Indemnisation des préjudices suite à un accident de la circulation et aggravation de l’état de santé

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Indemnisation des préjudices suite à un accident de la circulation et aggravation de l’état de santé

L’Essentiel : Le 12 mars 1999, Monsieur [J], passager d’une motocyclette, a subi un grave accident de la circulation causé par un véhicule assuré par AREAS DOMMAGES. Il a été reconnu éligible à une indemnisation, recevant une provision de 5000F. Après une expertise médicale, son état a été jugé non consolidé, puis aggravé en 2021, avec un déficit fonctionnel permanent accru. En juin 2021, Monsieur [J] a assigné AREAS DOMMAGES pour obtenir une indemnisation, le tribunal lui accordant finalement 193.877,92 €, après évaluation des préjudices. AREAS DOMMAGES a été condamnée à verser 14.270 € à Monsieur [J].

Accident de la circulation

Le 12 mars 1999, Monsieur [L] [J], passager d’une motocyclette, a été impliqué dans un accident de la circulation causé par un véhicule assuré par la société AREAS-CMA, devenue AREAS DOMMAGES. À la suite de cet accident, Monsieur [J] a subi de graves blessures, notamment un traumatisme crânien, des fractures cervicales et thoraciques, ainsi qu’une contusion pulmonaire.

Indemnisation initiale et expertise médicale

Monsieur [J] a été reconnu éligible à une indemnisation selon la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, recevant une provision amiable de 5000F. Une expertise médicale a été réalisée, concluant à une non-consolidation initiale, suivie d’un rapport définitif en 2001 indiquant une consolidation et un déficit fonctionnel permanent de 12 %.

Demande d’aggravation de l’état

Invoquant une aggravation de son état, Monsieur [J] a assigné AREAS DOMMAGES devant le tribunal de Bordeaux pour obtenir une nouvelle expertise. En janvier 2021, un rapport a confirmé une aggravation de son état, avec une consolidation au 8 octobre 2018 et un déficit fonctionnel permanent accru de 5 %.

Procédure judiciaire et demandes d’indemnisation

En juin 2021, Monsieur [J] et Madame [Z] ont assigné AREAS DOMMAGES, la CPAM de la Gironde et la Mutuelle MIEUX-ETRE pour obtenir une indemnisation pour les préjudices subis. En juillet 2023, le tribunal a déclaré la demande pour le préjudice initial prescrite, mais a jugé recevables celles concernant l’aggravation, condamnant AREAS DOMMAGES à verser une provision de 10 000 €.

Prétentions de Monsieur [J]

Monsieur [J] a demandé une indemnisation totale de 352.686,92 €, décomposée en plusieurs postes, incluant des pertes de gains professionnels et des frais médicaux. Il a également sollicité une expertise complémentaire pour établir le lien entre son invalidité et l’accident.

Réponse d’AREAS DOMMAGES

AREAS DOMMAGES a proposé une indemnisation de 24.270 €, après déduction de la provision versée et des rentes. La compagnie a contesté les demandes de Monsieur [J], arguant que son état n’était pas imputable à l’accident.

Évaluation des préjudices

Le tribunal a évalué les préjudices de Monsieur [J], tenant compte des rapports d’expertise. Les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux ont été examinés, avec des montants alloués pour les dépenses de santé, les pertes de gains professionnels et les souffrances endurées.

Décision du tribunal

Le tribunal a reconnu le droit à indemnisation de Monsieur [J] et a fixé le montant total de son préjudice à 193.877,92 €, après imputation des créances des tiers payeurs. AREAS DOMMAGES a été condamnée à verser 14.270 € à Monsieur [J], avec intérêts légaux, et à payer les dépens de l’instance. La demande de Madame [Z] a été rejetée.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique du droit à indemnisation de Monsieur [J] ?

Le droit à indemnisation de Monsieur [J] repose sur la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, qui régit l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation.

Cette loi stipule que toute victime d’un accident de la circulation a droit à une indemnisation pour les préjudices subis, qu’ils soient matériels ou corporels.

L’article 1 de cette loi précise que « les victimes d’accidents de la circulation, qu’elles soient conducteurs, passagers ou piétons, ont droit à une réparation intégrale de leur préjudice ».

Dans le cas de Monsieur [J], son droit à indemnisation n’est pas contesté, ce qui signifie que la responsabilité de l’assureur, en l’occurrence AREAS DOMMAGES, est engagée.

Comment se décompose l’indemnisation demandée par Monsieur [J] ?

Monsieur [J] a demandé une indemnisation totale de 352.686,92 €, se décomposant en plusieurs postes de préjudice.

Les préjudices patrimoniaux incluent les dépenses de santé actuelles (DSA), les pertes de gains professionnels actuels (PGPA), les dépenses de santé futures (DSF), la perte de gains professionnels futurs (PGPF) et l’incidence professionnelle (IP).

Les préjudices extra-patrimoniaux comprennent le déficit fonctionnel temporaire (DFT) et les souffrances endurées (SE).

L’article 2 de la loi du 5 juillet 1985 précise que « l’indemnisation doit couvrir l’ensemble des préjudices subis par la victime, qu’ils soient économiques ou non économiques ».

Ainsi, chaque poste de préjudice est évalué en fonction des rapports d’expertise médicale et des frais engagés par la victime.

Quelles sont les conséquences de la prescription sur la demande d’indemnisation ?

La prescription est un élément crucial dans le cadre de l’indemnisation des préjudices. Selon l’article 2226 du Code civil, « l’action en réparation d’un dommage corporel se prescrit par dix ans à compter de la date de l’accident ».

Dans le cas de Monsieur [J], le juge a déclaré prescrite la demande concernant le préjudice initial, ce qui signifie qu’il ne peut plus revendiquer d’indemnisation pour les préjudices subis avant une certaine date.

Cependant, les demandes relatives à l’aggravation de son état, survenues après la consolidation, restent recevables.

Cela souligne l’importance de respecter les délais de prescription pour garantir le droit à indemnisation.

Quels sont les critères d’évaluation des préjudices corporels ?

L’évaluation des préjudices corporels repose sur plusieurs critères, notamment la gravité des blessures, les séquelles permanentes et l’impact sur la qualité de vie de la victime.

L’article 1 de la loi du 5 juillet 1985 stipule que « l’indemnisation doit être intégrale et tenir compte de l’ensemble des préjudices subis ».

Les experts médicaux jouent un rôle clé dans cette évaluation, en déterminant le taux de déficit fonctionnel permanent (DFP) et en identifiant les besoins futurs en soins.

Dans le cas de Monsieur [J], l’expert a évalué un DFP de 12 % initialement, puis a constaté une aggravation de 5 % lors d’une expertise ultérieure.

Ces évaluations sont essentielles pour déterminer le montant de l’indemnisation.

Comment se déroule la procédure d’indemnisation devant le tribunal ?

La procédure d’indemnisation devant le tribunal suit plusieurs étapes, notamment l’assignation des parties, la désignation d’experts et la présentation des conclusions.

Selon l’article 455 du Code de procédure civile, « les parties doivent exposer clairement leurs prétentions et moyens ».

Monsieur [J] a assigné AREAS DOMMAGES et d’autres parties devant le tribunal judiciaire, demandant une expertise complémentaire et l’indemnisation de ses préjudices.

Le tribunal a ensuite ordonné une expertise médicale pour évaluer l’aggravation de son état.

Enfin, le jugement a été rendu, fixant le montant de l’indemnisation et les modalités de paiement, conformément aux dispositions légales applicables.

Cette procédure garantit que les droits de la victime sont respectés et que l’indemnisation est calculée de manière équitable.

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 20 Janvier 2025
60A

RG n° N° RG 21/05034 – N° Portalis DBX6-W-B7F-VTVK

Minute n°

AFFAIRE :

[L] [J], [H] [Z]
C/
Compagnie d’assurance AREAS DOMMAGES, CPAM de la Gironde, MUTUELLE MIEUX ETRE

Grosse Délivrée
le :
à Avocats : la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE
la SELARL BIROT – RAVAUT ET ASSOCIES

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats en juge rapporteur :

Madame Marie-Sylvie LHOMER, magistrat à titre temporaire,

Lors du délibéré et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, Vice-Président, Magistrat rédacteur,
Madame Fanny CALES, juge,
Madame Marie-Sylvie LHOMER, magistrat à titre temporaire,

greffier présente lors des débats et de la mise à disposition :: Madame Elisabeth LAPORTE,

DEBATS:

A l’audience publique du 18 Novembre 2024,

JUGEMENT:

Réputé contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDEURS

Monsieur [L] [J]
né le 30 Juin 1970 à Bordeaux
de nationalité Française
292 avenue Pasteur
33185 Le Haillan

représenté par Maître Pierre RAVAUT de la SELARL BIROT – RAVAUT ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

Madame [H] [Z]
née le 12 Septembre 1979 à Montauban
de nationalité Française
292 avenue Pasteur
33185 Le Haillan

représentée par Maître Pierre RAVAUT de la SELARL BIROT – RAVAUT ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSES

Compagnie d’assurance AREAS DOMMAGES prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
47/49 rue de Miromesnil
75380 PARIS CEDEX 08

représentée par Maître Bénédicte DE BOUSSAC DI PACE de la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE, avocats au barreau de BORDEAUX

CPAM de la Gironde prise en la personne de son directeur en exercice domicilié es qualités audit siège
Place de l’Europe
33085 Bordeaux

défaillante

MUTUELLE MIEUX ETRE prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
171 avenue Ledru ROLLIN
75544 Paris

défaillante

FAITS ET PROCÉDURE

Le 12 mars 1999, Monsieur [L] [J], passager assis sur la motocyclette conduite par son employeur, a été victime d’un accident de la circulation, après avoir été percuté par un véhicule assuré auprès de la société AREAS-CMA devenue AREAS DOMMAGES.

Suite à cet accident, Monsieur [J], alors âgé de 28 ans, présentait notamment, d’aprés les constatations initiales :
un traumatisme crânien avec perte de connaissance initiale, un traumatisme du rachis cervical avec fracture de l’arc latéral C3une entorse bénigne, un traumatisme thoracique avec fracture de 7ème, 8ème et 9ème côtes gauche, une contusion pulmonaire gauche, une fracture de la clavicule gauche. Le droit à indemnisation de Monsieur [J] sur le fondement de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 n’est pas contesté de sorte qu’il a perçu une provision amiable à hauteur de 5000F, et qu’une expertise médicale a été organisée par AREAS DOMMAGES, la mission étant confiée au docteur [E]. Un premier rapport a conclu à une non consolidation puis le rapport définitif a été remis le 6 octobre 2001 concluant à une consolidation au 31 octobre 2000 et à un déficit fonctionnel permanent de 12 %.

Monsieur [J], invoquant une aggravation de son état, a fait assigner la compagnie AREAS DOMMAGES devant le tribunal judicaire de BORDEAUX statuant en référé aux fins d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire et par ordonnance du 23 décembre 2019, le juge des référés a ordonné une expertise médicale de Monsieur [J], confiée au docteur [V].
Le 5 janvier 2021, l’expert a rendu son rapport définitif concluant à une aggravation de l’état de la victime, avec une consolidation au 8 octobre 2018 et un taux de déficit fonctionnel permanent en aggravation de 5 %.

Par actes d’huissier des 2, 15 et 24 juin 2021, Monsieur [J] et Madame [Z] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de BORDEAUX la compagnie AREAS DOMMAGES, la CPAM de la Gironde et la Mutuelle MIEUX-ETRE, aux fins d’obtenir l’indemnisation des préjudices subis dans les suites de l’accident du 12 mars 1999, tant au titre du préjudice initial, qu’au titre de l’aggravation constatée.
Par ordonnance en date du 12 juillet 2023, la demande concernant le préjudice initial a été déclarée prescrite par le juge de la mise en état, celles au titre de l’aggravation étant recevables.
La compagnie AREAS DOMMAGES était condamnée à verser une provision à valoir sur l’aggravation de 10 000€.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 septembre 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 18 novembre 2024 au cours de laquelle elle a été retenue, puis mise en délibéré au 20 janvier 2025, par mise à disposition au greffe.

La CPAM et la Mutuelle MIEUX-ETRE n’ont pas constitué avocat. Il sera statué par jugement réputé contradictoire

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses conclusions responsives notifiées par voie électronique le 11 septembre 2021, Monsieur [J] demande au tribunal, aux visas de la loi du 5 juillet 1985, de :
– FIXER l’indemnisation du préjudice en aggravation subi par Monsieur [L] [J] dans les suites de l’accident du 12 mars 1999 à la somme de 352.686,92 €, se décomposant comme suit :

Préjudice
Montant
Créance CPAM
Solde victime
DSA et DSF
0 €
149.607,92 €
0 €
PGPF
287.975 €
89.915 €
198.060 €
DFT
3.370,00 €

3.370,00 €
SE
3.000,00 €

3.000,00 €
DFP
7.900,00 €

7.900,00 €
IP
100.000,00 €

100.000,00 €
TOTAL
402.245 €
239.522,92 €
312.330,00 €

– CONDAMNER la société AREAS DOMMAGES à payer à Monsieur [L] [J] la somme de 312.330 € au titre de l’indemnisation de son préjudice en aggravation, assortie des intérêts au taux légal à compter de la signification de l’assignation.
– ORDONNER la capitalisation des intérêts
A titre subsidiaire,
– ORDONNER une mesure d’expertise complémentaire confiée à tel expert qu’il plaira avec pour mission :
Se prononcer sur le lien de causalité entre le placement de Monsieur [J] en invalidité catégorie 2 et l’aggravation de son état de santé en lien avec l’accident de la circulation du 12 mars 1999
– CONDAMNER la société AREAS à payer à Madame [H] [Z] la somme de 10.000 euros.
– CONDAMNER la société AREAS DOMMAGES à payer à Monsieur [L] [J] une indemnité de 3.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– CONDAMNER la société AREAS DOMMAGES aux entiers dépens, dont distraction au bénéfice de la SELARL BIROT-RAVAUT ET ASSOCIES par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 9 juillet 2024, AREAS DOMMAGES demande au tribunal, aux visas des articles 2226 du du code civil, L 211-9 et L 211-13 du Code des assurances et de la loi du 5 juillet 1985, de :
– HOMOLOGUER l’offre d’AREAS DOMMAGES de verser à Monsieur [L] [J] la somme de 24.270 €, soit 4.270 € après déduction de la provision versée de 10.000 € et imputation de la rente AT versée par la CPAM DE LA GIRONDE d’un montant de 95.392,77 €,
– RAMENER à de plus justes proportions l’indemnité sollicitée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et statuer ce que de droit sur les dépens
– DEBOUTER Madame [H] [Z] de ses demandes;

La CPAM de la GIRONDE, régulièrement assignée, en application des dispositions des articles 656 et 658 du code de procédure civile, n’a pas constitué avocat mais a communiqué le montant des prestations versées.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures devant le tribunal ci-dessus évoquées, auxquelles il est expressément renvoyé pour répondre aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le droit à indemnisation de Monsieur [J]

Il convient de constater que le droit à indemnisation de Monsieur [J], en application de la loi du 5 juillet 1985, consécutif à l’accident de la circulation survenu le 12 mars 1999 , impliquant le véhicule assuré auprès de la compagnie AREAS DOMMAGES n’est pas contesté.

