Un artiste plasticien a réalisé une photographie panoramique intitulée Le Lacydon de Marseille au crépuscule. Il a émis une note d’honoraires autorisant le cessionnaire, une société d’expertise comptable, à utiliser cette photographie sur la page d’accueil de son site Internet, moyennant le versement de la somme de 96 euros TTC (80 euros HT), avec une faculté de renouvellement chaque année en contrepartie du versement de la somme de 20 euros HT.
Une procédure de liquidation judiciaire simplifiée a été ouverte à l’égard de la société cessionnaire.
Le photographe, ayant constaté que l’utilisation de sa photographie sur le site Internet de la société, toujours accessible, avait perduré pendant quatre ans, sans que la moindre somme ne lui ait été versée, a assigné le liquidateur judiciaire, en contrefaçon de ses droits d’auteur. La contrefaçon a été retenue. Le photographe a obtenu la somme de 2.500 euros, en réparation de son préjudice tant matériel que moral.
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 04 MARS 2022
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 20/18404 – n° Portalis 35L7-V-B7E-CC2CX
Décision déférée à la Cour : jugement du 15 octobre 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 1ère section – RG n°19/05703
APPELANTES AU PRINCIPAL et INTIMEES INCIDENTES
S.A.R.L. C D ET ASSOCIES, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[…]
Le Phocéen
[…]
Immatriculée au rcs de Marseille sous le numéro 322 010 315
S.A.R.L. C D E, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[…]
Le Phocéen
[…]
Immatriculée au rcs de Marseille sous le numéro 414 937 490
Représentées par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC – DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque W 09
INTIME AU PRINCIPAL et APPELANT INCIDENT
M. B G H X
Né le […] à Marseille
De nationalité française
Exerçant la profession de graphiste plasticien libéral immatriculé au sirène sous le […] […]
Représenté par Me Judith BOUHANA de la SELARL J BOUHANA AVOCAT, avocate au barreau de PARIS, toque C 656
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 5 janvier 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Z A, Présidente, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mme Z A a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Z A, Présidente
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Z A, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement réputé contradictoire rendu le 15 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Paris qui a :
– déclaré irrecevable l’action en contrefaçon de sa photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule, introduite par M. B X à l’encontre de Me H-Charles Y, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société HAM Conseil ,
– déclaré recevable l’action en contrefaçon de sa photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule, introduite par M. B X à l’encontre des sociétés C D E et C D et associés,
– dit qu’en reproduisant la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule, réalisée par M. B X sur leur site Internet accessible depuis l’adresse http://www.h2a.com, sans son autorisation, les sociétés C D E et C D et associés ont commis des actes de contrefaçon,
– fait défense aux sociétés C D E et C D et associés d’exploiter la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard courant à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la signification de la présente décision et pendant 6 mois,
– dit se réserver la liquidation de l’astreinte,
– condamné in solidum les sociétés C D E et C D et associés à payer à M. B X la somme de 2.500 euros à titre de dommages-intérêts réparant son préjudice tant matériel que moral imputable à la contrefaçon,
– rejeté la demande de publication du jugement,
– rejeté la demande de condamnation formée à l’encontre de M. B X au paiement d’une amende civile,
– condamné in solidum les sociétés C D E et C D et associés à payer à M. B X la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté les autres demandes formées au titre des frais irrépétibles,
– condamné in solidum les sociétés C D E et C D et associés aux dépens dont distraction dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire.
Vu l’appel de ce jugement interjeté le 16 décembre 2020 par les sociétés C D et associés (SARL) et C D E (SARL) à l’encontre de M. B X.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 24 septembre 2021 par les sociétés C D et associés et C D E, appelantes, qui demandent à la cour, au fondement des articles 1165 (ancien) du code civil, 31 et 122, 32-1 du code de procédure civile, de :
– les déclarer recevables et bien fondées en leur appel,
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
* déclaré recevable l’action en contrefaçon de sa photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule, introduite par M. B X à l’encontre des sociétés C D et associés et C D E,
* dit qu’en reproduisant la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule, réalisée par M. B X sur leur site Internet accessible depuis l’adresse http:// www.h2a.com, sans son autorisation, les sociétés C D et asociés et C D E ont commis des actes de contrefaçon,
* fait défense aux sociétés C D et associés et C D E d’exploiter la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard courant à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la signification de la présente décision et pendant 6 mois,
* dit se réserver la liquidation de l’astreinte,
* condamné in solidum les sociétés C D et associés et C D E à payer à M. B X la somme de 2.500 euros à titre de dommages-intérêts réparant son préjudice tant matériel que moral imputable à la contrefaçon,
* rejeté la demande de condamnation formée à l’encontre de M. B X au paiement d’une amende civile, * condamné in solidum les sociétés C D E et C D et associés à payer à M. B X la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
* rejeté les autres demandes formées au titre des frais irrépétibles,
* condamné in solidum les sociétés C D E et C D et associés aux dépens dont distraction dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire,
Et, statuant à nouveau,
À titre principal,
– dire et juger que M. B X n’a ni intérêt ni qualité à agir à l’encontre des sociétés C D et associés et C D E,
– débouter M. B X de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions et les déclarer irrecevables,
À titre subsidiaire,
– débouter M. B X de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions et les déclarer et en tout état de cause mal fondées,
En tout état de cause,
– dire et juger qu’introduire puis maintenir la présente procédure en prétendant subir un délit de contrefaçon alors que ladite action est manifestement irrecevable, à ce jour sans objet, et en tout état de cause particulièrement mal fondée, ce que ne saurait ignorer M. X, constitue un acharnement injustifié qui confine à un abus de procédure au sens de l’article 32-1 du code de procédure civile,
– prononcer une amende civile et condamner de ce chef M. X à verser aux sociétés C D et associés et C D E la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts,
– condamner M. B X au paiement aux sociétés C D et associés et C D E de la somme de 2.500 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. B X aux entiers dépens de la présente instance.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 avril 2021 par M. B X, intimé, qui demande à la cour, au fondement des articles L. 121-1 et suivants, L. 122-1 et suivants, L. 331-1 et suivants et L. 335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, de :
– débouter les sociétés C D et associés et C D E de toutes leurs demandes principales et reconventionnelles,
– déclarer recevable et fondé l’appel incident formé par M. B X,
Et ce faisant,
– réformer le jugement rendu en ce qu’il a écarté la novation et juger qu’une novation du contrat d’exploitation de la photographie de M. X est intervenue par changement de débiteurs entre les sociétés HAM Conseil et les sociétés C D et associés et C D E dès 2014 et au moins le 10 septembre 2018,
En conséquence,
– dire et juger que l’autorisation d’exploitation de la photographie de M. X a expiré le 26 mars 2019 suivant résiliation régulièrement adressée au gérant des sociétés C D et associés et C D E par mise en demeure du 13 septembre 2019 réceptionnée le 14 septembre 2019,
Si par extraordinaire la cour ne retient pas la novation,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé que les sociétés C D et associés et C D E éditent et exploitent le site Internet accessible via l’adresse http://www.h2a.com
Ce faisant et en tout état de cause,
– confirmer le jugement du 15 octobre 2020 en ce qu’il a :
* déclaré que l’usage sur le site http://www.h2a.com par les sociétés C D et associés et C D E de la photographie intitulée Le Lacydon de Marseille au crépuscule dont M. X est l’auteur est une reproduction non autorisée de cette photographie,
sue cette reproduction est illicite au terme de l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle et que, de ce fait, ces trois sociétés se rendent coupables du délit de contrefaçon puni par les articles L. 335- 2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle,
* interdit aux sociétés C D et associés et C D E d’utiliser la photographie intitulée Le Lacydon de Marseille au crépuscule sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la signification du jugement, et y ajoutant, poursuivre l’astreinte jusqu’à la notification de l’arrêt à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l’astreinte directement,
* condamné in solidum les sociétés C D et associés et C D E prises en la personne de leur représentant légal à réparer le préjudice subi par M. X au titre de la contrefaçon de ses droits d’auteur, et y ajoutant, condamner les sociétés C D et associés et C D E à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts,
– réformer le jugement rendu en ce qu’il a débouté M. X de la publication judiciaire du jugement à intervenir,
Et ce faisant,
– ordonner la publication judiciaire du jugement à intervenir, en haut de la page d’accueil du site http://www.h2a.com dans un champ au moins aussi grand que la reproduction illicite de la photographie sur ledit site et, par extrait, dans un (1) journal quotidien au choix de M. X, dans la limite de 3.000 euros hors taxe, aux frais des défenderesses condamnées in solidum à ce titre,
– condamner les sociétés C D et associés et C D E à la somme de 2000 euros au titre du préjudice distinct subi par M. X pour mauvaise foi, procédés dilatoires et organisation d’insolvabilité sur le fondement de l’article 1240 du code civil,
– confirmer le jugement du 15 octobre 2020 en son principe en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés C D et associés et C D E prise en la personne de leur représentant légal à payer à M. X la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Et y ajoutant,
– condamner en cause d’appel les sociétés C D et associés et C D E au paiement d’une somme complémentaire de 7 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum les sociétés C D et associés et C D E prises en la personne de leur représentant légal à payer à M. X l’ensemble des frais de justice dont constat d’huissier, timbre judiciaire et frais d’exécution forcée, qui seront recouvrés selon l’article 699 du code de procédure civile.
Vu l’ordonnance de clôture du 30 septembre 2021.
SUR CE, LA COUR :
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, au jugement entrepris et aux écritures précédemment visées des parties.
M. X, artiste plasticien, a réalisé en 2011 une photographie panoramique intitulée Le Lacydon de Marseille au crépuscule. Il a émis une note d’honoraires n° 140302 du 25 mars 2014 autorisant la société d’expertise comptable H2A, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Marseille sous le numéro 442 369 450, à utiliser cette photographie sur la page d’accueil de son site Internet accessible à l’adresse http://www.h2a.com, moyennant le versement de la somme de 96 euros TTC (80 euros HT), avec une faculté de renouvellement chaque année en contrepartie du versement de la somme de 20 euros HT. La société H2A, devenue par la suite la société HAM Conseil, s’est acquittée de cette note d’honoraires par le versement à M. X de la somme de 96 euros TTC.
Par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 24 novembre 2016, une procédure de liquidation judiciaire simplifiée a été ouverte à l’égard de la société HAM Conseil et Me Y désigné en qualité de liquidateur.
M. X ayant constaté que l’utilisation de sa photographie sur le site Internet accessible à l’adresse http://www.h2a.com avait perduré depuis 2015 sans que la moindre somme ne lui ait été versée a, le 16 mars 2018, adressé au gérant de la société HAM Conseil, M. C D, une demande de paiement de ses honoraires pour les années 2015, 1016, 2017 et 2018 à raison, conformément au contrat, de la somme de 20 euros HT par an, soit la somme de 96 euros TTC pour quatre ans.
Cette demande est restée sans effet et, le 27 juin 2018, M. X a fait dresser un procès-verbal de constat par huissier de justice établissant que sa photographie était toujours reproduite sur le site Internet litigieux, avant de mettre en demeure la société H2A, par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juillet 2018, d’en cesser l’utilisation et de retirer la photographie du site dans les 10 jours suivant la réception de cette lettre.
Après plusieurs relances, M. X a reçu paiement le 10 septembre 2018 de la somme de 96 euros. Ce paiement était effectué par la société C D E, immatriculée au RCS de Marseille sous le numéro 414 937 490, ayant pour gérant M. C D et pour activité l’exercice de la profession de commissaire aux comptes et le conseil aux entreprises.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 septembre 2018, M. X faisait savoir à M. C D qu’il ne renouvellera pas l’autorisation d’exploitation de la photographie en 2019 et qu’en conséquence, le site Internet http://www.h2a.com devra cesser de la faire apparaître et de l’utiliser à compter du 26 mars 2019.
Par procès-verbal de constat d’huissier de justice du 16 avril 2019, M. X a fait établir que la photographie litigieuse était toujours reproduite sur le site Internet précité.
C’est dans ces circonstances que, suivant acte d’huissier de justice du 30 avril 2019, M. X a fait délivrer assignation devant le tribunal de grande instance de Paris (désormais tribunal judiciaire) aux sociétés C D E, C D et associés ainsi qu’à la société HAM Conseil, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, en contrefaçon de ses droits d’auteur sur la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule .
Le tribunal, par le jugement dont appel, a déclaré irrecevable M. X, faute pour celui-ci d’avoir déclaré sa créance aux organes de la procédure collective, en son action dirigée contre Me Y ès qualités de liquidateur judiciaire de la société HAM Conseil.
La société HAM Conseil prise en la personne de son mandataire judiciaire n’est pas partie à la procédure d’appel et la cour n’est saisie d’aucune demande la concernant. Le jugement est en conséquence irrévocable en sa disposition déclarant M. X irrecevable à agir à son encontre.
Ceci ayant été posé, le débat devant la cour opposant les sociétés C D E et C D et associés, appelantes, d’une part, à M. X, intimé, d’autre part, se présente dans les mêmes termes qu’en première instance.
Les appelantes, pour l’essentiel, soutiennent que M. X ne justifie pas d’un intérêt à agir à leur endroit car seule la société HAM Conseil, destinataire de la note d’honoraires du 25 mars 2014 contenant cession du droit d’utilisation de la photographie, est engagée dans le contrat conclu avec l’artiste, lequel, ne saurait arguer du fait que ces sociétés ont le même gérant en la personne de M. C D, pour conclure à l’existence d’un lien contractuel avec les sociétés C D E et C D et associés. Elles ajoutent que M. X ne peut davantage se fonder sur le fait que la société C D E lui a réglé la somme de 96 euros TTC dont il réclamait le paiement à la société HAM Conseil en contrepartie de l’utilisation de sa photographie pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018, pour en déduire l’existence d’une novation par changement de débiteur, qui serait survenue dès 2014 et, au plus tard, le 10 septembre 2018, jour du versement de ladite somme. Elles estiment enfin que la prétendue exploitation du site Internet http///www.h2a.com par les sociétés C D E et C D et associés, alléguée mais non démontrée, n’est pas non plus de nature à justifier d’un lien contractuel entre ces sociétés et M. X. En conséquence de l’ensemble de ces observations, les appelantes font valoir que la notification faite par M. X, suivant courrier du 13 septembre 2018, qui plus est adressé à la société HAM Conseil prise en la personne de son gérant M. C D, alors que cette société était en liquidation judiciaire, de sa décision de ne pas renouveler son autorisation d’utiliser la photographie et de résilier le contrat à compter du 26 mars 2019, n’a pu produire aucun effet valable à l’égard des sociétés C D E et C D et associés lesquelles, en toute hypothèse, ne sont pas parties à ce contrat.
L’intimé maintient, à titre principal qu’il y a eu novation et conclut en toute hypothèse à la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu, à la charge des sociétés appelantes, une contrefaçon de ses droits d’auteur sur la photographie litigieuse. Il soutient qu’une novation par changement de débiteur s’est opérée dès 2014 avec l’utilisation par les sociétés C D E et C D et associés de cette photographie à l’adresse de leur site Internet http://www.h2a.com et à tout le moins le 10 septembre 2018 lors du règlement par la société C D E de la somme de 96 euros au titre de l’autorisation d’exploitation de la photographie de 2015 à 2018, règlement par lequel ces sociétés ont manifesté expressément et clairement leur engagement contractuel de se substituer à la société HAM Conseil dans les droits et obligations du contrat conclu avec M. X. Ce dernier soutient donc que l’utilisation de la photographie par les appelantes au-delà du 26 mars 2019, date de résiliation du contrat, constitue une contrefaçon. Il ajoute que si la cour devait écarter la novation, son action en contrefaçon serait en toute hypothèse recevable et fondée à l’encontre des sociétés appelantes qui, ainsi qu’il a été jugé par le tribunal, éditent et exploitent le site Internet sur lequel il a été constaté que la photographie litigieuse a été reproduite sans autorisation.
Il doit être d’emblée relevé que M. X ne se voit pas contester la qualité d’auteur de la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule ni l’éligibilité de cette photographie au statut d’oeuvre de l’esprit protégeable par le droit d’auteur.
