Exécution des obligations contractuelles et enjeux de la responsabilité du constructeur

·

·

Exécution des obligations contractuelles et enjeux de la responsabilité du constructeur

L’Essentiel : Madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] ont signé un contrat de construction avec la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION le 23 décembre 2020. La réception des travaux, intervenue le 21 juin 2022, a été marquée par des réserves. Un protocole d’accord du 1er juin 2023 a fixé des travaux à réaliser avant le 30 septembre 2023, en échange d’une retenue de garantie de 8.544,50€. Le 12 avril 2024, les époux [W] ont assigné la société pour obtenir une astreinte et des dommages-intérêts. Le juge a validé l’accord et imposé une astreinte de 40 euros par jour de retard.

Contexte du litige

Madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] ont signé un contrat de construction avec la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION le 23 décembre 2020 pour la construction de leur maison. La réception des travaux a eu lieu le 21 juin 2022, mais avec des réserves. Un protocole d’accord a été établi le 1er juin 2023, stipulant que la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION devait réaliser plusieurs travaux avant le 30 septembre 2023, en contrepartie du paiement d’une retenue de garantie de 8.544,50€ par les époux [W].

Assignation et demandes des époux [W]

Le 12 avril 2024, les époux [W] ont assigné la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION devant le juge de l’exécution pour obtenir une astreinte et des dommages-intérêts pour résistance abusive à l’exécution du titre exécutoire. Après plusieurs renvois, l’affaire a été plaidée le 7 novembre 2024. Les époux ont demandé au juge d’assortir l’ordonnance d’une astreinte de 100 euros par jour de retard et de condamner la société à des dommages-intérêts.

Arguments de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION a contesté la validité de l’accord du 1er juin 2023, arguant qu’il n’y avait pas eu de concessions réciproques. Elle a également soutenu qu’elle ne pouvait pas être tenue responsable de l’inexécution des travaux en raison de l’inaction de ses sous-traitants et a demandé l’annulation du procès-verbal de conciliation. De plus, elle a proposé une indemnité transactionnelle de 1.000€, qui a été refusée par les époux.

Décision du juge de l’exécution

Le juge a confirmé la validité du titre exécutoire, considérant que l’accord comportait des concessions réciproques. Il a décidé d’imposer une astreinte de 40 euros par jour de retard pour les obligations non exécutées par la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION, tout en déboutant les époux de leur demande de dommages-intérêts pour résistance abusive. La société a été condamnée à payer 1.200€ pour les frais irrépétibles et à supporter les dépens de l’instance.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature juridique de l’accord du 1er juin 2023 ?

L’accord du 1er juin 2023 entre les époux [W] et la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION est qualifié de transaction au sens de l’article 2044 du Code civil. Cet article stipule que :

« Une transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. »

Dans le cas présent, l’accord prévoit que le constructeur doit réaliser des travaux de finition, tandis que les époux [W] s’engagent à régler la somme de 8.544,50 € à l’issue des travaux.

Il y a donc des concessions réciproques, ce qui valide la nature transactionnelle de l’accord.

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION ne peut donc pas contester la validité de cet accord, car il répond aux critères de la transaction, et l’ordonnance d’homologation du 18 octobre 2023 lui confère force exécutoire, conformément à l’article 1er de l’article L. 111-3 du Code des procédures civiles d’exécution.

Quelles sont les conditions de fixation d’une astreinte ?

L’article L. 131-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution précise que :

« Le juge de l’exécution peut assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité. »

L’astreinte est un moyen de pression pour garantir l’exécution d’une obligation de faire ou de ne pas faire. Dans cette affaire, la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION n’a pas exécuté ses obligations, à l’exception du remplacement des vitrages.

L’absence d’exécution des autres travaux, malgré la date butoir du 30 septembre 2023, justifie la fixation d’une astreinte.

De plus, la responsabilité de l’entrepreneur principal ne peut être dégagée par des fautes de ses sous-traitants, ce qui renforce la nécessité d’une astreinte pour garantir l’exécution des travaux restants.

Quelles sont les conditions pour obtenir des dommages et intérêts pour résistance abusive ?

L’article L. 121-3 du Code des procédures civiles d’exécution stipule que :

« Le juge de l’exécution a le pouvoir de condamner le débiteur à des dommages et intérêts en cas de résistance abusive. »

Pour qu’une demande de dommages et intérêts soit recevable, il faut prouver que l’absence d’exécution des obligations résulte d’une intention de nuire de la part du débiteur.

