L’Essentiel : La société CCF, héritière de HSBC Continental Europe, a accordé un prêt immobilier de 300 000 euros aux époux [M]. Suite à des impayés, la banque a prononcé la déchéance du terme et a mis en place un plan d’apurement. En 2021, HSBC a délivré un commandement de payer, mais a reconnu son caractère non exécutoire. Les époux [M] ont invoqué la prescription, mais leur argument a été rejeté. En appel, la cour de Versailles a déclaré l’action de CCF irrecevable pour cause de prescription. Un pourvoi en cassation a été formé, entraînant un sursis à statuer jusqu’à la décision de la cour.
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Contexte de l’affaireLa société CCF, successeur de HSBC Continental Europe, a consenti un prêt immobilier de 300 000 euros aux époux [M] pour l’acquisition de biens immobiliers. Après des difficultés de paiement, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt et a mis en place un plan d’apurement. Déchéance et mise en demeureEn août 2012, HSBC a mis en demeure les époux [M] de rembourser le capital restant dû. Un protocole d’accord a été signé en mai 2013, stipulant un remboursement échelonné sur 240 mois. Cependant, en juillet 2021, la banque a dénoncé ce protocole en raison d’échéances impayées. Commandement de payer et désistementEn décembre 2021, HSBC a délivré un commandement de payer, mais a reconnu que celui-ci n’était pas un titre exécutoire et s’est désistée de la procédure de saisie immobilière. En novembre 2022, la société a assigné les époux [M] pour obtenir un titre exécutoire. Incident de prescriptionLes époux [M] ont soutenu que l’action en paiement était prescrite, ce qui a été rejeté par le juge de la mise en état en décembre 2023. La société CCF a été déclarée recevable dans sa demande de paiement. Appel et décisions de la courLes époux [M] ont interjeté appel de l’ordonnance de décembre 2023. En octobre 2024, la cour d’appel de Versailles a infirmé cette ordonnance, déclarant l’action de la société CCF irrecevable pour cause de prescription. Pourvoi en cassationLa société CCF a formé un pourvoi en cassation contre la décision de la cour d’appel. Les époux [M] ont demandé un sursis à statuer en attendant l’issue de ce pourvoi. Décision sur le sursis à statuerLe juge de la mise en état a ordonné un sursis à statuer, considérant que la décision de la cour de cassation pourrait avoir une incidence sur le litige. La demande d’extinction de l’instance formulée par les époux [M] a été rejetée. Conséquences et prochaines étapesL’affaire a été renvoyée à une audience de mise en état pour mai 2025, avec une exécution provisoire de la décision en cours. Les dépens ont été réservés, et les parties ont été déboutées de leurs demandes supplémentaires. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de l’action en paiement et sa prescription ?L’action en paiement engagée par la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, est une action en recouvrement de créance. Selon l’article 2224 du Code civil, « le délai de prescription est de cinq ans pour les actions personnelles ou mobilières ». Dans le cas présent, la société CCF a introduit son action par assignation du 10 novembre 2022. Les époux [M] soutiennent que cette action est prescrite, ayant cessé tout règlement au titre du protocole à compter du 20 février 2019. L’article L. 218-2 du Code de la consommation précise que « le délai de prescription est de deux ans à compter de la date à laquelle le créancier a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit ». Ainsi, la cour d’appel de Versailles a jugé l’action de la société CCF irrecevable comme prescrite, en contradiction avec la décision du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nanterre. Quelles sont les conséquences de la prescription sur l’action en paiement ?La prescription a pour effet d’éteindre l’action en paiement, rendant le créancier incapable d’exiger le paiement de sa créance. L’article 2227 du Code civil stipule que « la prescription est un moyen de défense ». Dans cette affaire, la cour d’appel a déclaré l’action de la société CCF irrecevable, car prescrite, ce qui signifie que les époux [M] ne sont plus tenus de rembourser la somme réclamée. L’article 2243 du Code civil précise que « la prescription est interrompue par l’assignation en justice ». Cependant, dans ce cas, la cour a considéré que l’assignation n’avait pas eu d’effet