L’Essentiel : Les époux [E] ont entrepris des travaux de rénovation d’un immeuble à [Localité 10], mais ont rencontré des problèmes majeurs lorsque la société CPF a abandonné le chantier. Après avoir résilié leur contrat avec MDA+A en mars 2018, ils ont assigné cette dernière et son assureur MAF en justice. Le tribunal de première instance a débouté les époux, mais en appel, la cour a infirmé ce jugement, reconnaissant la responsabilité de MDA+A et MAF. Ils ont été condamnés à verser 27 457,31 euros aux époux [E], ainsi qu’une indemnité de 5 000 euros pour les frais de procédure.
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Contexte des travauxM. [P] [E] et Mme [H] [T] épouse [E] ont entrepris des travaux de rénovation d’un immeuble de six étages à [Localité 10], propriété de Mme [E]. La société Lavigne & Zavani a été désignée comme maître d’ouvrage délégué sans contrat formel, tandis qu’un contrat de maîtrise d’œuvre a été signé avec la société MDA+A, assurée par la MAF, le 13 novembre 2013. Les travaux, d’un montant total de 498 590,19 euros TTC, ont été confiés à la société CPF France, débutant en mai 2015. Problèmes rencontrésEn janvier 2016, les époux [E] ont signalé un manque d’informations sur l’avancement des travaux, découvrant par la suite que la société CPF avait abandonné le chantier. La société CPF a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 22 mars 2017. Les époux [E] ont alors demandé un relevé de forclusion, qui a été accordé pour un trop-perçu de 126 739,34 euros. Résiliation et médiationSans nouvelles de MDA+A, les époux [E] ont résilié leur contrat par courrier recommandé le 3 mars 2018, demandant le remboursement de 135 151,28 euros. Après une médiation infructueuse, ils ont assigné MDA+A et son assureur MAF devant le tribunal judiciaire de Nanterre en janvier 2019. Jugement de première instanceLe tribunal a déclaré irrecevables certaines demandes des époux [E] et les a déboutés de toutes leurs demandes, les condamnant à payer 2 500 euros à MAF. Le tribunal a estimé que les époux [E] n’avaient pas prouvé les manquements contractuels de MDA+A et que leur action directe contre MAF ne pouvait prospérer. Appel et expertiseLes époux [E] ont interjeté appel le 7 juillet 2021. Un expert a été désigné pour évaluer l’état d’avancement des travaux et les manquements éventuels de MDA+A. Son rapport, rendu le 27 avril 2023, a révélé un trop-perçu de 129 212,16 euros par les époux [E] à la société CPF. Demandes des époux [E]Dans leurs conclusions, les époux [E] ont demandé l’infirmation du jugement et la reconnaissance de la responsabilité de MDA+A pour divers préjudices, incluant des sommes pour trop-perçus, des frais de travaux, des pertes de revenus locatifs, et un préjudice moral. Réponse de MDA+A et MAFMDA+A et MAF ont demandé la confirmation du jugement de première instance, contestant la responsabilité et les montants réclamés par les époux [E]. Elles ont également soulevé des questions sur la validité des demandes et les préjudices allégués. Décision de la courLa cour a infirmé le jugement de première instance, condamnant MDA+A et MAF à verser 27 457,31 euros aux époux [E], avec intérêts. La cour a également statué sur les dépens et les frais de procédure, condamnant les sociétés à payer une indemnité de 5 000 euros aux époux [E]. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les obligations contractuelles de l’architecte en matière de suivi des travaux ?L’architecte, en tant que maître d’œuvre, a des obligations précises envers le maître d’ouvrage, notamment en matière de suivi des travaux. Selon l’article G 3.3.5 du contrat de maîtrise d’œuvre, l’architecte doit : – Rédiger et signer les ordres de service pour l’exécution des travaux des différents corps d’état. – Organiser et diriger les réunions de chantier et en rédiger les comptes rendus, qu’il doit diffuser à tous les intéressés. – Vérifier l’avancement des travaux et leur conformité avec les pièces du marché. – Vérifier les situations de l’entrepreneur dans un délai de 21 jours à compter de leur réception et établir les propositions de paiement. – Vérifier les mémoires établis par les entreprises dans un délai de 45 jours à compter de leur réception, établir le décompte définitif en fin de chantier et proposer le règlement pour solde. Ces obligations impliquent que l’architecte doit s’assurer que les travaux sont réalisés conformément aux plans et aux spécifications, et qu’il doit prendre des mesures pour corriger toute déviation. Comment la responsabilité de l’architecte peut-elle être engagée en cas de manquement ?La responsabilité de l’architecte peut être engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle, en cas de manquement à ses obligations. Selon l’article 1231-1 du Code civil, « le débiteur est tenu de réparer le préjudice causé par son inexécution, sauf s’il prouve que celle-ci est due à une cause étrangère qui ne peut lui être imputée ». Dans le cas présent, les époux [E] reprochent à la société MDA+A de ne pas avoir contrôlé les travaux réalisés par la société CPF et de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour respecter les délais de livraison. Si ces manquements sont prouvés, l’architecte pourrait être tenu de réparer les préjudices subis par les maîtres d’ouvrage. Il est également important de noter que la responsabilité de l’architecte est souvent appréciée au regard de la norme de diligence qui lui est applicable, c’est-à-dire qu’il doit agir avec le soin et la compétence d’un professionnel de son