L’Essentiel : L’appel incident a contesté la réduction de la clause pénale à 1 500 euros et la condamnation de [R] [V] à verser 25 708 euros à la BPO. La cour a rétabli la clause pénale à 3 970,89 euros et a condamné [R] [V] à 26 943,44 euros, plus 2 500 euros selon l’article 700 du code de procédure civile. Le Fonds Cédrus, intervenant volontaire, a pris les droits de la BPO. La cour a jugé que l’engagement de caution de [R] [V] n’était pas disproportionné et a rejeté sa demande de délais de paiement, confirmant ainsi le jugement de première instance.
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Appel incident et révision de la clause pénaleL’appel incident a été formulé pour contester la réduction du montant de la clause pénale à 1 500 euros et la condamnation de [R] [V] à payer à la BPO la somme de 25 708 euros, avec intérêts légaux à partir du 13 novembre 2019. La cour a statué en faveur de la reconnaissance du montant de la clause pénale conformément au contrat de crédit, le fixant à 3 970,89 euros, et a condamné [R] [V] à verser 26 943,44 euros à la BPO, ainsi qu’une somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. Intervention du Fonds commun de titrisation CédrusLe Fonds commun de titrisation Cédrus a été reconnu comme intervenant volontaire, prenant les droits de la BPO suite à un bordereau de cession de créances daté du 1er août 2023, conformément à l’article L313-27 du Code monétaire et financier. Engagement de caution de [R] [V]L’engagement de caution de [R] [V] a été examiné sous l’angle de l’article L.332-1 du code de la consommation, qui stipule qu’un créancier ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution. La cour a constaté que le cautionnement n’était pas disproportionné par rapport aux biens et revenus de [R] [V], qui avait rempli une fiche patrimoniale sans anomalies apparentes. Obligation de mise en garde de la banque[R] [V] a soutenu que la banque avait manqué à son obligation de mise en garde en ne l’informant pas des risques liés à l’octroi d’un prêt inadapté. Cependant, la cour a jugé que [R] [V], en tant que dirigeant d’entreprise, possédait une expérience suffisante pour être considéré comme averti des risques financiers, et a rejeté ses demandes de dommages et intérêts. Indemnité forfaitaire et créance finaleLe Fonds Cédrus a demandé la condamnation de [R] [V] à 26 934,44 euros, représentant 50 % des sommes dues par la société. [R] [V] a contesté le montant de l’indemnité forfaitaire, arguant qu’elle devait être minorée. La cour a reconnu le caractère de clause pénale des indemnités et a décidé de réduire l’indemnité de 5 % tout en maintenant celle de 3 %. Demande de délais de paiement[R] [V] a sollicité des délais de paiement en raison de sa situation financière difficile, mais la cour a infirmé cette demande, constatant qu’il n’avait pas fourni de preuves suffisantes de sa situation économique actuelle. Frais irrépétibles et dépensLe jugement de première instance a été confirmé concernant les dépens et frais irrépétibles. [R] [V], en tant que partie succombante, a été condamné aux dépens d’appel, et aucune indemnité n’a été accordée en vertu de l’article 700 du code de procédure civile. Décision finale de la courLa cour a confirmé le jugement de première instance dans toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le montant de la créance finale du Fonds commun de titrisation Cédrus sur [R] [V] et l’octroi des délais de paiement. Elle a condamné [R] [V] à payer 26 162,61 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2019, tout en rejetant sa demande de délais de paiement. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de validité d’un engagement de caution selon le Code de la consommation ?L’article L.332-1 du Code de la consommation stipule que : « Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. » Cette disposition implique que pour qu’un engagement de caution soit valide, il ne doit pas être manifestement disproportionné par rapport aux biens et revenus de la caution au moment de sa conclusion. La disproportion se mesure en tenant compte de l’ensemble des engagements de la caution, ainsi que de ses biens et revenus, sans considérer les revenus futurs de l’opération garantie. Il appartient à la caution de prouver cette disproportion, tandis que le créancier doit démontrer que la caution peut faire face à son obligation au moment de l’appel en paiement. Quelles sont les obligations de mise en garde du créancier envers la caution ?L’article 1382 du Code civil, dans sa version applicable, énonce que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Dans le cadre d’un engagement de caution, le créancier a une obligation de mise en garde envers la caution, surtout si celle-ci n’est pas avertie des risques liés à l’engagement. Cette obligation se renforce lorsque l’engagement de la caution n’est pas adapté à ses capacités financières ou lorsque le prêt garanti présente un risque d’endettement. Dans cette affaire, la cour a constaté que la banque n’avait pas manqué à son obligation de mise en garde, car la caution, [R] [V], possédait une expérience professionnelle significative et était dirigeant d’autres sociétés, ce qui le rendait apte à comprendre les enjeux financiers. Comment se détermine le caractère excessif d’une clause pénale ?L’article 1226 du Code civil précise que : « La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution. » Dans le cas présent, la cour a reconnu que les indemnités forfaitaires stipulées dans le contrat de prêt avaient le caractère de clauses pénales. Ces clauses peuvent être minorées par le juge si elles sont jugées manifestement excessives. La cour a constaté que l’indemnité de 5% devait être réduite en raison de l’exécution partielle de l’obligation par la débitrice principale, tandis que l’indemnité de 3% n’a pas été réduite, car le préjudice de la banque était intégralement réalisé. Quelles sont les conséquences d’une demande de délais de paiement selon le Code civil ?L’article 1343-5 du Code civil stipule que : « Le débiteur peut demander des délais de paiement, sauf si le créancier justifie d’un intérêt légitime à obtenir le paiement immédiat. » Dans cette affaire, [R] [V] a sollicité des délais de paiement en raison de sa situation financière difficile. Cependant, la cour a refusé cette demande, car [R] [V] n’a pas fourni de preuves suffisantes de sa situation économique actuelle, malgré la dégradation de ses revenus dans le passé. Ainsi, la cour a infirmé le jugement de première instance qui avait accordé des délais de paiement, considérant que la demande n’était pas justifiée. |
ARRÊT N° 422
N° RG 22/03660
N° Portalis DBVI-V-B7G-PBOA
MN/ND
Décision déférée du 26 Septembre 2022
Tribunal de Commerce de CASTRES
2020002109
M. LAUTTIER
[R] [V]
C/
S.A. BANQUE POPULAIRE OCCITANE
Société FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS REPRESENTE PAR MCS ET ASSOCIES
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANT
Monsieur [R] [V]
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représenté par Me Jean christophe LAURENT de la SCP SCP BOONSTOPPEL LAURENT, avocat au barreau de CASTRES
INTIMEE
S.A. BANQUE POPULAIRE OCCITANE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Loïc ALRAN de la SCP ALRAN PERES RENIER, avocat au barreau de TOULOUSE
PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE
FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS
prise en la personne de son représentant légal,
Ayant pour société de gestion IQ EQ MANAGEMENT, et représenté par son recouvreur la société MCS ET ASSOCIES,
Venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE OCCITANE,
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Loïc ALRAN de la SCP ALRAN PERES RENIER, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. NORGUET conseillère,chargée du rapport et F. PENAVAYRE magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
M. NORGUET, conseillère
F. PENAVAYRE,magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre.
Faits et procédure :
Le 15 avril 2016, la Banque Populaire Occitane (ci après la BPO ou la banque) a consenti à la Sarl Abadalbo, créée le 1er avril 2016 et ayant pour activité la vente de chaussures et de vêtements à [Localité 6] (81), un prêt équipement d’un montant de 90 500 euros, d’une durée de 84 mois, au taux fixe annuel de 2,10% et un TAEG de 3,923%.
Le même jour, son gérant [R] [V] s’est porté caution solidaire de cet engagement à hauteur de la somme de 45 250 euros dans la limite de 50 % des sommes restant dues par la société en capital, intérêts frais et commissions, sur 96 mois et avec le consentement exprès de son épouse, [B] [G], commune en biens.