interruptif en raison de la prescription déjà acquise par les époux [M]. Quelles sont les implications du pourvoi en cassation sur la procédure en cours ?Le pourvoi en cassation, selon l’article 1002 du Code de procédure civile, « suspend l’exécution de la décision attaquée, sauf disposition contraire ». Cependant, il est important de noter que le pourvoi en cassation n’est pas suspensif d’exécution, comme le précise l’article 514 du même code. Dans cette affaire, la société CCF a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, ce qui a conduit à une demande de sursis à statuer. L’article 378 du Code de procédure civile permet au juge de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la cour de cassation, si celle-ci est susceptible d’avoir une incidence sur le litige en cours. Ainsi, le juge de la mise en état a décidé de prononcer un sursis à statuer, considérant que la solution du pourvoi pourrait avoir un impact direct sur l’affaire. Quelles sont les conséquences de l’exécution provisoire dans cette affaire ?L’exécution provisoire, selon l’article 514 du Code de procédure civile, est de droit pour les décisions de première instance, sauf disposition contraire. Dans cette affaire, l’instance ayant été introduite après le 1er janvier 2020, l’exécution provisoire est applicable. Cela signifie que, malgré le pourvoi en cassation, la décision du juge de la mise en état est exécutoire. Les époux [M] doivent donc se conformer à cette décision, même si un appel est en cours. L’article 514 alinéa 2 précise que « l’exécution provisoire peut être ordonnée même en cas d’appel ». Ainsi, la société CCF peut continuer à faire valoir ses droits pendant que le pourvoi est examiné par la cour de cassation. |
6ème Chambre
ORDONNANCE DE MISE EN ETAT
Rendue le 03 Janvier 2025
N° RG 22/09805 – N° Portalis DB3R-W-B7G-X7BN
N° Minute : 24/
AFFAIRE
Société CCF venant aux droits de la société HSBC CONTINENTAL EUROPE
C/
[B] [H] épouse [M], [C] [M]
Copies délivrées le :
A l’audience du 10 Décembre 2024,
Nous, Louise ESTEVE, Juge de la mise en état assistée de Sylvie CHARRON, Greffier ;
Société CCF venant aux droits de la société HSBC CONTINENTAL EUROPE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître Christophe PHAM VAN DOAN de la SELARL CABINET SABBAH & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0466
DEFENDEURS
Madame [B] [H] épouse [M]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Monsieur [C] [M]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentés par Me Jean-david GUEDJ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0025
ORDONNANCE
Par décision publique, rendue en premier ressort, contradictoire susceptible d’appel dans les conditions de l’article 795 du code de procédure civile, et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Les avocats des parties ont été entendus en leurs explications, l’affaire a été ensuite mise en délibéré et renvoyée pour ordonnance.
Avons rendu la décision suivante :
Selon offre préalable de prêt immobilier datée du 14 novembre 2011, acceptée le 5 décembre 2011, la société HSBC France, devenue HSBC Continental Europe (désormais la société CCF), a consenti à Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] (ci-après dénommés les époux [M]) un prêt immobilier d’un montant de 300 000 euros au taux fixe de 4,10 % destiné à financer l’acquisition des lots de copropriété n°7 et 46 au sein d’un immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 5] à usage de résidence principale, dont l’acte de vente a été régularisé par acte notarié du 31 janvier 2011.
Par lettre du 21 août 2012, HSBC Continental Europe a prononcé la déchéance du terme du prêt et mis en demeure les époux [M] d’avoir à lui rembourser la somme de 295 422,45 euros, correspondant au capital restant dû au titre du prêt.
En contrepartie de la constitution d’une hypothèque sur le domicile des débiteurs, les parties ont conclu un protocole d’accord transactionnel par acte sous seing privé du 16 mai 2013, par lequel les époux [M] ont accepté la déchéance du terme du prêt consenti par la société HSBC Continental Europe, se sont reconnus redevables de la somme exigible de 285.310,10 euros en principal arrêtée au 30 janvier 2013, portant intérêts au taux du prêt de 4,10 %, à régler suivant un plan d’apurement convenu entre les parties, à raison de 240 acomptes mensuels de 1 743,99 euros exigibles du 15 juin 2013 au 15 mai 2033.
