L’Essentiel : En janvier 2011, la Banque populaire de Lorraine Champagne a accordé un prêt à Mme [U], avec la SCI Hadis comme caution solidaire, garantissant l’engagement par une hypothèque. En mai 2015, la banque a initié une procédure de saisie immobilière. Cependant, un jugement d’avril 2021 a constaté la prescription de la créance, annulant la saisie. Mme [U] et la SCI ont contesté cette décision, et la cour d’appel a jugé que l’action de la banque n’était pas prescrite. La Cour de cassation a finalement annulé cette décision, renvoyant l’affaire pour poursuivre la saisie immobilière.
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Contexte de l’affaireLa société Banque populaire de Lorraine Champagne a accordé un prêt à Mme [U] en janvier 2011, avec la société SCI Hadis comme caution solidaire. Cette dernière a également consenti une hypothèque sur un bien immobilier en garantie de son engagement. Procédure de saisie immobilièreEn mai 2015, la banque a délivré un commandement de payer à la société SCI Hadis, suivi d’une assignation à une audience d’orientation. Jugement de prescriptionUn jugement rendu en avril 2021 a constaté la prescription de la créance de la banque et a annulé la procédure de saisie immobilière engagée contre la société. Arguments des partiesMme [U] et la société ont contesté la décision de la cour d’appel qui a jugé que l’action de la banque n’était pas prescrite, remettant en cause l’annulation du commandement de saisie immobilière. Examen des moyens de droitLa cour d’appel a été critiquée pour avoir statué sur un moyen soulevé pour la première fois en appel, ce qui aurait dû entraîner son irrecevabilité selon les règles de procédure. Décision de la Cour de cassationLa Cour de cassation a annulé les décisions de la cour d’appel concernant la prescription de la créance, renvoyant l’affaire devant le juge de l’exécution pour la poursuite de la procédure de saisie immobilière. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article R. 311-5 du code des procédures civiles d’exécution dans le cadre d’une saisie immobilière ?L’article R. 311-5 du code des procédures civiles d’exécution stipule que : « Les contestations et demandes incidentes soulevées après l’audience d’orientation ne sont recevables que si elles portent sur des actes de la procédure de saisie immobilière postérieurs à cette audience ou si, nées de circonstances postérieures à celle-ci, elles sont de nature à interdire la poursuite de la saisie. » Cette disposition impose une rigueur procédurale aux parties impliquées dans une saisie immobilière. En effet, toutes les parties appelées à l’audience d’orientation doivent respecter cette règle, ce qui signifie qu’elles ne peuvent pas soulever de nouvelles contestations après cette audience, sauf si ces contestations sont directement liées à des actes postérieurs ou à des circonstances nouvelles. Ainsi, la cour d’appel a commis une erreur en ne déclarant pas d’office l’irrecevabilité d’un moyen soulevé pour la première fois en appel, ce qui a conduit à une violation de cet article. Comment l’article 2224 du code civil s’applique-t-il dans le cadre de la prescription des créances ?L’article 2224 du code civil dispose que : « La prescription extinctive est un mode d’extinction des droits résultant de l’inaction de leur titulaire pendant un certain temps. » Cet article établit le principe selon lequel une créance peut être éteinte par la prescription, qui est généralement de cinq ans, sauf disposition contraire. Dans le cas présent, la cour d’appel a jugé que l’action de la banque contre la société en recouvrement de sa créance n’était pas prescrite, ce qui a été contesté par Mme [U] et la société. La question de la prescription est cruciale, car elle détermine si la banque peut encore revendiquer son droit de créance. La cour a donc dû examiner si la prescription quinquennale ou biennale s’appliquait, en tenant compte des circonstances entourant la caution et de la date de délivrance du commandement de saisie. Quelles sont les conséquences de la cassation de l’arrêt de la cour d’appel ?La cassation de l’arrêt de la cour d’appel a des conséquences significatives, conformément à l’article 624 du code de procédure civile, qui stipule que : « La cassation d’un jugement entraîne la nullité de celui-ci et, le cas échéant, le renvoi de l’affaire devant une juridiction de même degré. » Dans ce cas, la cassation des chefs de dispositif de l’arrêt a entraîné l’annulation de la décision qui avait infirmé le jugement déféré. Cela signifie que l’affaire doit être renvoyée devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy pour la poursuite de la procédure de saisie immobilière. De plus, Mme [U] et la société ont été déboutées de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ce qui implique qu’elles ne pourront pas obtenir de remboursement de leurs frais de justice, et elles sont condamnées aux dépens de première instance et d’appel. Cette décision souligne l’importance de respecter les règles de procédure et les délais en matière de prescription dans les affaires de saisie immobilière. |
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 novembre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1091 F-D
Pourvoi n° E 22-15.755
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
1°/ Mme [R] [U], domiciliée [Adresse 1],
2°/ la société SCI Hadis, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° E 22-15.755 contre l’arrêt rendu le 24 février 2022 par la cour d’appel de Nancy (chambre de l’exécution – JEX), dans le litige les opposant à la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, société coopérative de banque populaire, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chevet, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [U] et de la société SCI Hadis, de la SCP Boucard-Maman, avocat de la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, et l’avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l’audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chevet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Nancy, 24 février 2022), par acte authentique du 6 janvier 2011, la société Banque populaire de Lorraine Champagne, aux droits de laquelle vient la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne (la banque), a accordé un prêt à Mme [U], en garantie duquel la société SCI Hadis (la société) s’est portée caution solidaire et a consenti, en garantie de cet engagement de caution, une hypothèque conventionnelle sur un bien immobilier lui appartenant.
