Précisions sur les obligations d’information en matière de crédit à la consommation

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Précisions sur les obligations d’information en matière de crédit à la consommation

L’Essentiel : Le 30 août 2017, M. [O] [S] a ouvert un compte au Crédit agricole mutuel. Il a signé un contrat le 9 novembre 2018 pour une autorisation de découvert de 400 euros, suivie d’une augmentation à 500 euros en janvier 2019. En raison d’un non-règlement, la caisse a assigné M. [O] [S] le 11 octobre 2023 pour un montant de 5 655,44 €. Lors de l’audience du 7 novembre 2024, M. [O] [S] était absent. Le tribunal a débouté la caisse de sa demande d’intérêts, condamnant M. [O] [S] à payer 5 322,86 € sans intérêts ni frais supplémentaires.

Ouverture du compte et autorisations de découvert

Le 30 août 2017, M. [O] [S] a ouvert un compte bancaire auprès de la caisse de Crédit agricole mutuel du centre est. Par la suite, il a signé un contrat le 9 novembre 2018, lui accordant une autorisation de découvert de 400 euros pour une durée de 35 jours à un taux débiteur annuel de 4,89 %. Un second contrat, signé le 31 janvier 2019, a augmenté cette autorisation à 500 euros, avec un taux de 4,96 %.

Assignation et demandes de la caisse

En raison du non-règlement de son découvert, la caisse a assigné M. [O] [S] par acte de commissaire de justice le 11 octobre 2023, demandant le paiement de 5 655,44 € selon un relevé de compte arrêté au 1er juillet 2022, ainsi que 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et la prise en charge des dépens.

Audience et absence de M. [O] [S]

Lors de l’audience du 7 novembre 2024, le juge a soulevé d’office des moyens relatifs à l’application du code de la consommation. La caisse a maintenu ses demandes, tandis que M. [O] [S], bien que régulièrement assigné, n’a pas comparu. L’affaire a été mise en délibéré, avec une décision rendue le 16 janvier 2025.

Application du code de la consommation

Les dispositions du code de la consommation s’appliquent aux crédits d’un montant égal ou supérieur à 200 euros. Selon l’article L.312-93, si le dépassement du découvert se prolonge au-delà de trois mois, le prêteur doit proposer un autre type de crédit. En l’absence de contrat régulier et de mise en demeure, le solde débiteur est considéré comme une prorogation tacite et irrégulière, entraînant la déchéance du droit aux intérêts.

Constatations sur le solde débiteur

Les relevés montrent que le compte de M. [O] [S] est devenu débiteur de 505,41 € le 2 juillet 2021 et est resté débiteur sans qu’aucune offre de crédit ne soit émise. Le prêteur doit prouver l’exécution de son obligation d’information, ce qui n’a pas été fait dans ce cas.

Décision du tribunal

Le tribunal a débouté la caisse de sa demande d’intérêts et de frais, condamnant M. [O] [S] à payer 5 322,86 € (5 655,44 € – 332,58 €). Il a été décidé que cette somme ne produira aucun intérêt et qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile. M. [O] [S] a également été condamné aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’application du code de la consommation pour les opérations de crédit ?

Les dispositions du chapitre II du code de la consommation s’appliquent aux opérations de crédit dont le montant total est égal ou supérieur à 200 euros, conformément à l’article L.312-1.

Cet article précise que :

« Les dispositions du présent chapitre s’appliquent aux opérations de crédit dont le montant total est égal ou supérieur à 200 euros. »

Ainsi, pour que le code de la consommation soit applicable, il est nécessaire que le montant du crédit dépasse ce seuil.

Dans le cas présent, les autorisations de découvert accordées à M. [O] [S] dépassent ce montant, ce qui implique que les règles de protection des consommateurs s’appliquent.

Il est donc essentiel de respecter les obligations d’information et de mise en demeure prévues par le code de la consommation pour éviter des conséquences juridiques défavorables.

Quelles sont les conséquences d’un dépassement de découvert au-delà de trois mois ?

