Résolution d’un protocole d’accord pour inexécution d’un remboursement de prêt

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Résolution d’un protocole d’accord pour inexécution d’un remboursement de prêt

L’Essentiel : Le 28 février 2017, Madame [K] [O] a accordé un prêt de 300 000 euros à la société RENAISSANCE, avec un remboursement prévu le 31 décembre 2017. En raison de l’absence de remboursement, elle a mis en demeure la société en novembre 2019. En octobre 2022, une sommation de paiement de 398 411,96 euros a été signifiée. Un juge a autorisé l’inscription d’une hypothèque provisoire, et en décembre 2022, Madame [K] [O] a assigné la société en justice. Le tribunal a finalement condamné RENAISSANCE à rembourser 284 600 euros, ainsi que des pénalités de retard.

Prêt consenti à la société RENAISSANCE

Le 28 février 2017, Madame [K] [O] a accordé un prêt de 300 000 euros à la société RENAISSANCE, représentée par Monsieur [E] [N]. Ce prêt devait être remboursé en une seule échéance le 31 décembre 2017, avec un taux d’intérêt annuel de 6,4% et des paiements d’intérêts mensuels de 1 600 euros. En cas de retard, une pénalité de 10 000 euros était prévue.

Absence de remboursement et mise en demeure

À la date d’échéance, la société RENAISSANCE n’a pas remboursé le prêt. Après plusieurs échanges, Madame [K] [O] a mis en demeure la société par lettre recommandée le 21 novembre 2019. En octobre 2022, elle a signifié une sommation de paiement de 398 411,96 euros, incluant le capital, les intérêts, les pénalités et les frais d’huissier.

Inscription d’une hypothèque provisoire

Le 14 novembre 2022, un juge a autorisé Madame [K] [O] à inscrire une hypothèque provisoire sur des biens de la société RENAISSANCE, pour un montant de 397 948 euros. Cette hypothèque a été inscrite le 1er décembre 2022 et notifiée à la société.

Assignation en justice

Le 27 décembre 2022, Madame [K] [O] a assigné la société RENAISSANCE devant le tribunal judiciaire de Tours pour obtenir le paiement des sommes dues. Un protocole d’accord a été signé le 17 mars 2023, prévoyant un remboursement global de 385 000 euros, mais la société n’a versé que 30 000 euros.

Inexécution du protocole d’accord

En raison de l’inexécution du protocole, Madame [K] [O] a mis en demeure la société RENAISSANCE de régler la somme de 397 948 euros, déduction faite des paiements partiels. Elle a demandé la résolution du protocole d’accord pour inexécution.

Demandes de Madame [K] [O]

Madame [K] [O] a sollicité le remboursement du prêt, des intérêts, des pénalités, ainsi que des dommages-intérêts pour préjudice moral et économique. Elle a également demandé la capitalisation des intérêts échus et la condamnation de la société aux dépens.

Réponse de la société RENAISSANCE

La société RENAISSANCE a demandé le déboutement de Madame [K] [O], arguant que les parties avaient signé une transaction reportant le remboursement jusqu’à la vente de certains biens.

Décision du tribunal

Le tribunal a prononcé la résolution du protocole d’accord pour inexécution, condamnant la société RENAISSANCE à rembourser 284 600 euros, plus 10 000 euros de pénalités de retard. Madame [K] [O] a été déboutée de ses demandes de dommages-intérêts pour préjudice économique, mais a obtenu 5 000 euros pour préjudice moral. La société a également été condamnée à payer 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature et les conséquences de la résolution du protocole d’accord du 17 mars 2023 ?

La résolution du protocole d’accord du 17 mars 2023 est régie par les dispositions de l’article 1217 du Code civil, qui stipule que :

« La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution. »

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

En l’espèce, Madame [K] [O] a constaté que la société RENAISSANCE n’a pas respecté ses engagements de remboursement, n’ayant versé que 30 000 euros sur les 385 000 euros dus.

Ainsi, elle a notifié la caducité et/ou résolution du protocole en raison de son inexécution.

Le tribunal a donc prononcé la résolution du protocole d’accord, considérant que l’exécution imparfaite justifiait cette décision, conformément à l’article 1228 du Code civil, qui permet au juge de constater ou prononcer la résolution du contrat.