L’hypothèque conventionnelle a été constituée sur le bien financé en garantie de cet engagement par acte notarié du 16 mai 2013.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 juillet 2021, la société HSBC Continental Europe a annoncé aux époux [M] son intention de dénoncer le protocole dans les conditions prévues à son article 8, à défaut de règlement d’une somme de 36 623,79 euros représentant 21 échéances impayées.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 août 2021, la banque a mis en demeure les époux [M] de payer le solde restant dû d’un montant de 264 999,98 euros.
Le 7 décembre 2021, la société HSBC Continental Europe a délivré aux époux [M] un commandement de payer valant saisie immobilière, sur le fondement de l’acte notarié d’affectation hypothécaire du 16 mai 2013.
Reconnaissant que ce commandement ne constituait pas un titre exécutoire, la société HSBC Continental Europe s’est désistée de la procédure de saisie immobilière, désistement qui a été constaté par jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre chargé des saisies immobilières, le 17 novembre 2022.
Dans ce contexte, par exploit d’huissier du 10 novembre 2022, la société HSBC Continental Europe a fait assigner les époux [M] au fond devant le tribunal judiciaire de Nanterre, pour obtenir un titre exécutoire constatant sa créance et obtenir leur condamnation à lui payer la somme de 240 736,58 euros en principal arrêté au 4 novembre 2022, outre les intérêts postérieurs au taux de 4,10 %.
Dans le cadre de cette procédure, les époux [M], soutenant avoir cessé tout règlement au titre du protocole à compter du 20 février 2019, ont saisi le juge de la mise en état d’un incident pour voir déclarer l’action en paiement de la banque prescrite.
Par ordonnance contradictoire du 8 décembre 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nanterre a :
Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M],
Déclaré la société HSBC Continental Europe recevable en son action et en sa demande de paiement de la somme de 240 736,58 euros en principal et intérêts arrêtés au 4 novembre 2022, outre les intérêts au taux conventionnel annuel de 4,10 % depuis cette date jusqu’à parfait règlement, car non-prescrite,
Condamné Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M] à verser à la société HSBC Continental Europe la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Réservé les dépens,
Rejeté les demandes de Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M] au titre des frais irrépétibles,
Renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 7 mars 2024 à 9h30 pour les conclusions des parties au fond (avec proposition d’un calendrier de procédure à peine de radiation),
Rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Le 30 janvier 2024, les époux [M] ont interjeté appel de l’ordonnance en intimant la société HSBC Continental Europe.
Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 26 janvier 2024 et le 13 février 2024, Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M] sollicitent du Juge de la mise en état d’ordonner un sursis à statuer de la présente instance, dans l’attente de l’issue définitive de la procédure actuellement pendante devant la Cour d’appel de Versailles, sur l’appel formé par Monsieur et Madame [M] à l’encontre de l’ordonnance de mise en état du 8 décembre 2023.
Les demandeurs à l’incident indiquent avoir interjeté appel de la décision du Juge de la mise en état du 08 décembre 2023 et sollicite un sursis à statuer sur le fondement de l’article 378 du code de procédure civile, invoquant la bonne administration de la justice.
Par acte du 14 février 2024, la société CCF s’est constituée comme venant aux droits de la société HSBC Continental Europe.
Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 29 février 2024, la société HSBC Continental Europe sollicite du Juge de la mise en état de :
Rejeter l’incident soulevé par Monsieur et Madame [M] aux fins de sursis à statuer ; Enjoindre aux époux [M] de conclure au fond à la prochaine audience de mise en état, et qu’à défaut, l’instruction de l’affaire pourra être clôturée et les plaidoiries fixées. ; Condamner solidairement Monsieur et Madame [M] à payer à la société HSBC Continental Europe la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire ; Condamner solidairement Monsieur et Madame [M] aux dépens de l’incident ;Condamner solidairement Monsieur et Madame [M] à payer à la société HSBC Continental Europe la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt contradictoire en date du 17 octobre 2024, la cour d’appel de Versailles a infirmé l’ordonnance du 8 décembre 2023 en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, a :
Déclaré irrecevable comme prescrite l’action en paiement de la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, introduite contre MONSIEUR [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M] par assignation du 10 novembre 2022,
Débouté la société CCF de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif,
Condamné la société CCF à payer à Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamné la société CCF aux dépens de première instance et d’appel.
