L’Essentiel : La Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM, réceptionnée en 2001, a fait l’objet d’une assignation par le syndicat des copropriétaires contre la SA EQUITE pour des désordres décennaux. En avril 2024, la SA EQUITE a demandé l’irrecevabilité de l’action, tout en sollicitant le déboutement du syndicat. Ce dernier a répliqué en demandant à son tour le déboutement de la SA EQUITE. Le juge a finalement déclaré incompétent pour statuer sur certaines demandes et a condamné la SA EQUITE à verser 1.000 € au syndicat, tout en renvoyant l’affaire à une audience ultérieure.
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Contexte de l’affaireLa Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM, située à Nantes, a été réceptionnée le 6 novembre 2001. Suite à des désordres de nature décennale, le syndicat des copropriétaires a assigné la SA EQUITE, assureur dommages-ouvrage, devant le tribunal judiciaire de Nantes le 23 août 2023, demandant une indemnisation pour des travaux conservatoires et de reprise. Demandes de la SA EQUITELe 5 avril 2024, la SA EQUITE a demandé au juge de la mise en état de déclarer l’action du syndicat des copropriétaires irrecevable. Dans ses dernières conclusions du 14 octobre 2024, elle a réitéré cette demande, tout en sollicitant le déboutement du syndicat de toutes ses demandes et la condamnation de ce dernier à verser 3.000 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens. Réponse du syndicat des copropriétairesEn réponse, le syndicat des copropriétaires a, le 19 juin 2024, demandé au juge de débouter la SA EQUITE de ses demandes et de la condamner à verser 3.000 € pour les frais irrépétibles, ainsi qu’aux dépens de l’incident. L’affaire a été appelée à l’audience sur incidents le 17 octobre 2024 et mise en délibéré pour le 9 janvier 2025. Motifs de la décisionLe juge a rappelé que selon l’article 789 du code de procédure civile, il est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir. L’article 122 du même code définit les moyens qui peuvent rendre une demande irrecevable. La SA EQUITE a invoqué l’article L121-12 du code des assurances pour justifier l’irrecevabilité de l’action du syndicat, mais le juge a estimé que cette disposition ne constituait pas une fin de non-recevoir, mais une défense au fond. Décision du jugeLe juge a déclaré incompétent le juge de la mise en état pour statuer sur l’application de l’alinéa 2 de l’article L121-12 du code des assurances. Il a également condamné la SA EQUITE aux dépens et à verser 1.000 € au syndicat des copropriétaires pour les frais irrépétibles, tout en déboutant la SA EQUITE de sa propre demande. L’exécution provisoire a été déclarée de droit. ConclusionLe juge a renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 19 mars 2025 pour les conclusions de Maître MANDEVILLE, tout en rappelant que l’exécution provisoire est de droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la compétence du juge de la mise en état selon l’article 789 du code de procédure civile ?Selon l’article 789 du code de procédure civile, « Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal pour : (…) 6° Statuer sur les fins de non-recevoir (…) ». Cet article précise que le juge de la mise en état a une compétence exclusive pour statuer sur certaines questions procédurales, notamment les fins de non-recevoir. Cela signifie que ce juge est le seul habilité à examiner les moyens qui pourraient rendre une demande irrecevable, sans entrer dans le fond du litige. Il est donc essentiel de comprendre que le juge de la mise en état ne peut pas se prononcer sur des questions qui relèvent du fond du dossier, mais uniquement sur des questions procédurales, comme celles relatives à la recevabilité des demandes. Quelles sont les fins de non-recevoir selon l’article 122 du code de procédure civile ?L’article 122 du code de procédure civile stipule que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ». Cet article énumère les différents motifs qui peuvent être invoqués pour déclarer une demande irrecevable. Ces motifs incluent des éléments tels que le défaut de qualité pour agir, c’est-à-dire que la partie qui engage l’action n’a pas le droit de le faire, ou encore la prescription, qui signifie que le délai pour agir est écoulé. Il est important de noter que ces fins de non-recevoir doivent être examinées par le juge de la mise en état, qui doit se prononcer sur leur recevabilité sans entrer dans le fond du litige. Comment l’article L121-12 du code des assurances s’applique-t-il dans ce litige ?L’article L121-12 du code des assurances dispose que “L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur. L’assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l’assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l’assuré, s’opérer en faveur de l’assureur.” Dans le cadre de ce litige, la SA EQUITE invoque cet article pour soutenir que l’action du syndicat des copropriétaires est irrecevable. Cependant, il est déterminant de noter que cette disposition ne constitue pas une fin de non-recevoir au sens de l’article 122 du code de procédure civile. En effet, l’article L121-12, alinéa 2, permet à l’assureur de soulever une défense au fond, mais ne peut pas être utilisé pour déclarer une demande irrecevable. Cela signifie que le juge de la mise en état n’est pas compétent pour statuer sur cette question, qui devra être tranchée par le tribunal au fond. Quelles sont les conséquences de l’incompétence du juge de la mise en état ?L’incompétence du juge de la mise en état pour statuer sur l’application de l’alinéa 2 de l’article L121-12 du code des assurances a des conséquences significatives sur le déroulement de la procédure. En effet, cela signifie que la SA EQUITE ne peut pas obtenir la déclaration d’irrecevabilité de l’action du syndicat des copropriétaires par ce biais. Le juge de la mise en état a donc rejeté la demande de la SA EQUITE, ce qui permet à l’affaire de continuer sur le fond. De plus, cette décision implique que la question de la responsabilité de l’assureur et de la possibilité de décharge devra être examinée par le tribunal lors d’une audience ultérieure. Cela peut également avoir des implications sur les frais de justice, puisque la SA EQUITE a été condamnée aux dépens et à verser une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Quelles sont les implications des frais irrépétibles selon l’article 700 du code de procédure civile ?L’article 700 du code de procédure civile stipule que « le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles ». Les frais irrépétibles sont des frais qui ne peuvent pas être récupérés par la partie qui les a engagés, tels que les honoraires d’avocat. Dans ce cas, le juge a décidé de condamner la SA EQUITE à verser 1000 euros au syndicat des copropriétaires au titre de ces frais. Cette décision est fondée sur le principe de l’équité, qui commande que la partie qui succombe dans ses prétentions soit tenue de compenser les frais engagés par la partie gagnante. Cela souligne l’importance de la responsabilité dans le cadre des litiges, où la partie perdante doit assumer les conséquences financières de sa défaite. En conclusion, l’article 700 permet de garantir que les parties ne soient pas pénalisées financièrement par le simple fait d’avoir dû engager une procédure judiciaire pour faire valoir leurs droits. |
[Adresse 3]
[Localité 1]
09/01/2025
4ème chambre
Affaire N° RG 23/03993 – N° Portalis DBYS-W-B7H-MNOY
DEMANDEUR :
Syndicat des Copropriétaires de la RESIDENCE LES BERGES DE VAN ISEGHEM – [Adresse 2] représenté par son Syndic la SASU FONCIA 44 (RCS de [Localité 1] n° 338 553 696)
Rep/assistant : Maître Guillaume CIZERON de la SELARL CABINET CIZERON, avocats au barreau de NANTES
DEFENDEUR :
S.A. EQUITE
Rep/assistant : Maître Camille MANDEVILLE de la SELARL GUEGUEN AVOCATS, avocats au barreau de NANTES
Rep/assistant : Me Isabelle ALLEMAND, avocat au barreau de PARIS
ORDONNANCE
du juge de la mise en état
Audience incident du 17 Octobre 2024, délibéré au 9 Janvier 2025
Le NEUF JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ
La réalisation de la Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM, située [Adresse 2] à [Localité 1], a fait l’objet d’une réception le 06 novembre 2001.
Par exploit du 23 août 2023, le syndicat des copropriétaires de la Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM, située [Adresse 2] à Nantes a fait assigner, devant le tribunal judiciaire de Nantes, la SA EQUITE, assureur dommages-ouvrage, aux fins d’indemnisation au titre de travaux conservatoires et de travaux de reprise suite à des désordres de nature décennale.
Par conclusions d’incident du 05 avril 2024, la SA EQUITE ASSURANCES a sollicité du juge de la mise en état de déclarer l’action irrecevable.
Par dernières conclusions d’incident du 14 octobre 2024, la SA EQUITE ASSURANCES a sollicité du juge de la mise en état, au visa de l’article 122 du code de procédure civile, de l’article 1792 du code civil, de l’article L.121-12 al 2 du code des assurances, de :
Dire irrecevable le Syndicat des copropriétaires LES BERGES DE VAN ISEGHEM en toutes ses demandes,
Débouter le Syndicat des copropriétaires LES BERGES DE VAN ISEGHEM de toutes ses demandes,
Condamner le Syndicat des copropriétaires LES BERGES DE VAN ISEGHEM au paiement d’une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner le Syndicat des copropriétaires LES BERGES DE VAN ISEGHEM aux entiers dépens, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions d’incident du 19 juin 2024, le syndicat des copropriétaires de la Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM, située [Adresse 2] à [Localité 1] a sollicité du juge de la mise en état, au visa de l’article 789 du code de procédure civile, de l’article 1792 du code civil, de l’article L121-12 du code des assurances, de :
– Débouter la société l’EQUITE de l’ensemble de ses demandes ;
– Condamner la société l’EQUITE à la somme de 3.000,00 € au titre des frais irrépétibles, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société l’EQUITE aux entiers dépens de l’incident.
L’affaire a été appelée à l’audience sur incidents du 17 octobre 2024 et mise en délibéré au 09 janvier 2025.
Selon l’article 789 du code de procédure civile, « Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal pour :
(…)
6° Statuer sur les fins de non-recevoir (…) ».
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
L’article L121-12 du code des assurances “L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.
L’assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l’assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l’assuré, s’opérer en faveur de l’assureur.”
La SA EQUITE se fonde sur l’article L121-12, alinéa 2 du code des assurances pour faire valoir l’irrecevabilité de l’action engagée par le syndicat des copropriétaires de la Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM.
Or cette disposition ne constitue nullement une fin de non-recevoir au sens de l’article 122 du code de procédure civile, mais une défense au fond que l’assureur peut opposer à la demande de garantie de son assuré. L’article L121-12, alinéa 2, autorise l’assureur qui est privé de recours par le fait de son assuré à lui opposer une non garantie. Cette défense au fond ne relève ainsi pas de la compétence du juge de la mise en état, mais devra être tranchée par le tribunal qui se prononcera sur les conditions d’une décharge totale ou partielle de l’assureur, fondée sur un fait imputable à son assuré.
Il convient donc de rejeter la demande de la SA EQUITE du fait de l’incompétence du juge de la mise en état pour statuer sur l’application de l’alinéa 2 de l’article L121-12 du code des assurances.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dépens seront mis à la charge de la SA EQUITE, qui succombe.
L’équité commande de condamner la SA EQUITE, à verser la somme de 1000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, au syndicat des copropriétaires de la Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM et de la débouter de sa propre demande au titre des frais irrépétibles.
En application de l’article 514 du code de procédure civile, l’exécution provisoire est de droit.
Nous, Stéphanie LAPORTE, juge de la mise en état, assistée de Franck DUBOIS, faisant fonction de greffier, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire susceptible d’appel
DECLARONS incompétent le juge de la mise en état pour statuer sur l’application de l’alinéa 2 de l’article L121-12 du code des assurances ;
CONDAMNONS la SA EQUITE aux dépens ;
CONDAMNONS la SA EQUITE à verser la somme de 1000 euros au syndicat des copropriétaires de la Résidence LES BERGES DE VAN ISEGHEM, située [Adresse 2] à [Localité 1] ;
RENVOYONS à l’audience de mise en état du 19 mars 2025 pour les conclusions de Maître MANDEVILLE ;
RAPPELONS que l’exécution provisoire est de droit.
Le greffier, Le juge de la mise en état,
Franck DUBOIS Stéphanie LAPORTE
copie :
Me Isabelle ALLEMAND
Maître Guillaume CIZERON de la SELARL CABINET CIZERON – 257
Maître Camille MANDEVILLE de la SELARL GUEGUEN AVOCATS – 53
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