En matière de vente automobile, les informations concernant l’indication de la marque, du type, du modèle, de la version et, le cas échéant, de la variante de ce modèle doivent être considérées comme des informations sur les caractéristiques essentielles du bien vendu.
Les époux [G] ont acheté un véhicule d’occasion à la société Saga, mais se plaignent de sa non-conformité par rapport à sa date de fabrication. Le tribunal judiciaire de Douai a annulé la vente et condamné la société Saga à rembourser le prix de vente ainsi que d’autres frais aux époux [G]. La société Saga a interjeté appel de ce jugement, demandant à la cour d’infirmer la décision. Les époux [G] demandent quant à eux la confirmation du jugement initial. L’affaire est en attente de jugement suite à l’ordonnance de clôture de la mise en état rendue le 18 décembre 2023.
Sur la demande de nullité de la vente pour réticence dolosive
La société Saga Lille conteste l’annulation de la vente pour dol, arguant qu’elle n’a pas dissimulé intentionnellement l’année de fabrication du véhicule. Les époux [G], quant à eux, affirment avoir été trompés sur les caractéristiques du véhicule et demandent l’annulation de la vente pour réticence dolosive.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour examine les dispositions du code civil relatives au dol et à la nullité des contrats. Elle analyse également les obligations du vendeur en matière de communication d’informations essentielles sur le bien vendu, notamment en matière automobile.
Sur la demande subsidiaire de résolution de la vente pour défaut de conformité
La cour constate que le véhicule livré aux époux [G] correspondait aux stipulations du bon de commande signé. Par conséquent, elle rejette la demande de résolution de la vente pour défaut de conformité.
Sur les demandes de dommages et intérêts accessoires
Les époux [G] sont déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts accessoires, notamment pour frais d’immatriculation, frais bancaires et préjudice moral. La cour infirme la décision de première instance qui avait fait droit à ces demandes.
Sur les autres demandes
Les époux [G] sont condamnés aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à verser une somme à la société Saga Lille au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Leur demande en ce sens est rejetée.
– Déboute Monsieur [D] [B] de sa demande de bénéfice de sa retraite personnelle
– Condamne Monsieur [D] [B] aux dépens
Réglementation applicable
Aux termes de l’article 1130 du code civil, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
L’article 1137 dudit code, dans sa version applicable à la date du contrat de vente litigieux, dispose par ailleurs que le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des man’uvres ou des mensonges ; que constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
L’article 1131 dudit code précise que les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
En vertu de l’article 1178 du même code, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d’un commun accord. Le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé.
Par ailleurs, il résulte de l’article L111-1 du code de la consommation dans sa version applicable au présent litige qu’avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel doit lui communiquer, de manière lisible et compréhensible, les informations sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
Plus précisément, il résulte de l’article 2 du décret n°78-993 du 4 octobre 1978 pris pour l’application de la loi du 1er août sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services en ce qui concerne les véhicules automobiles, dans sa version résultant du décret n° 2000-576 du 28 juin 2000, en vigueur au moment de la vente litigieuse, que dans les transactions portant sur des véhicules automobiles neufs ou d’occasion, la dénomination de vente doit comporter l’indication de la marque, du type, du modèle, de la version et, le cas échéant, de la variante de ce modèle ; que la version ou variante est désignée par une appellation unique qui doit permettre d’identifier les véhicules d’un même modèle de la marque présentant des caractéristiques techniques homogènes de motorisation, de transmission, de carrosserie, ainsi que d’équipements substantiels de sécurité, de confort et d’aménagement intérieur.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Aurélie Jeanson, avocat au barreau de Lille
– Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai
– Me Stéphane Dhonte, avocat au barreau de Lille
– Me Asma Bakir, avocat au barreau d’Arras
Mots clefs associés
– Motifs de la décision
– Nullité de la vente pour réticence dolosive
– Dol
– Dissimulation intentionnelle
– Vices du consentement
– Nullité relative du contrat
– Code de la consommation
– Informations sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service
– Vente de véhicules automobiles
– Marque, type, modèle, version, variante du modèle
– Encyclopédie en ligne Wikipédia
– Expertise amiable
– Date de fabrication du véhicule
– Différence de valeur entre modèles
– Documentation technique
– Conformité de la chose vendue
– Obligation de délivrance
– Demande de résolution de la vente
– Dommages et intérêts accessoires
– Frais d’immatriculation, frais bancaires, surplus d’assurance, préjudice moral
– Dépens de première instance et d’appel
– Article 700 du code de procédure civile
– Motifs de la décision : Raisons juridiques et factuelles qui justifient le jugement ou la décision rendue par un tribunal.
– Nullité de la vente pour réticence dolosive : Annulation d’une vente due à la dissimulation intentionnelle par le vendeur d’un fait important qui, s’il avait été connu de l’acheteur, aurait empêché ce dernier de conclure le contrat.
– Dol : Manœuvre frauduleuse ou mensonge utilisé pour induire une personne en erreur et la pousser à conclure un contrat.
– Dissimulation intentionnelle : Acte de cacher délibérément une information essentielle dans le but de tromper une autre partie lors de la conclusion d’un contrat.
– Vices du consentement : Défauts qui affectent la validité du consentement d’une partie lors de la formation d’un contrat, incluant l’erreur, le dol et la violence.
– Nullité relative du contrat : Annulation du contrat qui peut être demandée uniquement par la partie lésée, généralement en raison de vices du consentement.
– Code de la consommation : Ensemble de lois régissant les droits et les obligations des consommateurs et des professionnels dans le cadre de la vente de biens et de services.
– Informations sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service : Détails importants et nécessaires sur un produit ou service que le vendeur doit fournir au consommateur avant la conclusion du contrat.
– Vente de véhicules automobiles : Transaction commerciale concernant l’achat et la vente de véhicules motorisés.
– Marque, type, modèle, version, variante du modèle : Détails spécifiques identifiant un véhicule automobile, utilisés pour décrire ses spécifications techniques et ses caractéristiques.
– Encyclopédie en ligne Wikipédia : Plateforme numérique fournissant des articles encyclopédiques rédigés et édités par des volontaires autour du monde.
– Expertise amiable : Évaluation ou examen d’une situation ou d’un bien réalisé par un expert, avec l’accord des parties, dans le but de résoudre un litige de manière non contentieuse.
– Date de fabrication du véhicule : Moment où le véhicule a été fabriqué, souvent indiqué par le constructeur.
– Différence de valeur entre modèles : Variation de prix entre différents modèles de véhicules, généralement due à des différences de spécifications, de performances ou d’options.
– Documentation technique : Ensemble de documents fournissant des informations détaillées sur les caractéristiques techniques et le fonctionnement d’un produit.
– Conformité de la chose vendue : Correspondance entre les caractéristiques du bien livré et celles stipulées dans le contrat de vente.
– Obligation de délivrance : Devoir du vendeur de remettre la chose vendue à l’acheteur conformément aux termes du contrat.
– Demande de résolution de la vente : Requête visant à annuler un contrat de vente et à restituer les parties à leur état initial en raison de manquements contractuels.
– Dommages et intérêts accessoires : Compensation financière pour les pertes indirectes subies en raison d’un préjudice principal.
– Frais d’immatriculation, frais bancaires, surplus d’assurance, préjudice moral : Divers coûts et dommages subis par une partie en raison d’un contrat ou d’un litige.
– Dépens de première instance et d’appel : Frais de justice engagés durant un procès en première instance et en appel.
– Article 700 du code de procédure civile : Disposition légale permettant à une partie de demander à l’autre le remboursement des frais non compris dans les dépens, tels que les honoraires d’avocat.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 07/03/2024
N° de MINUTE :
N° RG 22/02693 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UJ7O
Jugement (N° 20/00539)
rendu le 07 avril 2022 par le tribunal judiciaire de Douai
APPELANTE
La SAS Saga Lille
prise en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Aurélie Jeanson, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [C] [G]
né le 28 mars 1970 à [Localité 3]
et
Madame [H] [I] épouse [G]
née le 03 juin 1976 à [Localité 5] (Belgique)
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentés par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistés de Me Stéphane Dhonte, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant substitué par Me Asma Bakir, avocat au barreau d’Arras
DÉBATS à l’audience publique du 08 janvier 2024, tenue par Céline Miller magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Céline Miller, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 07 mars 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 18 décembre 2023
Mme [H] [G] et M. [C] [G] (‘les époux [G]’) ont acquis en janvier 2017 auprès de la SAS Saga Lille (‘la société Saga’) un véhicule d’occasion de marque Mercedes, modèle ML 320 CDI 4 MATIC, mis pour la première fois en circulation en mai 2012, et affichant 85 929 kilomètres au compteur, moyennant la somme de 33 250 euros.
Se plaignant d’une non-conformité du véhicule au regard de sa date de fabrication, les époux [G] ont, par acte du 12 mai 2020, fait assigner la société Saga devant le tribunal judiciaire de Douai aux fins, notamment, d’obtenir la résolution de la vente. Aux termes de leurs dernières conclusions au fond, ils sollicitaient subsidiairement l’annulation de la vente pour vice du consentement.
Par jugement du 7 avril 2022, le tribunal judiciaire de Douai a :
– annulé la vente litigieuse ;
– condamné la société Saga à payer aux demandeurs les sommes suivantes :
‘ 33 152 euros au titre du remboursement du prix de vente avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation ;
‘ 743,76 euros au titre des frais d’immatriculation ;
‘ 1 886 euros au titre des frais et intérêts CGI ;
‘ 1 500,93 euros au titre des intérêts Crédit du Nord ;
‘ 250,20 euros au titre du surplus d’assurance ;
‘ 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
– ordonné aux époux [G] de restituer le véhicule litigieux aux frais de la société Saga une fois le prix de vente remboursé ;
– débouté la société Saga de sa demande d’indemnité de dépréciation du véhicule ;
– condamné cette dernière, outre aux dépens, à verser aux époux [G] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– rappelé que la décision est de droit assortie de l’exécution provisoire.
La société Saga a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions remises le 29 mars 2023, demande à la cour, au visa des articles 1129 et suivants du code civil, et des articles 1603 et 1604 du même code, d’infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
– débouter les époux [G] de l’ensemble de leurs demandes ;
– subsidiairement, dans l’hypothèse où l’annulation de la vente serait confirmée, les débouter de l’ensemble de leurs demandes et les condamner à lui payer la somme de 13 000 euros à titre d’indemnités correspondant à la dépréciation subie par le véhicule en raison du kilométrage entre le jour de la vente et le 26 avril 2019, somme à parfaire en fonction du kilométrage du véhicule le jour de la restitution ;
– en tout état de cause, condamner conjointement et solidairement les intimés, outre aux dépens, à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs dernières conclusions remises le 29 novembre 2022, les époux [G] demandent à la cour, au visa des articles 1603 et 1604 et suivants du code civil, des articles 1129 et suivants du même code, des articles L. 111-1 et L. 211-4 du code de la consommation, et de l’article 548 du code de procédure civile, de :
– à titre principal, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a annulé la vente litigieuse, ordonné la restitution du véhicule et le remboursement du prix de vente, condamné la société Saga à lui payer diverses sommes au titre des frais d’immatriculation et des frais et intérêts bancaires, et débouté celle-ci de sa demande d’indemnité de dépréciation du véhicule ;
– le cas échéant, prononcer la résolution du contrat de vente pour défaut de délivrance conforme et confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé les condamnations mentionnées ci-avant à l’encontre de la société appelante ;
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société appelante à leur verser les sommes de 250,20 euros au titre du surplus d’assurance et de 500 euros à titre de dommages et intérêts, et, statuant à nouveau de ces chefs, la condamner à leur verser les sommes de 358,80 euros pour le premier poste et de 1 500 euros pour le second ;
– débouter la société Saga de l’ensemble de ses demandes ;
– ajoutant à la décision dont appel, condamner la société appelante à leur verser les sommes de’:
‘ 813 euros au titre des frais de réparation du véhicule engagés le 16 novembre 2022 ;
‘ 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction au profit de la SCP Processuel au visa de l’article 699 du code de procédure civile.
Pour le détail de l’argumentation des parties, il sera référé à leurs dernières écritures susvisées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 18 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il sera relevé que si, dans sa déclaration d’appel, la société Saga Lille précise que son appel tend à la nullité ou à la réformation du jugement du 7 avril 2022, pris en ses chefs expressément critiqués, elle ne sollicite plus, dans ses dernières conclusions, la nullité du jugement entrepris, de sorte qu’en application de l’article 954, alinéa 4 du code de procédure civile, elle est réputée avoir abandonnée cette prétention.
Sur la demande de nullité de la vente pour réticence dolosive
La société Saga Lille sollicite l’infirmation de la décision entreprise en ce que celle-ci a annulé la vente litigieuse pour dol au motif que l’année de fabrication du véhicule, à savoir 2007, n’a pas été communiquée aux acquéreurs lors de la vente alors que la première mise en circulation du véhicule était intervenue en 2012, soit cinq ans plus tard. Elle fait valoir que ni le caractère intentionnel de la dissimulation invoquée ni les manoeuvres destinées à dissimuler l’information de l’année de fabrication ne sont démontrés. Elle rappelle qu’il n’existe aucune disposition légale ou réglementaire qui imposerait au vendeur professionnel de mentionner ou d’informer l’acquéreur sur l’année de fabrication, le décret n°2000-576 du 28 juin 2000 étant venu abroger l’exigence de cette mention lors des ventes de véhicules neufs ou d’occasion ; qu’en revanche la date de mise en circulation du véhicule, qui correspond à la première immatriculation de celui-ci, doit être indiquée, ce qui était bien le cas en l’espèce ; qu’elle a vendu un modèle ML 320, nécessairement fabriqué entre 2005 et 2008, sans jamais laisser croire à ses acquéreurs qu’elle vendait un modèle ML 350, dont l’esthétique était différente et la valeur largement supérieure à celle d’un ML 320 lors de l’acquisition ; que les époux [G] ne l’ont jamais questionnée et n’évoquent aucune manoeuvre de sa part de nature à cacher ou masquer l’année de fabrication’; qu’ils ne peuvent soutenir qu’ils ont été volontairement trompés sur les caractéristiques du véhicule et qu’ils ont d’ailleurs roulé plus de deux ans avec le véhicule sans émettre la moindre contestation
Les époux [G] font valoir que, profanes en matière automobile, ils ont acquis un véhicule mis en circulation en mai 2012, dont ils pouvaient légitimement penser qu’il avait été produit cette année-là ou, à tout le moins, l’année précédente et qu’il s’agissait d’une phase 3 du modèle concerné, alors qu’il s’agissait en réalité d’une phase 1, le véhicule ayant été fabriqué en 2007′; que sa valeur à dire d’expert était en conséquence inférieure de près de 10 000 euros au prix convenu lors de la vente en janvier 2017 ; que le vendeur professionnel, en masquant volontairement l’information sur la date de fabrication du véhicule et en ne faisant figurer que l’information de la date de mise en circulation, a nécessairement commis un manquement à son devoir d’information et, en conséquence, une réticence dolosive, en leur faisant croire qu’il s’agissait d’un véhicule qui avait à peine cinq années au jour de la vente, alors qu’il en avait le double et qu’il n’est pas discutable que, même non utilisé, un véhicule s’use par l’effet du temps.
Ceci étant exposé, aux termes de l’article 1130 du code civil, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
L’article 1137 dudit code, dans sa version applicable à la date du contrat de vente litigieux, dispose par ailleurs que le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des man’uvres ou des mensonges ; que constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
L’article 1131 dudit code précise que les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
En vertu de l’article 1178 du même code, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d’un commun accord. Le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé.
Par ailleurs, il résulte de l’article L111-1 du code de la consommation dans sa version applicable au présent litige qu’avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel doit lui communiquer, de manière lisible et compréhensible, les informations sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
Plus précisément, il résulte de l’article 2 du décret n°78-993 du 4 octobre 1978 pris pour l’application de la loi du 1er août sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services en ce qui concerne les véhicules automobiles, dans sa version résultant du décret n° 2000-576 du 28 juin 2000, en vigueur au moment de la vente litigieuse, que dans les transactions portant sur des véhicules automobiles neufs ou d’occasion, la dénomination de vente doit comporter l’indication de la marque, du type, du modèle, de la version et, le cas échéant, de la variante de ce modèle ; que la version ou variante est désignée par une appellation unique qui doit permettre d’identifier les véhicules d’un même modèle de la marque présentant des caractéristiques techniques homogènes de motorisation, de transmission, de carrosserie, ainsi que d’équipements substantiels de sécurité, de confort et d’aménagement intérieur.
Il résulte de la combinaison de ces deux derniers textes qu’en matière de vente automobile, les informations concernant l’indication de la marque, du type, du modèle, de la version et, le cas échéant, de la variante de ce modèle doivent être considérées comme des informations sur les caractéristiques essentielles du bien vendu.
La société Saga Lille produit un document extrait de l’encyclopédie en ligne Wikipédia, concernant le véhicule Classe M de de Mercedes-Benz, dont il résulte qu’il s’agit d’un véhicule de type SUV, qui a connu trois générations successives : le modèle de première génération, de type 163, produit entre 1997 et 2005, suivant deux phases (I et II) ; le modèle de deuxième génération, de type 164, produit entre 2005 et 2011, également en deux phases, la phase I produite de 2005 à 2008 et la phase II, produite de 2008 à 2011, après une restylisation du modèle ; et enfin le modèle de troisième génération, de type 166, produit de 2011 à 2015.
Il résulte également des factures produites par la société appelante (pièces 1 et 3) que le modèle de type 164 vendu aux époux [G] a pour appellation commerciale ‘Classe ML 320 CDI 4 Matic’, tandis que le modèle de type 166 a pour appellation commerciale ‘350 BlueTec 7G-Tronic+’, de sorte qu’à la lecture de leur bon de commande, les époux [G] ne pouvaient croire qu’ils faisaient l’acquisition d’un modèle ML 350 dit de la troisième génération, quand bien même le véhicule objet de la vente aurait été mis en circulation pour la première fois en mai 2012.
En revanche, compte tenu de cette date de mise en circulation et en l’absence de précision dans le bon de commande de la version ou variante du modèle qui leur était vendu, ils pouvaient légitimement croire que le véhicule litigieux était un véhicule de phase II de la Classe ML 320, produite entre 2008 et 2011.
Or il résulte du rapport d’expertise amiable diligenté par M. [Z] à l’initiative des époux [G] le 26 avril 2019 que le véhicule litigieux est en réalité un modèle de phase I, fabriqué le 23 août 2007, de sorte que non seulement il est plus ancien et nécessairement plus sujet à la vétusté pour certaines pièces qu’un véhicule de phase II construit en 2011, mais encore, qu’il ne présente pas tout à fait les mêmes caractéristiques techniques.
C’est ainsi à tort que la société Saga soutient que le modèle ML 320 de phase I dont les époux [G] ont fait l’acquisition aurait nécessairement été produit avant 2008 alors qu’il résulte des éléments versés aux débats que le modèle ML 320 (type 164) a été produit entre 2005 et 2011 selon deux phases et que si la date de fabrication du véhicule objet de la vente avait été portée à la connaissance des acquéreurs, elle aurait été de nature à leur donner des indications plus précises sur la version (phase I ou II) du modèle dont ils faisaient l’achat, caractéristique essentielle du véhicule objet de la vente.
Pour autant, les époux [G], qui soutiennent qu’ils pensaient avoir affaire à un véhicule de la troisième génération (à savoir ML 350), ce qui n’est pas plausible au vu des mentions expressément portées sur le bon de commande (ML 320, n°de série commençant par WDC 164 et non WDC 166), ne produisent que des éléments sur la différence de valeur entre un modèle ML 320 et un modèle ML 350 et ne fournissent aucun élément sur la différence de valeur entre le modèle ML 320 de phase I dont ils ont fait l’acquisition et le modèle ML 320 de phase II dont ils auraient légitimement pu croire qu’ils faisaient l’acquisition, étant précisé que la valorisation des véhicules d’occasion dépend de nombreux facteurs, outre celui du modèle et de l’ancienneté du véhicule, à savoir le kilométrage, l’état général du véhicule et l’entretien qui en a été fait depuis sa mise en circulation.
Ils ne produisent par ailleurs aucune documentation technique précise sur les différences de caractéristiques des modèles ML 320 de phase I et les modèles ML 320 de phase II, ce qui ne permet pas à la cour d’apprécier si l’information omise sur le millésime a pu être déterminante de leur consentement, la documentation produite par la société Saga Lille ne faisant état que d’une ‘restylisation’ du modèle en 2008.
Dès lors, les époux [G] ne démontrant pas que l’absence de mention de l’année de millésime du modèle qui leur était vendu a pu être déterminante de leur consentement, il convient d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a annulé la vente et, statuant à nouveau, de les débouter de leur demande en ce sens.
Sur la demande subsidiaire de résolution de la vente pour défaut de conformité
Il résulte de l’article 1603 du code civil que le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu’il vend, l’obligation de délivrance s’entendant de la délivrance d’une chose conforme aux stipulations contractuelles.
C’est par de justes motifs, que la cour adopte, que le premier juge, ayant constaté qu’il résultait du bon de commande signé le 6 janvier 2017 que la commande portait sur un véhicule de marque Mercedes ML 320 CDI 4 MATIC, au prix de 33 250 euros, dont la date de première mise en circulation était du 21 mai 2012 et comptant 85 929 kilomètres et que c’était bien un tel véhicule qui avait été livré aux époux [G], a conclu que le bien vendu était bien conforme aux stipulations contractuelles et qu’il ne pouvait être retenu de manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme.
Le premier juge n’a cependant pas tiré les conséquences juridiques de sa motivation dès lors qu’il n’a pas expressément débouté les époux [G], par le dispositif de sa décision, de leur demande de résolution de la vente, pourtant formulée à titre principal.
Il convient donc en cause d’appel, de réparer cette omission et de débouter les époux [G] de leur demande de résolution de la vente.
Sur les demandes de dommages et intérêts accessoires
Compte tenu de l’issue du litige, les époux [G] seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts accessoires au titre des frais d’immatriculation, des frais bancaires, du surplus d’assurance et de leur préjudice moral, la décision entreprise étant infirmée en ce qu’elle avait fait droit à ces demandes.
Ils seront également déboutés de leur demande complémentaire de dommages et intérêts formée en cause d’appel au titre des frais de réparation du véhicule.
Sur les autres demandes
Les époux [G], qui succombent en appel, seront tenus in solidum aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Ils seront par ailleurs condamnés in solidum à payer à la société Saga Lille la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et seront déboutés de leur propre demande formée à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour
Infirme la décision entreprise,
Statuant à nouveau,
Déboute M. [C] [G] et Mme [H] [I], son épouse, de l’ensemble de leurs demandes formées à l’encontre de la SAS Saga Lille ;
Condamne M. [C] [G] et Mme [H] [I] in solidum aux dépens de première instance et d’appel ;
Les condamne in solidum à payer à la SAS Saga Lille la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Les déboute de leur demande à ce titre.
Le greffier
Delphine Verhaeghe
Le président
Bruno Poupet