Interprétation des clauses d’assurance en période de crise sanitaire : enjeux de la garantie pertes d’exploitation et conditions de mobilisation

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Interprétation des clauses d’assurance en période de crise sanitaire : enjeux de la garantie pertes d’exploitation et conditions de mobilisation

L’Essentiel : Le 13 et le 27 janvier 2022, Gan Assurances a interjeté appel d’une décision judiciaire concernant la garantie mobilisable et des provisions à verser à NCCM. Ce dernier avait demandé la confirmation du jugement du 14 décembre 2021, qui reconnaissait sa garantie pour pertes d’exploitation. Gan Assurances a soutenu que les dispositions contractuelles ne couvraient pas la fermeture administrative des salons, tandis que NCCM a affirmé que l’arrêté du 15 mars 2020 justifiait la mobilisation de la garantie. La cour a finalement infirmé le jugement initial, déboutant NCCM et condamnant cette dernière à payer des frais à Gan Assurances.

Appel de Gan Assurances

Le 13 et le 27 janvier 2022, la société Gan Assurances a interjeté appel d’une décision judiciaire. Les procédures ont été jointes le 24 février 2022, et la société a formulé ses dernières écritures le 24 juillet 2024, demandant à la cour de recevoir son appel et de le déclarer fondé.

Demandes de Gan Assurances

Gan Assurances a demandé l’infirmation du jugement qui avait déclaré la garantie mobilisable et l’avait condamnée à verser des provisions à la société NCCM. Les montants en question étaient de 12 504,40 euros pour le salon Franck Provost Femmes et de 37 271,32 euros pour le salon Franck Provost Hommes. L’assureur a également contesté la demande d’expertise judiciaire et a demandé à être indemnisé pour les frais de procédure.

Réponse de NCCM

En réponse, la société NCCM a demandé à la cour de confirmer le jugement du 14 décembre 2021, qui avait reconnu sa recevabilité et sa garantie au titre des pertes d’exploitation. NCCM a également demandé des provisions et la désignation d’un expert judiciaire pour évaluer les pertes d’exploitation subies pendant la période de fermeture.

Arguments de Gan Assurances

Gan Assurances a soutenu que les dispositions contractuelles ne couvraient pas la fermeture administrative des salons de coiffure, arguant que le centre commercial n’avait pas été fermé selon les arrêtés en vigueur. L’assureur a affirmé que la charge de la preuve incombait à NCCM pour démontrer que les conditions de garantie étaient réunies.

Arguments de NCCM

NCCM a rétorqué que l’arrêté du 15 mars 2020 avait ordonné la fermeture des centres commerciaux, ce qui avait entraîné la cessation d’activité de ses salons. Elle a soutenu que l’impossibilité d’accès aux salons justifiait la mobilisation de la garantie, indépendamment de la fermeture administrative des salons eux-mêmes.

Décision de la Cour

La cour a finalement infirmé le jugement initial en toutes ses dispositions, déboutant la société NCCM de l’ensemble de ses demandes. Elle a condamné NCCM à payer des frais irrépétibles à Gan Assurances et a précisé que les frais de greffe seraient à la charge de NCCM.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de l’appel de Gan Assurances ?

Le 13 et le 27 janvier 2022, la société Gan Assurances a interjeté appel d’une décision judiciaire. Les procédures ont été jointes le 24 février 2022, et la société a formulé ses dernières écritures le 24 juillet 2024, demandant à la cour de recevoir son appel et de le déclarer fondé.

Quelles demandes a formulées Gan Assurances ?

Gan Assurances a demandé l’infirmation du jugement qui avait déclaré la garantie mobilisable et l’avait condamnée à verser des provisions à la société NCCM. Les montants en question étaient de 12 504,40 euros pour le salon Franck Provost Femmes et de 37 271,32 euros pour le salon Franck Provost Hommes. L’assureur a également contesté la demande d’expertise judiciaire et a demandé à être indemnisé pour les frais de procédure.

Quelle a été la réponse de NCCM à Gan Assurances ?

En réponse, la société NCCM a demandé à la cour de confirmer le jugement du 14 décembre 2021, qui avait reconnu sa recevabilité et sa garantie au titre des pertes d’exploitation. NCCM a également demandé des provisions et la désignation d’un expert judiciaire pour évaluer les pertes d’exploitation subies pendant la période de fermeture.

Quels arguments a avancés Gan Assurances ?