Par jugement du 11 octobre 2019, le tribunal de commerce de Castres a ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l’encontre de la Sarl Abadalbo avec désignation de Me [S] en qualité de mandataire liquidateur. La procédure a été clôturée pour insuffisance d’actifs le 11 juin 2020.
Le 11 janvier 2021, le mandataire liquidateur a délivré un certificat d’irrécouvrabilité à la BPO.
Par LRAR du 7 novembre 2019, la banque a déclaré sa créance entre les mains du mandataire liquidateur pour un montant de 53 607,32 euros au titre des sommes restant dues relativement au prêt du 15 avril 2016 comprenant le capital restant dû, les intérêts de retard au taux légal à compter du 11 octobre 2019 ainsi que l’indemnité forfaitaire de 8%
Le 13 novembre 2019, par lettre recommandée, la banque a mis [R] [V] en demeure d’honorer son engagement de caution.
Le 26 août 2020, la BPO a assigné [R] [V], en présence de [B] [V], devant le tribunal de commerce de Castres en paiement des sommes restant dues au titre de son engagement de caution, pour un montant de 26 943,44 euros, outre sa condamnation à lui verser 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Reconventionnellement, [R] [V] a soutenu le manquement de la banque à son devoir de mise en garde, en sollicitant des dommages et intérêts en réparation du préjudice ainsi subi et la disproportion manifeste de son engagement de caution à ses biens et revenus au jour de sa conclusion.
Le 26 septembre 2022, le tribunal de commerce de Castres a :
écarté le moyen tiré par [R] [V] de la disproportion entre ses facultés financières et son engagement,
débouté [R] [V] de sa demande indemnitaire formée contre la demanderesse au titre du devoir de mise en garde,
réduit le montant de la clause pénale à 1 500 euros,
condamné [R] [V] à payer à la BPO la somme de 25 708 euros outre les intérêts légaux à compter du 13 novembre 2019 et jusqu’à parfait paiement,
autorisé [R] [V] à se libérer de sa dette en 24 mensualités égales, la première devant intervenir dans les trente jours suivant la signification du présent jugement,
dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité échue [R] [V] sera déchu du bénéfice du terme, la totalité des sommes restant dues devenant immédiatement exigible,
condamné [R] [V] à verser à la BPO une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l’article T00 du Code de procédure civile,
condamné [R] [V] aux entiers dépens dont frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 84,48 euros TTC.
Par déclaration en date du 17 octobre 2022, [R] [V] a relevé appel du jugement du tribunal de commerce aux fins de le voir réformé en intégralité à l’exception des chefs de dispositif ayant réduit le montant de la clause pénale à 1 500 euros, l’ayant autorisé à se libérer de sa dette en 24 mensualités égales, la première devant intervenir dans les trente jours suivant la signification du présent jugement et dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité échue [R] [V] serait déchu du bénéfice du terme, la totalité des sommes restant dues devenant immédiatement exigible.
Par voie de conclusions, la BPO a formé appel incident de ces trois chefs de dispositif.
Le 1er août 2023, la BPO a cédé la créance détenue sur [R] [V] au fonds commun de titrisation Cédrus (ci après le Fct Cédrus), lequel est intervenu volontairement à l’instance.
L’ordonnance de clôture a été rendue en date du 5 août 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience du 11 septembre 2024.