Sur la liquidation du préjudice corporel de Monsieur [J]

A la suite de l’accident du 12 mars 1999, Monsieur [J] a présenté diverses blessures et en a conservé des séquelles au niveau du rachis cervical et du membre supérieur gauche. L’expert évalué le DFP initial à 12%. Le déficit fonctionnel permanent au titre de l’aggravation est évalué par l’expert à 5%.
Il convient de liquider les préjudices d’aggravation de Monsieur [J] au regard des rapports d’expertise médicale du docteur [V] qui constitue une base valable d’évaluation du préjudice corporel subi.
Monsieur [J] limite désormais ses demandes aux seuls préjudices résultant de l’aggravation.

I- Préjudices patrimoniaux deMonsieur [J]

A/ Pour la période antérieure à la consolidation

1° Dépenses de santé actuelles (D.S.A.)

Les dépenses de santé sont les frais médicaux et pharmaceutiques, non seulement les frais restés à la charge effective de la victime, mais aussi les frais payés par des tiers, les frais d’hospitalisation et tous les frais paramédicaux.

Monsieur [J] ne fait état d’aucune dépense demeurée à sa charge.

Suivant décompte des débours définitifs établi par la CPAM de la Gironde, le 23 décembre 2022, les frais médicaux et pharmaceutiques engagés au bénéfice de Monsieur [J], consécutifs à l’aggravation de son état s’élèvent à la somme totale de 744,03€.
Ce poste de préjudice s’élève donc à la somme de 744,03€ .

2° Pertes de gains professionnels actuels (P.G.P.A.)

Les préjudices professionnels qui résultent de la durée de l’incapacité temporaire se situant entre la date du dommage et la date de la consolidation sont les préjudices économiques correspondant aux revenus dont la victime a été privée ou au retard occasionné pendant la période d’études.
Il convient de déduire des revenus dont la victime a été privée pendant l’indisponibilité professionnelle temporaire, le montant des indemnités journalières versées par son organisme de sécurité sociale comme celui du salaire maintenu par son employeur.
L’indemnisation est en principe égale au coût économique du dommage pour la victime. Elle se calcule donc en “net” et hors incidence fiscale.

Monsieur [J] ne fait état d’aucun préjudice au titre de la perte de gains professionnels actuels.

B/ Pour la période postérieure à la consolidation

1° Dépenses de santé futures (D.S.F.)

Il s’agit les frais médicaux et pharmaceutiques, non seulement les frais restés à la charge effective de la victime, mais aussi les frais payés par des tiers, les frais d’hospitalisation, et tous les frais paramédicaux, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l’état pathologique de la victime après la consolidation.

L’expert judiciaire a retenu la nécessité d’un traitement morphinique et de soins futurs en addictologie pour un sevrage du traitement morphinique ainsi que la poursuite d’un traitement antalgique.

Le décompte de la CPAM mentionne au titre des frais futurs de santé la somme de 148 863,89€.
Ces frais futurs sont en lien avec l’aggravation au regard des conclusions des experts rappelées.

Monsieur [J] ne formule aucune demande à ce titre. AREAS DOMMAGES ne formule aucune observation.

En conséquence, les frais futurs seront évalués à 148 863,89 €.

3° Perte de Gains Professionnels Futurs (P.G.P.F) et Incidence Professionnelle (I.P.)

La perte de gains professionnels futurs a pour objet d’indemniser les conséquences patrimoniales de l’invalidité auxquelles la victime est confrontée dans sa sphère professionnelle à la suite du dommage, du fait des séquelles conservées, résultant de la perte ou du changement d’emploi, dont le lien direct et certain avec le fait dommageable doit être établi.
L’incidence professionnelle a pour objet d’indemniser les incidences périphériques du dommage qui limitent, après la consolidation, les possibilités professionnelles ou rendent l’activité antérieure plus fatigante ou pénible, fragilisant ainsi la permanence de l’emploi, voire rendent son exercice de moindre intérêt, traduisant une certaine dévalorisation sur le marché du travail. L’incidence professionnelle suppose une appréciation in concreto au regard de la nature et de l’ampleur des séquelles, de l’emploi précédemment exercé par la victime et de son âge.

Monsieur [J] estime subir une perte de gains professionnels depuis son licenciement, et sollicite à ce titre le versement de la somme de 287 975€ au titre des arrérages échus et à échoir, soit, aprés déduction de la rente versée par la CPAM, la somme de 198 060€.
Il expose que du fait des séquelles subies, il a été licencié de son poste en mars 2021, qu’il a été placé en invalidité catégorie 2 au 1er janvier 2022, et que dans l’impossibilité de reprendre, il a cessé toute activité professionnelle au mois de février 2022.
Subsidiairement, il demande d’organiser une expertise complémentaire en vue de se prononcer sur le lien de causalité entre son placement en invalidité catégorie 2 et l’aggravation de son état de santé du fait de l’accident du 12 mars 1999.
AREAS DOMMAGES sollicite le rejet de cette demande au titre de la perte de gains professionnels futurs retenant que le classement en invalidité de 2nde catégorie de Monsieur [J] n’est pas imputable à l’accident du 12 mars 1999, et que celui-ci reste en capacité d’exercer une activité professionnelle.

Par ailleurs, Monsieur [J] évalue l’indemnisation de l’incidence professionnelle à hauteur de 100 000 € eu égard à une dévalorisation sur le plan professionnel et social résultant de la dépression induite par son état.
Sur ce point, AREAS DOMMAGES demande d’homologuer l’offre formulée à hauteur de
100 00 € avec imputation de la rente AT.

Le rapport d’expertise médicale du Docteur [V], ne relève, au titre d’incidence du nouveau déficit fonctionnel permanent de 5 % correspondant à la majoration des douleurs neuropathiques, comme conséquences professionnelles, qu”une “majoration de la gêne douloureuse et de la fatigabilité”. Monsieur [J], qui indique avoir été licencié de son poste de plombier le 11 mars 2021, ne produit ni sa lettre de licenciement, ni d’avis du médecin du travail concluant à une inaptitude au poste. Il produit en revanche un rapport médical de révision d’invalidité à l’initiative de la caisse au mois de janvier 2022 qui émet 1 avis favorable à la révision en pension d’invalidité groupe 2 à compter du mois de janvier 2022 pour “dépression sévère”. Ce rapport fait état au titre des diagnostics “d’épisodes dépressifs” et conclut à “une dépression sévère, une aggravation clinique et une perte totale de capacité”. Il mentionne comme situation actuelle “ouvrier dans une usine : fait de la maintenance chez Ariane”.

Il ressort par ailleurs du rapport d’expertise médicale du 26 février 2001 que Monsieur [J] présentait un état antérieur au titre d’un important accident de la voie publique du 1er juillet 1990 avec traumatisme craniofacial grave et de multiples fractures de la face, accident à l’origine de 25 interventions sous anesthésie générale.

Au vu de ces documents, l’imputabilité de l’évolution professionnelle de Monsieur [J] à “la majoration des douleurs neuropathiques au niveau du membre supérieur gauche”n’est pas établie. Il n’y a pas lieu d’ordonner une nouvelle expertise médicale, le rapport d’expertise du Docteur [V], qui répond aux dires des parties, étant suffisamment complet et motivé, sans contradiction avec les pièces produites.

