Le règlement des échéances est une obligation essentielle du contrat de crédit, dont le défaut pendant plusieurs mois caractérise un manquement contractuel suffisamment grave pour en justifier la résiliation.
Aux termes de l’article L. 312-36 du code de la consommation, dès le premier manquement de l’emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur informe celui-ci des risques qu’il encourt au titre des articles L. 312-39 et L. 312-40 (remboursement immédiat, indemnité, production d’intérêts au taux contractuel). En application de l’article L. 312-39 du même code, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. En outre, il est de jurisprudence constante que si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle. Aux termes de l’article 1227, la résolution d’un contrat peut, en toute hypothèse, être demandée en justice. L’article 1228 du même code prévoit que juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts. Suivant les dispositions de l’article 1229 du code précité, la résolution met fin au contrat et prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice. |
→ Résumé de l’affaireLa SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France a consenti à Monsieur [S] [J] [C] un prêt personnel de 40 000,00 €, mais plusieurs échéances n’ont pas été honorées. La banque a mis en demeure Monsieur [S] [J] [C] de rembourser les échéances impayées et l’a ensuite assigné devant le juge des contentieux de la protection pour demander la résolution judiciaire du contrat et le paiement de sommes dues. L’affaire a été mise en délibéré pour le 11 mars 2024.
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→ Les points essentielsMOTIFS DE LA DÉCISION SUR L’ABSENCE DU DÉFENDEUREn l’espèce, il convient de faire application de l’article 472 du code de procédure civile selon lequel si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDELa forclusion de l’action en paiement d’un crédit à la consommation est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par le juge comme étant d’ordre public, en vertu de l’article 125 du code de procédure civile. Selon l’article L. 311-52 devenu l’article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Au regard des pièces produites aux débats, la demande de la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France est recevable. MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LA RÉSOLUTION DU CONTRATAux termes de l’article L. 312-36 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû. En l’espèce, le manquement de l’emprunteur à ses obligations de remboursement justifie la résolution du contrat. MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTSLe prêteur ne justifie pas d’une signature électronique sécurisée du contrat, ce qui le prive de tout droit aux intérêts. De plus, le défaut de remise d’une notice d’assurance entraîne également la déchéance du droit aux intérêts. MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LES SOMMES RESTANT DUESLa créance du prêteur se limite au remboursement du capital restant dû, déduction faite des intérêts réglés à tort. Monsieur [S] [J] [C] est condamné à payer la somme restante due au titre du contrat de prêt. MOTIFS DE LA DÉCISION SUR LES DEMANDES ACCESSOIRESMonsieur [S] [J] [C] est condamné aux dépens et à verser une somme de 200,00 € à la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France au titre des frais exposés. Les montants alloués dans cette affaire: – La SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France : 15 828,80 €
– Monsieur [S] [J] [C] : 200,00 € (article 700 du code de procédure civile) – Monsieur [S] [J] [C] : dépens de l’instance |
→ Réglementation applicable– Code de procédure civile
– Code de la consommation – Code civil Article 472 du code de procédure civile: Article 125 du code de procédure civile: Article L. 311-52 du code de la consommation: Article L. 312-36 du code de la consommation: Article 1227 du code civil: Article L. 141-4 du code de la consommation: Article 1359 du code civil: Article L. 311-19 du code de la consommation: Article L. 311-48 alinéa 3e du code de la consommation: Article 696 du code de procédure civile: Article 700 du code de procédure civile: |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Samira MAHI
– Me Nathalie GARLIN |
→ Mots clefs associés & définitions– Motifs de la décision
– Absence du défendeur – Recevabilité de la demande – Forclusion de l’action en paiement – Résolution du contrat – Déchéance du droit aux intérêts – Défaut de preuve d’une signature électronique sécurisée du contrat – Défaut de notice d’assurance – Sommes restant dues – Demande accessoires – Dépens – Article 700 du code de procédure civile – Exécutoire à titre provisoire – Motifs de la décision : Raisons justifiant la décision rendue par le tribunal
– Absence du défendeur : Situation où le défendeur ne se présente pas à l’audience – Recevabilité de la demande : Possibilité pour la demande d’être examinée par le tribunal – Forclusion de l’action en paiement : Perte du droit d’agir en justice pour réclamer un paiement – Résolution du contrat : Annulation du contrat en raison d’une inexécution ou d’une violation des obligations contractuelles – Déchéance du droit aux intérêts : Perte du droit de percevoir des intérêts sur une somme due – Défaut de preuve d’une signature électronique sécurisée du contrat : Absence de preuve de la validité d’une signature électronique sécurisée sur un contrat – Défaut de notice d’assurance : Absence de notification de l’assurance à l’assuré – Sommes restant dues : Montant restant à payer – Demandes accessoires : Demandes complémentaires liées à la demande principale – Dépens : Frais engagés lors d’une procédure judiciaire – Article 700 du code de procédure civile : Disposition permettant au juge d’allouer une somme à une partie pour ses frais de justice – Exécutoire à titre provisoire : Décision pouvant être exécutée avant même qu’elle ne soit définitive |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Bobigny
RG n°
23/02850
41 rue Délizy
93692 PANTIN cedex
Tél:[XXXXXXXX02]
Fax : [XXXXXXXX01]
@ : [Courriel 8]
REFERENCES : N° RG 23/02850 – N° Portalis DB3S-W-B7H-YO3I
Minute :
JUGEMENT
Du : 11 Mars 2024
Société CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE
C/
Monsieur [S] [J] [C]
JUGEMENT
Après débats à l’audience publique du 15 Janvier 2024, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe le 11 Mars 2024;
Sous la Présidence de Madame Armelle GIRARD, juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de BOBIGNY siégeant au tribunal de proximité de PANTIN, assistée de Madame Martine GARDE, greffier ;
ENTRE :
DEMANDEUR :
Société CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Samira MAHI, avocat au barreau de la SEINE-SAINT-DENIS
Substitué par Me Nathalie GARLIN, avocat au barreau de la SEINE-SAINT-DENIS
DÉFENDEUR :
Monsieur [S] [J] [C]
Chez Mr [K]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Non comparant
Copie exécutoire délivrée le :
à : Me Samira MAHI
M. [S] [J] [C]
Expédition délivrée à :
Selon offre préalable acceptée le 25 mai 2018, la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France a consenti à Monsieur [S] [J] [C], né le [Date naissance 5] 1981, un prêt personnel n°41298592509004 d’un montant de 40 000,00 € remboursable en 121 mensualités de 426,02 € hors assurance incluant notamment les intérêts au taux débiteur annuel fixe de 5 %.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, par lettre recommandée en date du 16 octobre 2023, la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France a mis en demeure Monsieur [S] [J] [C] de rembourser les échéances impayées.
Par acte de commissaire de justice signifié le 6 novembre 2023 à étude, la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France a attrait Monsieur [S] [J] [C] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Pantin, aux fins de voir :
➢
prononcer la résolution judiciaire du contrat, la présente assignation valant déchéance du terme ;➢
à titre principal, condamner Monsieur [S] [J] [C] à lui payer la somme de 26 347, 90 €, outre intérêts au taux contractuel annuel de 5,23 % à compter de la mise en demeure ;➢
à titre subsidiaire, condamner Monsieur [S] [J] [C] à lui payer la somme de 16 233, 32 € au titre de la répétition de l’indu, outre intérêts au taux contractuel légal à compter de la mise en demeure ;➢
condamner Monsieur [S] [J] [C] au paiement de la somme de 400 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.À l’audience du 15 janvier 2024, en application de l’article R. 632-1 du code de la consommation, la présidente a soulevé d’office un ou plusieurs moyens tirés de la violation des dispositions du code de la consommation susceptibles d’entraîner la nullité et / ou la déchéance du droit aux intérêts, tels que visés à la note d’audience.