domaine. Quelles sont les conséquences d’une liquidation judiciaire sur les créances des maîtres d’ouvrage ?La liquidation judiciaire d’une entreprise, comme celle de la société CPF dans cette affaire, a des conséquences importantes sur les créances des maîtres d’ouvrage. Selon l’article L.641-1 du Code de commerce, « la liquidation judiciaire est la procédure collective qui a pour objet de réaliser l’actif de l’entreprise pour désintéresser les créanciers ». Dans ce contexte, les créanciers, y compris les maîtres d’ouvrage, doivent déclarer leurs créances auprès du mandataire liquidateur. Si aucune déclaration de créance n’est faite, comme cela a été le cas pour les époux [E], ils peuvent se voir opposer la forclusion, c’est-à-dire la perte de leur droit à être remboursés. Cependant, les époux [E] ont réussi à obtenir un relevé de forclusion, ce qui leur a permis de faire valoir leur créance de 126 739,34 euros TTC. Cela souligne l’importance de respecter les délais de déclaration de créance dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire. Quelles sont les implications de l’article L.124-3 du Code des assurances pour l’action directe contre l’assureur ?L’article L.124-3 du Code des assurances stipule que « le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ». Cela signifie que si la responsabilité de l’architecte est engagée, les maîtres d’ouvrage peuvent directement demander réparation à l’assureur, ici la société MAF. Cette action directe est conditionnée par le fait que l’assureur ne peut payer que le tiers lésé, tant que celui-ci n’a pas été désintéressé des conséquences pécuniaires du fait dommageable. Ainsi, si la responsabilité de l’architecte est retenue, l’action contre la MAF peut prospérer, mais dans les limites de son contrat, notamment en ce qui concerne les plafonds et franchises. Cela permet aux maîtres d’ouvrage de sécuriser leur droit à indemnisation, même en cas de défaillance de l’architecte, en se tournant vers l’assureur pour obtenir réparation des préjudices subis. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 54D
Ch civ. 1-4 construction
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 13 JANVIER 2025
N° RG 21/04335
N° Portalis DBV3-V-B7F-UT6J
AFFAIRE :
[P] [E],
Madame [H] [T] épouse [E]
C/
S.A.S. MDA+A,
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Mars 2021 par le Tribunal judiciaire de NANTERRE
N° RG : 19/00762
Expéditions exécutoires, Copies certifiées conforme délivrées le :
à :
Me Clarisse DUHAU
Me Sophie POULAIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TREIZE JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANTS
Monsieur [P] [E]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Clarisse DUHAU de la SELEURL BERGER, THIRY Associés (BTA), avocat au barreau de PARIS
Madame [H] [T] épouse [E]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Clarisse DUHAU de la SELEURL BERGER, THIRY Associés (BTA), avocat au barreau de
****************
INTIMÉES
S.A.S. D’ARCHITECTURE MDA+A
[Adresse 1]
[Localité 9]
Représentant : Me Sophie POULAIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 180
Plaidant : Me Ferouze MEGHERBI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0474
MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentant : Me Sophie POULAIN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 180
Plaidant : Me Ferouze MEGHERBI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0474
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Octobre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Séverine ROMI, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne TROUILLER, Présidente,
Madame Séverine ROMI, Conseillère,
Madame Marie-Cécile MOULIN-ZYS, Conseillère,
Greffière, lors des débats : Madame Jeannette BELROSE,
M. [P] [E] et Mme [H] [T] épouse [E] ont fait réaliser des travaux de rénovation intérieure et extérieure d’un immeuble de six étages à usage d’habitation situé [Adresse 4] à [Localité 10] (75), appartenant en pleine propriété à Mme [E].
La société Lavigne & Zavani, administrateur d’immeubles, a été choisie comme maître d’ouvrage délégué sans qu’aucun contrat n’ait été formalisé.
Un contrat de maîtrise d »uvre a été conclu, par l’intermédiaire de la société Lavigne & Zavani, avec la société MDA+A, assurée par la société Mutuelle des architectes français (ci-après MAF) le 13 novembre 2013.
Les travaux ont été confiés à la société CPF France (ci-après CPF), pour un montant total de 498 590,19 euros TTC, pour les lots couverture, souches de cheminées, ravalement des façades, remplacement des menuiseries extérieures, embellissement de la cage d’escalier, réfection du sol de la cour et de la construction à rez-de-chaussée, plancher haut du sous-sol.
Le chantier a démarré en mai 2015.
En janvier 2016, les époux [E] ont alerté le maître d »uvre et le maître d’ouvrage délégué du manque d’informations sur l’avancement du chantier.
Ils ont appris qu’une procédure avait été initiée à la requête de la société Lavigne & Zavani à l’encontre de la société CPF du fait de son abandon du chantier.
Par jugement du 22 mars 2017, la société CPF a été mise en liquidation judiciaire.
Aucune déclaration de créance n’ayant été régularisée auprès du mandataire liquidateur de la société CPF, les époux [E] ont, par requête du 28 septembre 2017, sollicité leur relevé de forclusion.
Par ordonnance du 20 novembre 2017, le juge commissaire a fait droit à cette demande à hauteur de la somme de 126 739,34 euros TTC correspondant à un trop versé revendiqué par les époux [E].