Prétentions et moyens des parties :
Vu les conclusions notifiées le 10 janvier 2023, auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, et dans lesquelles [R] [V] sollicite, au visa des articles L 332-1 du code de la consommation, 2313 du Code Civil, 1231-5 et 1343-5 du Code civil :
sur le fond, l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, et la reconnaissance du caractère disproportionné de l’engagement de caution,
la reconnaissance d’un défaut de justification par la banque d’une créance certaine, liquide et exigible,
et en conséquence, le rejet de l’ensemble des demandes de la BPO à son encontre,
en toute hypothèse, la reconnaissance que la BPO a manqué à son devoir de mise en garde à son égard,
en conséquence, la condamner à lui payer la somme de 26 943,44 euros suivant décompte arrêté au 17.01.2020, et prononcer la compensation avec le montant de l’ensemble des sommes dues en exécution de l’engagement de caution,
la condamnation de la BPO à payer à [R] [V] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC et les entiers dépens,
subsidiairement, si par extraordinaire la cour confirmait le jugement rendu en ce qu’il a admis le principe de l’obligation de Monsieur [R] [V] la reconnaissance de ce que l »indemnité forfaitaire de 8% constitue une clause pénale et la fixation de son montant à de un euro symbolique,
octroyer à [R] [V] un échéancier sur une période de deux ans, sur le fondement des dispositions de l’article 1343-5 du code civil et prescrire les sommes porteront intérêt à un taux réduit,
le rejet de la demande d’article 700 de la BPO,
et dans cette hypothèse, qu’il soit statué ce que de droit quant aux dépens.
Vu les conclusions d’intervention volontaire notifiées en date du 24 avril 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, et dans lesquelles le fonds commun de titrisation Cédrus demande, au visa des articles L.214-169 du code monétaire et financier et 328 et suivants du code de procédure civile :
que soit reçue son intervention volontaire,
la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a :
– écarté le moyen tiré par [R] [V] de la disproportion entre ses facultés financières et son engagement,
– débouté [R] [V] de sa demande indemnitaire formée contre la demanderesse au titre du devoir de mise en garde,
– autorisé [R] [V] à se libérer de sa dette en 24 mensualités égales, la première devant intervenir dans les 30 jours suivant la signification du jugement,
– dit qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité échue
[R] [V] sera déchu du bénéfice du terme, la totalité des sommes restant dues devenant immédiatement exigible,
– condamné [R] [V] à verser à la BPO, une indemnité de 1500 euros sur le fondement l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné [R] [V] aux entiers dépens dont frais de greffe taxés et liquidés à la somme de 84,45 euros TTC,
statuant à nouveau sur ces points, la reconnaissance de ce que le montant de la clause pénale doit être fixé conformément au contrat de crédit souscrit, soit la somme de 3 970,89 euros,
la condamnation de [R] [V] à payer à la BPO, la somme de 26 943,44 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2019,
la condamnation de [R] [V] au paiement de la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de l’avocat soussigné.
La cour prend acte que le Fonds commun de titrisation Cédrus, intervenant volontaire, vient aux droits de la BPO en vertu du bordereau de cession de créances du 1er août 2023 conformément aux dispositions de l’article
L313-27 du Code monétaire et financier.
Sur l’engagement de caution de [R] [V] du 15 avril 2016
Aux termes de l’article L.332-1 du code de la consommation, applicable à l’engagement en cause, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Le caractère disproportionné s’apprécie d’une part, au regard de l’ensemble des engagements souscrits par la caution, d’autre part de ses biens et revenus, sans tenir compte des revenus escomptés de l’opération garantie. L’engagement de caution ne doit pas être manifestement disproportionné aux biens et revenus tels que déclarés par la caution, énonciations auxquelles le créancier est en droit de se fier et dont, en l’absence d’anomalies apparentes, il n’a pas à vérifier l’exactitude ou l’exhaustivité.
La sanction du caractère manifestement disproportionné de l’engagement de la caution est l’impossibilité pour le créancier de se prévaloir de cet engagement.
Il appartient à la caution qui l’invoque de rapporter la preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement à la date à laquelle il a été souscrit et au créancier professionnel, qui entend malgré tout se prévaloir d’un engagement de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion, d’établir qu’au moment où il appelle la caution en paiement, le patrimoine de celui-ci permet de faire face à son obligation.
Le Fct Cédrus produit une fiche patrimoniale du 19 novembre 2015 que [R] [V] ne conteste pas avoir remplie et signée et à propos de laquelle il ne soulève aucune anomalie apparente.
Il est rappelé qu’en l’absence d’anomalies apparentes, la banque n’est pas tenue de procéder à des vérifications complémentaires et est en droit de se fier aux informations figurant dans la dite fiche, la caution ne pouvant a posteriori soutenir que les informations fournies sont inexactes ou incomplètes afin d’établir que le cautionnement appelé était en réalité manifestement disproportionné.
[R] [V] ne soutient pas que les mentions portées sur la fiche patrimoniale remplie 6 mois avant la conclusion de son engagement n’étaient plus d’actualité au 15 avril 2016.
Sur cette fiche, il est indiqué que [R] [V] et son épouse percevaient 55 560 euros de revenus communs annuels et étaient propriétaires de leur résidence principale sise à [Localité 8] (81), évaluée à 265 000 euros avec un solde d’emprunt d’acquisition s’établissant à 177 860 euros. Il est enfin indiqué que [R] [V] a fait un apport en numéraire à la Sarl Abaldo de 34 000 euros sans autre précision. La fiche ne mentionne aucune autre dette que celle relative au solde de l’emprunt immobilier.
Contrairement à ce que soutient [R] [V], la disproportion manifeste de l’engagement de la caution s’apprécie par rapport à ses biens et revenus sans distinction, de sorte que, lorsque la caution est mariée sous le régime de la communauté légale, doivent être pris en considération tant les biens propres et les revenus de la caution que les biens communs, incluant les revenus du conjoint.
C’est également en vain qu’il invoque la charge représentée par des engagements financiers conclus postérieurement au 15 avril 2016.
Au vu des éléments ainsi examinés, la cour indique que le cautionnement consenti par [R] [V] le 15 avril 2016, limité à la somme de 45 250 euros dans la limite de 50 % des sommes restant dues par la société en capital, intérêts frais et commissions, n’était pas disproportionné à ses biens et revenus.
Le moyen tiré de la disproportion manifeste de l’engagement de l’appelant au jour de sa conclusion est écarté. Le Fct Cédrus peut se prévaloir de cet engagement, le jugement entrepris étant confirmé sur ce point.
La cour note qu’en réplique au moyen soulevé par [R] [V] de l’absence d’exigibilité de la créance en l’absence de production au dossier de l’ordonnance d’admission du juge-commissaire, le Fct Cédrus produit le certificat d’irrécouvrabilité délivré par le mandataire liquidateur à la BPO le 11 janvier 2021, lequel présuppose l’admission de la créance de la banque dans la procédure collective.
Sur le manquement de la banque à son obligation de mise en garde de la caution
Aux termes de l’article 1382 du code civil, dans sa version applicable aux faits en cause, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
[R] [V] soutient que la banque a manqué à son obligation de mise en garde à son égard en ne le prévenant pas des risques d’endettement liés à l’octroi à la Sarl Abadalbo d’un prêt inadapté à ses capacités financières et donc du risque de non paiement de son engagement par la débitrice principale.
La banque est tenue à un devoir de mise en garde à l’égard d’une caution non avertie alternativement lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n’est pas adapté à ses capacités financières ou s’il existe un risque d’endettement né de l’octroi du prêt garanti, inadapté aux capacités financières de l’emprunteur et créant un risque de défaillance caractérisée du débiteur principal.
C’est en vain que [R] [V] soutient sa qualité de caution non avertie dans la mesure où la banque produit son curriculum vitae, lequel démontre qu’il possède une expérience professionnelle de longue durée le rendant plus qu’avisé en matière de gestion commerciale et budgétaire. De même, comme les deux parties en justifient conjointement, il était dirigeant de la Sarl Abadalbo en même temps que de trois autres sociétés exerçant dans le même secteur d’activité.
Par ailleurs, l’appelant ne démontre ni le caractère inadapté du cautionnement consenti, lequel a été reconnu proportionné à ses biens et revenus au moment de sa conclusion, ni le caractère inadapté du prêt consenti à la Sarl Abadalbo.
Il doit notamment être relevé que le prêt en cause n’a pas été conclu par la Sarl Abadalbo pour acquérir le fonds de commerce, évalué à 178 000 euros dans la fiche patrimoniale, mais pour réaliser ses travaux d’aménagement et acquitter le droit d’entrée dans la franchise » Carnet de vol « .
[R] [V] ne rapporte aucune preuve du caractère inadapté dudit prêt sinon en se limitant à déduire le caractère excessif du crédit consenti de la création concomitante de la Sarl. Il n’indique cependant pas comment a été financée au préalable l’acquisition du fonds de commerce.
Il est constaté au surplus que l’activité exercée, elle, n’était pas nouvelle, s’agissant du rachat d’un fonds de commerce de chaussures bien implanté en centre-ville de [Localité 6]. Les échéances du prêt, qui courraient sur 7 ans, ont été régulièrement honorées par la débitrice principale jusqu’à l’ouverture de sa procédure collective 3 ans et demi après l’octroi du crédit, ce qui atteste du caractère non excessif du crédit consenti.
La banque n’était donc tenue d’aucune obligation de mise en garde à l’encontre de [R] [V] de sorte qu’il ne peut lui être reproché aucune faute à ce titre. L’ensemble des demandes de dommages et intérêts formulées par [R] [V] à son encontre sont rejetées.
Le jugement de première instance est confirmé de ce chef.
Sur l’indemnité forfaitaire et le montant final de la créance du Fct Cédrus
Le Fctt Cédrus sollicite la condamnation de [R] [V] à la somme de 26 934,44 euros représentant, conformément à son engagement contractuel, 50 % des sommes restant dues par la société en capital, intérêts frais et commissions.
[R] [V] soutient que l’indemnité forfaitaire de 8% dont le paiement est poursuivi a la nature d’une clause pénale et doit être minorée par le juge pour être ramenée à 1 euro.
Le Fct Cédrus s’y oppose en indiquant que l’indemnité en cause a été valablement prévue par les clauses du contrat de prêt et que l’appelant ne rapporte aucunement la preuve de son caractère excessif.
En application de l’article 1226 du code civil, dans sa version applicable au contrat en cause, la clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution.
En l’espèce, le contrat initial de prêt a prévu deux indemnités forfaitaires en cas de défaillance de l’emprunteur, une indemnité de 5% découlant directement de la défaillance et une indemnité complémentaire de 3% en cas de nécessité d’introduction d’une action en justice en vue d’obtenir le paiement des sommes.
Il a été jugé que l’indemnité forfaitaire contractuellement prévue en cas de non paiement par l’emprunteur des sommes dues s’analyse en une clause pénale si elle est stipulée à la fois comme un moyen de contraindre l’emprunteur à l’exécution spontanée, moins coûteuse pour lui, et comme l’évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice futur subi par le prêteur du fait de l’obligation d’engager une procédure.
Dès lors, les deux indemnités forfaitaires contractuellement prévues en l’espèce ont bien le caractère de clauses pénales et peuvent être minorées d’office par le juge s’il constate leur caractère manifestement excessif.
A ce titre, [R] [V] affirme que la banque ne justifie d’aucune préjudice et qu’elle a déjà facturée plus de 2 800 euros de frais de gestion. [R] [V] ne rapporte cependant aucune preuve des frais facturés par la banque.
Il est néanmoins admis que le caractère excessif d’une clause pénale peut être retenu s’il est constaté expressément l’absence de préjudice de la banque. Comme l’a fait le tribunal de commerce, il convient de constater en l’espèce que l’emprunteuse principale a réglé 41 mensualités sur les 84 dues avant l’ouverture de sa liquidation judiciaire, de sorte que le préjudice de la banque doit s’apprécier au regard de l’exécution partielle de son obligation par la débitrice.
En considération de cette exécution partielle, le montant de l »indemnité forfaitaire de 5% sera réduit d’office. En revanche, l’indemnité de 3% contractuellement prévue aux fins de réparer le préjudice découlant de la nécessité d’entamer une procédure judiciaire pour recouvrer les sommes restant dues et ce préjudice étant intégralement réalisé du fait de la présente procédure, ne sera pas réduite.
Le Fct Cédrus produit un décompte arrêté au 17 janvier 2020 établissant sa créance sur la Sarl Abadalbo à la somme totale de 53 886,89 euros se décomposant en 49 636,13 euros au titre du capital restant dû, 279,87 euros au titre des intérêts du 11 octobre 2019 au 17 janvier 2020 et 3 970,89 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de 8%
L’indemnité de 5% s’établit à 2 481,80 euros tandis que l’indemnité de 3% s’établit à la somme de 1 489,10 euros. Le montant de l’indemnité forfaitaire de 5% sera donc ramené à la somme de 1 200 euros.
La cour constate enfin que la déclaration de créance produite par le Fct Cédrus ne comporte qu’une demande au titre des intérêts légaux à compter de la mise en demeure, lesquels seront adjoints à la condamnation en paiement de [R] [V], mais aucune demande au titre d’intérêts contractuels antérieurs, de sorte que les 279,87 euros inclus dans le montant total ne sont pas dus.
La créance finale du Fct Cédrus sur [R] [V], en sa qualité de caution, s’établit donc à la somme de 26 162,61 euros (50% de (49 636,13+1 489,10+1 200), avec intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2019, date de la mise en demeure.
Le jugement de première instance est confirmé sur le principe de la condamnation en paiement mais infirmé quant au montant dû.
Sur la demande de délais de paiement
En application de l’article 1343-5 du code civil, [R] [V] sollicite des délais de paiement afin de pouvoir s’acquitter de sa dette, mettant en avant une situation difficile découlant du placement en liquidation judiciaire de 3 autres sociétés dont il était le dirigeant et le garant.
Le Fct Cédrus sollicite la confirmation du jugement de première instance qui a accordé des délais de paiement à la caution.
Pour justifier de la réalité de sa situation économique, [R] [V] produit ses avis d’imposition pour les années 2017 à 2020, portant sur ses revenus de 2016 à 2019, attestant d’une dégradation progressive des revenus annuels communs imposables du couple, passant de 36 886 euros à 15 113 euros. Au jour où la cour statue, il n’est cependant fourni aucune pièce illustrant la réalité de la situation économique du couple quatre années plus tard.
Si l’appelant produit les jugements d’ouverture des liquidations judiciaires des Sarl Nafrouffiac et Nafalbi, il ne justifie pas être garant des engagements de ces deux entités et des montants restant à sa charge à l’issue de leurs procédures collectives.
Dès lors, la cour ne peut faire droit à sa demande de délais de paiement et le jugement de première instance sera infirmé sur ce point.
Sur les frais irrépétibles,
Confirmé presque intégralement, le jugement de première instance le sera également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
[R] [V], partie succombante, sera condamné aux dépens d’appel.
Les circonstances de l’espèce ne justifient pas qu’il soit alloué d’indemnités en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Les parties seront déboutées de leurs demandes formulées sur ce fondement.
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf quant au montant de la créance finale du Fonds commun de titrisation Cédrus sur [R] [V] et sur l’octroi des délais de paiement,
Infirme le jugement entrepris sur le montant de la créance finale du Fonds commun de titrisation Cédrus sur [R] [V] et sur l’octroi des délais de paiement
Et, statuant à nouveau de ces chefs,
Condamne [R] [V] à payer au Fonds commun de titrisation Cédrus le somme de 26 162,61 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2019 et jusqu’à parfait paiement,
Rejette sa demande d’octroi de délais de paiement,
Y ajoutant,
Condamne [R] [V] aux dépens d’appel,
Déboute [R] [V] et le Fonds commun de titrisation Cédrus de leurs demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier La Présidente .
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