Gan Assurances a soutenu que les dispositions contractuelles ne couvraient pas la fermeture administrative des salons de coiffure, arguant que le centre commercial n’avait pas été fermé selon les arrêtés en vigueur. L’assureur a affirmé que la charge de la preuve incombait à NCCM pour démontrer que les conditions de garantie étaient réunies.

Quels arguments a présentés NCCM en réponse ?

NCCM a rétorqué que l’arrêté du 15 mars 2020 avait ordonné la fermeture des centres commerciaux, ce qui avait entraîné la cessation d’activité de ses salons. Elle a soutenu que l’impossibilité d’accès aux salons justifiait la mobilisation de la garantie, indépendamment de la fermeture administrative des salons eux-mêmes.

Quelle a été la décision finale de la Cour ?

La cour a finalement infirmé le jugement initial en toutes ses dispositions, déboutant la société NCCM de l’ensemble de ses demandes. Elle a condamné NCCM à payer des frais irrépétibles à Gan Assurances et a précisé que les frais de greffe seraient à la charge de NCCM.

Quels motifs ont été avancés par Gan Assurances pour soutenir son appel ?

Au soutien de son appel, la société Gan Assurances explique que :

– les dispositions particulières contractuelles ont été négociées spécialement pour répondre aux besoins des sociétés du groupe Provalliance,

– l’extension de garantie ne couvre pas la fermeture administrative du salon de coiffure mais constitue une garantie spécifique attachée aux conséquences de la situation du centre commercial où se trouve le salon,

– l’assuré a la charge de prouver que les conditions de garantie sont réunies.

Comment Gan Assurances a-t-elle interprété la situation du centre commercial ?

L’assureur affirme que le centre commercial Cora [Localité 1] hébergeant les salons de coiffure n’a pas fermé ses portes à la suite de l’arrêté du 15 mars 2020, et qu’ainsi il ne peut être allégué qu’il ait fait l’objet d’une fermeture administrative.

Selon la société Gan Assurances, il importe peu que ce centre commercial ait pu ouvrir par dérogation, l’essentiel résulte dans le fait que ce centre était ouvert.

Quelles précisions a apportées Gan Assurances concernant l’accès aux salons ?

Elle précise que les arrêtés de mars 2020 ne constituent pas des fermetures administratives. La société Gan Assurances soutient que la galerie commerciale est restée accessible et qu’il était matériellement possible d’accéder aux salons. Pour l’assureur, la condition sur l’impossibilité ou les difficultés matérielles d’accès au salon n’est pas remplie.

Quel est le point de vue de NCCM sur la fermeture des centres commerciaux ?

En réponse, la société intimée rappelle que l’arrêté du 15 mars 2020 a ordonné la fermeture des centres commerciaux, et par voie de conséquence sa cessation d’activité entre le 15 mars et le 11 mai 2020.

Elle signale que le Conseil d’état a qualifié de fermeture les mesures gouvernementales touchant les établissements de restauration pendant la crise sanitaire.

Comment NCCM justifie-t-elle l’impossibilité d’accès aux salons ?

Elle affirme qu’à compter du 15 mars 2020, tous les centres commerciaux et donc les autres établissements présents dans les centres commerciaux ont eu l’obligation formelle de fermer leurs portes au public à l’exception des commerces dits ‘essentiels à la vie de la Nation’ dont notamment les hypermarchés qui pouvaient rester ouverts.

Elle indique que la notion de fermeture administrative ne saurait être restreinte à la seule fermeture administrative totale des centres commerciaux.

Quelle est la position de NCCM sur l’interprétation du contrat d’assurance ?

Elle déclare que le contrat doit s’interpréter strictement et au seul bénéfice de l’assuré. Selon elle, l’impossibilité d’accès des centres commerciaux engendrée par les mesures gouvernementales est à elle seule de nature à justifier la mobilisation de la garantie, indépendamment de toute mesure administrative visant expressément les salons de coiffure.

Quels éléments la cour a-t-elle pris en compte pour sa décision ?

Il résulte clairement de cette clause, sans qu’il ne soit besoin de l’interpréter, que la mobilisation de la garantie suppose une interruption ou réduction d’activité résultant d’une impossibilité ou de difficultés matérielles d’accès aux locaux de l’assuré faisant elles-mêmes suite à une fermeture administrative du centre commercial hébergeant de tels locaux.

La charge de la preuve de la réunion des conditions de garantie pèse sur la société assurée.

Quelles conclusions la cour a-t-elle tirées concernant la fermeture administrative ?

Ainsi la condition tenant à l’existence d’une fermeture administrative du centre commercial hébergeant la société assurée fait défaut. La discussion sur le caractère partiel de cette fermeture est inopérante puisqu’il n’y a pas de fermeture du centre.

La garantie ne peut ainsi être mobilisée.

Quel a été le résultat final pour NCCM concernant les frais ?

Succombant en appel, la société NCCM est déboutée de sa demande en frais irrépétibles et est condamnée à payer à la société Gan Assurances la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ainsi qu’aux dépens, étant par ailleurs précisé que les dispositions du jugement sur les frais de greffe sont infirmées, ceux-ci étant mis à la charge de la société intimée.

5ème Chambre

ARRÊT N°-403

N° RG 22/00204 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SMC4

(Réf 1ère instance : 2021F00109)

S.A. GAN ASSURANCES

C/

S.A.R.L. NCCM

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Octobre 2024

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 27 Novembre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

S.A. GAN ASSURANCES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège.

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Guillaume ANQUETIL de l’AARPI ANQUETIL ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

S.A.R.L. NCCM

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-Charlotte JUILLAN de la SELARL QUINTARD-PLAYE – JUILLAN, Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

Représentée par Me Pascal TRILLAT de l’ASSOCIATION TRILLAT & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Le groupe Provaillance, spécialisé dans la coiffure sous toutes ses formes et dans les activités accessoires telles que la parfumerie, les soins de beauté, la manucure ou encore la pédicure, est composé de 96 sociétés, assurées auprès de la société Gan Assurances au titre de plusieurs contrats d’assurance Multirisque des Professionnels.

Ces sociétés exploitent 145 salons de coiffure situés dans des centres commerciaux.

La société NCCM appartient au groupe Provaillance et exploite deux établissements au sein du centre commercial Cora, local n° 37 et local n° 47 à [Localité 1] sous l’enseigne Franck Provost.

Elle est assurée auprès de la société GAN Assurances, au titre de deux contrats Multirisque des Professionnels n° 061272379-l9 et n°06l 272379-20.

À la suite de l’arrêté du l5 mars 2020, complétant l’arrêté du l4 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-l9, la société NCCM s’est vue contrainte de cesser toute activité entre le l5 mars et le l l mai 2020.

La société NCCM a déclaré un sinistre auprès de la société Gan Assurances qui, par courrier du 28 août 2020, a refusé la mobilisation de la garantie sur les pertes d’exploitation de la société NCCM.

Par exploit d’huissier du 19 février 2021, la société NCCM a assigné la société Gan Assurances d’avoir à comparaître par devant le tribunal de commerce de Rennes pour demander la condamnation de ladite société à l’indemniser au titre de la garantie Pertes d’exploitation.

Par jugement en date du 14 décembre 2021, le tribunal de commerce de Rennes a :

– dit la société NCCM recevable dans sa demande,

– dit la société NCCM en demande assurée au titre de la garantie pertes d’exploitation par la société Gan Assurances,

– dit que les que les deux salons de coiffure se sont vus contraints de cesser toute activité entre le l5 mars 2020 et une date à déterminer par l’expert judiciaire,

– dit que c’est à tort que la société Gan Assurances a refusé d’accorder sa garantie pertes d’exploitation aux deux salons en demande, ceux-ci étant fermés et se trouvant dans des galeries marchandes fermées de par une décision administrative donnée par une autorité compétente,

– condamné la société Gan Assurances à verser à la société NCCM en demande une provision de :

* l2 504,40 euros pour le salon Franck Provost Femmes (local n°47) à parfaire,

* 37 271,32 euros pour le salon Franck Provost Hommes (local n° 37) à parfaire,

– désigné Mme [L] [F], en qualité d’expert judiciaire, dans l’affaire opposant la société NCCM et Gan Assurances,

– dit qu’avant d’accepter sa mission, l’expert désigné pourra consulter au greffe du tribunal les documents qui lui sont nécessaires, par application de l’article 268 du code de procédure civile,

– dit qu’en cas de refus de la mission, il sera procédé à la désignation d’un autre expert par le juge en charge du suivi du présent dossier,

– dit que l’expert aura pour mission de :

* se rendre sur les lieux, et convoquer l’ensemble des parties à une réunion contradictoire sur site si elle l’estime nécessaire,

* se faire communiquer tous documents et pièces qu’elle estimera utiles à

l’accomplissement de sa mission, entendre tout sachant, et recueillir les déclarations de toutes personnes informées ;

– examiner l’ensemble des pièces comptables transmises, et procéder à l’analyse de l’ensemble des dommages immatériels que la fermeture a engendré sur l’activité des sociétés demanderesses,

– donner son avis sur les préjudices immatériels de toute nature subis par les

sociétés demanderesses,

– chiffrer, par tous moyens, les pertes d’exploitation subies par les sociétés

demanderesses sur une période qu’elle déterminera et qui ne saurait excéder l8 mois,

– chiffrer, par tous moyens, les pertes d’exploitation partielles, subies par les

sociétés demanderesses après la réouverture de leur salon de coiffure, sur une durée qui ne saurait excéder l8 mois,

– évaluer le montant des frais supplémentaires d’exploitation pendant la période d’indemnisation,

– se faire assister de tout sapiteur de son choix,

– dit qu’elle sera mis en oeuvre et accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 255, 263 à 284-l du code de procédure civile, et qu’elle déposera l’original de son rapport au greffe avant le délai fixé, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge chargé du contrôle,

– dit qu’il en sera référé en cas de difficulté,

– dit qu’en cas de carence des parties à fournir tous moyens à l’expert d’accomplir sa mission, ce dernier informera le juge chargé du suivi du dossier, conformément aux dispositions de l’article 275 du code de procédure civile,

– fixé la provision sur honoraires de l’expert à la somme de 5 000 euros, que la société NCCM demanderesse, devra consigner au greffe de ce tribunal, dans le délai d’un mois à compter de la date de signification du jugement à la société NCCM,

– dit que l’expert devra commencer ses opérations à compter du jour où il aura reçu notification par le greffe de la consignation de la provision fixée ci-dessus, et ce, conformément à l’article 267 alinéa 2 du code de procédure civile,

– dit qu’à défaut de consignation dans le délai imparti, le juge chargé du suivi du dossier constatera la caducité de la mesure, sauf par l’une des parties à agir conformément à l’article 271 du code de procédure civile,

– dit que l’expert fera connaître à la société NCCM, demanderesse, le montant de ses frais et honoraires dans le mois suivant la première réunion,

– dit que l’expert devra déposer son rapport définitif, en deux exemplaires, au greffe du tribunal de commerce de Rennes, dans un délai de 4 mois à compter du jour de la consignation de la provision au greffe du tribunal,

– dit que dans le cas ou les parties viendraient à se concilier, elles en informeront l’expert, lequel devra constater que sa mission est devenue sans objet et en faire rapport au juge chargé du suivi du dossier, après que lesdites parties aient convenu du mode de règlement de ses honoraires et débours,

– dit que M. Jean-Paul Eyrault, juge du tribunal, aura en charge le suivi du dossier,

– autorisé les greffiers à remettre leurs dossiers aux parties ou a leurs conseils,

– dit qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile, dans l’attente du rapport définitif de l’expert judiciaire,

– réservé l’article 700 et les dépens de la présente instance,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– liquidé les frais de greffe à la somme de 69,59 euros, tels que prévu aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.

Le 13 et le 27 janvier 2022 la société Gan Assurances a interjeté appel de cette décision.

Les procédures ont été jointes le 24 février 2022.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 24 juillet 2024, la société Gan Assurances demande à la cour de :

– la recevoir en son appel, le dire bien fondé et y faisant droit,

À titre principal,

– infirmer le jugement en ce qu’il a dit que la garantie était mobilisable et l’a condamnée à verser à la société NCCM les provisions suivantes :

* 12 504,40 euros pour le salon Franck Provost Femmes (local n°47) à parfaire,

* 37 271,32 euros le salon Franck Provost Hommes (local n°37) à parfaire,

– infirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande d’expertise judiciaire,

– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté sa demande formée à l’encontre de la société NCCM de lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de la société NCCM à son encontre en réparation du prétendu dommage causé par la prétendue résistance abusive de l’assureur,

Statuant de nouveau,

– débouter la société NCCM de l’intégralité de ses demandes,

– condamner la société NCCM à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance,

– condamner la société NCCM à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

– condamner la société NCCM en tous les frais et dépens de première instance et d’appel, en application des dispositions des articles 695 et 699 du code de procédure civile,

À titre subsidiaire,

– infirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à l’intégralité des demandes de provisions de la société NCCM, sans prendre en compte les aides de l’État versées, ni les facteurs extérieurs et intérieurs au sens du contrat,

– infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas retenu que la période d’indemnisation serait limitée à la stricte période de fermeture soit 57 jours,

Statuant de nouveau,

– débouter la société NCCM de sa demande de provision à hauteur de 12 504,40 euros au titre du lot 47 et 37 271,32 euros au titre du lot 37, et subsidiairement limiter le montant de la provision à la moitié de ses demandes,

À supposer par impossible que la cour confirme la désignation d’un expert judiciaire :

– infirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande d’expertise judiciaire, avec pour mission de chiffrer les pertes d’exploitation sur une période de 18 mois,

Statuant de nouveau,

– ordonner que l’expert chiffrera les pertes d’exploitation de la société NCCM pour la période du 15 mars au 11 mai 2020, par comparaison avec le chiffre d’affaires qu’aurait réalisé le salon de coiffure durant cette période si le centre commercial lui-même n’avait pas été fermé, dans le contexte de la crise sanitaire et conformément aux clauses contractuelles, aux seuls frais avancés de la société NCCM.

Par dernières conclusions notifiées le 23 décembre 2022, la société NCCM demande à la cour de :

– confirmer le jugement du 14 décembre 2021 en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il :

* l’a dite recevable dans sa demande,

* l’a dite assurée au titre de la garantie pertes d’exploitation par la société Gan Assurances,

* a dit que c’est à tort que la société Gan Assurances a refusé d’accorder sa garantie pertes d’exploitation aux deux salons en demande, ceux-ci étant fermés et se trouvant dans des galeries marchandes fermées par une décision administrative donnée par une autorité compétente,

* a condamné la société Gan Assurances à lui verser une provision de :

° 12 504,40 euros pour le salon Franck Provost Femmes (local n° 47) à parfaire,

° 37 271,32 euros pour le salon Franck Provost Hommes (local n° 37) à parfaire,

* a désigné Mme [L] [F], en qualité d’Expert Judiciaire, dans l’affaire l’opposant à la société Gan Assurances,

* dit que l’expert aura pour mission de :

° chiffrer, par tous moyens, les pertes d’exploitation subies sur une période qu’elle déterminera et qui ne saurait excéder 18 mois,

– débouter la société Gan Assurances de l’intégralité de ses demandes,

– condamner la société Gan Assurances à lui verser la somme de 7 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Gan Assurances aux entiers dépens d’instance et d’appel.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au soutien de son appel, la société Gan Assurances explique que :

– les dispositions particulières contractuelles ont été négociées spécialement pour répondre aux besoins des sociétés du groupe Provalliance,

– l’extension de garantie ne couvre pas la fermeture administrative du salon de coiffure mais constitue une garantie spécifique attachée aux conséquences de la situation du centre commercial où se trouve le salon,

– l’assuré a la charge de prouver que les conditions de garantie sont réunies.

L’assureur affirme que le centre commercial Cora [Localité 1] hébergeant les salons de coiffure n’a pas fermé ses portes à la suite de l’arrêté du 15 mars 2020, et qu’ainsi il ne peut être allégué qu’il ait fait l’objet d’une fermeture administrative.

Selon la société Gan Assurances, il importe peu que ce centre commercial ait pu ouvrir par dérogation, l’essentiel résulte dans le fait que ce centre était ouvert.

Elle précise que les arrêtés de mars 2020 ne constituent pas des fermetures administratives.

La société Gan Assurances soutient que la galerie commerciale est restée accessible et qu’il était matériellement possible d’accéder aux salons. Pour l’assureur, la condition sur l’impossibilité ou les difficultés matérielles d’accès au salon n’est pas remplie.

Elle estime que la résiliation du contrat ne peut être assimilée à l’acquisition de la garantie.

Elle écrit que, pour les besoins du raisonnement, même dans l’hypothèse d’une fermeture du centre commercial par une autorité compétente et une impossibilité d’accès matériel aux salons de coiffure, la garantie ne peut jouer qu’à la condition de démontrer l’existence d’un lien de causalité entre la perte du chiffre d’affaires et l’impossibilité matérielle d’accès. Pour la société appelante, les salons de coiffure n’étaient pas, de toute façon, autorisés à recevoir des clients en exécution des arrêtés et décrets et ne pouvaient pas réaliser un quelconque chiffre d’affaires.

La société Gan Assurances affirme que la clause d’extension de garantie est claire et ne saurait souffrir d’aucune interprétation ou critique.

Elle conteste l’application de l’article L. 211-1 du code de la consommation telle qu’invoquée par les sociétés assurées.

La société Gan Assurances expose que :

– le tribunal a effectué une confusion entre ‘fermeture administrative du centre commercial’ et ‘interdiction d’accueil de la clientèle’,

– les centres commerciaux n’ont pas fait l’objet d’une fermeture administrative,

– le tribunal n’a pas caractérisé la condition essentielle de l’impossibilité ou difficultés matérielles d’accès,

– le tribunal a éludé la question du lien de causalité entre la perte d’exploitation et l’impossibilité ou les difficultés matérielles d’accès aux salons,

– les pertes d’exploitation des salons de coiffure résultent nullement d’une impossibilité d’accès mais résultent de l’arrêté du 15 mars 2020 leur interdisant de recevoir du public.

En réponse, la société intimée rappelle que l’arrêté du 15 mars 2020 a ordonné la fermeture des centres commerciaux, et par voie de conséquence sa cessation d’activité entre le 15 mars et le 11 mai 2020.

Elle signale que le Conseil d’état a qualifié de fermeture les mesures gouvernementales touchant les établissements de restauration pendant la crise sanitaire.

Elle affirme qu’à compter du 15 mars 2020, tous les centres commerciaux et donc les autres établissements présents dans les centres commerciaux ont eu l’obligation formelle de fermer leurs portes au public à l’exception des commerces dits ‘essentiels à la vie de la Nation’ dont notamment les hypermarchés qui pouvaient rester ouverts.

Elle indique que la notion de fermeture administrative ne saurait être restreinte à la seule fermeture administrative totale des centres commerciaux.

Elle avance que l’impossibilité d’accès n’a pas besoin d’être matérielle pour mobiliser la garantie.

Elle soutient que :

– les clients des centres commerciaux hébergeant les salons de coiffure ne pouvaient accéder aux galeries que sur présentation d’une attestation obligatoire en indiquant où ils se rendaient,

– l’accès aux galeries étaient fermés pour les clients souhaitant se rendre dans les salons de coiffure.

Elle déclare que le contrat doit s’interpréter strictement et au seul bénéfice de l’assuré.

Selon elle, l’impossibilité d’accès des centres commerciaux engendrée par les mesures gouvernementales est à elle seule de nature à justifier la mobilisation de la garantie, indépendamment de toute mesure administrative visant expressément les salons de coiffure.

Elle analyse la résiliation du contrat à compter du 1er janvier 2021 par la société Gan Assurances en une réunion des conditions de la mobilisation de la garantie.

Concernant l’interprétation de la police d’assurance, la société intimée argue de ce que ce contrat est un contrat d’adhésion rédigé par le seul assureur et qu’ainsi l’interprétation du contrat favorable à l’assuré doit être retenue.

Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Le contrat d’assurance indique, en pages 7 et 8 des conditions particulières, un article intitulé ‘EXTENSION PERTES D’EXPLOITATION SUITE A IMPOSSIBILITE D’ACCES A VOS LOCAUX stipulant : ‘PAR DEROGATION AUX DISPOSITIONS GENERALES DU PRESENT CONTRAT, LA GARANTIE PERTES D’EXPLOITATION EST ETENDUE A L’INTERRUPTION OU A LA REDUCTION DE VOTRE ACTIVITE PROFESSIONNELLE LORSQU’ELLE RESULTE D’UNE IMPOSSIBILITE OU DE DIFFICULTES MATERIELLES D’ACCES A VOTRE ETABLISSEMENT SANS DOMMAGE A CELUI-CI A LA SUITE DE :

– ‘EVENEMENTS ‘INCENDIE’, ‘EXPLOSION’ GARANTIS AU TITRE DU CONTRAT SURVENUS DANS LE VOISINAGE DE VOS LOCAUX PROFESSIONNELS OU DANS LE CENTRE COMMERCIAL HEBERGEANT VOS LOCAUX,

– EFFONDREMENT DE BATIMENTS OU DE TERRAINS SURVENUS DANS LE VOISINAGE DE VOS LOCAUX PROFESSIONNELS OU DANS LE CENTRE COMMERCIAL HEBERGEANT VOS LOCAUX,

– LA FERMETURE ADMINISTRATIVE DU CENTRE COMMERCIAL HEBERGEANT VOS LOCAUX, RESULTANT D’UNE DECISION D’UNE AUTORITE PUBLIQUE OU SANITAIRE COMPETENTE’.

Il résulte clairement de cette clause, sans qu’il ne soit besoin de l’interpréter, que la mobilisation de la garantie suppose une interruption ou réduction d’activité résultant d’une impossibilité ou de difficultés matérielles d’accès aux locaux de l’assuré faisant elles-mêmes suite à une fermeture administrative du centre commercial hébergeant de tels locaux.

La charge de la preuve de la réunion des conditions de garantie pèse sur la société assurée.

L’arrêté du 15 mars 2020 complétant l’arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19, a prévu :

‘ Art. 1-1 Afin de ralentir la propagation du virus Covid-19, les établissements relevant des catégories mentionnées à l’article GN1 de l’arrêté du 25 juin 1980 susvisé figurant ci-après ne peuvent plus accueillir du public jusqu’au 15 avril 2020 :

(…) Au titre de la catégorie M : magasins de vente et centres commerciaux, sauf pour leurs activités de livraison et de retraits de commandes ; (…)

II. Les établissements relevant de la catégorie M peuvent toutefois continuer à recevoir du public pour les activités figurant en annexe du présent arrêté (…).

Cette annexe énumère les activités suivantes :

Commerce de détails de produits surgelés

Commerce d’alimentation générale

Supérettes

Supermarchés

Magasin multi-commerces

Hypermarchés

Commerce de détail de fruits et légumes en magasin spécialisé

Commerce de détail de viandes et de produits à base de viande en magasin spécialisé

Commerce de détail de poissons, crustacés et mollusques en magasin spécialisé

Commerce de pain, pâtisserie et confiserie en magasin spécialisé

Commerce de détail de boissons en magasin spécialisé

Commerce de détail d’équipements de l’information et de la communication en magasin spécialisé

Commerce de détail d’ordinateurs, d’unités périphériques et de logiciels en magasin spécialisé

Commerce de détail de journaux et papeterie en magasin spécialisé

Commerce de détail de produits pharmaceutiques en magasin spécialisé

(…..).

Il résulte de ces dispositions que le centre commercial de [Localité 1] n’a pas fermé puisque l’accueil du public y a été autorisé, induisant ainsi un maintien de l’activité, qui est incompatible avec la notion de fermeture administrative.

Ainsi la condition tenant à l’existence d’une fermeture administrative du centre commercial hébergeant la société assurée fait défaut. La discussion sur le caractère partiel de cette fermeture est inopérante puisqu’il n’y a pas de fermeture du centre.

La garantie ne peut ainsi être mobilisée.

Au surplus, la fermeture du salon de coiffure résulte non pas de la fermeture du site hébergeur mais de l’interdiction administrative de recevoir du public.

Il convient de signaler que la clause sur l’interruption ou la réduction de l’activité résultant ‘d’une impossibilité ou de difficultés matérielles d’accès à l’établissement’ est également claire, puisque l’adjectif ‘matérielles’ concerne et l’impossibilité d’accès et les difficultés d’accès en l’absence d’une ponctuation entre les termes. Cette clause ne signifie nullement une impossibilité d’accès dans un sens plus large ou juridique.

La société intimée ne justifie d’aucune entrave matérielle totale ou partielle pour accéder à son salon de coiffure.

Enfin, l’argument sur la résiliation du contrat d’assurance est inefficace puisque la garantie n’est pas mobilisable.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter la société NCCM de l’ensemble de ses demandes.

Succombant en appel la société NCCM est déboutée de sa demande en frais irrépétibles et est condamnée à payer à la société Gan Assurances la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ainsi qu’aux dépens, étant par ailleurs précisé que les dispositions du jugement sur les frais de greffe sont infirmées, ceux-ci étant mis à la charge de la société intimée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Déboute la société NCCM de l’ensemble de ses demandes ;

Condamne la société NCCM à payer à la société Gan Assurances la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;

Condamne la société NCCM aux frais de greffe d’un montant de 190,03 euros ;

Y ajoutant,

Déboute la société NCCM de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société NCCM à payer à la société Gan Assurances la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la société NCCM aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


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