2. Le 16 mai 2015, la banque a fait délivrer à la société un commandement de payer valant saisie immobilière, puis l’a assignée à une audience d’orientation.
3. Par jugement du 22 avril 2021, un juge de l’exécution a constaté la prescription de la créance de la banque et annulé la procédure de saisie immobilière.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. Mme [U] et la société font grief à l’arrêt de juger que l’action de la banque contre la société en recouvrement de sa créance n’est pas prescrite, et d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a constaté l’acquisition de la prescription de la créance de la banque, créancier poursuivant, sur la société à la date de délivrance du commandement de saisie immobilière en date du 16 mai 2015 et en ce qu’il a, en conséquence, prononcé l’annulation dudit commandement et, par suite, celle de la procédure de saisie immobilière, alors « qu’aucun moyen de fait ou de droit ne peut être formulé pour la première fois devant la cour d’appel après l’audience d’orientation, à moins que la contestation ne porte sur les actes de procédure postérieurs à cette audience ; qu’en décidant n’y avoir lieu à se prononcer sur la recevabilité du moyen, soulevé pour la première fois devant elle par le créancier poursuivant, tiré de ce que la caution ne pourrait se prévaloir de l’acquisition de la prescription biennale prévue par l’article L. 218-2 du code de la consommation et de l’application en conséquence de la prescription quinquennale, faute pour la caution de l’avoir saisie d’une fin de non-recevoir, la cour d’appel, qui devait relever d’office l’irrecevabilité de ce moyen, a violé l’article R. 311-5 du code des procédures civiles d’exécution. »
Vu l’article R. 311-5 du code des procédures civiles d’exécution :
5. Il résulte de ce texte que les contestations et demandes incidentes soulevées après l’audience d’orientation ne sont recevables que si elles portent sur des actes de la procédure de saisie immobilière postérieurs à cette audience ou si, nées de circonstances postérieures à celle-ci, elles sont de nature à interdire la poursuite de la saisie.
6. Cette règle s’impose à toutes les parties appelées à l’audience d’orientation.
7. Pour dire n’y avoir lieu de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par Mme [U] et la société, tirée de l’irrecevabilité de la banque à se prévaloir des dispositions de l’article 2224 du code civil, et dire que l’action de la banque contre la société en recouvrement de sa créance n’est pas prescrite, l’arrêt retient que cette fin de non-recevoir n’est pas reprise dans le dispositif de leurs conclusions.
8. En statuant ainsi, alors que le moyen tiré de l’application de la prescription quinquennale à la caution avait été soulevé pour la première fois en cause d’appel, de sorte qu’elle devait prononcer d’office son irrecevabilité, peu important que ce moyen ait été soulevé par le créancier en réponse à une fin de non-recevoir soulevée par le débiteur, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. En application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l’arrêt en ce qu’il infirme le jugement déféré en ses autres dispositions et dit que l’action de la banque contre la société en recouvrement de sa créance n’est pas prescrite, entraîne la cassation des chefs de dispositif renvoyant l’affaire et les parties devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nancy pour la poursuite de la procédure de saisie immobilière, déboutant Mme [U] et la société de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et condamnant Mme [U] et la société aux dépens de première instance et d’appel, qui s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
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