Résolution d’un contrat de prêt face à la prescription des demandes

·

·

Résolution d’un contrat de prêt face à la prescription des demandes

L’Essentiel : L’affaire concerne un contrat de prêt souscrit par M. [W] auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Normandie en 2004, pour financer l’acquisition de biens immobiliers. En raison de retards de livraison, une résolution judiciaire des contrats de vente a été prononcée en 2009. M. [W] a ensuite assigné la banque en résolution du contrat de prêt en 2016, mais celle-ci a opposé la prescription. La cour d’appel a été saisie, et la banque a contesté la décision, arguant que l’emprunteur n’avait pas formulé de prétentions claires. La cour de renvoi a jugé le moyen irrecevable.

Contexte de l’affaire

L’affaire concerne un contrat de prêt souscrit par M. [W] auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Normandie, le 6 novembre 2004, pour financer l’acquisition de lots dans un ensemble immobilier. En raison de retards dans la livraison des biens, une résolution judiciaire des contrats de vente a été prononcée en mars 2009, confirmée par un arrêt en mars 2011.

Procédure judiciaire

Le 1er mars 2016, M. [W] a assigné la banque en résolution du contrat de prêt, mais celle-ci a opposé la prescription. La cour d’appel a été saisie pour examiner cette demande, suite à un renvoi après cassation en mars 2021.

Arguments de la banque

La banque a contesté la décision de la cour d’appel qui a prononcé la résolution du contrat de prêt. Elle a fait valoir que l’emprunteur n’avait pas formulé de prétentions claires dans ses conclusions d’appel pour infirmer le jugement précédent, ce qui aurait dû conduire à la confirmation de ce dernier.

Réponse de la cour

La cour de renvoi a statué en conformité avec l’arrêt de cassation. Elle a jugé que le moyen soulevé par la banque, qui appelait à un retour sur la doctrine établie par le précédent arrêt, était irrecevable.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée des articles 562 et 954 du code de procédure civile dans le cadre d’un appel ?

La portée des articles 562 et 954 du code de procédure civile est essentielle pour comprendre les exigences procédurales lors d’un appel.

L’article 562 stipule que :

« L’appel est formé par une déclaration au greffe de la cour d’appel. Cette déclaration doit contenir l’indication des décisions attaquées et des moyens de l’appel. »

Cela signifie que l’appelant doit clairement indiquer les points qu’il conteste et les raisons de son appel.

De plus, l’article 954 précise que :

« Les conclusions de l’appelant doivent contenir, à peine d’irrecevabilité, l’exposé des moyens et les prétentions. »

Ainsi, pour qu’une cour d’appel puisse infirmer un jugement, l’appelant doit formuler des prétentions claires et précises.

Dans le cas présent, la cour d’appel a infirmé le jugement sans que l’emprunteur ait formulé de demande explicite concernant la prescription, ce qui constitue une violation des exigences posées par ces articles.

Comment l’article 455 du code de procédure civile s’applique-t-il à la motivation des décisions judiciaires ?

L’article 455 du code de procédure civile impose une obligation de motivation des décisions judiciaires.

Il dispose que :

« Les jugements doivent être motivés. La motivation consiste en l’exposition des raisons qui fondent la décision. »

Cela signifie que le juge doit expliquer les raisons pour lesquelles il a pris une décision, afin que les parties puissent comprendre les fondements de celle-ci.

Dans le cas présent, la cour d’appel a infirmé le jugement sans fournir de motivation concernant la fin de non-recevoir tirée de la prescription.

Cette absence de motivation constitue une violation de l’article 455, car elle empêche les parties de comprendre les raisons de la décision et de préparer une éventuelle contestation.

Quelles sont les conséquences de la prescription dans le cadre d’un contrat de prêt ?

La prescription est un mécanisme juridique qui éteint les droits d’action après un certain délai.

Selon l’article 2224 du code civil :

« Le délai de prescription est de cinq ans pour les actions en paiement. »

Dans le cadre d’un contrat de prêt, cela signifie que l’emprunteur dispose de cinq ans pour agir en justice à compter du moment où il aurait pu exercer son droit.