À cette même audience, la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France représentée par son conseil qui a été autorisé à déposer son dossier, a demandé le bénéfice de son acte introductif d’instance. La demanderesse soutient que son action n’est pas forclose, précise ne pas avoir de certificat d’authenticité de la signature électronique mais qu’il y a suffisamment d’éléments pour démontrer la relation contractuelle existante, et s’en rapporte sur les causes de déchéance du droit aux intérêts.
Monsieur [S] [J] [C] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter, malgré sa convocation régulière.
L’affaire a été mise en délibéré au 11 mars 2024.
SUR L’ABSENCE DU DÉFENDEUR
En l’espèce, il convient de faire application de l’article 472 du code de procédure civile selon lequel si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE
La forclusion de l’action en paiement d’un crédit à la consommation est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par le juge comme étant d’ordre public, en vertu de l’article 125 du code de procédure civile.
Selon l’article L. 311-52 devenu l’article R. 312-35 du code de la consommation à la suite de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 14 mars 2016 portant recodification de la partie législative du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant la juge des contentieux de la protection à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme, le premier incident de paiement non régularisé, le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ou le dépassement, du découvert tacitement accepté ou de l’autorisation de découvert convenue au sens du 13° de l’article L. 311-1 du code de la consommation, non régularisé à l’issue du délai de 3 mois prévu à l’article L. 311-47 devenu L. 312-93 du même code sans proposition par le prêteur d’un autre type d’opération de crédit au sens du 4° de l’article L. 311-1 précité.
Au regard des pièces produites aux débats, en particulier le contrat et l’historique de compte, il apparaît que la présente action a été engagée avant l’expiration d’un délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé.
La demande de la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France est par conséquent recevable.
SUR LA RÉSOLUTION DU CONTRAT
Aux termes de l’article L. 312-36 du code de la consommation, dès le premier manquement de l’emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur informe celui-ci des risques qu’il encourt au titre des articles L. 312-39 et L. 312-40 (remboursement immédiat, indemnité, production d’intérêts au taux contractuel).
En application de l’article L. 312-39 du même code, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.
En outre, il est de jurisprudence constante que si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
Aux termes de l’article 1227, la résolution d’un contrat peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.
L’article 1228 du même code prévoit que juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.
Suivant les dispositions de l’article 1229 du code précité, la résolution met fin au contrat et prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice.
En l’espèce, il ressort des stipulations du contrat litigieux (articles IV. 3 et IV. 9) que l’emprunteur est tenu de régler les échéances du crédit qui lui a été consenti aux termes convenus et qu’en cas de défaillance dans les remboursements, l’organisme de crédit pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, et ce avec intérêts au taux conventionnel, outre le paiement d’une indemnité égale à 8% du capital restant dû.
Le règlement des échéances est donc une obligation essentielle du contrat de crédit, dont le défaut pendant plusieurs mois caractérise un manquement contractuel suffisamment grave pour en justifier la résiliation.
Dès lors et au vu de l’historique du prêt laissant apparaître que de nombreuses échéances du contrat de crédit sont demeurées impayées par Monsieur [S] [J] [C], il convient de faire droit à la demande de la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France et de prononcer la résolution du contrat litigieux à compter du 6 novembre 2023, date de l’assignation.
SUR LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTS
Aux termes de l’article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.
Sur le défaut de preuve d’une signature électronique sécurisée du contrat
Aux termes de l’article 1359 du code civil, l’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique. Il ne peut être prouvé outre ou contre un écrit établissant un acte juridique, même si la somme ou la valeur n’excède pas ce montant, que par un autre écrit sous signature privée ou authentique. Celui dont la créance excède le seuil mentionné au premier alinéa ne peut pas être dispensé de la preuve par écrit en restreignant sa demande. Il en est de même de celui dont la demande, même inférieure à ce montant, porte sur le solde ou sur une partie d’une créance supérieure à ce montant.