Quels sont les droits de Madame [K] [O] concernant le remboursement du prêt ?

Les droits de Madame [K] [O] en matière de remboursement du prêt sont fondés sur plusieurs articles du Code civil, notamment l’article 1103, qui dispose que :

« Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. »

De plus, l’article 1902 précise que :

« L’emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en même quantité et qualité et au terme convenu. »

Dans le cas présent, la reconnaissance de dette stipule un montant de 300 000 euros à rembourser en une seule échéance au 31 décembre 2017, avec un taux d’intérêt de 6,4 %.

Madame [K] [O] a produit des preuves de la remise des fonds et des paiements partiels effectués par la société RENAISSANCE.

Elle a également le droit de demander des intérêts au taux contractuel, conformément à l’article 1907, qui permet de stipuler des intérêts pour un prêt d’argent.

En conséquence, le tribunal a condamné la société RENAISSANCE à rembourser la somme de 284 600 euros en principal, avec intérêts au taux contractuel de 6,4 % à compter du 1er mars 2017.

Quelles sont les implications de la clause pénale stipulée dans le contrat de prêt ?

La clause pénale stipulée dans le contrat de prêt, qui prévoit une pénalité de 10 000 euros en cas de retard de remboursement, est régie par l’article 1231-5 du Code civil, qui précise que :

« La clause pénale est une stipulation par laquelle les parties évaluent d’avance le préjudice résultant de l’inexécution d’une obligation. »

Cette clause a pour but d’évaluer forfaitairement l’indemnité due en cas d’inexécution contractuelle.

Dans le cas présent, la société RENAISSANCE a manqué à son obligation de remboursement, ce qui a entraîné l’application de cette clause.

Le tribunal a jugé que la clause pénale ne procure pas à Madame [K] [O] un avantage manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement subi, et a donc condamné la société RENAISSANCE à payer la somme de 10 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

Quels sont les critères d’indemnisation des préjudices subis par Madame [K] [O] ?

L’indemnisation des préjudices subis par Madame [K] [O] est régie par l’article 1231-6 du Code civil, qui dispose que :

« Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. »

Les dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d’aucune perte.

Cependant, si le créancier a subi un préjudice indépendant du retard, il peut obtenir des dommages et intérêts distincts.

Dans cette affaire, Madame [K] [O] a demandé une indemnisation pour divers préjudices économiques et moraux.

Le tribunal a reconnu un préjudice moral, en raison des tracas liés au retard de paiement, et a accordé une indemnisation de 5 000 euros.

En revanche, les demandes d’indemnisation pour préjudice économique et perte de chance ont été rejetées, le lien de causalité entre ces préjudices et le retard de paiement n’étant pas suffisamment établi.

N° Minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOURS

PREMIERE CHAMBRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT RENDU LE 14 JANVIER 2025

N° RG 23/00007 – N° Portalis DBYF-W-B7G-ISMC

DEMANDERESSE

Madame [K] [O] divorcée [L]
née le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 6]
de nationalité Française, demeurant Chez Madame [B] – [Adresse 3]
représentée par Maître Antoine PLESSIS de l’AARPI OMNIA LEGIS, avocats au barreau de TOURS, avocats postulant, Me ALON LEIBA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

S.A.S.U. RENAISSANCE
(RCS de TOURS n° 802 615 146), dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Laurent SUZANNE de la SELARL ETHIS AVOCATS, avocats au barreau de TOURS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame B. CHEVALIER, Vice-Présidente, siégeant comme Juge Unique en application des articles 812 et suivants du Code de procédure civile,

Assistée de V. AUGIS, Greffier, lors des débats et C. FLAMAND, Greffier, lors du prononcé du jugement.

DÉBATS :

A l’audience publique du 12 Novembre 2024 avec indication que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2025.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 28 février 2017, Madame [K] [O] a consenti à la société par actions simplifiée RENAISSANCE, représentée par son président et unique associé Monsieur [E] [N], un prêt d’un montant de 300 000 euros sur une durée de 10 mois à compter du 1er mars 2017.

