Propriété et prescription : enjeux d’une revendication contestée dans le cadre d’une copropriété

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Propriété et prescription : enjeux d’une revendication contestée dans le cadre d’une copropriété

L’Essentiel : En 2013, la SCCV a lancé la construction d’une résidence sénior, gérée par Villas Ginkgos. En mai 2016, Sermesa a facturé des travaux de clôture réalisés en 2015. CCY investissements, associée de la SCCV, a affirmé avoir réglé cette facture et a assigné Villas Ginkgos pour remboursement, mais sa demande a été rejetée en novembre 2019. Suite à cela, CCY a engagé une nouvelle action contre le syndicat des copropriétaires et Villas Ginkgos pour récupérer le muret métallique. La SCCV a également intervenu, mais la cour d’appel a déclaré leurs actions prescrites, sans explication claire.

Contexte de l’affaire

La SCCV [8] a entrepris la construction d’un immeuble destiné à une résidence sénior en 2013, qui a ensuite été vendu par lots et intégrée dans un régime de copropriété. La gestion de cette résidence est assurée par la société Villas Ginkgos – [8].

Facturation des travaux

Le 12 mai 2016, la société Sermesa a émis une facture à la SCCV [8] pour des travaux de réalisation, façonnage et pose d’une clôture métallique effectués en 2015. Ces travaux étaient destinés à rehausser le muret entourant la résidence.

Litige entre les parties

La société CCY investissements, associée de la SCCV [8], a affirmé avoir réglé la facture et a soutenu que les travaux avaient été demandés par la société Villas Ginkgos – [8]. Elle a donc assigné cette dernière devant un tribunal de commerce pour obtenir le remboursement des coûts liés à la clôture métallique, mais sa demande a été rejetée par un jugement définitif en novembre 2019.

Nouvelle action en justice

Suite au rejet de sa demande, la société CCY investissements a engagé une nouvelle action devant un tribunal judiciaire contre le syndicat des copropriétaires de la résidence [8] et la société Villas Ginkgos – [8]. Elle cherchait notamment à récupérer son muret métallique, qui était simplement fixé au muret d’enceinte de la copropriété.

Intervention de la SCCV

La SCCV [8], représentée par son liquidateur amiable, a décidé d’intervenir dans cette instance en formant une demande similaire à celle de la société CCY investissements. Elle a également assigné en intervention forcée une autre société pour obtenir un extrait K-bis conforme, après que son intervention ait été déclarée nulle en première instance.

Arguments juridiques

La société CCY investissements et la SCCV [8] ont contesté la décision de la cour d’appel qui avait déclaré leurs actions irrecevables en raison de la prescription. Elles ont soutenu que leur action en revendication, visant à reconnaître leur propriété sur la clôture, était imprescriptible, contrairement à l’action en restitution de bien mobilier, qui est soumise à une prescription quinquennale.

Décision de la cour d’appel

La cour d’appel a jugé que, bien que l’action en revendication soit imprescriptible, l’action en restitution de bien mobilier était soumise à la prescription quinquennale. Elle a donc déclaré les actions de la société CCY investissements et de la SCCV [8] prescrites, en se basant sur la date de la facture émise par la société Sermesa. La cour n’a cependant pas fourni de motifs clairs pour justifier cette qualification de l’action.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de l’affaire ?

La SCCV [8] a entrepris la construction d’un immeuble destiné à une résidence sénior en 2013. Cet immeuble a ensuite été vendu par lots et intégré dans un régime de copropriété.

La gestion de cette résidence est assurée par la société Villas Ginkgos – [8].

Quelle est la nature des travaux facturés ?

Le 12 mai 2016, la société Sermesa a émis une facture à la SCCV [8] pour des travaux de réalisation, façonnage et pose d’une clôture métallique effectués en 2015.

Ces travaux étaient destinés à rehausser le muret entourant la résidence.

Quel litige a eu lieu entre les parties ?

La société CCY investissements, associée de la SCCV [8], a affirmé avoir réglé la facture et a soutenu que les travaux avaient été demandés par la société Villas Ginkgos – [8].

Elle a donc assigné cette dernière devant un tribunal de commerce pour obtenir le remboursement des coûts liés à la clôture métallique, mais sa demande a été rejetée par un jugement définitif en novembre 2019.

Quelle action a été engagée après le rejet de la demande initiale ?

Suite au rejet de sa demande, la société CCY investissements a engagé une nouvelle action devant un tribunal judiciaire contre le syndicat des copropriétaires de la résidence [8] et la société Villas Ginkgos – [8].

Elle cherchait notamment à récupérer son muret métallique, qui était simplement fixé au muret d’enceinte de la copropriété.

Comment la SCCV a-t-elle intervenu dans cette affaire ?

La SCCV [8], représentée par son liquidateur amiable, a décidé d’intervenir dans cette instance en formant une demande similaire à celle de la société CCY investissements.

Elle a également assigné en intervention forcée une autre société pour obtenir un extrait K-bis conforme, après que son intervention ait été déclarée nulle en première instance.

Quels arguments juridiques ont été avancés par les parties ?

La société CCY investissements et la SCCV [8] ont contesté la décision de la cour d’appel qui avait déclaré leurs actions irrecevables en raison de la prescription.

Elles ont soutenu que leur action en revendication, visant à reconnaître leur propriété sur la clôture, était imprescriptible, contrairement à l’action en restitution de bien mobilier, qui est soumise à une prescription quinquennale.

Quelle a été la décision de la cour d’appel ?

La cour d’appel a jugé que, bien que l’action en revendication soit imprescriptible, l’action en restitution de bien mobilier était soumise à la prescription quinquennale.

Elle a donc déclaré les actions de la société CCY investissements et de la SCCV [8] prescrites, en se basant sur la date de la facture émise par la société Sermesa.

La cour n’a cependant pas fourni de motifs clairs pour justifier cette qualification de l’action.

Quel moyen a été examiné par la cour ?

La société CCY investissements et la SCCV [8] font grief à l’arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites leur action et de rejeter, en conséquence, leurs demandes.

Elles soutiennent que l’action en revendication est imprescriptible et que cette action vise à reconnaître la qualité de propriétaire d’un bien, meuble ou immeuble, en vue de la restitution de celui-ci.

En l’espèce, la SCCV [8] et la société CCY investissements ont exercé une action en revendication afin de se voir reconnaître la propriété de la clôture litigieuse qui leur avait été facturée et qu’elles ont payée.

Elles contestent la qualification de cette action d’action personnelle mobilière pour appliquer la prescription quinquennale, arguant que cela viole les articles 2224, 2227 et 2266 du code civil.

CIV. 3

CL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 novembre 2024

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 646 F-D

Pourvoi n° U 23-12.644

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 NOVEMBRE 2024

1°/ La société CCY investissements, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5],

2°/ la société [8], société civile de construction-vente, dont le siège est [Adresse 6], agissant par son liquidateur amiable, M. [I] [J], domicilié [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° U 23-12.644 contre l’arrêt rendu le 29 novembre 2022 par la cour d’appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ au syndicat des copropriétaires de la résidence [8], dont le siège est [Adresse 2], représenté par son syndic la société Foncia Vendée,

2°/ à la société Villas Gingkos – [8], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ à la société GTC [Localité 7], société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Choquet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Corlay, avocat de la société CCY investissements et de la société [8], de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence [8], de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Villas Gingkos – [8], après débats en l’audience publique du 22 octobre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Choquet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société CCY investissements et à la société civile de construction-vente [8] (la SCCV [8]) du désistement de leur pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société GTC [Localité 7].

Faits et procédure

2. Selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 29 novembre 2022) et les productions, la SCCV [8] a fait réaliser en 2013 un immeuble à usage de résidence sénior qui a ensuite été vendu par lots et placé sous le régime de la copropriété. La résidence, dénommée la résidence [8], est exploitée par la société Villas Ginkgos – [8].

3. Le 12 mai 2016, la société Sermesa a adressé à la SCCV [8] une facture pour la réalisation, le façonnage et la pose en 2015 d’une clôture métallique en rehaussement du muret ceinturant la résidence.

4. Soutenant avoir réglé cette facture et que les travaux lui avaient été demandés expressément par la société Villas Ginkgos – [8] en sa qualité d’exploitante de la résidence, la société CCY investissements, associée de la SCCV [8], a assigné la société Villas Ginkgos – [8] devant un tribunal de commerce en paiement du coût de la fabrication et de la pose de la clôture métallique. Cette demande a été rejetée par un jugement définitif du 12 novembre 2019.

5. La société CCY investissements a alors assigné devant un tribunal judiciaire le syndicat des copropriétaires de la résidence [8] (le syndicat des copropriétaires) et la société Villas Ginkgos – [8] aux fins, notamment, d’être autorisée à reprendre son muret métallique en rehaussement simplement fixé sur le muret d’enceinte de la copropriété.

6. La SCCV [8], agissant par son liquidateur amiable, est intervenue volontairement à l’instance, a formé la même demande que la société CCY investissements, et a assigné en intervention forcée, à hauteur d’appel, son intervention volontaire ayant été déclarée nulle en première instance pour défaut de capacité d’agir en justice faute d’immatriculation, la société GTC La Roche-sur-Yon, titulaire de l’office de greffier du tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon, pour qu’elle lui délivre un extrait K-bis conforme et la garantisse des condamnations prononcées à son encontre.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La société CCY investissements et la SCCV [8] font grief à l’arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites leur action et de rejeter, en conséquence, leurs demandes, alors « que l’action en revendication est imprescriptible ; que constitue une action en revendication l’action qui vise à reconnaître la qualité de propriétaire d’un bien, meuble ou immeuble en vue de la restitution de celui-ci ; qu’en l’espèce la SCCV [8] et la société CCY investissements ont exercé une action en revendication afin de se voir reconnaître la propriété de la clôture litigieuse qui leur avait été facturée et qu’elles ont payée, et en conséquence la restitution de celle-ci ; qu’en qualifiant cette action d’action personnelle mobilière pour appliquer la prescription quinquennale, la cour d’appel a violé les articles 2224 par fausse application, 2227 et 2266 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 455 du code de procédure civile :

8. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

9. Pour déclarer irrecevables les actions exercées par la société CCY investissements et la SCCV [8], l’arrêt retient que, si l’action en revendication est imprescriptible, il n’en est pas de même de l’action en restitution de bien mobilier, qui constitue une action personnelle soumise à la prescription extinctive quinquennale, que tel est le cas de l’action formée par celles-ci et qu’elles sont prescrites pour les avoir introduites respectivement les 31 mai 2021 et 3 février 2022, alors que le délai de prescription a commencé à courir le 12 mai 2016, date d’émission de la facture établie par la société Sermesa.

10. En statuant ainsi, par voie d’affirmation, sans préciser les motifs pour lesquels l’action exercée par la société CCY investissements et la SCCV [8], tendant à la restitution d’un bien meuble dont elles revendiquaient la propriété, devrait être qualifiée d’action personnelle soumise à la prescription extinctive quinquennale, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.


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