Conformément aux dispositions de l’article 1361 du même code, il peut être suppléé à l’écrit par l’aveu judiciaire, le serment décisoire ou un commencement de preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve.
L’article L. 312-28 du code de la consommation prévoit que le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable. Il constitue un document distinct de tout support ou document publicitaire, ainsi que de la fiche mentionnée à l’article L. 312-12. Un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit. La liste des informations figurant dans le contrat et dans l’encadré mentionné au premier alinéa est fixée par décret en Conseil d’État.
L’article 2 du décret n° 2001-272 du 30 mars 2001, dans sa version applicable au présent litige, prévoit enfin que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée jusqu’à preuve contraire lorsque ce procédé met en œuvre une signature électronique sécurisée, établie grâce à un dispositif sécurisé de création de signature électronique et que la vérification de cette signature repose sur l’utilisation d’un certificat électronique qualifié.
En l’espèce, le prêteur ne justifie pas d’une signature électronique sécurisée du contrat, dont la fiabilité ne peut être que présumée, au moyen de l’attestation émanant d’un prestataire de service de confiance garantissant la date et l’intégrité du fichier dont est issu ce tirage, obtenue dans les conditions fixées par le décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 (auquel s’est substitué le décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017).
Si l’existence même du contrat de prêt peut être rapportée, conformément au droit commun, par les paiements partiels effectués par le débiteur, et corroborée par le déblocage des fonds au bénéfice de l’emprunteur, le défaut de justification du respect des prescriptions de l’article L. 312-28 du code de la consommation empêche en effet le prêteur de prétendre à un quelconque droit aux intérêts.
Sur le défaut de notice d’assurance
Selon l’article L. 311-19 devenu L. 312-29 du code de la consommation, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus.
En cas de manquement à cette obligation, l’établissement de crédit est sanctionné de la déchéance du droit aux intérêts en application de l’article L 311-48 alinéa 1 devenu L 341-4 du code de la consommation.
En l’espèce, il n’est pas justifié de la remise à l’emprunteur de cette notice et encore moins de la régularité de celle-ci. En effet, l’exemplaire versé n’est pas paraphé ni signé, et ne fait pas partie d’un ensemble de pages numéroté et signé, ce dont il résulte que la preuve de sa remise n’est pas démontrée.
La simple clause selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu ce document et en avoir pris connaissance ne peut en faire présumer la régularité. Elle ne peut constituer qu’un indice qu’il appartient au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents.
Or, ces éléments font autant défaut que la notice elle-même, étant observé que la “Fiche Conseil Assurance” ne constitue pas la notice du contrat assurance emprunteur prévue par la loi à laquelle elle se contente de renvoyer, mais un simple document explicatif destiné à guider le choix de l’emprunteur entre les différentes formules d’assurances proposées par la société de crédit.
Il en résulte que la disposition précitée n’est pas respectée.
*
Pour ces raisons, la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France doit donc être déchue de son droit aux intérêts sur le prêt litigieux.
SUR LES SOMMES RESTANT DUES
Selon l’article L. 311-48 alinéa 3e devenu L. 341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital restant dû après déduction des intérêts réglés à tort, déductions faite des paiements effectués à quelque titre que ce soit.
Cette limitation légale de la créance du prêteur exclut qu’il puisse prétendre au paiement de toute autre somme, notamment de la clause pénale prévue par l’article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, qu’il convient d’écarter.
La déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances, dont la privation n’apparaît pas excessive au regard des manquements du prêteur à ses obligations qui entachent d’irrégularité le contrat principal dès sa formation. La société de crédit n’établit d’ailleurs pas avoir avancé lesdites primes ou cotisations d’assurance pour le compte de l’emprunteur défaillant et ne peut ainsi prétendre à leur remboursement par ce dernier.
Les sommes dues par le débiteur se limiteront dès lors à la différence entre le montant effectivement débloqué à son profit et les règlements effectués par ce dernier, tels qu’ils résultent du décompte.
La créance de la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France s’établit donc comme suit : ➢ capital emprunté depuis l’origine : 40 000,00 € ➢ moins les versements réalisés :
antérieurement à la déchéance du terme : 24 171,20 €postérieurement à la déchéance du terme : 0,00 € soit un TOTAL restant dû de 15 828,80 € au titre du solde du contrat de prêt, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans le décompte en date du 12 octobre 2023.
En conséquence, il convient de condamner Monsieur [S] [J] [C] à payer à la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France la somme de 15 828,80 € au titre du solde du contrat de prêt conclu le 25 mai 2018.
Par ailleurs, bien que déchu de son droit aux intérêts, le prêteur est fondé, en vertu de l’article 12316 du code civil, à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure, le taux d’intérêt étant en principe majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice.
Cependant, par arrêt du 27 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA/Fesih Kalhan) a dit pour droit que l’article 23 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil s’oppose à l’application d’intérêts au taux légal lesquels sont en outre majorés de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire d’une décision de justice prononçant la déchéance du droit aux intérêts si « les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance des intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté » ses obligations découlant de ladite directive.
La Cour de Justice a ainsi indiqué que « si la sanction de la déchéance des intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, en raison du fait que l’application des intérêts au taux légal majoré est susceptible de compenser les effets d’une telle sanction, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif » (point 52).
Il s’ensuit qu’en vue d’apprécier le caractère réellement dissuasif de la sanction, il appartient à la juridiction « de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté son obligation » découlant de la directive, « avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de cette même obligation » (point 50).
La Cour de Justice a également indiqué que « dans l’occurrence où la juridiction de renvoi constaterait que la sanction de la déchéance des intérêts conventionnels ne présente pas un caractère véritablement dissuasif au sens de l’article 23 de la directive 2008/48, il y a lieu de rappeler à cet égard qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci » (point 54).
En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal, même non majoré de cinq points, nonobstant la déchéance des intérêts, ne sont pas suffisamment inférieurs à ceux dont celui ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations découlant de la directive 2008/48, le taux légal actuel (pour un professionnel, 1er semestre 2024 : 5, 07 %) étant très voisin de celui du contrat (5 %), de sorte que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne revêt pas de caractère effectif et dissuasif.
Afin d’assurer l’effet de la directive 2008/48, notamment de son article 23, et par conséquent de garantir le caractère effectif et dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, il convient donc de dire que la somme restant due en capital ne portera pas intérêts.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie succombante doit supporter les dépens. Il y aura donc lieu de condamner Monsieur [S] [J] [C] de ce chef.
Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
L’équité commande par ailleurs de condamner Monsieur [S] [J] [C] à payer à la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France la somme de 200,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire, conformément aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile.
La juge des contentieux de la protection, statuant après débats tenus en audience publique, par jugement réputé contradictoire et public rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,
DIT la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France recevable en ses demandes ;
PRONONCE la résolution du contrat de crédit n°41298592509004 conclu le 25 mai 2018 entre la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France et Monsieur [S] [J] [C], né le [Date naissance 5] 1981, à compter du 6 novembre 2023 ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts de la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de
France au titre du contrat de crédit n°41298592509004 conclu le 25 mai 2018 avec Monsieur [S] [J] [C], né le [Date naissance 5] 1981, à compter de la date de conclusion du prêt ;
CONDAMNE Monsieur [S] [J] [C] à payer à la SA Caisse d’épargne et de prévoyance
Île de France la somme de 15 828,80 € pour solde du contrat de crédit n°41298592509004 en date du 25 mai 2018, cette somme ne portant pas intérêts ;
RAPPELLE qu’en cas de mise en place d’une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans la dite procédure ;
CONDAMNE Monsieur [S] [J] [C] à payer à la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Île de France la somme de 200,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [S] [J] [C] aux dépens de l’instance ;
RAPPELLE que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
La greffière La juge des contentieux de la protection
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