La reconnaissance de dette prévoit que le prêt est à rembourser en une échéance unique le 31 décembre 2017, au taux d’intérêt annuel de 6,4%, les intérêts étant payés mensuellement par échéances de 1 600 euros. Il est également prévu que tout retard de remboursement du principal au delà du 31 décembre 2017 entraînera une pénalité forfaitaire de 10 000 euros après simple recommandé AR.

La remise des fonds a eu lieu les 7 et 30 mars 2017.

En l’absence de remboursement au 31 décembre 2017 et après plusieurs échanges entre les parties, Madame [K] [O] a mis en demeure la société RENAISSANCE et son président par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 novembre 2019 de lui rembourser la somme de 300 000 euros.

Elle a fait signifier le 18 octobre 2022 une sommation de payer la somme de 398 411,96 euros au titre du prêt, des intérêts, pénalités et frais d’huissier.

Par ordonnance du 14 novembre 2022, Madame [K] [O] a été autorisée par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Tours à faire inscrire une hypothèque provisoire à concurrence de sa créance arrêtée au 12 octobre 2022 (397 948 euros) sur les lots n°36 et n°37 de l’immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 5] (94) appartenant à la société RENAISSANCE.

L’hypothèque a été inscrite le 1er décembre 2022 et dénoncée à la société RENAISSANCE par acte d’huissier du 7 décembre 2022.

Par acte d’huissier du 27 décembre 2022, Madame [K] [O] a fait assigner la société RENAISSANCE devant le tribunal judiciaire de Tours en paiement des sommes dues.

Un protocole d’accord a été signé entre les parties le 17 mars 2023 sur la base d’un remboursement global de la somme de 385 000 euros avec un nouveau calendrier.

En l’absence d’exécution de ce protocole et par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 janvier 2024, Madame [K] [O] a mis en demeure la société RENAISSANCE de lui régler la somme de 397 948 euros arrêtée au 13 octobre 2022, outre les intérêts courants, déduction faite de la somme de 30 000 euros versée entre le 7 juillet et le 25 octobre 2023.

Par ses dernières conclusions d’actualisation en demande notifiées par voie électronique le 25 octobre 2024 et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, elle demande au tribunal, au visa des articles 1101 et suivants du Code civil, 1104 du Code civil, 1892 à 1914 du Code civil, 1895, 1902 à 1904, et 1907 du Code civil, 1343, 1343-1, 1343-2 et 1231-1 du Code civil, 1342-10 du Code civil, 1231, 1231-1, 1231-2, 1231-3 et suivants du Code civil, 1240, 1300 et suivants du Code civil, 1303 et 1303-4 du Code civil, R533-1 du Code des procédures civiles d’exécution, 1217 à 1231-7 du Code civil, 1224, 1227, 1228 du Code civil, de :
A TITRE PRINCIPAL :
– PRONONCER la résolution du protocole d’accord du 17 mars 2023 pour inexécution par la société RENAISSANCE et subsidiairement, sa déchéance ;
– DEBOUTER la société RENAISSANCE de ses demandes en ce qu’elles sont mal-fondées ou infondées ;
– CONDAMNER la société RENAISSANCE à lui verser, sur le fondement de la responsabilité contractuelle :
o la somme de 284.600 euros au titre du remboursement du prêt en principal, dû à compter du 1er janvier 2018, déduction faite de la somme totale de 15.400 euros correspondant à l’imputation et ventilation des versements effectués par la société RENAISSANCE entre le 03 avril 2017 et 05 février 2018 ;
o les intérêts au taux contractuel de 6,4 % à compter de la date du prêt au 1er mars 2017, dont une somme totale de 39.900 euros a déjà été versée par la société RENAISSANCE au titre des intérêts échus selon l’imputation et ventilation des versements effectués par la société RENAISSANCE entre le 03
avril 2017 et le 25 octobre 2023, et viendra donc en déduction de la dette des intérêts ;
o la somme de 10.000 euros au titre de la pénalité stipulée et due à cause du retard dans le remboursement du prêt, à compter de la lettre recommandée avec accusé de réception du 21 novembre 2019, reçue le 25 novembre 2019 par la société RENAISSANCE ;
o la somme de 30.000 euros au titre de son préjudice économique et financier (10.000 euros) et de perte de chance (20.000 euros) ;
o la somme de 15.000 euros au titre de préjudice moral, fondé plus particulièrement sur la mauvaise foi, la résistance abusive et la tromperie de la société RENAISSANCE,

A TITRE SUBSIDAIRE,
– CONDAMNER la société RENAISSANCE à lui verser, sur le fondement de la responsabilité extra-contractuelle :
o la somme de 284.600 euros, déduction faite de la somme totale de 15.400 euros correspondant à l’imputation et ventilation des versements effectués par la société RENAISSANCE entre le 03 avril 2017 et 05 février 2018 ;
o des intérêts à un taux de 6,4 % à compter du 1 er mars 2017, dont une somme
totale de 39.900 euros a déjà été versée par la société RENAISSANCE au titre des intérêts échus selon l’imputation et ventilation des versements effectués par la société RENAISSANCE entre le 03 avril 2017 et le 25 octobre 2023, et viendra
donc en déduction de la dette des intérêts ;
o la somme de 10.000 euros au titre de pénalité de retard, suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 21 novembre 2019, reçue le 25 novembre 2019 par la société RENAISSANCE ;
o la somme de 30.000 euros au titre de son préjudice économique et financier (10.000 euros) et de perte de chance (20.000 euros) ;
o la somme de 15.000 euros au titre de préjudice moral, fondé plus particulièrement sur la mauvaise foi, la résistance abusive et la tromperie de la société RENAISSANCE,

EN TOUT ETAT DE CAUSE,
– DEBOUTER la société RENAISSANCE de ses demandes en ce qu’elles sont mal-fondées ou infondées ;
– CONDAMNER la société RENAISSANCE à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– CONDAMNER la société RENAISSANCE aux entiers dépens, comprenant
notamment le montant de la sommation du 18 octobre 2022 et de sa dénonciation par Huissier et la signification de la présente assignation ;
– CONDAMNER la société RENAISSANCE aux frais exposés par elle auprès du service de la publicité foncière et notamment aux frais d’hypothèque (3.045 euros) ;
– RAPPELER et en tant que de besoin ORDONNER l’exécution provisoire.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 septembre 2023 et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la société RENAISSANCE demande au tribunal de débouter Madame [K] [O] de toutes ses demandes au motif que les parties ont signé une transaction par laquelle la demanderesse a accepté le report de la date de remboursement du capital, des intérêts et de l’indemnité, jusquà la date effective de la vente par la société RENAISSANCE des lots de son immeuble de [Localité 5].

Le tribunal renvoie aux écritures des parties par application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile et de l’article 768 du Code de procédure civile pour un exposé plus amplement détaillé de leurs argumentaires, dont l’essentiel sera repris à l’occasion de l’examen des moyens et prétentions qui y sont articulés.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 octobre 2024 et l’affaire a été plaidée à l’audience du 12 novembre 2024.

MOTIVATION :

Sur la résolution du protocole d’accord du 17 mars 2023 :

Aux termes de l’article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

L’article 1228 du code civil dispose que le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.

En l’espèce, par le protocole d’accord signé entre les parties le 17 mars 2023 (pièce n°1 des productions de la société RENAISSANCE) un nouvel accord est conclu sur la base d’un remboursement global de 385 000 euros :
– la société RENAISSANCE s’engage sur un nouvel échéancier de remboursement selon le calendrier suivant :
– 25 300 euros déjà remboursés depuis 2017,
– 25 000 euros à la réitération de l’acte du lot 28 sous promesse prévu en avril 2023,
– 25 000 euros à la vente du sous-lot rdc en septembre 2023,
– 9 700 euros à la vente du lot 36 (R+1 et R+2) en octobre 2023,
– 300 000 euros à la vente du lot 37 avant fin 2023.
– il est prévu que l’hypothèque prise par Madame [K] [O] sur le lot 36 sera levée au jour du premier paiement de 25 000 euros en avril 2023, les frais de levée d’hypothèque étant à la charge de la Société RENAISSANCE.

Madame [K] [O] fait valoir sans être contredite que la société RENAISSANCE ne lui a versé que la somme de 30 000 euros en exécution de ce protocole. Elle en justifie par la production de ses relevés bancaires (pièces n°31-1 et 31-2) qui établissent deux paiements à hauteur de 25 000 euros le 7 juillet 2023 et de 5 000 euros le 25 octobre 2023.

Elle justifie avoir mis en demeure la société RENAISSANCE de lui régler la somme de 397 948 euros arrêtée au 13 octobre 2022, outre les intérêts courants, déduction faite de la somme de 30 000 euros versée entre le 7 juillet et le 25 octobre 2023 par lettre recommandé avec accusé de réception du 11 janvier 204 reçue le 23 janvier 2024.
Par ce même courrier, elle a notifié la caducité et/ou résolution du protocole en raison de son inexécution et de sa défaillance.

Il est ainsi établi par les pièces versées aux débats que la société RENAISSANCE n’a pas exécuté le protocole d’accord conclu le 17 mars 2023 puisqu’elle n’a versé à Madame [K] [O] que la somme de 30 000 euros sur la somme de 385 000 euros qu’elle devait lui payer.

Compte tenu de l’exécution imparfaite du protocole d’accord du 17 mars 2023, il y a lieu de faire droit à la demande de Madame [K] [O] et d’en prononcer la résolution.

Sur la demande en remboursement du prêt :

L’article 1103 du Code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 1902 du Code civil prévoit que l’emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en même quantité et qualité et au terme convenu. Les articles 1905 et 1907 du même code précisent pour leur part qu’il est permis de stipuler des intérêts pour simple prêt d’argent.

Aux termes de l’article 1342-10 du Code civil :
“Le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu’il paie, celle qu’il entend acquitter.
A défaut d’indication par le débiteur, l’imputation a lieu comme suit : d’abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d’intérêt d’acquitter. A égalité d’intérêt, l’imputation se fait sur la plus ancienne ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement.”

En l’espèce, Madame [K] [O] justifie du bien-fondé de sa demande en paiement en produisant notamment les pièces suivantes :
– La reconnaissance de dette de la société RENAISSANCE envers elle en date du 28 février 2017 (pièce n°3) pour un montant de 300 000 euros qui prévoit :
“Montant de la reconnaissance de dette en principal :
° TROIS CENT MILLE EUROS (300.000,00 EUR)
° Durée : Dix (10) mois à compter du 1 er Mars 2017.
° Remboursement : en une échéance unique de 300 000 euros.
° Ladite échéance est fixée pour le : 31 Décembre 2017.
° Taux annuel d’intérêts : 6,4 % l’an.
Le taux effectif global annuel (articles L 313-1 et L 313-2 du Code de la
consommation) ressort à 6,4 % l’an pour le prêt d’un particulier aux Sociétés pour
|’année 2017.

