé le litige par son comportement soit responsable des coûts associés à la résolution de ce litige. Le tribunal a donc décidé de condamner la société LGW aux dépens, ce qui est une application classique de la règle de la perte des dépens. Comment l’article 700 du Code de procédure civile s’applique-t-il dans cette affaire ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme pour couvrir les frais exposés et non compris dans les dépens. Cet article stipule que « le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée ». Dans le cas présent, la société LGW a été condamnée à verser 2.000 euros à Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] au titre de l’article 700. Cette somme est destinée à compenser les frais que les demandeurs ont engagés pour faire valoir leurs droits, en plus des dépens. Le tribunal a donc exercé son pouvoir discrétionnaire en tenant compte de la situation des parties et a décidé d’accorder cette somme, ce qui est conforme à la pratique judiciaire. Ainsi, l’article 700 a été appliqué pour garantir une certaine équité dans la prise en charge des frais de justice. |
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Chambre 02
N° RG 21/02109 – N° Portalis DBZS-W-B7F-VGP7
JUGEMENT DU 07 JANVIER 2025
DEMANDEURS:
M. [U] [D]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par Me Jean-roch PARICHET, avocat au barreau de LILLE
Mme [X] [C]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Jean-roch PARICHET, avocat au barreau de LILLE
DÉFENDERESSE:
S.A.S. LGW
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Jean-philippe DEVEYER, avocat au barreau de LILLE
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Claire MARCHALOT, Vice Présidente
Assesseur : Maureen DE LA MALENE, Juge
Assesseur : Sarah RENZI, Juge
Greffier : Dominique BALAVOINE, Greffier
DÉBATS
Vu l’ordonnance de clôture en date du 20 Septembre 2024.
A l’audience publique du 05 Novembre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 07 Janvier 2025.
Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Maureen DE LA MALENE, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 07 Janvier 2025 par Claire MARCHALOT, Présidente, assistée de Dominique BALAVOINE, Greffier.
Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ont confié, suivant contrat en date du 14 décembre 2017, la construction d’une maison individuelle avec fourniture de plans à la société LGW exerçant sous l’enseigne Maisons Arlogis.
Les travaux ont fait l’objet d’un procès-verbal de livraison le 6 septembre 2019, avec réserves.
Par la suite, Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] se sont plaints de la non-levée de certaines de ces réserves qu’ils ont fait constater par huissier suivant procès-verbal en date du 23 juillet 2020.
Par ordonnance en date du 15 décembre 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a ordonné la réalisation d’une expertise judiciaire qu’il a confiée à Madame [M] [J].
Au cours des opérations d’expertise, la société LGW a procédé à la reprise des désordres.
L’expert a déposé son rapport le 7 juin 2022.
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Par acte d’huissier en date du 7 avril 2021, Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ont assigné en réparation la société LGW devant le tribunal judiciaire de Lille.
Dès août 2021, la société LGW a exercé ses recours à l’encontre des constructeurs intervenus sur le chantier et de leurs assureurs.
Par ordonnance d’incident en date du 7 mai 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Lille a notamment rejeté la demande de jonction entre ces deux procédures et a condamné la société LGW aux dépens de l’incident.
Dans leurs dernières écritures notifiées par voie électronique le 4 mai 2023, Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] demandent au tribunal, au visa des articles 1792 et 1792-6 du code civil et subsidiairement des articles 1231 et suivants de ce même code, de :
– condamner la société LGW à leur payer à la somme de 12.000 euros de dommages-intérêts au titre de leur préjudice de jouissance ;
– condamner la société LGW à leur payer la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise.
Dans ses dernières écritures notifiées le 26 août 2024, la société LGW demande au tribunal de :
– débouter Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C], ou toute autre partie, de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre ;
– condamner Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] à lui payer une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ou toute partie succombante aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, le tribunal se réfère expressément à leurs dernières écritures, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 20 septembre 2024 et l’affaire a été fixée à plaider à l’audience du 5 novembre 2024.
La décision a été mise en délibéré au 7 janvier 2025.
Sur la demande de condamnation au titre du préjudice de jouissance :
Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ne sollicitent désormais des dommages-intérêts qu’au titre de leur préjudice de jouissance suite à la reprise par la société LGW de l’ensemble des désordres dénoncés au cours des opérations d’expertise.
Ils soutiennent que si à ce jour ils ne souffrent plus d’aucun préjudice matériel du fait de ces travaux de reprise et de la levée des réserves, ceux-ci ont eu lieu tardivement, du fait de la mesure d’expertise judiciaire et de la présente procédure.
Les demandeurs ajoutent que leur préjudice de jouissance est également caractérisé par le désordre relatif aux mouvements anormaux des plaques à l’origine d’un bruit anormal en cas de phénomènes venteux.
La société LGW conteste l’existence d’un quelconque préjudice de jouissance, dont Monsieur [U] [D] et Madame [X] [C] ne rapportent pas la preuve, dans la mesure où elle est intervenue dans les meilleurs délais pour reprendre les désordres.
Il est constant que le trouble de jouissance s’analyse comme l’impossibilité dans laquelle se sont trouvés les demandeurs d’utiliser le bien pendant une période déterminée.
En l’espèce, il n’est contesté par aucune des parties que le bien a été livré à Monsieur [U] [D] et à Madame [X] [C] courant 2019 avec réserves, et qu’il faudra finalement attendre que la société LGW soit assignée tant en référé-expertise qu’au fond par ces derniers pour procéder à la levée des dernières réserves et aux travaux de reprise des différents désordres.
Par ailleurs, il ressort également de l’une des notes de l’expert judiciaire que les mouvements anormaux des plaques de placoplâtres sur les rampants à l’étage, désordre aujourd’hui repris par la société LGW, engendrent du bruit quand il y a du vent.
Aussi, en raison de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de condamner la société LGW à payer à Monsieur [U] [D] et à Madame [X] [C] la somme de 2.000 euros au titre de leur préjudice de jouissance, la somme de 12.000 euros n’étant pas justifiée dans son quantum.
Sur les demandes accessoires :
Sur les dépens :
L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la société LGW, partie perdante, sera condamnée aux dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
En vertu de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
En l’espèce, la société LGW, partie perdante, sera condamnée à payer à Monsieur [U] [D] et à Madame [X] [C] la somme de 2.000 euros à ce titre.
Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe de la juridiction, par jugement contradictoire et en premier ressort,
CONDAMNE la société LGW à payer à Monsieur [U] [D] et à Madame [X] [C] la somme de 2.000 euros au titre de leur préjudice de jouissance ;
CONDAMNE la société LGW aux dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;
CONDAMNE la société LGW à payer à Monsieur [U] [D] et à Madame [X] [C] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
Dominique BALAVOINE Claire MARCHALOT
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