L’article L.312-93 du code de la consommation stipule que :

« Lorsque le dépassement se prolonge au-delà de trois mois, le prêteur propose sans délai à l’emprunteur un autre type d’opération de crédit au sens du 4° de l’article L. 311-1, dans les conditions régies par les dispositions du présent chapitre. »

Cela signifie que si un emprunteur dépasse son autorisation de découvert pendant plus de trois mois, le prêteur doit proposer un nouveau type de crédit.

Dans le cas de M. [O] [S], le dépassement a été constaté depuis le 2 juillet 2021, sans qu’aucune offre de crédit ne soit émise par le prêteur.

Cette absence de proposition de crédit constitue une violation des obligations du prêteur, ce qui peut entraîner la déchéance de son droit aux intérêts.

Quelles sont les implications d’un contrat irrégulier de découvert ?

En vertu de l’article L.311-48, devenu L.341-4 du code de la consommation, il est précisé que :

« En l’absence de contrat régulier, et de mise en demeure valant préavis de résiliation, le solde débiteur correspond alors à une prorogation tacite et irrégulière du terme, et le prêteur est déchu du droit aux intérêts. »

Cela signifie que si le contrat de découvert n’est pas conforme aux exigences légales, le prêteur ne peut pas réclamer d’intérêts sur le montant dû.

Dans le cas de M. [O] [S], l’absence de contrat régulier et de mise en demeure a conduit à la déchéance du droit aux intérêts, ce qui a été pris en compte par le tribunal.

Ainsi, le montant réclamé par la caisse de Crédit agricole mutuel du centre-est a été réduit en conséquence.

Quelles sont les obligations d’information du prêteur ?

L’article L.311-43, devenu L.312-85 à L.312-87, impose au prêteur de respecter certaines obligations d’information.

Il est stipulé que :

« Celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation. A défaut d’une telle preuve, l’obligation en question est réputée non satisfaite. »

Dans le cas présent, la caisse de Crédit agricole mutuel du centre-est n’a pas pu prouver qu’elle avait respecté ses obligations d’information envers M. [O] [S].

Cette absence de preuve a conduit à la conclusion que le prêteur ne pouvait pas réclamer les intérêts et frais associés au dépassement de découvert.

Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal concernant les intérêts et les dépens ?

Le tribunal a décidé que M. [O] [S] devait payer la somme de 5 322,86 €, sans intérêts, en raison de la déchéance du droit aux intérêts.

Il a également été décidé qu’il n’y avait pas lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, qui prévoit la possibilité d’une indemnisation pour les frais irrépétibles.

En application de l’article 696 du code de procédure civile, M. [O] [S] a été condamné aux dépens, ce qui signifie qu’il doit supporter les frais de la procédure.

Ces décisions visent à garantir l’équité entre les parties et à respecter les droits des consommateurs, conformément aux dispositions du code de la consommation.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE RENNES
Service des contentieux de la protection
[Adresse 6]
[Localité 3]
JUGEMENT DU 16 Janvier 2025

N° RG 23/07624 – N° Portalis DBYC-W-B7H-KTXA

Jugement du 16 Janvier 2025

Société CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE EST

C/

[O] [S]

EXÉCUTOIRE DÉLIVRÉ
LE
à
COPIE CERTIFIEE CONFORME
à
Au nom du Peuple Français ;

Rendu par mise à disposition le 16 Janvier 2025 ;

Par Caroline ABIVEN, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de RENNES statuant en qualité de juge des contentieux de la protection, assistée de Emmanuelle BADUFLE, Greffier ;

Audience des débats : 07 Novembre 2024.

Le juge à l’issue des débats a avisé les parties présentes ou représentées, que la décision serait rendue le 16 Janvier 2025, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

ENTRE :

DEMANDEUR :

Société CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE EST
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par maître DEPASSE de la SCP DEPASSE, DAUGAN, QUESNEL, DEMAY, avocat au barreau de RENNES, substitué par maitre BOUCHER, avocat au barreau de RENNES

ET :

DEFENDEUR :

M. [O] [S]
[Adresse 4]
[Localité 2]
non comparant, ni représenté

EXPOSE DU LITIGE :

Le 30 août 2017, M. [O] [S] a ouvert un compte bancaire auprès de la caisse de Crédit agricole mutuel du centre est.

Par contrat signé électroniquement le 9 novembre 2018, la caisse de Crédit agricole mutuel du centre-est a accordé à M. [O] [S] une autorisation de découvert de 400 euros sur une durée de 35 jours au taux débiteur annuel de 4,89 %.

Puis, par contrat signé électroniquement le 31 janvier 2019, la caisse de Crédit agricole mutuel du centre-est a accordé à M. [O] [S] une autorisation de découvert de 500 euros sur une durée de 35 jours au taux débiteur annuel de 4,96 %.

Faisant valoir que M. [O] [S] n’a pas régularisé sa situation de découvert, par acte de commissaire de justice du 11 octobre 2023, la caisse de Crédit agricole mutuel du centre est a fait assigner M. [O] [S] afin d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, sa condamnation au paiement des sommes suivantes :

– 5 655,44 €, suivant relevé de compte arrêté au 1er juillet 2022,
– 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu’à supporter les dépens.

A l’audience du 7 novembre 2024 à laquelle l’affaire a été retenue après un renvoi ordonné par le tribunal, le juge a relevé d’office les moyens tirés de l’application du code de la consommation.

Comparant par ministère d’avocat, la caisse de Crédit agricole mutueldu centre-est a maintenu ses demandes.

Bien que régulièrement assigné par dépôt en l’étude, M. [O] [S] n’a pas comparu.

En cet état l’affaire a été mise en délibéré, la décision étant rendue par sa mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.

MOTIVATION :

Les dispositions du chapitre II Crédit à la consommation du code de la consommation s’appliquent aux opérations de crédit dont le montant total est égal ou supérieur à 200 euros (article L.312-1 du même code).

Il résulte de l’article L.312-93 du code de la consommation que “Lorsque le dépassement se prolonge au-delà de trois mois, le prêteur propose sans délai à l’emprunteur un autre type d’opération de crédit au sens du 4° de l’article L. 311-1, dans les conditions régies par les dispositions du présent chapitre.”

En l’absence de contrat régulier, et de mise en demeure valant préavis de résiliation, le solde débiteur correspond alors à une prorogation tacite et irrégulière du terme, et le prêteur est déchu du droit aux intérêts en application de l’article L.311-48 al. 1 in fine devenu L.341-4 du code de la consommation.

En l’espèce, les relevés produits montrent que le solde du compte, sur lequel M. [O] [S] bénéficiait d’une autorisation de découvert de 500 € sur une durée de 35 jours au maximun, est devenu débiteur le 2 juillet 2021 de 505,41 € et que ce solde est resté ensuite constamment débiteur, sans qu’aucune offre de crédit ne soit émise par le prêteur.

Or, celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation. A défaut d’une telle preuve, l’obligation en question est réputée non satisfaite ;

En l’absence de toute trace d’un contrat régulier de découvert, ou de mise en demeure valant préavis de résiliation, la preuve de l’accomplissement des formalités prévues par l’article L 311-43, devenu L 312-85 à L 312-87, n’est donc pas rapportée.

Le prêteur ne peut dans ces conditions qu’être débouté de la part de sa demande correspondant aux intérêts et frais de toute nature applicables au titre du dépassement, soit la somme de 332,58 €.

M. [O] [S] sera dès lors condamné à payer à La caisse de Crédit agricole mutuel du centre est, la somme de 5 322,86 € (5 655,44 €-332,58 €).

Afin d’assurer l’effectivité du droit de l’Union européenne dont les dispositions nationales ne sont que la transposition, exigence réaffirmée par l’arrêt CJUE du 27/03/2014, C-565/12, il convient d’écarter toute application des articles 1153 du code civil et L 313-3 du code monétaire et financier et de dire que cette somme ne produira aucun intérêt, même au taux légal.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la demanderesse la charge des frais irrépétibles qu’elle a pu exposer.

En application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, M. [O] [S], partie perdante, sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort,

CONDAMNE M. [O] [S] à payer à la caisse de Crédit agricole mutueldu centre est, la somme de 5 322,86 € ;

DIT que cette somme ne produira aucun intérêt ;

DIT n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

MAINTIENTl’exécution provisoire ;

CONDAMNE M. [O] [S] aux dépens.

Le greffier Le Juge des contentieux de la protection


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