Sans nouvelles de la société MDA+A, les époux [E] ont résilié le contrat les liant par courrier recommandé du 3 mars 2018 et l’ont mise en demeure de leur régler la somme de 135 151,28 euros correspondant au trop versé par eux à la société CPF ainsi qu’à la somme de 8 412,14 euros TTC au titre des honoraires perçus par la société d’architecture.
Faute de réponse, ils ont saisi le conseil régional de l’Ordre des architectes suivant courrier du 20 juin 2018. Ce dernier s’est déclaré incompétent et a renvoyé les époux [E] vers le médiateur de la consommation de la profession d’architecte, qu’ils ont saisi par courrier du 10 juillet 2018. La médiation a échoué.
Par exploit d’huissier délivré le 14 janvier 2019, les époux [E] ont fait assigner la société d’architecture MDA+A et son assureur la société MAF devant le tribunal judiciaire de Nanterre en réparation de leur préjudice.
Par jugement réputé contradictoire, la société MDA+A ne s’étant pas constituée, prononcé le 11 mars 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
– déclaré irrecevables les demandes des époux [E] à l’encontre de la société d’architecture MDA+A excédant celles formées dans l’assignation du 14 janvier 2019,
– débouté les époux [E] de toutes leurs demandes,
– condamné les époux [E] à payer à la société MAF assureur de la société MDA+A la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Le tribunal a retenu que seules les demandes formées dans l’assignation délivrée par les époux [E] à la société MDA+A étaient recevables, puisque cette dernière n’avait pas constitué avocat et que les époux [E] ne justifiaient pas lui avoir signifié leurs écritures postérieures à cette assignation.
De plus, le tribunal a retenu que, s’agissant de la responsabilité de la société MDA+A, les époux [E] échouaient à démontrer l’existence de ses manquements contractuels à l’origine des préjudices qu’ils alléguaient dès lors que la seule production d’un constat d’huissier même contradictoire ne donnait pas d’indication technique sur la réalisation des travaux prévus et qu’en l’absence d’expertise par un tiers indépendant extérieur au litige et bénéficiant de compétences techniques pour ce faire, la teneur exacte des travaux effectivement réalisés n’était pas connue.
Enfin, le tribunal a retenu que l’action directe des époux [E] à l’encontre de la société MAF, sur le fondement de l’article L.124-3 du code des assurances, ne pouvait prospérer puisque la responsabilité de son assurée, la société MDA+A, n’avait pas été retenue.
Par déclaration du 7 juillet 2021, les époux [E] ont interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance d’incident du conseiller de la mise en état du 19 avril 2022 un expert, M. [M] [W] a été désigné, remplacé par M. [O] [F] par ordonnance du 2 juin 2022, avec pour mission de :
« (‘) – Au vu des pièces récoltées, notamment du constat d’huissier en date du 9 mai 2016 et des comptes-rendus de chantier, décrire l’état d’avancement du chantier à la date d’abandon par la société CPF France, décrire les travaux effectivement réalisés et ceux restant à réaliser à cette date, établir un état d’avancement financier et chiffrer le montant d’un éventuel trop-versé à la société CPF France ;
– Dire si à son avis, le maître d »uvre a commis des fautes et manquements dans l’exécution de sa mission, notamment dans le suivi du paiement des factures ;
– Donner à la cour tous les éléments lui paraissant nécessaires afin d’apprécier les préjudices allégués par les maîtres de l’ouvrage et en proposer une évaluation chiffrée ; (‘).
L’expert a rendu son rapport le 27 avril 2023.
Aux termes de leurs dernières conclusions, remises au greffe le 3 juin 2024, les époux [E] demandent à la cour d’infirmer le jugement et de :
– dire et juger que la société MDA+A a commis des fautes dans le cadre de l’exécution de sa mission, et plus particulièrement à ses obligations contractuelles de vérification des comptes, de direction et de surveillance de l’exécution des travaux et de dépôt d’une autorisation de construire valable et conforme à la réglementation d’urbanisme,
– dire et juger qu’elle a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle,
– dire et juger que ses fautes ont contribué à leurs dommages l’obligeant à réparer l’ensemble de leurs préjudices,
– condamner in solidum la société MDA+A et son assureur la société MAF à leur payer les sommes de :
– 129 212,16 euros TTC au titre du trop-versé à la société CPF, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2018, date de la mise en demeure,
– 7 752,73 euros TTC au titre du trop-perçu d’honoraires par la société MDA+A pour l’exécution des travaux, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 3 mars 2018,
– 2 160 euros TTC au titre du trop-perçu d’honoraires par la société MDA+A pour la réalisation et le dépôt de la seconde déclaration préalable de travaux,
– 38 000 euros au titre de leur préjudice de jouissance,
– 30 493,76 euros TTC au titre du coût des travaux de reprise de ravalement,
– 7 614,20 euros TTC au titre du coût des travaux de reprise des peintures des boiseries du 6ème étage de l’immeuble,
– 429 euros TTC au titre des frais de dépose des châssis parisiens,
– 8 074,44 euros, à parfaire, au titre des intérêts versés depuis le 5 décembre 2015 sur la fraction de capital correspondant aux fonds débloqués pour régler la société CPF,
– 5 747,50 euros TTC au titre des travaux de remise en état de l’appartement mis à disposition des ouvriers de la société CPF,
– 28 709,31 euros au titre de la perte de revenus locatifs (appartements 5ème droite et 4ème gauche).
– 438,96 euros au titre des droits de voirie.
– 20 000 euros au titre de leur préjudice moral.
– ordonner la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
– condamner in solidum la société MDA+A et son assureur la MAF à leur payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum la société MDA+A et son assureur la MAF aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions, remises au greffe le 30 mai 2024, les sociétés MDA+A et MAF demandent à la cour de :
– confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,
– rejeter l’appel des époux [E] et les débouter de leurs demandes,
– subsidiairement et pour le cas où la cour retiendrait la faute de la société MDA + A en lien avec les dommages,
– les juger fondées à faire valoir l’application de la clause d’exclusion de solidarité prévue au contrat,
– juger qu’elles ne peuvent être tenues de la faute des autres,
– en conséquence, limiter leur condamnation à la seule faute de la société MDA + A et rejeter toutes demandes excédant cette limite,
– juger que les préjudices ne sont ni fondés ni constitués,
– si toutefois le préjudice de trop versé devait être retenu, le fixer à la somme de 65 147,17 euros TTC,
– juger que le contrat MAF n’a pas pour objet de garantir la restitution des honoraires et rejeter toutes demandes de ce chef,
– dans l’hypothèse d’une condamnation de la MAF, juger qu’elle ne peut être tenue que dans les limites de son contrat relativement à sa franchise et son plafond,
– rejeter toutes demandes excédant ces limites,
– condamner les appelants à leur payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 ainsi qu’en tous les dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juin 2024, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 21 octobre 2024. Elle a été mise en délibéré au 13 janvier 2025.
Sur la responsabilité de la société d’architecture
Les époux [E] reprochent à la société MDA+A de n’avoir pas contrôlé les travaux réalisés par la société CPF et de n’avoir pris aucune mesure utile afin que celle-ci respecte les délais de livraison convenus ou à tout le moins réalise la totalité des travaux commandés, manquements engageant sa responsabilité contractuelle envers eux.
De façon générale, l’architecte est tenu envers le maître d’ouvrage d’une obligation de moyens variable selon le contrat qui le missionne. À la lecture du contrat conclu entre les parties en novembre 2013, les missions confiées à la société d’architecture étaient les suivantes :
« P 4.1 ‘ Étude et Conception
– Études Préliminaires : PRE ‘ NON CONFIE
– Avant-Projet Sommaire : APS ‘ NON CONFIE
– Avant-Projet Définitif : APD ‘ NON CONFIE
– Projet de Conception Générale : PCG ‘ NON CONFIE
– Dossier de Consultation des Entreprises : DCE
– Mise au point des marchés de travaux : MDT
– Visa des études d’exécution : VISA
P 4.2 ‘ Exécution
– Direction de l’Exécution des contrats de Travaux : DET
– Assistance aux Opérations de Réception : AOR
– Dossier des Ouvrages Exécutés : DOE
P 4.3 ‘ Missions Complémentaires
– Réalisation et dépôt de dossier de déclaration préalable : DDP
Il n’a pas été confié d’autres missions complémentaires à l’Architecte au sens des missions
définies à l’article G 4 du CCG.
P 4.4 ‘ Autres dépenses (hors mission d’architecte)
Toute autre prestation fournie par l’Architecte, à la demande du Maître d’ouvrage, telle que : relevé des existants, démarches particulières, établissement de plans de vente ou de dossier de crédit etc. et non spécifiquement désignée dans le présent contrat fera l’objet d’une facturation distincte.(…) ».
Plus spécifiquement la mission de direction de l’exécution des contrats de travaux, incluait selon les termes du contrat :
« G 3.3.5. DET. Direction de l’Exécution des contrats de Travaux
(‘)
L’architecte rédige et signe les ordres de service pour l’exécution des travaux des différents corps d’état. Il organise et dirige les réunions de chantier et en rédige les comptes rendus, qu’il diffuse à tous les intéressés, vérifie l’avancement des travaux et leur conformité avec les pièces du marché, vérifie les situations de l’entrepreneur dans un délai de 21 jours à compter de leur réception et établit les propositions de paiement, vérifie les mémoires établis par les entreprises dans un délai de 45 jours à compter de leur réception, établit le décompte définitif en fin de chantier et propose le règlement pour solde. (‘)
G 6.6.4 – Relations avec les entrepreneurs
L’architecte établit les ordres de services, contrôle la conformité des travaux au projet architectural, organise les réunions de chantier, établit les comptes rendus de ces réunions, et établit les propositions d’acompte et de solde des marchés de travaux ».
En première instance, les époux [E] fondaient leurs demandes de condamnation de la société d’architecture sur un constat d’huissier dressé en présence de cette dernière et sur un tableau récapitulatif faisant état de l’avancement financier du chantier ainsi que des travaux restant à réaliser à la date du 31 mars 2016.
Il faut cependant noter que les travaux sont à ce jour achevés d’où la difficulté d’examiner ce qui a pu être réalisé ou non dans le cadre du chantier litigieux.