Dans cette affaire, bien que la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION n’ait pas exécuté la totalité des travaux, le remplacement des vitrages a été effectué.

Les époux [W] n’ont pas démontré l’existence d’un préjudice direct causé par la résistance abusive, ce qui conduit à leur déboutement de cette demande.

Ainsi, l’absence de preuve d’une intention malveillante ou d’un préjudice direct empêche l’octroi de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Quelles sont les conséquences de la nullité de la transaction ?

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION a soulevé une exception de nullité concernant l’accord du 1er juin 2023, arguant qu’il ne s’agissait pas d’une transaction en raison de l’absence de concessions réciproques.

Cependant, comme mentionné précédemment, l’article 2044 du Code civil définit la transaction comme un contrat avec des concessions réciproques.

L’accord en question prévoit des obligations pour les deux parties, ce qui valide sa nature transactionnelle.

Ainsi, la demande d’annulation de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION est rejetée, et l’accord reste valide et exécutoire.

La nullité de la transaction n’est pas reconnue, ce qui signifie que les obligations qui en découlent demeurent en vigueur et doivent être respectées par les parties.

Quelles sont les implications des frais irrépétibles dans cette affaire ?

L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que :

« Le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. »

Dans cette affaire, la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION, ayant perdu le litige, est condamnée à payer aux époux [W] une somme de 1.200 € au titre des frais irrépétibles.

Ces frais comprennent les dépenses engagées par les époux pour faire valoir leurs droits en justice.

La demande de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION pour obtenir des frais irrépétibles est rejetée, car elle a été condamnée au paiement des dépens de l’instance.

Ainsi, les frais irrépétibles sont à la charge de la partie perdante, conformément aux dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 3] – tél : [XXXXXXXX01]
JUGE DE L’EXÉCUTION

Audience du 09 Janvier 2025
Affaire N° RG 24/02683 – N° Portalis DBYC-W-B7I-K5SN

RENDU LE : NEUF JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ

Par Mélanie FRENEL, Juge chargé de l’exécution, statuant à Juge Unique.

Assistée de Annie PRETESEILLE, Greffier, lors des débats et lors du prononcé, qui a signé la présente décision.

ENTRE :

– Monsieur [B] [W],
– Madame [E] [X] épouse [W], demeurant ensemble [Adresse 2]

Ayant pour avocat la SCP ODYS AVOCATS, avocat au Barreau de RENNES, représentée par Maître Elsa DIETENBECK

Partie(s) demanderesse(s)

ET :

– SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION, Société à responsabilité limitée, dont le siège social est [Adresse 4] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant pour avocat la SELARL PARTHEMA AVOCATS représentée par Maître Estelle GARNIER, avocat au Barreau de Rennes, substitué à l’audience par Me Elisa FROMAGER

Partie(s) défenderesse(s)

DEBATS :

L’affaire a été plaidée le 07 novembre 2024, et mise en délibéré pour être rendue le 19 décembre 2024. A cette date le délibéré a été prorogé au 09 janvier 2025.

JUGEMENT :

En audience publique, par jugement Contradictoire
En PREMIER RESSORT, par mise à disposition au Greffe

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant contrat de construction de maison individuelle en date du 23 décembre 2020, madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] ont confié l’édification de leur maison à la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION, laquelle a missionnée plusieurs entreprises pour différents lots de travaux

La réception des travaux est intervenue avec réserves le 21 juin 2022.

Par ordonnance du 18 octobre 2023 rectifiée par ordonnance du 7 février 2024, la présidente du tribunal judiciaire de Rennes a homologué et conféré force exécutoire au protocole d’accord en date du 1er juin 2023 conclu entre madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] d’une part, la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION d’autre part aux termes duquel cette dernière société s’est engagée pour le 30 septembre 2023 au plus tard à :
– ajouter les éléments de frisette nécessaires sous la toiture principale,
– remplacer deux vitrages dans la cuisine et le salon,
– déposer en mairie la demande modificative de permis de construire,
– mettre en place deux noquets sur la toiture,
– mettre en place une solution pour hydrofuger le parement pierre et appliquer une peinture pour masquer les trous de rouille existants ;
– redresser la planimétrie de la dalle au droit de la porte du garage ;
les époux [W] devant quant à eux, à l’issue de ces travaux, régler l’intégralité de la retenue de garantie, soit la somme de 8.544,50€.

Par acte de commissaire de justice du 12 avril 2024, madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] ont fait assigner la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rennes à l’effet de voir fixer une astreinte à l’encontre de cette dernière et obtenir des dommages et intérêts pour résistance abusive à exécuter un titre exécutoire.

Après quatre renvois pour échange de pièces et conclusions entre les parties, l’affaire a été plaidée à l’audience du 7 novembre 2024, les conseils des parties reprenant oralement leurs écritures.

Entre temps, l’ordonnance du 18 octobre 2023 rectifiée par ordonnance du 7 février 2024 a été signifiée par les époux [W] à la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION par acte du 17 septembre 2024.

Aux termes de conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 7 octobre 2024, madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] demandent au juge de l’exécution de :

“Vu les dispositions des articles L121-3, L131-1 et R131-1 du Code des procédure civile d’exécution,
Vu les dispositions de l’article R631-4 du Code de la consommation,
Vu les dispositions des articles 699 et 700 du Code de procédure civile,

– Débouter la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires dirigées à l’encontre des époux [W] ;
– Assortir l’ordonnance rendue par la Présidente du Tribunal judiciaire de Rennes le 18 octobre 2023 et l’ordonnance rectificative subséquente du 7 février 2024 d’une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard ;
– Fixer le point de départ de l’astreinte au 18 octobre 2023 ;
– Condamner la Société BROCELIANDE CONSTRUCTION à payer aux époux [W] la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive à exécuter un titre exécutoire ;
– Ordonner que l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du Code des procédures civiles d’exécution restent à la charge exclusive de la Société BROCELIANDE CONSTRUCTION ;
– Condamner la Société BROCELIANDE CONSTRUCTION à payer aux époux [W] la somme de 1.200 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens.”

A propos de l’exception de nullité de la transaction soulevée par la défenderesse, les époux [W] font valoir que la circonstance que l’accord auquel ils sont parvenus avec la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION pour mettre fin au litige ait été nommée “transaction” est indifférente puisque le juge peut restituer leur exacte qualification aux actes en vertu de l’article 12 du Code de procédure civile et qu’en l’occurrence, il pourra être considéré que les parties s’étaient engagées dans un processus de conciliation conventionnel et que cette conciliation a été homologuée conformément aux dispositions des articles 130 et 131 du Code de procédure civile. Ils en déduisent qu’il ne peut pas leur être dénié qu’ils agissent en vertu d’un titre exécutoire à l’encontre de la défenderesse.

Sur le fond, ils invoquent une inexécution persistante du constructeur à ses engagements, les travaux de reprise n’ayant toujours pas été réalisés à l’exception du remplacement des vitrages. A la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION qui prétend n’avoir pas compris qu’elle prenait des engagements qui l’obligeaient personnellement alors qu’elle ne peut pas intervenir directement pour procéder aux travaux de reprise, les époux [W] répondent qu’elle est leur seul contractant et qu’en tant que donneur d’ordre de ses sous-traitants, elle engage sa propre assurance de responsabilité civile professionnelle et décennale pour l’ensemble des travaux et non pas uniquement pour ceux qu’elle aurait personnellement réalisés. Ils fustigent l’inertie du constructeur à laquelle il ne peut selon eux être mis fin que par le prononcé d’une astreinte d’un quantum dissuasif.

Se prévalant de réserves émises et persistantes depuis plus de deux années en raison du manque de diligence de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION, les époux [W] sollicitent l’indemnisation de leur préjudice sur le fondement de l’article L. 121-3 du Code des procédures civiles d’exécution.

Par conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 6 novembre 2024, la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION demande au juge de l’exécution de :

“Vu l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire ;
Vu l’articles 1221 et 2044 du code civil ;

A titre principal,
– Constater la nullité du procès-verbal de conciliation en date du 1er juin 2023 ;
A titre subsidiaire,
– Débouter les époux [W] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions;
A titre infiniment subsidiaire,
– Réduire le montant de l’astreinte ;
– Fixer le point de départ de l’astreinte au jour de la signification du jugement à intervenir;
En tout état de cause,
– Débouter les époux [W] de leur demande de dommages et intérêts;
– Condamner les époux [W] à la somme de 1.000€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner les mêmes aux dépens.”

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION rappelle que l’homologation d’un accord transactionnel, lui conférant force exécutoire, ne fait pas obstacle à la contestation de la validité de cet accord devant le juge de l’ exécution . A ce titre, elle conteste que l’accord du 1er juin 2023 ait la nature d’une transaction, faute de concessions réciproques entre les parties.

Subsidiairement, la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION considère qu’il ne peut pas lui être fait supporter une astreinte alors qu’elle ne peut pas diligenter les travaux et procéder à leur mise en œuvre de son seul chef. Elle pointe par ailleurs le manque de disponibilité et de collaboration des époux [W] comme étant également à l’origine de l’inexécution de travaux de reprise qu’ils déplorent.
Elle ajoute que sur les engagements pris, le remplacement des vitrages a été effectué de sorte que l’inexécution des engagements qu’elle a pris n’est pas totale.
Elle se prévaut par ailleurs de la disproportion entre le montant de l’astreinte sollicité et l’enjeu du litige, s’agissant de travaux de finition qui n’ont aucune incidence sur la jouissance des lieux par les demandeurs.

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION nie tout abus de droit de nature à fonder l’allocation d’une indemnité pour résistance abusive. Elle précise avoir offert le 16 octobre 2024 une indemnité de 1.000 € aux époux [W] à titre transactionnel, laquelle a été refusée par ces derniers.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, le juge de l’exécution se réfère aux conclusions susmentionnées des parties en application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS

I – Sur la validité du titre exécutoire

Selon l’article 2044 du Code civil, une transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.

L’article 1565 du Code de procédure civile prévoit que l’accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation (…) peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l’homologation du juge compétent pour connaître du contentieux dans la matière considérée.

Est débattue au cas présent l’absence de concessions réciproques exigées en matière de transaction.

L’accord litigieux prévoit en substance que le constructeur devra procéder à des travaux de finition avant le 30 septembre 2023, à charge pour les époux [W] de régler à ce dernier la somme de 8.544,50 € (retenue de garantie) restant due, à l’issue desdits travaux.

Cet accord prévoit bien une renonciation implicite de chacune des parties a engager une instance judiciaire, l’une aux fins de recouvrement du solde des travaux, l’autre pour obtenir la reprise des désordres ayant fait l’objet de réserves lors de la réception.

Il existe donc bien des concessions réciproques.

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION ne peut donc qu’être déboutée de sa demande d’annulation du procès-verbal de conciliation du 1er juin 2023 ainsi que de celle subséquente d’annulation de l’ordonnance d’homologation en date du 18 octobre 2023 rectifiée par ordonnance du 7 février 2024.

Cette ordonnance par laquelle force exécutoire a été conféré à l’accord du 1er juin 2023 vaut donc titre exécutoire au sens de l’article 1er de l’article L. 111-3 du Code des procédures civiles d’exécution.

II – Sur la fixation d’une astreinte

En vertu de l’article L. 131-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution peut assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.

L’astreinte permet de sanctionner l’exécution d’une obligation de faire ou de ne pas faire. Il s’agit d’un procédé de contrainte indépendant de dommages-intérêts.

En l’espèce, hormis le remplacement des vitrages dans la cuisine et le salon, il n’est pas discuté que la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION n’a pas exécuté les obligations mises à sa charge et à la réalisation desquelles elle s’était engagée avant la date du 30 septembre 2023.

La circonstance que cette inexécution soit prétendument imputable à l’inaction des sous-traitants est inopérante, dès l’instant qu’il est de jurisprudence constante que n’est pas libératoire l’événement interne à la prestation de l’entrepreneur principal, ce dernier ne pouvant pas se prévaloir utilement des fautes commises par son sous – traitant pour se dégager de sa responsabilité.

Du reste, l’obligation tendant à “déposer en mairie la demande modificative de permis de construire” qui lui incombe directement, n’a pas davantage été réalisée.

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION ne produit aucune pièce pour démontrer qu’elle aurait agi ou missionné les entreprises pour opérer la reprise de l’intégralité des désordres et assurer la levée de toutes les réserves, qui aurait dû intervenir le 30 septembre 2023 au plus tard, soit depuis plus d’une année désormais.

Elle n’établit pas non plus que les maîtres d’ouvrage auraient entravé l’exécution des obligations mises à sa charge avant la date butoir.

Enfin, si les dernières correspondances échangées entre les parties par l’intermédiaire de leur conseil démontrent la volonté du constructeur de s’exécuter, il n’en demeure pas moins que seule l’introduction de la présente instance a manifestement permis de faire évoluer le litige.

En conséquence, la demande des époux [W] est légitime afin d’assurer l’exécution de la transaction homologuée par ordonnance du 18 octobre 2023 rectifiée par ordonnance du 7 février 2024.

Il y sera donc fait droit selon les modalités précisées ci-après au dispositif de la présente décision.

A cet égard il convient d’indiquer que si l’astreinte prend effet à la date fixée par le juge, elle ne peut pas être antérieure au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire.

Par ailleurs, l’allégation d’une disproportion au regard de l’enjeu du litige ne peut pas prospérer, un tel critère ne s’appliquant qu’à la liquidation de l’astreinte provisoire.

III – Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

L’article L. 121-3 du Code des procédures civiles d’ exécution précise que “le juge de l’exécution a le pouvoir de condamner le débiteur à des dommages et intérêts en cas de résistance abusive.”

En l’occurrence, il n’est pas démontré que l’absence d’exécution de la totalité des travaux de reprise procède d’une intention de nuire de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION, le remplacement des vitrages ayant tout de même été effectué.

Surtout, les époux [W] n’allèguent ni ne démontrent l’existence d’aucun préjudice directement causé par la résistance abusive évoquée.

Dès lors, ils seront nécessairement déboutés de leur demande en dommages et intérêts pour résistance abusive.

IV – Sur les mesures accessoires

La SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION qui perd le litige au principal sera condamnée au paiement des dépens de l’instance conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile. Sa demande au titre des frais irrépétibles ne peut de ce fait prospérer.

Elle sera également condamnée à payer aux époux [W] une somme au titre des frais non compris dans les dépens qu’ils ont été contraints d’exposer pour faire valoir leurs droits en justice que l’équité commande de fixer à 1.200 €.

Les émoluments proportionnels de recouvrement ou d’encaissement des huissiers de justice sont en application de l’article R. 444-55 du Code de commerce à la charge du débiteur pour ceux mentionnés au numéro 128 du tableau 3-1 annexé à l’article R. 444-3 du Code de commerce (recouvrement ou encaissement après avoir reçu mandat ou pouvoir à cet effet, des sommes dues en application d’une décision de justice, d’un acte ou d’un titre en forme exécutoire) et à la charge du créancier pour ceux mentionnés au numéro 129 du tableau 3-1 annexé à l’article R. 444-3 du Code de commerce (recouvrement ou encaissement, après avoir reçu mandat ou pouvoir à cet effet, des sommes dues par un débiteur).

Cette répartition ne peut être remise en cause par le juge, sauf dans les litiges nés du Code de la consommation en application de l’article R. 631-4 du Code de la consommation qui prévoit que lors du prononcé d’une condamnation, le juge peut, même d’office, pour des raisons tirées de l’équité ou de la situation économique du professionnel condamné, mettre à sa charge l’intégrité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution.

Le présent litige ne s’inscrivant pas dans le cadre d’un contentieux de consommation, la demande formée de ce chef par les époux [W] est sans objet.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire mis à disposition au greffe et en premier ressort,

– REJETTE la demande de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION tendant à l’annulation du procès-verbal de conciliation en date du 1er juin 2023 et de sa demande implicite et subséquente d’annulation de l’ordonnance d’homologation ;

– FIXE une astreinte provisoire de 40 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision, ladite astreinte ayant vocation à courir pendant un délai de 90 jours pour assortir les obligations suivantes à la charge de la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION et auxquelles elle s’est engagée suivant procès-verbal de conciliation du 1er juin 2023 homologué par ordonnance de la présidente du tribunal judiciaire de Rennes du 18 octobre 2023 rectifiée par ordonnance du 7 février 2024 à savoir :
“- ajouter les éléments de frisette nécessaires sous la toiture principale,
– déposer en mairie la demande modificative de permis de construire,
– mettre en place deux noquets sur la toiture,
– mettre en place une solution pour hydrofuger le paiement pierre et appliquer une peinture pour masquer les trous de rouille existantes ;
– redresser la planimétrie de la dalle au droit de la porte du garage.”

– DÉBOUTE madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] de leur demande de dommages et intérêts ;

– CONDAMNE la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION à payer à madame [E] [X] épouse [W] et monsieur [B] [W] la somme de mille deux cents euros (1.200 €) au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– CONDAMNE la SARL BROCELIANDE CONSTRUCTION au paiement des dépens de la présente instance ;

– DIT que la demande fondée sur les dispositions des articles R 631-4 du Code de la consommation et L. 111-8 du Code des procédures civiles d’exécution est sans objet ;

– RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit en application de l’article R. 121-21 du Code des procédures civiles d’exécution.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe les jour, mois et an que dessus,

Le Greffier, Le Juge de l’Exécution,


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon