Atteinte au droit à l’image de Jean-Marie Le Pen
On se souvient qu’un internaute avait posté sur les réseaux sociaux un « selfie » le représentant dans un avion avec Jean-Marie Le Pen endormi sur le siège situé devant lui, accompagné du commentaire suivant : « Mettez les KO demain en allant tous voter. Pour préserver notre France fraternelle !!! ». Assigné en référé, l’internaute a vu sa condamnation pour atteinte au droit à l’image de Jean-Marie Le Pen, être confirmée en appel.
Le cliché avait été pris alors que Jean-Marie Le Pen était endormi, sa tête étant renversée en arrière sur l’appui-tête de son fauteuil et la bouche entrouverte. Or, ce moment surpris relève de l’intimité de la vie privée, le sommeil étant, à l’évidence, un moment de relâchement et d’abandon personnel. Les juges ont considéré qu’il convenait de le préserver de plus belle comme étant un espace de la sphère privée puisqu’il résulte d’un état d’inconscience, y compris pour des personnalités publiques.
Exception de droit à l’information exclue
L’internaute a tenté de faire valoir qu’en tant qu’artiste engagé et à l’occasion du second tour des élections régionales, il avait eu l’idée de diffuser ledit selfie réalisé deux ans plus tôt à l’occasion d’un voyage en avion. Il résulte des articles 9 du code civil et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, que toute personne, quelle que soit sa notoriété a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection. De même, elle dispose sur son image, attribut de sa personnalité et sur l’utilisation qui en est faite d’un droit exclusif, qui lui permet de s’opposer à sa diffusion sans son autorisation.
Ces droits doivent se concilier avec le celui à la liberté d’expression notamment lorsqu’il s’agit d’événements d’actualité ou de sujets d’intérêt général. Or, l’internaute n’établissait pas en quoi la diffusion de cette photographie volée était de nature à apporter un élément d’information d’intérêt général qui justifierait que le droit à l’intimité de la vie privée et le droit à l’image s’éclipsent. La diffusion de ce cliché n’a pu être considérée comme présentant un sujet d’intérêt légitime pour le public qu’il était possible de mobiliser contre l’abstention et contre le parti de Jean-Marie Le Pen en utilisant d’autres supports. Au demeurant, l’internaute n’a pas été considéré comme étant un débatteur politique, un journaliste ou un humoriste dont l’expression mériterait également d’être protégée et appréciée au regard des droits de Jean-Marie Le Pen. S’il avait souhaité présenter ce cliché sous un angle humoristique en associant l’image et son commentaire pour faire passer un message politique, le selfie n’en constituait pas moins une atteinte au droit exclusif de Jean-Marie Le Pen de disposer de son image.
Personnalité publique dans un lieu public
Le fait que Jean-Marie Le Pen se trouvait dans un lieu public n’était pas de nature à diminuer son droit d’obtenir réparation du préjudice moral résultant de l’atteinte portée à son image et à l’intimité de sa vie privée. Admettre le contraire conduirait en effet à considérer que les personnes jouissant d’une certaine célébrité ne bénéficient pas du même droit que les autres de fréquenter des lieux publics et constituerait ainsi une mesure discriminatoire.
Selfie dégradant
Allant au-delà de l’appréciation des premiers juges, la Cour d’appel a retenu que le cliché était dégradant puisqu’il présentait l’intéressé la tête en arrière, la bouche ouverte ce qui ne constituait pas l’image habituelle que toute personne souhaite donner d’elle-même, lorsqu’elle est en mesure de contrôler ses attitudes, il en va ainsi de la dignité humaine.
Par ailleurs, s’agissant d’un chef de parti politique, le fait d’associer à l’image un commentaire commençant par : « mettez les KO » implique le souhait de celui qui diffuse d’associer le sommeil de son sujet à un KO, qui est associé en termes sportifs à une défaite peu glorieuse. A titre provisionnel, l’internaute a été condamné à verser 3.000 euros à Jean-Marie Le Pen.
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