Dans cette affaire, la banque a soulevé la prescription des demandes de l’emprunteur, ce qui a conduit à une question cruciale sur la recevabilité de ces demandes.

Si la cour d’appel avait confirmé la prescription, cela aurait eu pour effet d’éteindre les droits de l’emprunteur à agir contre la banque, rendant ainsi sa demande de résolution du contrat de prêt irrecevable.

La question de la prescription est donc centrale dans l’analyse des droits des parties dans le cadre d’un contrat de prêt.

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2025

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 42 F-D

Pourvoi n° M 23-14.500

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2025

M. [D] [W], domicilié [Adresse 4], [Localité 2], a formé le pourvoi n° M 23-14.500 contre l’arrêt rendu le 9 février 2023 par la cour d’appel de Rouen (chambre de la proximité), dans le litige l’opposant à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) de Normandie, dont le siège est [Adresse 3], [Localité 1], défenderesse à la cassation.

La caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) de Normandie a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, un moyen unique de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l’appui de son recours, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Peyregne-Wable, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [W], SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Normandie, après débats en l’audience publique du 26 novembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Peyregne-Wable, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Rouen, 9 février 2023), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 24 mars 2021, pourvoi n° 19-23.271), par acte notarié du 6 novembre 2004, M. [W] (l’emprunteur) a souscrit un contrat de prêt auprès de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de Normandie (la banque), destiné à financer l’acquisition en l’état futur d’achèvement de lots au sein d’un ensemble immobilier vendu par la société Le Hameau du prieuré (le vendeur). A la suite de retards dans la livraison des lots, la résolution judiciaire des contrats de vente aux torts exclusifs du vendeur a été prononcée par un jugement du 12 mars 2009, confirmé sur ce point par un arrêt du 15 mars 2011.

2. Le 1er mars 2016, l’emprunteur a assigné en résolution du contrat de prêt la banque qui a opposé la prescription.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable

Enoncé du moyen

1. La banque fait grief à l’arrêt de prononcer la résolution du contrat de prêt, et de la condamner aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris les dépens de l’arrêt de la cour d’appel de Caen du 27 juin 2019, et la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, alors :

« 1°/ que la partie qui entend voir infirmer par la cour d’appel des chefs d’un jugement doit formuler des prétentions en ce sens dans le dispositif de ses
conclusions d’appel ; qu’il en résulte que le dispositif des conclusions de l’appelant doit comporter, en vue de l’infirmation ou de l’annulation du jugement frappé d’appel, des prétentions sur le litige, sans lesquelles la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement frappé d’appel ; qu’en infirmant, dès lors, en toutes ses dispositions, le jugement du tribunal de grande instance de Lisieux du 14 avril 2017, qui avait déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes de l’emprunteur, quand le dispositif des conclusions d’appel de l’emprunteur ne comportait aucune demande tendant au rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de l’emprunteur, que soulevait la banque dans le dispositif de ses conclusions d’appel, en demandant la confirmation du jugement du tribunal de grande instance de Lisieux du 14 avril 2017, et quand, en conséquence, elle ne pouvait que confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Lisieux en date du 14 avril 2017, la cour d’appel a violé les dispositions des articles 562 et 954 du code de procédure civile ;

2°/qu’en infirmant, dès lors, en toutes ses dispositions, le jugement du tribunal de grande instance de Lisieux du 14 avril 2017, qui avait déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes de l’emprunteur, sans motiver, d’une quelconque manière, son arrêt, en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de l’emprunteur, que soulevait la banque, dans le dispositif de ses conclusions d’appel, en demandant la confirmation du jugement du tribunal de grande instance de Lisieux en date du 14 avril 2017, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

2. La cour de renvoi a statué en conformité de l’arrêt de cassation qui l’avait saisie.

3. Le moyen qui appelle la Cour de cassation à revenir sur la doctrine exprimée par le précédent arrêt est irrecevable.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon