L’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière. Le prestataire de services de paiement, y compris, le cas échéant, le prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, fournit des éléments afin de prouver la fraude ou la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement. »
Il s’en déduit que le fait que l’utilisateur d’un service de paiement, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en application des articles L. 133-16 et L. 133-17 du code monétaire et financier, ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été utilisés.
Il appartient donc à la banque de prouver la faute volontaire ou non du payeur, autrement qu’en démontrant l’utilisation de données hautement confidentielles et elle ne peut se contenter d’invoquer le probable « hameçonnage » dont le client aurait été victime, c’est-à-dire un courriel ou un SMS frauduleux qui l’aurait nécessairement conduit, en réponse, à divulguer ses éléments d’identification personnels au fraudeur.
M. [K] [I] a constaté un virement non autorisé de 14.600 euros depuis son compte bancaire vers le compte de M. [J] [L]. Il a contesté cette opération auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE et a déposé plainte, mais celle-ci a été classée sans suite. M. [K] [I] a alors assigné la BRED BANQUE POPULAIRE en justice pour obtenir le remboursement du montant détourné et réparation du préjudice subi. Il affirme ne pas être à l’origine du virement et accuse la banque de négligence dans la gestion de son compte. De son côté, la BRED BANQUE POPULAIRE soutient que le virement a été effectué avec les accès personnels de M. [K] [I] et nie toute responsabilité contractuelle. Elle estime que le demandeur a fait preuve de négligence dans la surveillance de son compte. Le juge de la mise en état a clôturé l’instruction de l’affaire et les parties ont exposé leurs moyens et arguments devant le tribunal.
Sur la demande de remboursement du virement litigieux
La BRED BANQUE POPULAIRE a été condamnée à rembourser à M. [K] [I] la somme de 14.600 € au titre des fonds détournés. La banque n’a pas réussi à prouver la fraude ou la négligence de la part de M. [I] dans le virement non autorisé, ce qui a conduit à cette décision en sa faveur.
Sur les demandes au titre du préjudice moral
M. [I] a été débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, car le refus de remboursement de la BRED BANQUE POPULAIRE n’a pas été considéré comme une faute suffisante pour justifier un tel préjudice.
Sur les autres demandes
La BRED BANQUE POPULAIRE, en tant que partie perdante, a été condamnée aux entiers dépens. De plus, elle devra verser à M. [I] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision est exécutoire de droit à titre provisoire selon l’article 514 du code de procédure civile.
– Monsieur [K] [I] : 14.600€ en remboursement du virement frauduleux
– Monsieur [K] [I] : 2.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– La BRED BANQUE POPULAIRE : condamnée aux entiers dépens
– La BRED BANQUE POPULAIRE : rejet de l’ensemble des demandes
– M. [K] [I] : demande indemnitaire au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral rejetée
Réglementation applicable
L’article L.133-18 du code monétaire et financier pose le principe du remboursement par la banque des opérations de paiement non autorisées : « En cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur dans les conditions prévues à l’article L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l’opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant, sauf s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement et s’il communique ces raisons par écrit à la Banque de France. Le cas échéant, le prestataire de services de paiement du payeur rétablit le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération de paiement non autorisée n’avait pas eu lieu. »
Par dérogation à ce principe, l’article L.133-19 IV prévoit que le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L.133-16 et L.133-17, lesquels lui font obligation notamment de préserver la sécurité de ses données.
L’article L.133-23 du code monétaire et financier fixe les règles de preuve applicables lorsque l’utilisateur conteste avoir donné son autorisation au paiement : « En application de l’article L.133-23 du code monétaire et financier, lorsqu’un utilisateur de services de paiement nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, il incombe à son prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée et qu’elle n’a pas été affectée par une déficience technique ou autre.
L’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière. Le prestataire de services de paiement, y compris, le cas échéant, le prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, fournit des éléments afin de prouver la fraude ou la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement. »
Il s’en déduit que le fait que l’utilisateur d’un service de paiement, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en application des articles L. 133-16 et L. 133-17 du code monétaire et financier, ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été utilisés.
Il appartient donc à la banque de prouver la faute volontaire ou non du payeur, autrement qu’en démontrant l’utilisation de données hautement confidentielles et elle ne peut se contenter d’invoquer le probable « hameçonnage » dont le client aurait été victime, c’est-à-dire un courriel ou un SMS frauduleux qui l’aurait nécessairement conduit, en réponse, à divulguer ses éléments d’identification personnels au fraudeur.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Mathilde ROUTHE BEAUCART, avocat au barreau de PARIS
– Maître Jean-philippe GOSSET de la SELEURL CABINET GOSSET, avocat au barreau de PARIS
Mots clefs associés
– Remboursement
– Opération de paiement non autorisée
– Fraude
– Négligence grave
– Preuve
– Utilisateur de services de paiement
– Banque
– Virement litigieux
– Consentement
– Connexion
– Préjudice moral
– Dommages et intérêts
– Dépens
– Article 700 du code de procédure civile
– Exécutoire
– Remboursement : Action de restituer une somme d’argent qui avait été versée précédemment, souvent suite à une rétractation ou à une erreur.
– Opération de paiement non autorisée : Transaction effectuée sans le consentement du titulaire du compte, souvent associée à un usage frauduleux des moyens de paiement.
– Fraude : Acte délibéré visant à obtenir un avantage illégitime, souvent financier, par des moyens trompeurs ou illégaux.
– Négligence grave : Manquement significatif au devoir de prudence ou de diligence, allant au-delà d’une simple négligence.
– Preuve : Ensemble des éléments apportés au soutien d’une allégation dans le cadre d’une procédure judiciaire, destinés à convaincre le juge de la véracité des faits allégués.
– Utilisateur de services de paiement : Personne qui utilise des services permettant de réaliser des transactions financières (transferts d’argent, paiements, etc.).
– Banque : Établissement financier autorisé à recevoir des dépôts, à offrir des crédits et à fournir d’autres services financiers à ses clients.
– Virement litigieux : Virement bancaire faisant l’objet d’une contestation, souvent en raison de suspicions de fraude ou d’erreur.
– Consentement : Accord volontaire et éclairé donné par une personne pour une action spécifique, souvent nécessaire dans le cadre de transactions ou de traitements de données personnelles.
– Connexion : Établissement d’une communication ou d’un accès entre deux points, souvent utilisé en référence à des systèmes informatiques ou des réseaux.
– Préjudice moral : Dommage non matériel subi par une personne, incluant la souffrance psychologique, l’atteinte à la réputation ou d’autres aspects non financiers.
– Dommages et intérêts : Somme d’argent versée à une personne pour réparer un préjudice subi, qu’il soit matériel ou moral.
– Dépens : Frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire, incluant les frais de justice, qui sont généralement à la charge de la partie perdante.
– Article 700 du code de procédure civile : Disposition légale permettant à une partie dans un procès de demander à l’autre partie le remboursement des frais non compris dans les dépens.
– Exécutoire : Qualifie une décision de justice ou un acte juridique qui peut être mis en œuvre par la force, permettant par exemple la saisie de biens pour satisfaire à un jugement.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:
■
9ème chambre 1ère section
N° RG 22/08768
N° Portalis 352J-W-B7G-CXNWO
N° MINUTE :
Contradictoire
Assignation du :
12 Juillet 2022
JUGEMENT
rendu le 27 Février 2024
DEMANDEUR
Monsieur [K] [I]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Mathilde ROUTHE BEAUCART, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #D0631
DÉFENDERESSE
Ste coopérative banque Po BRED BANQUE POPULAIRE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Jean-philippe GOSSET de la SELEURL CABINET GOSSET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B0812
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Anne-Cécile SOULARD, Vice-présidente,
Monsieur Patrick NAVARRI,Vice-président,
Madame Marine PARNAUDEAU, Vice-présidente,
assistés de Madame Sandrine BREARD, greffière.
Décision du 27 Février 2024
9ème chambre 1ère section
N° RG 22/08768 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXNWO
DÉBATS
A l’audience du 19 Décembre 2023 tenue en audience publique devant Monsieur Patrick NAVARRI, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile.
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
FAITS CONSTANTS
M. [K] [I] possède un compte bancaire dans les livres de la BRED BANQUE POPULAIRE.
Le 25 juillet 2021, un virement a été effectué pour un montant de 14.600 euros depuis son compte bancaire vers le compte d’une personne dénommée M. [J] [L].
Par une lettre du 27 juillet 2021, M. [K] [I] a contesté ce virement auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE.
Le 27 juillet 2021, M. [K] [I] a déposé plainte, qui a été classée sans suite le 20 août 2021.