Il est établi que M. X a contracté, dans les termes de la note d’honoraires du 25 mars 2014, avec la société H2A devenue HAM Conseil laquelle, en exécution du contrat, lui a réglé la somme de 96 euros TTC en contrepartie de l’autorisation, pour un an, d’exploiter la photographie par reproduction sur la page d’accueil du site Internet http://www.h2a.com exclusivement.
Il est cependant montré par les procès-verbaux respectivement dressés par huissier de justice le 27 juin 2018 et le 16 avril 2019, et il n’est pas démenti, que la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule a été maintenue en page d’accueil du site Internet http://www.h2a.com au delà de la durée initiale d’un an prévue au contrat. En conséquence, M. X se trouvait en droit de percevoir la rémunération, fixée au contrat, de 20 euros HT pour chaque renouvellement annuel de l’autorisation d’exploiter la photographie.
La société d’expertise comptable HAM Conseil, ayant pour gérant M. C D, a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire simplifiée par jugement du 24 novembre 2016.
S’il est patent que la somme de 96 euros TTC que réclamait M. X en paiement de l’utilisation de la photographie en page d’accueil du site Internet http://www.h2a.com pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018 a été réglée le 10 septembre 2018 par la société C D E, un tel fait ne saurait emporter, ainsi que le prétend M. X, une ‘novation par changement de débiteur’ au motif qu’il manifesterait une ‘volonté expresse’ des sociétés C D E et C D et associés ‘ de se substituer à la société HAM Conseil comme co-contractant de M. X’ (page 8 des conclusions de l’intimé).
L’accord clair et non équivoque des sociétés C D E et C D et associés pour prendre à leur charge les engagements contractuels de la société HAM Conseil n’est aucunement établi à compter de 2014, ainsi que le soutient sans justification aucune M. X, pas plus qu’à compter du 10 septembre 2018 date à laquelle la société C D E a réglé à M. X la somme réclamée de 96 euros au titre de l’utilisation de sa photographie.
Un tel accord aux fins de novation ne saurait davantage se déduire du fait que M. C D, qui était le gérant de la société HAM Conseil, est aujourd’hui le gérant des sociétés C D E et C D associés.
Il s’ensuit que le jugement déféré doit être approuvé en ce qu’il a écarté la novation alléguée.
En revanche, les éléments de la procédure et, notamment, les deux procès-verbaux de constat d’huissier de justice versés aux débats, révèlent que le site Internet http://www.h2a.com sur lequel apparaît la photographie de M. X, est édité et exploité par la société C D E qui se présente également sur ce site sous la dénomination ‘H2A E’ et communique les informations suivantes: Fondé en 1990 à Marseille par C D après son expérience dans un grand cabinet d’E parisien, H2A E propose une offre de service multidisciplinaire avec une expertise particulière en matière de droit des affaires.
En outre, l’extrait Kbis, à jour au 10 septembre 2018, de la société C D E mentionne que cette société utilise le sigle ‘H2A’.
Il est constaté, enfin, que le message électronique adressé le 14 mai 2019 à la société Les Echos Publishing en vue de remplacer la photographie existante ‘dans le bandeau de la page d’accueil de notre site Internet’ est signé ‘C D F-comptable- gérant’ avec l’indication de l’adresse Internet www.h2a.com . De même, c’est à M. C D qu’est adressé, le 21 mai 2019, le message en retour de la société Les Echos Publishing dans les termes suivants : ‘ J’ai le plaisir de v o u s i n f o r m e r q u e n o u s a v o n s m o d i f i é l a p h o t o p a n o r a m i q u e s u r l e s i t e I n t e r n e t http://www.h2a.com’.
Il n’est pas montré, par contre, que la société C D et associés, qui est une personne morale d i s t i n c t e d e l a s o c i é t é H u b e r t A m e n c A u d i t , é d i t e r a i t e t e x p l o i t e r a i t l e s i t e I n t e r n e t http://www.h2a.com, ceci ne pouvant être déduit du seul fait que ces deux sociétés ont le même gérant en la personne de M. C D.
Il suit des observations qui précèdent que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a retenu, à bon droit, à la charge de la société C D E, des actes de contrefaçon pour avoir reproduit sur le site Internet qu’elle édite et exploite à l’adresse http://www.h2a.com , ainsi qu’il ressort du procès-verbal de constat d’huissier de justice du 19 avril 2019, la photographie Le Lacydon de Marseille au crépuscule sans autorisation de M. X qui en est l’auteur.
C’est en vain que la société C D E fait valoir que la décision de M. X de ne pas renouveler son autorisation d’utiliser la photographie et de résilier, à compter du 26 mars 2019, le contrat du 25 mars 2014, ne lui a pas été valablement notifiée et ne lui est donc pas opposable. Une telle circonstance est inopérante car, ainsi qu’elle le soutient à juste titre, la société C D E n’a conclu avec l’artiste aucun contrat et n’a souscrit à l’égard de celui-ci aucun engagement contractuel en conséquence de quoi, il n’y avait aucun lieu, pour M. X, de lui notifier la résiliation du contrat.
Le jugement entrepris doit être cependant infirmé en ce qu’il a également imputé à la société C D et associés des actes de contrefaçon qui, au vu des éléments de la procédure, ne sont pas caractérisés à l’encontre de celle-ci.
Il le sera également concernant l’ensemble des condamnations prononcées à l’encontre de la société C D et associés qui est mise hors de cause.
Sur le préjudice, les condamnations prononcées par le tribunal ne sont pas critiquées par M. X qui en demande la confirmation. Il est fait valoir au soutien de l’appel que la photographie de M. X a été retirée du site Internet litigieux dès le 21 mai 2019 soit moins de deux mois à compter du 26 mars 2019, date à laquelle M. X faisait produire effet à sa décision de résilier le contrat du 25 mars 2014 et de ne pas renouveler l’autorisation d’utiliser sa photographie.
Cependant, la somme de 2.500 euros allouée à M. X en réparation du préjudice tant matériel que moral résultant de la contrefaçon n’est aucunement excessive et a été justement appréciée au regard des dispositions de l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle et en considération de l’ensemble des circonstances de la cause. La cour confirmera en conséquence le montant des dommages-intérêts compensatoires.
Les mesures accessoires retenues par le tribunal sont pertinentes et proportionnées au regard de la nécessité de faire cesser les faits illicites et d’en prévenir le renouvellement et ne sont pas au demeurant critiquées. Elles sont donc approuvées y compris sur le refus d’ordonner la mesure de publicité judiciaire demandée par M. X, mesure qui ne se justifie pas compte tenu de l’ancienneté des faits et dès lors qu’il n’est pas montré que l’exploitation litigieuse ait perduré au-delà du 19 avril 2019.
Il s’infère du sens de l’arrêt que l’action engagée par M. X est fondée et ne procède d’aucune manoeuvre dilatoire ni abus d’ester en justice. La demande formée à son encontre du chef des dispositions de l’article 32-1 du code de procédure civile et de la procédure abusive est en conséquence, par confirmation du jugement, rejetée.
M. X ne fait pas la démonstration, qui lui incombe, de la mauvaise foi, des procédés dilatoires et des faits d’organisation d’insolvabilité qu’il invoque à la charge des sociétés C D et associés et C D E. Sa demande en paiement, formée au fondement de l’article 1240 du code civil, de la somme de 2000 euros au titre du préjudice distinct de la contrefaçon qu’il aurait subi à raison de tels faits, n’est pas fondée et doit être rejetée.
L’équité commande de condamner la société C D E à payer à M. X la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel et de débouter les appelantes de leur demande formée au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.
La société C D E, succombant à l’appel, en supportera les dépens tels que définis à l’article 795 du code de procédure civile, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 de ce même code.
PAR CES MOTIFS
Statuant dans les limites de l’appel,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’elles font grief à la société C D et associés,
Statuant à nouveau,
Met hors de cause la société C D et associés et rejette les demandes formées à l’encontre de celle-ci,
Ajoutant,
Rejette la demande de dommages-intérêts de M. X des chefs de mauvaise foi, procédés dilatoires et organisation d’insolvabilité,
Condamne la société C D E à payer à M. X la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,
Déboute les sociétés C D E et C D et associés de leur demande formée au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,
Condamne la société C D E aux dépens de l’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente