L’Essentiel : Madame [O] [M] a été victime d’une fraude sur son compte à la SOCIETE GENERALE, entraînant un préjudice de 8.110,40 euros. Malgré ses demandes de remboursement et de reconnaissance de ses droits, le tribunal a jugé que la banque avait correctement exécuté les opérations, sans engager sa responsabilité. En conséquence, Madame [M] a été déboutée de ses demandes et condamnée aux dépens. Le tribunal a également décidé de ne pas appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, laissant Madame [M] sans recours financier supplémentaire. L’affaire a été mise en délibéré pour janvier 2025.
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Exposé du litigeMadame [O] [M] a été victime d’une fraude sur son compte à la SOCIETE GENERALE. Le 30 octobre 2020, un chèque de 4.700 euros a été crédité sur son compte, permettant au fraudeur d’effectuer des virements et des paiements par carte totalisant 7.500 euros le même jour. Le chèque a été déclaré volé, entraînant sa contrepassation le 4 novembre 2020. En juillet 2023, Madame [M] a assigné la banque pour obtenir le remboursement des sommes perdues. Demandes des partiesLa SOCIETE GENERALE a demandé au tribunal de débouter Madame [M] de ses demandes et de la condamner à verser 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. En revanche, Madame [M] a demandé la reconnaissance de ses demandes, le remboursement de 8.110,40 euros avec intérêts, ainsi que des frais supplémentaires au titre des articles 700 et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Ordonnance de clôtureL’ordonnance de clôture a été rendue le 26 septembre 2024, avec une audience fixée au 5 décembre 2024. L’affaire a été mise en délibéré pour le 16 janvier 2025. Sur les demandes de remboursementLe tribunal a examiné les articles du code monétaire et financier relatifs au consentement et à la responsabilité des prestataires de services de paiement. Il a été établi que la SOCIETE GENERALE avait correctement exécuté les opérations ordonnées par Madame [M], qui avait elle-même transmis des informations au fraudeur. La banque n’avait pas à contrôler l’usage des fonds, et sa responsabilité ne pouvait être engagée. Sur les frais irrépétibles et les dépensMadame [M] ayant succombé dans ses demandes, elle a été condamnée aux dépens. Toutefois, le tribunal a décidé de ne pas faire droit aux demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Décision du tribunalLe tribunal a débouté Madame [O] [M] de toutes ses demandes contre la SOCIETE GENERALE, l’a condamnée aux dépens, et a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la responsabilité de la banque en cas de fraude sur un compte ?La responsabilité de la banque dans le cadre d’opérations de paiement est régie par le Code monétaire et financier, notamment par les articles L.133-6, L.133-7, L.133-19 et L.133-23. L’article L.133-6 stipule que « une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution ». Cela signifie que la banque doit s’assurer que le consentement a été donné avant d’exécuter une opération. De plus, l’article L.133-19 précise que « le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L. 133-16 et L. 133-17 ». Ainsi, si le client a transmis ses informations de connexion à un tiers, comme dans le cas de Madame [M], la banque peut ne pas être tenue responsable des pertes subies. Enfin, l’article L.133-23 impose à la banque de prouver que l’opération a été authentifiée et que le client n’a pas commis de négligence grave. Dans cette affaire, la banque a démontré que les opérations étaient dûment autorisées par la cliente. Quels sont les droits du client en matière de remboursement après une fraude ?Les droits du client en matière de remboursement après une fraude sont également encadrés par le Code monétaire et financier, notamment par les articles L.133-19 et L.133-23. L’article L.133-19 indique que le client supporte les pertes si celles-ci résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou d’une négligence grave. Cela signifie que si le client a été imprudent, il ne pourra pas obtenir de remboursement. Par ailleurs, l’article L.133-23 précise que lorsque le client nie avoir autorisé une opération, il incombe à la banque de prouver que l’opération a été authentifiée et correctement exécutée. Cela implique que le client doit être en mesure de démontrer qu’il n’a pas donné son consentement. Dans le cas de Madame [M], elle a reconnu avoir transmis ses informations au fraudeur, ce qui constitue une négligence grave. Par conséquent, ses droits au remboursement sont limités, et la banque ne peut être tenue responsable des pertes subies. Quelles sont les implications des articles 700 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ?Les articles 700 du Code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991 traitent des frais irrépétibles et des dépens dans le cadre d’une procédure judiciaire. L’article 700 du Code de procédure civile stipule que « le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles ». Cela signifie que si une partie perd son procès, elle peut être condamnée à rembourser les frais engagés par l’autre partie. De son côté, l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit également la possibilité de condamner la partie perdante à verser une somme pour couvrir les frais d’avocat. Dans cette affaire, le tribunal a débouté Madame [M] de ses demandes et a décidé de la condamner aux dépens. Cependant, il a également jugé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700, ce qui signifie que Madame [M] ne devra pas payer de frais supplémentaires à la Société Générale au titre des frais irrépétibles. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
à
Me SMAIL
Me MEUNIER
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9ème chambre 3ème section
N° RG 23/09486
N° Portalis 352J-W-B7H-C2GY7
N° MINUTE : 5
Assignation du :
21 Juillet 2023
JUGEMENT
rendu le 16 Janvier 2025
DEMANDERESSE
Madame [O] [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Nadia SMAIL, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire #208
DÉFENDERESSE
S.A. SOCIETE GENERALE
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Maître Caroline MEUNIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0126
Décision du 16 Janvier 2025
9ème chambre 3ème section
N° RG 23/09486 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2GY7
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Béatrice CHARLIER-BONATTI, Vice-président, statuant en juge unique assistée de Chloé DOS SANTOS, Greffière.
DÉBATS
A l’audience du 05 Décembre 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue le 16 Janvier 2025.
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Madame [O] [M] détenait un compte dans les livres de la banque SOCIETE GENERALE et a été victime d’une fraude qui s’est déroulée ainsi : Le 30 octobre 2020, un chèque a été porté au crédit de son compte pour un montant de 4.700 euros, à la suite d’une remise effectuée le 29 octobre 2020; grâce à la provision ainsi constituée, le fraudeur a réalisé 3 virements pour un montant global de 4.000 euros, le 30 octobre 2020, 4 paiements par carte vers un compte Lydia pour un montant global de 3.500 euros le même jour, soit le 30 octobre 2020 .
Par la suite, le chèque litigieux ayant fait l’objet d’une déclaration de vol , le montant du chèque a été contrepassé le 4 novembre 2020.
Par acte de commissaire de justice en date du 21 juillet 2023, Madame [M] a assigné la SOCIETE GENERALE aux fins d’obtenir le remboursement de ces sommes.
Par conclusions en date du 3 juillet 2024, la SOCIETE GENERALE demande au tribunal de :
“- DEBOUTER Madame [M] de l’ensemble de ses demandes ;
– CONDAMNER Madame [M] à verser à SOCIETE GENERALE la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.”
Par conclusions en date du 4 septembre 2024, Madame [O] [M] demande au tribunal de :
“- DECLARER recevable et bien fondée Mme [M] en ses présentes demandes ;
– CONDAMNER la Société Générale au paiement de la somme de 8 110,40 € augmentée des intérêts au taux légal majoré à compter de la date de la mise en demeure, soit le 5 novembre 2022 ;
– PRONONCER la capitalisation des intérêts échus annuellement ;
– CONDAMNER la Société Générale au paiement d’une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens et 1 500 € au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
– DEBOUTER la Société Générale de l’ensemble de ses demandes.”
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures susvisées pour l’exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 26 septembre 2024 avec fixation à l’audience de juge unique du 5 décembre 2024. L’affaire a été mise en délibéré au 16 janvier 2025.
I. Sur les demandes de remboursement
L’article L.133-6 du code monétaire et financier dispose que :
« I. – Une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution.
Toutefois, le payeur et son prestataire de services de paiement peuvent convenir que le payeur pourra donner son consentement à l’opération de paiement après l’exécution de cette dernière.
II. – Une série d’opérations de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à l’exécution de la série d’opérations, notamment sous la forme d’un mandat de prélèvement ».
L’article L.133-7 du même code souligne que « le consentement est donné sous la forme convenue [en ce compris une authentification forte] entre le payeur et son prestataire de services de paiement […] ».
Les articles L.133-3, L.133-8 et L.133-13 du code monétaire et financier prévoient quant à eux qu’à réception par l’établissement bancaire du consentement de son client, et de l’autorisation susmentionnée, celui-ci a l’obligation de l’exécuter, l’opération étant devenue irrévocable.