Se disant victime d’un virement frauduleux non autorisé et en l’absence de remboursement de la BRED BANQUE POPULAIRE, M. [K] [I] a fait assigner la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE devant le tribunal judiciaire de Paris par acte d’huissier en date du 12 juillet 2022 pour obtenir le remboursement de l’opération non autorisée et la réparation du préjudice en résultant.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 16 juin 2023, M. [K] [I] demande au tribunal de :
« Vu les articles L133- 6, L133-7, L133-16, L133-18, L133-23, L561-6 du code monétaire et financier et 1231 et 1231-1 du code civil,
– Dire Monsieur [K] [I] recevable et bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,
– Y faire droit,
– Débouter la BRED BANQUE POPULAIRE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– Condamner la BRED BANQUE POPULAIRE à verser à Monsieur [K] [I] la somme de 14.600 € au titre des fonds détournés,
– Condamner la BRED BANQUE POPULAIRE à verser à Monsieur [K] [I] la somme de 5.000 € au titre du préjudice moral subi,
– Condamner la BRED BANQUE POPULAIRE à verser à Monsieur [K] [I] la somme de 4.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamner la BRED BANQUE POPULAIRE aux entiers dépens de l’instance,
– Rappeler que l’exécution provisoire est de droit ».
A l’appui de ses demandes M. [K] [I] affirme qu’il n’est pas à l’origine de l’opération litigieuse, qu’il n’a pas autorisé le virement litigieux, qu’il n’a jamais communiqué ses coordonnées bancaires à quiconque et ne connait pas le bénéficiaire du virement. Il soutient qu’il revient à la banque d’apporter la preuve de sa fraude ou de sa négligence grave et qu’il n’est pas tenu d’établir la faute de la BRED BANQUE POPULAIRE. En outre la BRED n’a jamais mis en place le système de double authentification qui aurait pu permettre de prévenir le dommage.
Il fait valoir que la BRED BANQUE POPULAIRE a manqué à son obligation de vigilance en faisant preuve d’une négligence dans la gestion de son compte, notamment en ne l’avisant pas dès l’apparition de cette opération qui était anormale ce qui la rend responsable du virement dont il demande le remboursement au titre de son préjudice matériel. Il estime également subir un préjudice du fait du comportement de la BRED BANQUE POPULAIRE qui lui a créé un préjudice moral.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 27 mars 2023, la BRED BANQUE POPULAIRE demande au tribunal de :
« Vu les articles L.133-6 et L.133-23 du Code monétaire et financier,
Vu l’article 1103 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
RECEVOIR la BRED en ses conclusions, l’y déclarant bien fondée ;
JUGER que la responsabilité de la BRED n’est en tout état de cause pas engagée en l’absence d’opération de virement qualifiable de non – autorisée en l’espèce et de surcroît en raisons des négligences graves de Monsieur [I],
DEBOUTER en conséquence Monsieur [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de la BRED,
CONDAMNER Monsieur [I] à verser à la BRED la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Le CONDAMNER aux entiers dépens. »
La BRED BANQUE POPULAIRE affirme que le virement litigieux a été réalisé avec les accès personnels de la banque en ligne du demandeur par la saisie de son identifiant et de son mot de passe. Elle estime qu’un tel processus d’authentification rend la thèse d’une opération effectuée à l’insu du demandeur totalement improbable et conteste toute responsabilité contractuelle. Elle ajoute qu’en application du principe de non-ingérence, elle ne pouvait s’opposer à l’exécution du virement litigieux. De plus l’obligation de la double identification n’a été rendu obligatoire qu’en 2022 soit postérieurement à l’opération querellée.
La BRED BANQUE POPULAIRE considère que le demandeur a fait preuve de négligence dans la surveillance de son compte bancaire. Elle précise que l’opération litigieuse s’est déroulée sans réaction de la part du titulaire du compte. Elle conteste les demandes indemnitaires présentées en l’absence de faute de sa part et de démonstration de la réalité du préjudice.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux dernières écritures des parties pour l’exposé des moyens et arguments venant au soutien de leurs demandes et de leurs défenses.
Le juge de la mise en état a clôturé l’instruction de l’affaire par ordonnance du 31 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de remboursement du virement litigieux
L’article L.133-18 du code monétaire et financier pose le principe du remboursement par la banque des opérations de paiement non autorisées : « En cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur dans les conditions prévues à l’article L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l’opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant, sauf s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement et s’il communique ces raisons par écrit à la Banque de France. Le cas échéant, le prestataire de services de paiement du payeur rétablit le compte débité dans l’état où il se serait trouvé si l’opération de paiement non autorisée n’avait pas eu lieu. »
Par dérogation à ce principe, l’article L.133-19 IV prévoit que le payeur supporte toutes les pertes occasionnées par des opérations de paiement non autorisées si ces pertes résultent d’un agissement frauduleux de sa part ou s’il n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations mentionnées aux articles L.133-16 et L.133-17, lesquels lui font obligation notamment de préserver la sécurité de ses données.
L’article L.133-23 du code monétaire et financier fixe les règles de preuve applicables lorsque l’utilisateur conteste avoir donné son autorisation au paiement : « En application de l’article L.133-23 du code monétaire et financier, lorsqu’un utilisateur de services de paiement nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, il incombe à son prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée et qu’elle n’a pas été affectée par une déficience technique ou autre.
L’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière. Le prestataire de services de paiement, y compris, le cas échéant, le prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement, fournit des éléments afin de prouver la fraude ou la négligence grave commise par l’utilisateur de services de paiement. »
Il s’en déduit que le fait que l’utilisateur d’un service de paiement, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en application des articles L. 133-16 et L. 133-17 du code monétaire et financier, ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été utilisés.
Il appartient donc à la banque de prouver la faute volontaire ou non du payeur, autrement qu’en démontrant l’utilisation de données hautement confidentielles et elle ne peut se contenter d’invoquer le probable « hameçonnage » dont le client aurait été victime, c’est-à-dire un courriel ou un SMS frauduleux qui l’aurait nécessairement conduit, en réponse, à divulguer ses éléments d’identification personnels au fraudeur.
En l’espèce la BRED BANQUE POPULAIRE se prévaut des conditions générales de la « convention de services personnes physiques » et notamment de l’article 9 sur la preuve selon lesquelles une fois identifié et authentifié, le client peut réaliser des opérations depuis son espace client internet et la validation de ces opérations emporte consentement du client aux opérations.
Toutefois, ces stipulations contractuelles ne peuvent tenir en échec les principes légaux rappelés précédemment, lesquels font l’obligation à la banque de prouver la fraude ou la négligence grave de l’utilisateur.
Le virement litigieux a eu lieu le 25 juillet 2021 et M. [K] [I] s’est rapproché de la BRED pour le contester dès le 27 juillet 2021. Il en résulte qu’il a réagi rapidement sans qu’il puisse lui être reproché de ne pas avoir surveillé le fonctionnement de son compte bancaire lors de cette opération.
La BRED BANQUE POPULAIRE verse aux débats un document intitulé « les informations présentées dans les différents onglets CNX & VIR qui sont la transcription exacte des traces techniques (logs) afin d’en faciliter la lecture » et qui constitue le listing des différentes connexions au portail bancaire de Monsieur [I] ainsi que des différents virements effectués par M. [I].
Il ressort de cette comparaison que M. [I] s’est connecté à son portail le 25 juillet 2021 à 11h27 alors que le virement a eu lieu à 23h46. Or dans les précédents virements qui ont été effectués par M. [I] avec son consentement, le virement a suivi de quelques minutes la connexion à son espace. Concernant l’opération litigieuse on peut donc constater que M. [I] ne s’est pas connecté à son espace client alors que l’opération était effectuée. D’ailleurs la BRED n’apporte aucun élément sur cette situation.
En outre, sous l’onglet « deviceIdrequest », les informations indiquées pour le virement du 25 juillet 2021 ne correspondent pas aux informations habituelles d’identification de Monsieur [I] qui ont été précédemment renseignées et avec lesquelles il a volontairement effectué des virements bancaires. La BRED n’apporte également aucun élément sur cette situation.
Dans ces conditions, la BRED BANQUE POPULAIRE ne rapporte pas la preuve d’une fraude ou d’une négligence de la part de M. [K] [I] dans le virement qui n’a pas été autorisé.
Dès lors, il y a lieu de condamner la BRED BANQUE POPULAIRE à verser à Monsieur [K] [I] la somme de 14.600 € au titre des fonds détournés.
Sur les demandes au titre du préjudice moral
Quand bien même la BRED BANQUE POPULAIRE s’est opposée aux demandes de remboursement, son refus ne permet pas d’établir l’existence d’un préjudice moral résultant d’une faute commise par la BRED BANQUE POPULAIRE à son encontre et M. [I] sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts sur ce chef.
Sur les autres demandes
Partie perdante au procès, la BRED BANQUE POPULAIRE sera condamnée aux entiers dépens.
La BRED BANQUE POPULAIRE sera également condamnée à payer à M. [I] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l’article 514 du code de procédure civile, la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
CONDAMNE la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [K] [I] la somme de 14.600€ en remboursement du virement frauduleux ;
REJETTE la demande indemnitaire de M. [K] [I] au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral;
REJETTE l’ensemble des demandes de la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE ;
CONDAMNE la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE aux entiers dépens ;
CONDAMNE la société anonyme la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à M. [K] [I] la somme totale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Fait et jugé à Paris le 27 février 2024.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE