Intervention d’un tiers dans le cadre d’une expertise : enjeux de la preuve et de la procédure civile

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Intervention d’un tiers dans le cadre d’une expertise : enjeux de la preuve et de la procédure civile

L’Essentiel : La S.C.C.V. EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G a engagé une procédure judiciaire pour désigner un expert dans un projet de construction. Le 13 avril 2023, le tribunal de Créteil a nommé Monsieur [G] [Y] comme expert. Cependant, le 27 juin 2023, il a été remplacé par Monsieur [V] [N]. Le 20 juin 2024, la S.C.C.V. a assigné la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) en référé, demandant que les ordonnances soient opposables. En l’absence de défense de la RESB, le tribunal a jugé nécessaire de l’impliquer dans l’expertise, rendant les ordonnances communes et opposables.

Contexte de l’affaire

La S.C.C.V. EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G a initié une procédure judiciaire pour obtenir la désignation d’un expert dans le cadre d’une opération de construction immobilière. Le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil a rendu une ordonnance le 13 avril 2023, désignant Monsieur [G] [Y] comme expert judiciaire.

Changement d’expert

Suite à une ordonnance de remplacement en date du 27 juin 2023, Monsieur [V] [N] a été désigné en remplacement de Monsieur [G] [Y]. Ce changement a été effectué par le juge chargé du contrôle des expertises.

Assignation en référé

Le 20 juin 2024, la S.C.C.V. EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G a assigné la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) en référé, demandant que les ordonnances précédentes soient rendues communes et opposables à la partie défenderesse. L’affaire a été entendue le 15 octobre 2024, où la S.C.C.V. a maintenu sa demande.

Absence de défense

Malgré une assignation régulière, la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) n’a pas constitué avocat, ce qui a conduit à une décision réputée contradictoire. Les débats ont été suivis d’une mise en délibéré, avec une décision à rendre par mise à disposition au greffe.

Motifs de la décision

Selon l’article 145 du code de procédure civile, une mesure d’instruction peut être ordonnée en référé si un motif légitime existe pour conserver ou établir la preuve de faits avant tout procès. Il a été jugé nécessaire d’impliquer la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) dans les opérations d’expertise, étant donné son rôle de substitut à l’établissement public territorial Grand Orly Seine Bièvre.

Conclusion de la décision

L’ordonnance du 13 avril 2023 et celle du 27 juin 2023 ont été rendues communes et opposables à la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB). L’expert a été chargé de convoquer toutes les parties concernées aux rendez-vous d’expertise. La partie demanderesse a été condamnée aux dépens de la présente instance.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour ordonner une mesure d’instruction en référé selon l’article 145 du code de procédure civile ?

L’article 145 du code de procédure civile stipule que :

« Il peut être ordonné en référé toute mesure d’instruction légalement admissible, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige. »

Ainsi, pour qu’une mesure d’instruction soit ordonnée en référé, il faut :

1. **Un motif légitime** : Cela implique qu’il doit exister des raisons valables justifiant la nécessité de conserver ou d’établir des preuves avant le procès.

2. **La preuve de faits** : Les faits à prouver doivent être directement liés à la solution du litige envisagé.

3. **Légalité de la mesure** : La mesure d’instruction demandée doit être conforme aux dispositions légales en vigueur.

En résumé, l’article 145 permet d’ordonner des mesures d’instruction en référé lorsque des éléments de preuve sont nécessaires pour la résolution d’un litige, et ce, dans un cadre légal.

Comment un tiers peut-il être impliqué dans une expertise déjà ordonnée selon l’article 245 du code de procédure civile ?

L’article 245, alinéa 3, du code de procédure civile précise que :

« Lorsqu’une mesure d’instruction a d’ores et déjà été ordonnée, pour qu’un tiers à l’expertise puisse y être appelé, il doit être établi que ce tiers est susceptible d’être concerné par le procès futur dont l’éventualité a légitimé le prononcé de la mesure. »

Cela signifie que pour qu’un tiers soit impliqué dans une expertise déjà ordonnée, il faut :

1. **Établir la pertinence** : Il doit être démontré que le tiers est concerné par le litige à venir.

2. **Bonne administration de la justice** : Il est dans l’intérêt de la justice que toutes les parties potentiellement affectées par le litige soient présentes lors de l’expertise.

3. **Opposabilité du rapport** : La présence du tiers permet que le rapport de l’expert soit opposable à toutes les parties concernées.

En conclusion, l’article 245 permet d’inclure un tiers dans une expertise si sa participation est justifiée par son lien avec le litige.

Quelles sont les obligations de l’expert en matière de convocation des parties selon l’article 169 du code de procédure civile ?

L’article 169 du code de procédure civile stipule que :

« L’expert doit convoquer à tous les rendez-vous qu’il organisera les parties en cause et celles-ci doivent être mises en mesure de présenter leurs observations sur les opérations auxquelles il a déjà été procédé. »

Les obligations de l’expert incluent donc :

1. **Convocation des parties** : L’expert est tenu de convoquer toutes les parties concernées à chaque rendez-vous qu’il organise.

2. **Droit d’observation** : Les parties doivent avoir la possibilité de présenter leurs observations sur les opérations d’expertise déjà réalisées.

3. **Transparence** : Cela garantit que toutes les parties sont informées et peuvent participer activement à l’expertise.

En résumé, l’article 169 impose à l’expert de veiller à ce que toutes les parties soient convoquées et puissent s’exprimer, assurant ainsi une procédure équitable.

MINUTE N° :
ORDONNANCE DU : 19 Novembre 2024
DOSSIER N° : N° RG 24/01024 – N° Portalis DB3T-W-B7I-VHFN
CODE NAC : 54G – 0A
AFFAIRE : SCCV EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G C/ REGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIEVRE (RESB)

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL

Section des Référés

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

LE JUGE DES REFERES : Madame Isabelle KLODA, Première vice-présidente

GREFFIER : Madame Stéphanie GEULIN, Greffier

PARTIES :

DEMANDERESSE

SCCV EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 909 69 501
dont le siège social est sis 121 avenue de Malakoff – 75116 PARIS

représentée par Maître Philippe RENAUD, avocat au barreau de PARIS – Vestiaire : P0139

DEFENDERESSE

REGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIEVRE (RESB)
dont le siège social est sis Hôtel de Ville – 2 avenue Youri Gagarine – 94400 VITRY SUR SEINE

non représentée

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Débats tenus à l’audience du : 15 Octobre 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : le 19 Novembre 2024
Ordonnance rendue par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2024

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EXPOSE DU LITIGE

La S.C.C.V. EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G a obtenu la désignation d’un expert judiciaire, Monsieur [G] [Y], selon une ordonnance du 13 avril 2023 (RG N°23/00375) rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil dans le cadre d’une opération de construction immobilière.

Par une ordonnance de remplacement rendue par le juge chargé du contrôle des expertises en date du 27 juin 2023, Monsieur [V] [N] a été désigné en remplacement de Monsieur [G] [Y].

Vu l’assignation en référé délivrée le 20 juin 2024 à la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) à la demande de la S.C.C.V. EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G , par laquelle il est sollicité que l’ordonnance rendue le 13 avril 2023 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil ordonnant une expertise ainsi que celle du 27 juin 2023 désignant notamment Monsieur [V] [N] comme expert soient rendues communes et opposable à la partie défenderesse à la présente instance ;

L’affaire a été entendue à l’audience du 15 octobre 2024 au cours de laquelle la S.C.C.V. EMERIGE IVRY CONFLUENCES 4G a maintenu sa demande.

Bien que régulièrement assignée, la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) n’a pas constitué avocat, de sorte qu’il est statué par décision réputée contradictoire.

Il est renvoyé à l’acte introductif d’instance pour un plus ample exposé des moyens qui y sont contenus.

A l’issue des débats, il a été indiqué que l’affaire était mise en délibéré et que la décision serait rendue ce jour par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, il peut être ordonné en référé toute mesure d’instruction légalement admissible, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige.

Lorsque la mesure d’instruction a d’ores et déjà été ordonnée, pour qu’un tiers à l’expertise puisse y être appelé, il doit être établi que ce tiers est susceptible d’être concerné par le procès futur dont l’éventualité a légitimé le prononcé de la mesure, dès lors qu’il est de bonne administration de la justice que toutes les parties susceptibles d’être concernées par le litige soient présentes à l’expertise, de sorte que le rapport de l’expert puisse leur être opposable.

Tel est le cas en l’espèce, au vu des documents produits aux débats et notamment de la recommandation de l’expert dans son courriel du 19 juin 2024, il apparaît nécessaire de faire intervenir aux opérations d’expertises la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) s’étant substituée à L’établissement public territorial (l’EPT) Grand Orly Seine Bièvre, en vertu d’une délibération en date du 14 novembre 2023.

L’expert a donné son avis à cette mise en cause, conformément aux dispositions de l’article 245, alinéa 3, du code de procédure civile.

L’ordonnance susvisée sera donc rendue commune et opposable à la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) .

La partie demanderesse, dans l’intérêt de laquelle la présente décision est rendue, supportera la charge des dépens de la présente instance en référé.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire, exécutoire de plein droit par provision, et susceptible d’appel,

RENDONS commune et opposable à la RÉGIE DES EAUX DE LA SEINE ET DE LA BIÈVRE (RESB) l’ordonnance rendue le 13 avril 2023 (RG N°23/00375) par le juge des référés du Tribunal judiciaire de Créteil ordonnant une expertise ainsi que celle du 27 juin 2023 désignant notamment Monsieur [V] [N] comme expert,

DISONS que l’expert devra, conformément à l’article 169 du code de procédure civile, convoquer à tous les rendez-vous qu’il organisera désormais les parties nouvellement en cause et que celles-ci devront être mises en mesure de présenter leurs observations sur les opérations auxquelles il a déjà été procédé par l’expert,

DISONS que dans l’hypothèse où la présente décision est portée à la connaissance de l’expert après le dépôt du rapport, ses dispositions seront caduques,

CONDAMNONS la partie demanderesse aux dépens,

FAIT AU PALAIS DE JUSTICE DE CRÉTEIL, le 19 novembre 2024.

LE GREFFIER LE JUGE DES REFERES,


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