Les intérêts de ce prêt seront payés mensuellement (fin de mois) au pro rata temporis soit 1 600 euros par virements bancaires.
Tout retard de remboursement du principal de 300 000 euros au delà du 31
Décembre 2017 entrainera une pénalité forfaitaire de 10 000 euros, après simple
lettre recommandée A/R” ;
– son relevé de compte BNP PARIBAS du 28 février 2017 au 31 mars 2017 qui établit que les fonds ont été virés sur le compte bancaire de la société RENNAISSANCE les 7 et 30 mars 2017 (pièce n°4) ;
– son relevé de compte du 31 mars 2017 au 15 février 2018 (pièce n°6) qui établit les virements émis par la société RENAISSANCE :
– 3 avril 2017 : 2 500 euros,
– 3 mai 2017 : 2 500 euros,
– 2 juin 2017 : 2 500 euros,
– 7 juillet 2017 : 2 500 euros,
– 1er août 2017 : 2 500 euros,
– 31 août 2017 : 2 500 euros,
– 11 octobre 2017 : 300 euros
– 10 janvier 2018 : 5 000 euros,
– 5 février 2018 : 5 000 euros,
– les courriers électroniques des 3 et 5 mai 2018, 14 août 2018, 23 décembre 2018, 9 janvier 2019 par lesquelles Monsieur [E] [N] président de la société RENAISSANCE l’informe des difficultés financières rencontrées par la société et des dispositions prises pour y remédier et parvenir à la rembourser (pièces n°8) ;
– le courrier du 15 novembre 2019 par lequel la société RENAISSANCE lui indique que le prêt de 300 000 euros va lui être remboursé grâce à un refinancement de l’immeuble qu’elle possède à [Localité 5] à hauteur de 300 000 euros sollicité auprès de la Banque Crédit du Nord (pièce n°9) ;
– La mise en demeure de rembourser la dette de 300 000 euros outre les intérêts, pénalités de retard et accessoires du 21 novembre 2019 adressée par Madame [K] [O] à Monsieur [E] [N] ès qualité de représentant de la société RENAISSANCE et reçue le 25 novembre 2019 (pièce n°10) ;
– la sommation du 18 octobre 2022 d’avoir à payer la somme de 398 411,96 euros comprenant la somme de 300 000 euros en capital, 10 000 euros de pénalité forfaitaire, 113 248 euros d’intérêts échus et 541,12 euros TTC de coût de l’acte hors et après déduction de l’acompte de 25 300 euros (pièce n°11) ;
– le décompte d’intérêts édité le 13 octobre 2022 par le commissaire de Justice qui établit le montant total des intérêts échus depuis le 1er mars 2017 à la somme de 113 248 euros (pièce n°19) et le décompte du dossier (pièce n°18) ;
– son relevé de compte de Monabanq du 30 juin 2023 au 31 octobre 2023 qui fait état d’un virement bancaire de la sociét RENAISSANCE “remboursement partiel de prêt” de 25 000 euros le 7 juillet 2023, 1450 euros le 19 juillet 2023, 5 000 euros le 25 octobre 2023 (pièces n°31-1 et 31-2).

Il n’est pas contesté que la société RENAISSANCE a remboursé à Madame [K] [O] les sommes suivantes :
– 2 500 euros le 3 avril 2017,
– 2 500 euros 3 mai 2017,
– 2 500 euros 2 juin 2017,
– 2 500 euros 7 juillet 2017,
– 2 500 euros 1er août 2017,
– 2 500 euros 31 août 2017,
– 300 euros 11 octobre 2017,
– 5 000 euros 10 janvier 2018,
– 5 000 euros 5 février 2018,
– 25 000 euros le 7 juillet 2023,
– 5 000 euros le 25 octobre 2023.

Soit au total la somme de 55 300 euros.

Madame [K] [O] sollicite que ces sommes soient imputées :
– à hauteur de 39 900 euros sur les intérêts échus (9 900 : 1600 X 6 = 9 600 + 300 + 25 000 + 5 000),
– à hauteur de 15 400 euros sur le capital (900 X 6 = 5 400 + 5000 + 5 000).

En application des dispositions de l’article 1342-10 du Code civil et des dispositions contractuelles qui prévoyait que les intérêts du prêt (6,4% sur la somme de 300 000 euros soit 19 200 euros) seraient versés à hauteur de 1 600 euros par mois pendant 12 mois, il y a lieu de faire droit à sa demande.

Compte tenu de ce qui précède, la société RENAISSANCE sera condamnée à payer à Madame [K] [O], la somme de (300 000 – 15 400) 284 600 euros en principal, avec intérêts au taux contractuel de 6,4% à compter du 1er mars 2017, dont à déduire la somme de 39 900 euros déjà versée à ce titre.

Par ailleurs, la stipulation selon laquelle « Tout retard de remboursement du principal de 300 000 euros au delà du 31 Décembre 2017 entrainera une pénalité forfaitaire de 10 000 euros, après simple lettre recommandée A/R» s’analyse en une clause pénale par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d’avance l’indemnité à laquelle donnera lieu l’inexécution contractuelle.

Il y a lieu de faire application de cette clause qui ne procure pas à Madame [K] [O] un avantage manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement subi par elle et de condamner la société RENAISSANCE au paiement de la somme de 10 000 euros à ce titre.

Cette somme qui présente un caractère indemnitaire produira intérêts au taux légal à compter du présent jugement.

