L’Essentiel : Le 21 janvier 2003, un débiteur a été mis en liquidation judiciaire, nécessitant la gestion de ses actifs par un liquidateur. Le 31 mars 2022, sur requête du liquidateur, le juge-commissaire a ordonné une expertise pour évaluer quatre biens immobiliers appartenant au débiteur, qui a contesté cette ordonnance. Le tribunal a déclaré le recours du débiteur irrecevable le 4 juillet 2022, entraînant un appel. Le débiteur a soutenu un excès de pouvoir du juge, tandis que la Cour d’appel a rappelé que les jugements concernant les ordonnances du juge-commissaire ne sont pas susceptibles de recours, sauf en cas d’excès de pouvoir.
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Contexte de la liquidation judiciaireLe 21 janvier 2003, un débiteur a été mis en liquidation judiciaire, entraînant la nécessité de gérer ses actifs et passifs par un liquidateur. Ordonnance d’expertiseLe 31 mars 2022, sur requête du liquidateur, le juge-commissaire a ordonné une expertise pour évaluer quatre biens immobiliers appartenant au débiteur. Ce dernier a contesté cette ordonnance en formant un recours. Recours et irrecevabilitéLe tribunal a déclaré le recours du débiteur irrecevable par un jugement rendu le 4 juillet 2022, ce qui a conduit le débiteur à faire appel de cette décision. Argumentation du débiteurLe débiteur soutient que le juge a commis un excès de pouvoir en déclarant son recours irrecevable pour cause de tardiveté, arguant que l’erreur manifeste d’appréciation sur le calcul du délai de recours ne devrait pas être considérée comme un excès de pouvoir. Réponse de la Cour d’appelLa Cour d’appel a rappelé que les jugements du tribunal concernant les ordonnances du juge-commissaire ne sont pas susceptibles de recours, sauf en cas d’excès de pouvoir. Elle a constaté que l’erreur du tribunal sur le calcul du délai d’opposition constituait un excès de pouvoir. Conclusion de la Cour d’appelEn confirmant le jugement du tribunal, la Cour d’appel a validé l’excès de pouvoir commis par le tribunal en déclarant irrecevable le recours du débiteur, ce qui constitue une violation des textes et principes applicables. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article L. 623-4 du code de commerce concernant les recours contre les ordonnances du juge-commissaire ?L’article L. 623-4 du code de commerce stipule que « les jugements par lesquels le tribunal statue contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire dans la limite de ses attributions ne sont susceptibles d’aucune voie de recours ; qu’il n’est dérogé à cette règle, comme à toute autre règle interdisant ou différant un recours, qu’en cas d’excès de pouvoir. » Cette disposition établit un principe fondamental en matière de liquidation judiciaire, limitant les possibilités de recours contre les décisions du juge-commissaire. Ainsi, un débiteur ne peut contester une ordonnance du juge-commissaire que si un excès de pouvoir est démontré. Dans le cas présent, le tribunal a commis une erreur en considérant que le délai d’opposition à l’ordonnance était expiré, ce qui constitue un excès de pouvoir. Quelles sont les conséquences d’une erreur manifeste d’appréciation sur le délai de recours ?L’erreur manifeste d’appréciation, comme celle relevée dans le jugement, a des conséquences directes sur la recevabilité du recours. En effet, l’article 25 alinéa 3 du décret du 27 décembre 1985 précise que le délai d’opposition à l’ordonnance du juge-commissaire est de dix jours à compter de la date de présentation de la lettre recommandée de notification au débiteur. Dans cette affaire, le tribunal a erronément calculé ce délai en le faisant courir à partir de la date de connaissance effective de l’ordonnance par le débiteur. Cette erreur a conduit à la déclaration d’irrecevabilité du recours, alors qu’il aurait dû être considéré comme recevable. Comment la cour d’appel a-t-elle interprété l’excès de pouvoir dans cette affaire ?La cour d’appel a jugé que l’erreur manifeste d’appréciation sur le calcul du délai de recours ne pouvait pas être qualifiée d’excès de pouvoir. Cependant, cette interprétation est contestable, car l’excès de pouvoir est défini comme une décision qui dépasse les limites des attributions du juge. En confirmant le jugement du tribunal, la cour d’appel a ainsi validé une décision qui, selon les principes régissant l’excès de pouvoir, aurait dû être annulée en raison de l’erreur de calcul du délai. Cette situation met en lumière la nécessité d’une stricte application des règles de procédure pour garantir les droits des débiteurs en liquidation judiciaire. |
JB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 février 2025
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 71 F-B
Pourvoi n° K 23-22.089
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 FÉVRIER 2025
M. [T] [M], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 23-22.089 contre l’arrêt rendu le 6 septembre 2023 par la cour d’appel de Bordeaux (4e chambre commerciale), dans le litige l’opposant à la société Amauger – [K], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1] en la personne de M. [R] [K], prise en qualité de mandataire liquidateur de M. [T] [M], société civile professionnelle, défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bedouet, conseiller, les observations de la SAS Zribi et Texier, avocat de M. [M], et l’avis de Mme Henry avocat général, après débats en l’audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Bedouet, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux , 06 septembre 2023), le 21 janvier 2003 M. [M] a été mis en liquidation judiciaire.
2. Le 31 mars 2022, sur requête du liquidateur, la société Amauger-[K], le juge-commissaire a ordonné une expertise aux fins d’évaluation de quatre bien immobiliers appartenant à M. [M].
3. Ce dernier a formé un recours contre cette ordonnance. Par un jugement du 4 juillet 2022, le tribunal l’a déclaré irrecevable.
Enoncé du moyen
4. M. [M] fait grief à l’arrêt de déclarer son appel irrecevable alors « que commet un excès de pouvoir négatif le juge qui déclare à tort un recours irrecevable comme tardif ; qu’en retenant que l’erreur manifeste d’appréciation prêtée au tribunal de commerce sur le calcul du délai de recours, et donc sur la recevabilité de l’opposition formée par M. [M],
ne peut être qualifiée d’excès de pouvoir, la cour d’appel a consacré l’excès
de pouvoir négatif commis par le tribunal et violé l’article L. 623-4 du code
de commerce dans sa rédaction applicable, ensemble les principes régissant l’excès de pouvoir. »
Vu l’article L 623-4 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, l’article 25 alinéa 3 du décret du 27 décembre 1985, et les principes régissant l’excès de pouvoir :
5. Il résulte du premier de ces textes et des principes susvisés que les jugements par lesquels le tribunal statue contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire dans la limite de ses attributions ne sont susceptibles d’aucune voie de recours ; qu’il n’est dérogé à cette règle, comme à toute autre règle interdisant ou différant un recours, qu’en cas d’excès de pouvoir.
6. L’erreur commise par le tribunal, qui fait courir le délai d’opposition à l’ordonnance du juge-commissaire d’une durée de dix jours à compter de la date à laquelle la lettre recommandée de notification de la dite ordonnance a été présentée au débiteur et non à la date à laquelle il en a eu effectivement connaissance, pour en déduire que le dit délai était expiré lorsque le débiteur a fait opposition à l’ordonnance de sorte que son recours était irrecevable comme tardif, constitue un excès de pouvoir.
7. Pour déclarer irrecevable l’appel formé contre le jugement, l’arrêt retient que M. [M] ne démontre pas que serait en cause un excès de pouvoir, l’erreur manifeste d’appréciation prêtée au tribunal sur le calcul du délai de recours ne pouvant être qualifiée d’excès de pouvoir.
8. En statuant ainsi, la cour d’appel, qui, en confirmant le jugement du 4 juillet 2022 a consacré l’excès de pouvoir commis par le tribunal consistant à déclarer irrecevable comme tardif le recours formé par M. [M] contre l’ordonnance du juge-commissaire du 31 mars 2022, a violé les textes et les principes susvisés.
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