L’article L. 133-4 du code monétaire et financier qui impose aux prestataires de services de paiement de mettre en place un dispositif de sécurisation des instruments de paiement dispose notamment que :
« a) Les données de sécurité personnalisées s’entendent des données personnalisées fournies à un utilisateur de services de paiement par le prestataire de services de paiement à des fins d’authentification; […]
c) Un instrument de paiement s’entend, alternativement ou cumulativement, de tout dispositif personnalisé et de l’ensemble de procédures convenu entre l’utilisateur de services de paiement et le prestataire de services de paiement et « utilisé » pour donner un ordre de paiement ; […]
e) Une authentification s’entend d’une procédure permettant au prestataire de services de paiement de vérifier l’identité d’un utilisateur de services de paiement ou la validité de l’utilisation d’un instrument de paiement spécifique, y compris l’utilisation des données de sécurité personnalisées de l’utilisateur.
f) Une authentification forte du client s’entend d’une authentification reposant sur l’utilisation de deux éléments ou plus appartenant aux catégories » connaissance », » possession » et « inhérence » et indépendants en ce sens que la compromission de l’un ne remet pas en question la fiabilité des autres, et qui est conçue de manière à protéger
la confidentialité des données d’authentification ; »
L’article L.133-44 du code monétaire et financier poursuit en disposant :
« I. – Le prestataire de services de paiement applique l’authentification forte du client définie au f de l’article L. 133-4 lorsque le payeur :
1° Accède à son compte de paiement en ligne ;
2° Initie une opération de paiement électronique ;
3° Exécute une opération par le biais d’un moyen de communication à distance, susceptible de comporter un risque de fraude en matière de paiement ou de toute autre utilisation frauduleuse.
II. – Pour les opérations de paiement électronique à distance, l’authentification forte du client définie au f de l’article L. 133-4 comporte des éléments qui établissent un lien dynamique entre l’opération, le montant et le bénéficiaire donnés. »
L’article L. 133-16 du code monétaire et financier dispose que « dès qu’il reçoit l’instrument de paiement, l’utilisateur de services de paiement prend toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés. Il utilise l’instrument de paiement conformément aux conditions régissant sa délivrance et son utilisation ».
L’article L 133-19 du code monétaire et financier énonce en son IV que « le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L. 133-16 et L. 133-17. »
Enfin, l’article L.133-21 du code de monétaire et financer dispose :
« Un ordre de paiement exécuté conformément à l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est réputé dûment exécuté pour ce qui concerne le bénéficiaire désigné par l’identifiant unique.
Si l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est inexact, le prestataire de services de paiement n’est pas responsable de la mauvaise exécution ou de la non-exécution de l’opération de paiement […] ».
L’article L.133-23 du code monétaire et financier prévoit que :
« Lorsqu’un utilisateur de services de paiement nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, ou affirme que l’opération de paiement n’a pas été exécutée correctement, il incombe à son prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée et qu’elle n’a pas été affectée par une déficience technique ou autre.
L’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière. Le prestataire de services de paiement, y compris, le cas échéant, le prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, fournit des éléments afin de prouver la fraude ou la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement.»
En vertu de l’article L.133-23 du code monétaire et financier, la responsabilité du prestataire de services de paiement n’est pas engagée s’il prouve la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement.
Cette négligence grave évoquée aux termes de l’article L. 133-19 susvisé s’apprécie in concreto, par référence à un utilisateur normalement attentif.
Sur ce point, Madame [M] reconnaît qu’elle a transmis au fraudeur les numéros de connexion et code de carte qui lui ont permis de faire les achats vers un compte Lydia.
Par ailleurs, il résulte de ses propres déclarations notamment à l’occasion de sa plainte, qu’elle a réalisé elle même les virements litigieux de 4.000 euros
La SOCIETE GENERALE, simple teneuse de compte, a donc convenablement exécuté les opérations ordonnées par sa cliente.
La SOCIETE GENERALE, banque émettrice des virements litigieux, avait une obligation de résultat dans l’exécution des ordres donnés et simple mandataire du client, elle n’avait pas à contrôler l’usage de fonds dont ils avaient la libre disposition.
Le principe de la non-ingérence du banquier dans les affaires de son client cède devant son obligation de vigilance portant sur la régularité apparente du fonctionnement d’un compte. Ce principe oblige le banquier à exécuter rapidement les instructions reçues de son client pour son compte dès lors que les instructions qu’il reçoit ont l’apparence de la régularité.
En application des principes de non ingérence et de non immixion qui s’imposent à un établissement bancaire, la SOCIETE GENERALE ne pouvait s’opposer aux virements émanant de sa cliente, parfaitement authentifiés et dûment autorisés.Sa responsabilité ne peut être mise en cause.
En conséquence de quoi, Madame [O] [M] sera déboutée de ses demandes.
II. Sur les frais irrépétibles et les dépens
Succombant à l’instance, Madame [O] [M] sera condamnée aux dépens.
L’équité commande cependant de ne pas faire droit aux demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe :
DEBOUTE Madame [O] [M] de l’ensemble de ses demandes formées contre la SOCIETE GENERALE ;
CONDAMNE Madame [O] [M] aux dépens ;
DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait et jugé à Paris le 16 Janvier 2025.
LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE
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