Il est également utile de préciser que le chantier a débuté avant l’intervention de la société MDA+A avec un premier maître d »uvre, le cabinet [Z], qui a abandonné le projet en novembre 2013 comme le confirme la lettre du maître d’ouvrage délégué aux époux [E] :
« Je réponds à votre mail du 13 courant. Ce mail reprend effectivement les nécessités de la planification du chantier et vos exigences. Je fais le maximum pour accélérer ce dossier en qualité de Maître d’ouvrage délégué. Par contre, sachez que nous sommes obligés de reprendre à zéro cette affaire et M. [S] et moi-même ne pourrons faire de miracles sur les délais que nous réduirons au maximum. Sachez également que nous vous serons entièrement dévoués pour le suivi de ce chantier mais il est également nécessaire que vous nous fassiez confiance. Nous avons déjà avancé en relançant la société France Affaire Equipement, je reçois le rapport ce jour et il se révèle que ce qu’avait prévu M. [Z] n’est guère envisageable et représentait une dépense excessive et inutile. Je le savais mais vous étiez persuadé qu’il fallait traiter les VMC par une VMC commune à l’ensemble des appartements avec tout ce que cela suggérait comme difficultés. Nous étudierons donc la deuxième solution d’un traitement par appartement beaucoup plus réalisable et moins onéreux. Nous en parlerons. Je vous joins le contrat conforme à votre demande du Maître d »uvre en deux exemplaires à me retourner signés ».
Dans un courriel adressé à M. [E] le 25 novembre 2013, M. Lavigne, le maître d’ouvrage délégué, ajoute :
« En main votre lettre du 21/11/2013. Je vous précise que M. [Z] a renoncé purement et simplement à sa mission en s’excusant. Je relance dès ce jour le dossier auprès de M. [S] [ société MDA+A ] en lui demandant de poursuivre les consultations et me faire le point dès que possible. Je suivrai ce dossier régulièrement y compris les rendez-vous de chantier quand cela sera nécessaire, et vous pourrez bien évidemment assister aux réunions quand vous le souhaiterez ».
Il faut relever que le maître d’ouvrage délégué, la société Lavigne & Zavani, qui devait assurer le suivi général de l’opération de construction, sa gestion comptable et financière, ainsi que l’assistance administrative et juridique des maîtres d’ouvrage, n’apparaît pas avoir été mis en cause par les époux [E].
C’est dans ces conditions que les époux [E], représentés par la société Lavigne & Zavani, ont conclu le 13 novembre 2013 avec la société MDA+A un contrat de maîtrise d »uvre portant sur l’opération suivante :
« Rénovation intérieure et extérieure d’un ouvrage à usage d’habitation collective, dont la réalisation est prévue en 1 seule tranche de travaux comportant sur le ravalement des façades, le remplacement des menuiseries extérieures, la réfection de la couverture et le traitement des émergences, le remplacement de réseaux intérieurs de plomberie et d’électricité, la création de ventilation améliorant le confort des logements. La rénovation des embellissements des parties communes et la rénovation des logements vacants.
Adresse : [Adresse 4] ‘ [Localité 8] [en réalité [Localité 11]]
Référence cadastrale : CE [Cadastre 5] pour une surface parcellaire de 241 m² ».
Ceci a été prévu pour une enveloppe prévisionnelle de travaux de 500 000 euros HT et un montant estimatif total d’honoraires d’architecte, hors frais décrit à l’article P 4.4 « Autres dépenses (hors mission d’architecte) », de 32 780 euros plus la TVA. La société CPF a été chargée de nombreux lots pour un montant de 498 590,19 euros TTC.
La mission de l’architecte a été rappelée ci-avant.
Les ordres de travaux des lots numéros 1, 3, 4, 7 et 9, datés du 5 décembre 2014, sont versés, ainsi que les demandes d’acompte à hauteur de 30 % pour chacun de ces lots et la preuve des règlements par le biais du crédit immobilier contracté auprès de la société BNP Paribas par les époux [E].
La société MDA+A a établi le planning prévisionnel pour les lots 1 à 4, mentionnant un début de chantier au 11 mai 2015.
Elle a par la suite dressé les comptes-rendus (CR) de chantier qui sont versés :
– n° 1 du 23 avril 2014
– n° 2 du 30 avril 2014
– n° 3 du 15 mai 2014
– n° 4 du 12 juin 2014
– n° 5 du 19 juin 2014
– n° 6 du 24 juillet 2014
– n° 7 du 9 octobre 2014
– n° 8 du 30 octobre 2014
– n° 9 du 14 novembre 2014
– n° 10 du 20 novembre 2014
– n° 12 du 8 janvier 2015
– n° 13 du 22 janvier 2015
– n° 14 du 21 mai 2015
– n° 15 du 4 juin 2015
– n° 16 du 11 juin 2015
– n° 17 du 18 juin 2015
– n° 18 des 2 et 9 juin 2015
– n° 19 du 16 juillet 2015
– n° 22 du 1er octobre 2015
– n° 24 du 15 octobre 2015
– n° 25 du 21 décembre 2015
– n° 26 du 14 janvier 2016
Un « tableau financier CPF » a également été établi par la société MDA+A le 31 mars 2016.
Par courriel du 8 avril 2016, la société Lavigne & Zavani a informé M. et Mme [E] de l’abandon de chantier de la société CPF en leur indiquant d’engager une procédure à son encontre.
Un procès-verbal de constat a été dressé un mois plus tard, le 9 mai 2016, à la requête du syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 11], en présence notamment du cabinet Lavigne & Zavani et de M. [S], montrant un chantier inachevé et abandonné.
Une sommation d’assister a ensuite été délivrée en vain à la société CPF le 10 mai 2016, qui a donné lieu à un procès-verbal de constat du 18 mai 2016 immédiatement clos, l’entreprise ne s’étant pas présentée.
Tous ces éléments ont été examinés par l’expert judiciaire, qui note que certains CR sont manquants, en dépit de ses demandes, et qu’ils n’ont pas été communiqués.
Il relate les faits suivants.
Le 5 décembre 2014, la société Lavigne & Zavani, pour les maîtres d’ouvrage, a signé sept ordres de travaux à effectuer par la société PCF pour les lots 1 à 4, 7, 9 et 10 soit :
– le lot 1 couverture, pour 107 207,66 euros TTC
– le lot 2 souches de cheminée, pour 11 931,70 euros TTC
– le lot 3 ravalement des façades, pour 203 728,03 euros TTC
– le lot 7 embellissement de la cage d’escalier, pour 35 572,90 euros TTC
– le lot 9 réfections cour et appentis pour 32 627,10 euros TTC
– le lot 10 plancher haut sous-sol, pour 18 862,80 euros TTC.
Les délais contractuels ont été précisés par corps d’état avec des dates de démarrage des travaux.
Le planning des travaux a été dressé par la société MDA+A le 29 juin 2015 pour les quatre premiers lots. Les travaux avaient démarré le 11 mai 2015. Le 15 octobre suivant, la société CPF a abandonné le chantier.
L’expert remarque que, de façon surprenante, pendant deux ans après l’abandon du chantier par la société CPF, il n’y a pas eu de communication entre les époux [E], la société MDA+ et la société Lavigne & Zavani.
Il appert que par courriel du 25 avril 2017, les époux [E] se sont plaints auprès de la société Lavigne & Zavani de l’absence d’information sur la cessation de paiements de la société CPF depuis le 22 septembre 2015.
Par courrier recommandé du 25 septembre 2017, ils se sont étonnés du silence de la société MDA+A à la suite de l’abandon de chantier de la société CPF dans le courant du premier trimestre de l’année 2016 et sollicité un état détaillé et chiffré des travaux réalisés et restant à réaliser.
Le 15 novembre 2017, la société MDA+A a affirmé avoir effectué de multiples relances auprès de l’entreprise CPF.
Par courrier du mois d’août 2017, la société MDA+A, avec le cabinet Lavigne & Zavani, a émis des propositions pour la poursuite du chantier en lançant un nouvel appel d’offres auprès de diverses entreprises pour chacun des lots.
Les demandes de préjudices et surcoûts chiffrés par les époux [E] devant l’expert étaient :
– le trop-versé à la société CPF France chiffré à 126 739,14 euros TTC
– le trop-versé à l’architecte MDA+A de 8 412,14 euros TTC pour de suivi de l’exécution des travaux
– le trop-versé à l’architecte MDA+A de 2 160 euros TTC pour la 2e déclaration de travaux
– le montant des travaux d’achèvement du ravalement par la société BTI pour un montant de 30 493,76 euros TTC
– le montant de 7 614,20 euros TTC des reprises des peintures des boiseries du 4e étage de l’immeuble par la société BTI
– le montant de 429 euros TTC des frais de dépose des châssis parisiens
– le montant de 8 074,44 euros TTC à parfaire au titre des intérêts versés depuis le 5 décembre 2015 sur la fraction de capital.
– les travaux de remise en état de l’appartement mis à disposition des ouvriers de la société CPF pour un montant de 5 747,50 euros TTC
– 28 709, 31 euros de perte de revenus locatifs (appartements 5e droite et 4e gauche)
– le montant de 438,96 euros de taxes de voirie payées à la mairie de [Localité 10] pour la durée de l’occupation du domaine public par l’échafaudage.
Après le dépôt du rapport de l’expert, les époux [E] ont modifié à la marge le montant de leurs demandes.
Chacun de ces postes, avec le montant réclamé aujourd’hui par les époux [E], sera examiné successivement, précision faite que l’architecte, seul poursuivi par les maîtres d’ouvrage, ne l’est que pour sa propre faute – ce qui rend inutile les développements des intimées sur l’application d’une clause d’exclusion de solidarité – et qu’il ne peut être tenu responsable de la défaillance de la société CPF en cours de chantier.
Le trop-versé à la société CPF France chiffré à 129 212,16 euros TTC
De façon générale, dans le cadre de ses missions de direction, l’architecte doit vérifier les situations des entreprises et leurs décomptes en fonction de l’avancement du chantier. Il engage sa responsabilité à l’égard du maître d’ouvrage en cas d’erreur et d’insuffisance de vérification.
Selon l’expert, après examen des pièces, les travaux réalisés par la société CPF s’élèvent à une somme totale de 229 261,90 euros alors que les époux [E] ont payé 358 474,06 euros soit un trop-payé par eux de 129 212,16 euros.
L’expert a examiné pour parvenir à ces conclusions, les ordres de service, les CR, le constat d’huissier dressé en présence de la société MDA+A. Il a effectué un travail précis et complet.
En effet, selon l’expert, si la société MDA+A, au vu de sa mission de maîtrise d »uvre, a rempli sa mission technique correctement, comme le montrent les nombreux CR de chantier, en revanche elle n’a pas tenu compte de l’équilibre financier et des retenues nécessaires pour assurer la bonne gestion du chantier.
Il remarque ainsi des insuffisances importantes car la seule retenue appliquée par l’architecte sur les situations des travaux concerne le ravalement des façades (lot n° 3) de 50 % de 30 558,3 euros.
Pour le reste, il affirme qu’aucune retenue n’apparaît ce qui est contraire à la norme NFP 03-001 applicable aux marchés privés à laquelle il est fait référence sur les ordres de services.
La société d’architecture ne conteste pas avoir validé les situations de travaux permettant le paiement de la société CPF. Elle conteste les pièces sur lesquelles l’expert s’est fondé pour estimer l’avancement des travaux, essentiellement le constat d’huissier dressé en sa présence le 9 mai 2016.
Toutefois, ces remarques ont pu être présentées à l’expert dans le cadre des dires des parties. Celui-ci a estimé que ce constat d’huissier dressé de façon contradictoire et les CR de chantier établis par l’architecte, en dépit du fait que les travaux avaient été achevés en 2019 par d’autres sociétés, lui permettaient de donner un avis éclairé sur l’état d’avancement des travaux à l’époque de l’abandon de chantier par la société CPF. D’ailleurs lorsque les pièces ne le lui permettaient pas ou lorsque la société MDA+A n’a pas déféré à sa demande de communication, il l’a indiqué expressément. Ainsi, la société MDA+A conteste en vain ces conclusions sans fournir de preuves capables de les combattre. Les conclusions de l’expert sont retenues.
Il met en lumière une insuffisance dans la gestion financière de la société MDA+A.
La faute de l’architecte qui a validé des situations de travaux inexactes est établie, sa responsabilité pécuniaire est retenue.
Par ailleurs, si la société Lavigne & Zavani était en charge notamment de la gestion comptable et financière, elle ne peut être incriminée, n’étant pas un professionnel de la construction, dans la mesure où elle a pu se fier à la validation par l’architecte de l’avancement des travaux.
Force est de constater que la faute qui a contribué à la production du préjudice est principalement celle de la société CPF qui n’a pas effectué les travaux pour lesquels elle a été payée.
Cependant, l’architecte qui a validé les situations en donnant aux maîtres d’ouvrage l’indication de leur paiement a aussi contribué à ce dommage dans une moindre part.
L’entier préjudice sur ce point est le trop-versé à la société CPF par les époux de 129 212,16 euros, précision faite qu’ils ont déclaré leur créance au passif de cette société pour la somme de 126 739,34 euros TTC. Il n’est pas donné d’informations sur le recouvrement de cette créance que la société Lavigne & Zavani a tenté de recouvrer. Eu égard à la liquidation de la société, il est douteux que ceci aboutisse.
Quoi qu’il en soit, le trop-perçu par la société CPF constitue un indu pour lequel la société MDA+A doit être incriminée à hauteur de sa faute évaluée à 20 %.
En conséquence, la société MDA+A est condamnée à payer aux époux [E] la somme de 25 842,43 euros en réparation de leur préjudice.
Le trop-versé à l’architecte MDA+A
Estimé par les époux [E] à 8 412,14 euros TTC pour la carence dans le suivi de l’exécution des travaux par l’architecte.
Il faut rappeler que le contrat d’architecte du 13 novembre 2013 prévoyait un taux d’honoraires de 6 % HT sur le montant des travaux estimé à 500 000 euros HT soit un montant de 30 000 euros HT. Le taux de TVA applicable étant de 10 %.
Sa mission étant partielle comme ne comportant pas les phases de conception (études préliminaires, avant-projet sommaire, avant-projet définitif, projet de conception générale) et la phase DCE (dossier de consultation des entreprises) était ramenée, selon l’expert, à son strict minimum. Il regrette à cet égard que l’architecte ne lui ait pas communiqué de précisions sur ce point.
Les missions DCE et de DDP (dossier de déclaration préalable) ont été chiffrées, en plus, à respectivement 980 euros HT et 1 800 euros HT.
L’expert n’a été destinataire que d’une seule note d’honoraires de la société MDA+A, concernant la mission de déclaration de travaux pour un montant de 2 160 euros TTC réglée par la société Lavigne & Zavani.
S’il rappelle les insuffisances dans la gestion financière des travaux, comme évoqué ci-avant, il estime que le suivi technique des travaux a été satisfaisant et affirme ne pas être en mesure de donner un avis sur ce point.
La société MDA+A reconnaît avoir perçu les sommes de 7 752,73 euros TTC et 2 160 euros ce qui n’apparaît pas excessif eu égard au travail qu’elle a fourni.
Ce trop-versé n’est pas démontré, la demande est rejetée.
Le trop-versé à l’architecte MDA+A de 2 160 euros TTC pour la 2e déclaration de travaux
Une deuxième déclaration de travaux a été nécessaire compte tenu du retard pris par l’arrêt des travaux et par la mise au point du redémarrage du chantier. Ce montant de 2 160 euros TTC versé à l’architecte est directement lié à la défaillance de l’entreprise CPF et ne peut être imputé à l’architecte.
Cette affirmation de l’expert est juste, elle est retenue par la cour.
Le montant des travaux d’achèvement du ravalement par la société BTI pour un montant de 30 493,76 euros TTC
Le montant total des travaux du lot ravalement commandés à la société CPF s’élevait à la somme de 203 728,03 euros TTC. Le montant des travaux payés pour ce lot s’élève à la somme de 183 355,23 euros TTC, le solde non réglé de 20 372,80 euros TTC. Les prestations facturées par BTI pour reprendre et achever les travaux s’élèvent à 30 493, 76 euros TTC.
L’expert estime donc que la différence entre le solde du lot et la facture BTI qui correspond à la somme de 10 120,96 euros TTC est un surcoût non justifié pour les époux [E].
Toutefois, ceci est du fait de la société CPF qui a abandonné le chantier et non de l’architecte. De plus, comme le fait remarquer la société MDA+A, le devis a été établi au bénéfice de la copropriété et non des appelants.
La demande est rejetée.
La perte de revenus locatifs pour les deux appartements, 5e droite et 4e gauche
Évaluée, sans être démontrée, par les époux [E] à la somme de 28 709,31 euros.
L’expert affirme que pour la perte de revenus locatif de ces deux appartements, les éléments communiqués ne suffisent pas à expliquer ces pertes, en effet, les traces d’humidités relevées dans l’appartement du 4e étage n’ont pas de lien de causalité avec les non-travaux de ravalement et de couverture non achevés par la société CPF mais plutôt par un défaut d’isolation thermique, de vétusté et de ventilation.
Pour le reste, le retard pris par le chantier est dû à son abandon par la société CPF. Le suivi des travaux comme le montrent les nombreux CR a été assuré par l’architecte.
La demande est rejetée.
Le montant de 438,96 euros de taxes de voirie payé à la mairie de [Localité 10] pour la durée d’occupation du domaine public par un échafaudage
Les droits de voirie correspondent à des taxes municipales calculées sur la base de la surface d’échafaudages occupant le domaine public. Ce montant de 438,96 euros est donc normalement dû.
Ceci ne ressort pas d’une quelconque faute de l’architecte.
7 614,20 euros TTC au titre du coût des travaux de reprise des peintures des boiseries du 6ème étage
L’expert a retenu que les photos, documents et CR communiqués ne permettent pas d’évaluer avec précision ce montant.
La cour n’a pas non plus la preuve de ce poste de préjudice qui est rejeté.
429 euros TTC au titre des frais de dépose des châssis parisiens
Selon l’expert, le coût de la dépose des châssis parisiens doit être pris en compte car les époux [E] avaient demandé la pose de châssis de toit type Vélux (par courriel du 3 mars 2015) et qu’il a été posé des châssis parisiens.
Ceci est un défaut d’exécution, qui n’échet pas à la société MDA+A.
8 074,44 euros au titre des intérêts versés depuis le 5 décembre 2015 sur la fraction de capital correspondant aux fonds débloqués pour régler la société CPF
Des intérêts de 8 074,44 euros ont été payés sur la fraction de capital correspondant aux fonds débloqués à tort au profit de la société CPF, pour des travaux non-effectués, avec l’accord de l’architecte MDA+A qui a validé les situations de travaux.
La faute de l’architecte ci-avant décrite a contribué à la même hauteur de 20 % à la production du dommage, soit la somme de 1 614,88 euros, à laquelle la société MDA+A est condamnée.
5 747,50 euros TTC au titre des travaux de remise en état de l’appartement mis à disposition des ouvriers de la société CPF
L’architecte ne peut évidemment pas être tenu des éventuelles dégradations commises par les salariés de la société CPF. Ce préjudice ne ressort pas d’une faute de l’architecte. La demande est rejetée.
20 000 euros au titre de leur préjudice moral
Le préjudice moral ressenti par les époux [E] du fait de l’abandon du chantier et du retard dans l’exécution des travaux est également du fait de la société CPF. La demande est rejetée.
Ainsi le préjudice des époux [E] lié à la seule faute de la société d’architecture MDA+A est chiffré à la somme de 27 457,31 euros avec intérêts à compter du présent arrêt s’agissant d’intérêts compensatoires et leur capitalisation dans les conditions légales.
Le jugement est infirmé.
Sur l’action directe à l’encontre de la MAF
Les époux [E] agissent à l’encontre de la MAF sur le fondement de l’article L.124-3 du code des assurances aux termes duquel « Le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L’assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n’a pas été désintéressé, jusqu’à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l’assuré. ».
La responsabilité de son assurée étant retenue, l’action à l’encontre de la MAF peut prospérer à hauteur de sa condamnation, dans les limites de son contrat relativement à sa franchise et son plafond.
Sur les dépens et les autres frais de procédure
Les sociétés MDA+ A et MAF, qui succombent, sont condamnées aux dépens de première instance et d’appel. Le jugement est infirmé.
Selon l’article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Le jugement est également infirmé sur ce point et les circonstances de l’espèce justifient de condamner les sociétés MDA+ A et MAF à payer à M. et Mme [E] une indemnité de 5 000 euros au titre des frais exclus des dépens exposés en cause d’appel.
La cour,
Statuant dans les limites de l’appel, après débats en audience publique, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
Condamne in solidum les sociétés MDA+ A et Mutuelle des architectes français, dans la limite pour cette dernière de son contrat s’agissant des plafonds et franchises, à payer à M. [P] [E] et Mme [H] [T] épouse [E] une somme de 27 457,31 euros avec intérêts à compter du présent arrêt et capitalisation desdits intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;
Condamne in solidum les sociétés MDA+ A et Mutuelle des architectes français à payer les entiers dépens de première instance et d’appel ;
Condamne in solidum les sociétés MDA+ A et Mutuelle des architectes français à payer à M. [P] [E] et Mme [H] [T] épouse [E] une indemnité de 5 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Fabienne TROUILLER, Présidente et par Madame Jeannette BELROSE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
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