Le 15 novembre 2024, la société CCF a formé un pourvoi en cassation contre cette décision.
Aux termes de ses conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 28 novembre 2024, les époux [M] demandent au juge de la mise en état de :
A titre principal, Prendre acte de leur désistement de leur demande de sursis à statuer de la présente instance, dans l’attente de la décision sur l’appel qu’ils ont formé à l’encontre de l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 8 décembre 2023 ;Constater l’extinction de la présente instance et action et le dessaisissement du Tribunal ;Déclarer irrecevable la demande de la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, visant au sursis à statuer dans l’attente de l’issue définitive du pourvoi en cassation formé à l’encontre de l’arrêt rendu le 17 octobre 2024 par la cour d’appel de Versailles ;
A titre subsidiaire, débouter la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, de sa demande de sursis à statuer dans l’attente de l’issue définitive du pourvoi en cassation formé à l’encontre de l’arrêt rendu le 17 octobre 2024 par la cour d’appel de Versailles,
En tout état de cause,
Débouter la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, de toutes ses demandes ;
Condamner la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, aux dépens, dont distraction au profit de Maître Jean-David GUEDJ, avocat, sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de leur demande d’extinction de l’instance et de l’action de la société CCF, les époux [M] indiquent que la cour d’appel de Versailles, dans son arrêt du 17 octobre 2024, a jugé irrecevable comme prescrite l’action en paiement engagée par la société CCF à leur encontre.
En réponse à la demande de sursis à statuer de la société CCF, les époux [M] indiquent à titre principal qu’elle est irrecevable et, à titre subsidiaire, mal-fondée.
Sur l’irrecevabilité de la demande, les époux [M], se fondant sur les dispositions de l’article 480 alinéa 1er du code de procédure civile, soutiennent que le prononcé d’un sursis à statuer contreviendrait à l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles et à son exécution provisoire de droit. Ils ajoutent que le pourvoi en cassation formé par la société CCF n’est pas suspensif d’exécution.
Sur le mal-fondé de la demande, les époux [M] font valoir que le prononcé d’un sursis à statuer serait contraire au principe de bonne administration de la justice, lequel commande qu’il soit mis fin au présent litige.
Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par voie électronique le 22 novembre 2024, la société CCF, venant aux droits de la société HSBC Continental Europe, demande au juge de la mise en état de :
Débouter les époux [M] de leur demande ;Surseoir à statuer dans l’attente de l’issue définitive du pourvoi en cassation formé à l’encontre de l’arrêt rendu le 17 octobre 2024 par la cour d’appel de Versailles ;Juger que les dépens de l’incident suivront le sort de la procédure au fond.
Au soutien de sa demande de sursis à statuer, se fondant sur les dispositions de l’article 378 du code de procédure civile, la société CCF fait valoir que la solution du pourvoi en cassation qu’elle a formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Versailles du 17 octobre 2024 est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige, de sorte qu’il est dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de prononcer le sursis à statuer.
En réponse à la demande des époux [M] d’extinction de l’instance et de dessaisissement du tribunal, la société CCF rétorque que les conséquences d’une telle extinction seraient irrémédiables puisque les actes introductifs d’instance délivrés aux époux [M] le 10 novembre 2022 perdraient leur effet interruptif en application de l’article 2243 du code civil, si bien que le délai biennal de la prescription abrégé de l’article L. 218-2 du code de la consommation serait alors acquis.
L’incident a été plaidé le 10 décembre 2024 et mis en délibéré au 03 janvier 2025.
Sur la demande de constater le désistement de l’incident des époux [M]
Il convient de constater que les époux [M] abandonnent leur demande de sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt de la Cour d’appel, ladite demande étant devenue sans objet du fait de la survenance de l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 17 octobre 2024.
Sur la demande de sursis à statuer formulée par la société CCF et sur la demande d’extinction d’instance et d’action formulée par les époux [M]
Selon l’article 73 du code de procédure civile, constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours.
L’article 789, 1° du code de procédure civile dispose que, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance. Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu’ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge.
Il est constant que si les demandes de sursis à statuer font partie d’un titre du code de procédure civile consacré aux incidents d’instance, la jurisprudence les soumet néanmoins au régime des exceptions de procédure, de sorte qu’elles relèvent de la compétence du juge de la mise en état.
L’article 378 du code de procédure civile dispose que la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine.
Il est constant que hors les cas où cette mesure est prévue par la loi, les juges du fond apprécient discrétionnairement l’opportunité du sursis à statuer, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, et ne sont pas tenus de motiver sur ce point leur décision.
Pour ordonner le sursis à statuer, il faut que le résultat de la procédure à venir ait une conséquence sur l’affaire en cours.
L’article 110 du code de procédure civile dispose que le juge peut également suspendre l’instance lorsque l’une des parties invoque une décision, frappée de tierce opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation.
Il est également constant que le caractère non suspensif du pourvoi en cassation n’interdit pas au juge de surseoir à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice lorsqu’il estime que la solution du pourvoi est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige.
En l’espèce, la cour d’appel de Versailles, dans son arrêt du 17 octobre 2024, a déclaré l’action de la société CCF irrecevable, car prescrite, en contradiction avec la solution retenue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nanterre dans son ordonnance du 8 décembre 2023.
La société CCF a formé un pourvoi en cassation le 15 novembre 2024 n°Z2421416, dont elle produit au débat le justificatif, raison pour laquelle elle sollicite que le juge de la mise en état ordonne le sursis à statuer dans l’attente de la décision de la cour de cassation.
D’une part, s’agissant de la recevabilité d’une telle demande, ni le caractère non-suspensif du pourvoi en cassation ni l’autorité de la chose jugée et l’exécution provisoire attachées à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles – qui ne porte que sur l’incident de procédure et non sur le fond de l’affaire – n’interdit au juge de la mise en état de prononcer un tel sursis à statuer, de sorte que la demande formulée par la société CCF est recevable.
D’autre part, sur le caractère bien-fondé de la demande, il est incontestable que la solution du pourvoi en cassation est de nature à avoir une incidence directe sur la solution du litige. En effet, en fonction de la solution retenue par la cour de cassation quant à la prescription de l’action en paiement de la société CCF, cette dernière pourra ou non faire valoir ses moyens au succès de ses prétentions au fond.
En tout état de cause, l’incident de procédure n’étant pas définitivement tranché, il ne serait pas d’une bonne administration de la justice de constater l’extinction de l’instance et de l’action de la société CCF.
Par conséquent, et dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, le sursis à statuer dans l’attente de la décision de la cour de cassation est prononcé et la demande d’extinction de l’instance et de l’action formulée par les époux [M] est rejetée.
Sur les demandes accessoires
Sur les dépens
Aux termes de l’article 790 du code de procédure civile, le juge de la mise en état peut statuer sur les dépens.
Selon l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
L’article 699, alinéa 1er du code de procédure civile dispose que les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision.
En l’espèce, il convient de réserver les dépens.
Sur l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
En l’espèce, l’instance ayant été introduite postérieurement au 1er janvier 2020, il convient ainsi de rappeler que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.
Louise ESTEVE, juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et susceptible d’appel dans les conditions de l’article 795 du code de procédure civile ;
ORDONNONS le sursis à statuer dans l’attente l’arrêt rendu par la Cour de cassation sur le pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Versailles du 17 octobre 2024 (RG n°24/00632 – Pourvoi n°Z2421416) ;
REJETONS l’intégralité des demandes formulées par Monsieur [C] [M] et Madame [B] [H] épouse [M] ;
RENVOYONS l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 15 mai 2025 à 9h30 pour retrait du rôle (sauf observation des parties) ou radiation ;
RÉSERVONS les dépens ;
DÉBOUTONS les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELONS que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.
signée par Louise ESTEVE, Magistrat, chargée de la mise en état, et par Sylvie CHARRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER
LE JUGE DE LA MISE EN ETAT
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