Sur les demandes de Madame [K] [O] au titre de l’indemnisation de ses préjudices :

L’article 1231-6 du code civil dispose que :

« Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d’aucune perte.

Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l’intérêt moratoire. »

En l’espèce, Madame [K] [O] fait valoir que le retard dans le remboursement du prêt l’a placée dans une situation financière délicate. Elle expose qu’elle a ainsi vendu sa résidence principale pour réduire ses charges, ce qui l’a contrainte à louer divers logements et assumer des frais de garde meuble. Elle indique qu’en 2019, pensant obtenir le remboursement de la société RENAISSANCE, elle a fait une offre d’achat pour acquérir une maison et qu’elle a dû assumer une indemnité d’immobilisation de 20 250 euros quand la vente a échoué en l’absence des fonds nécessaires. Elle sollicite ainsi l’indemnisation de cette indemnité au titre de la perte de chance à hauteur de 20 000 euros ainsi que des divers frais engagés (frais de location, de garde meuble, frais bancaires) qui sont selon elle exclusivement liés au retard de paiement.

Il y a lieu cependant de constater que le lien de causalité entre les divers préjudices allégués et le retard de paiement n’est pas suffisamment établi en ce que le choix de vendre un bien immobilier puis d’en louer ou d’en acquérir un autre pour finalement y renoncer ne saurait tenir uniquement au remboursement des sommes prêtées.

Elle sera en conséquence déboutée de ces demandes d’indemnisation au titre du préjudice économique et de la perte de chance.

Les tracas inhérents au retard de paiement, aux nombreuses démarches à accomplir pour obtenir les fonds et à la présente procédure lui ont cependant causé un préjudice moral qui sera indemnisé à hauteur de la somme de 5 000 euros.

Sur les demandes accessoires :

La capitalisation des intérêts échus depuis au moins un an sera ordonnée dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil.

Pour obtenir gain de cause, Madame [K] [O] a engagé des frais dont il serait inéquitable qu’elle conserve l’entière charge.

La société RENAISSANCE sera en conséquence condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la société RENAISSANCE sera condamnée aux dépens qui comprendront les frais d’inscription hypothécaire provisoire et de leur dénonciation. Les frais de sommation de payer ne seront cependant pas compris dans les dépens, à défaut d’être nécessaires à l’instance.

Il sera rappelé qu’en vertu de l’article 514 du code de procédure civile, la présente décision est assortie de plein droit de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire, statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort ;

Prononce la résolution pour inexécution du protocole d’accord conclu entre Madame [K] [O] et la société RENAISSANCE le 17 mars 2023 ;

Condamne la société RENAISSANCE représentée par son président Monsieur Monsieur [E] [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de euros DEUX-CENT-QUATRE-VINGT-QUATRE-MILLE-SIX -CENTS EUROS (284 600 euros en principal, avec intérêts au taux contractuel de 6,4% à compter du 1er mars 2017, dont à déduire la somme de TRENTE-NEUF-MILLE-NEUF-CENTS (39 900 euros) déjà versée à ce titre ;

Condamne la société RENAISSANCE représentée par son président Monsieur Monsieur [E] [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de DIX-MILLE EUROS(10 000 euros) au titre des pénalités de retard avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

Déboute Madame [K] [O] de ses demandes de dommages- intérêts au titre de la perte de chance et au titre du préjudice économique et financier ;

Condamne la société RENAISSANCE représentée par son président Monsieur Monsieur [E] [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de CINQ-MILLE EUROS (5 000 euros) en indemnisation de son préjudice moral ;

Condamne la société RENAISSANCE représentée par son président Monsieur Monsieur [E] [N] à payer à Madame [K] [O] la somme de TROIS-MILLE EUROS (3 000 euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne la capitalisation des intérêts échus depuis au moins un an, dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil ;

Condamne la société RENAISSANCE aux dépens comprenant les frais d’inscription hypothécaire provisoire et de sa dénonciation ;

Rappelle que la présente décision est assortie de plein droit de l’exécution provisoire.

Ainsi fait, jugé et rendu par mise à disposition au Greffe les jour, mois et an que dessus.

LE GREFFIER,

C. FLAMAND
LA PRÉSIDENTE,

B. CHEVALIER


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