Dès lors, aucune perte de revenus futurs ne peut être imputée à l’aggravation de l’accident de 1999. En revanche, la majoration de la gêne douloureuse et de la fatigabilité en lien avec le déficit fonctionnel permanent additionnel de 5 % retenu au titre de la majoration des douleurs neuropathiques du membre supérieur gauche est à l’origine, comme soutenu, d’une pénibilité majorée et d’une “dévalorisation sur le plan professionnel et social”.
Dans ces circonstances, il convient d’allouer à Monsieur [J], âgé de 48 ans au moment de la consolidation, une somme de 30 000 € au titre de l’incidence professionnelle.

Sur cette somme s’impute la créance de la CPAM au titre de la rente accident du travail qui est d’un montant nettement supérieur (12 925 € au titre des arrérages échus et 82 466 € au titre du capital représentatif de la rente à échoir)

II- Préjudices extra-patrimoniaux deMonsieur [J]

A/ Pour la période antérieure à la consolidation

1° Déficit fonctionnel temporaire (D.F.T.)

Ce poste de préjudice indemnise l’aspect non économique de l’incapacité temporaire, c’est-à-dire l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subit la victime jusqu’à sa consolidation. Ce préjudice correspond à la gêne dans tous les actes de la vie courante que rencontre la victime pendant sa maladie traumatique et à la privation temporaire de sa qualité de vie.

Monsieur [J] demande la somme globale de 3 370 € en réparation des troubles subis dans ses conditions d’existence au cours de la période antérieure à la consolidation, sur la base de 25 € par jour au titre d’un déficit fonctionnel temporaire total.

AREAS DOMMAGES ne s’oppose pas à la demande et accepte d’indemniser Monsieur [J] à hauteur de cette somme.

Au vu de cet accord, il sera alloué la somme de 3 370 €.

2° Souffrances endurées (S.E.)

Il s’agit d’indemniser les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, à sa dignité et à son intimité et des traitements, interventions, hospitalisations qu’elle a subis depuis l’accident jusqu’à la consolidation.

Monsieur [J] sollicite la somme de 3 000 € compte tenu des souffrances physiques et morales subies durant la période antérieure à la consolidation sur la base de l’évaluation faite par l’expert à hauteur de 2,5/7.
AREAS DOMMAGES ne s’oppose pas à la demande et accepte d’indemniser Monsieur [J] à hauteur de cette somme.

Au vu de cet accord, il sera alloué la somme de 3 000 €.

B/ Pour la période postérieure à la consolidation

1° Déficit Fonctionnel Permanent (D.F.P.)

Ce préjudice a pour composante les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, les douleurs qui persistent depuis la consolidation, la perte de la qualité de la vie et les troubles définitifs apportés à ces conditions d’existence. Plus précisément, il s’agit du préjudice non économique lié à la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique médicalement constatable, à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liées à l’atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours.

Monsieur [J] sollicite le paiement de la somme de 7 900 € au titre de ce poste de préjudice, sur la base d’une valeur du point estimée à 1 580 € au taux de déficit fonctionnel permanent chiffré à 5 % par l’expert.
AREAS DOMMAGES accepte la demande à hauteur de cette somme.

Au vu de cet accord, il sera alloué la somme de 7 900 €.

Dès lors, les divers postes de préjudices seront récapitulés comme suit :

Evaluation du préjudice
Créance victime
Créance CPAM
PREJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

-DSA dépenses de santé actuelles
744,03 €
0,00 €
744,03 €
-PGPA perte de gains actuels
0,00 €
0,00 €
0
permanents

– DSF dépenses de santé futures
148 863,89 €

148 863,89 €
– PGPF perte de gains professionnels futurs
0,00 €

– IP incidence professionnelle
30 000,00 €

30 000,00 €
PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

temporaires

– DFTT déficit fonctionnel temporaire
3 370,00 €
3 370,00 €

– SE souffrances endurées
3 000,00 €
3 000,00 €

permanents

– DFP déficit fonctionnel permanent
7 900,00 €
7 900,00 €

– TOTAL
193 877,92 €
14 270,00 €
179 607,92 €

Sur l’imputation de la créance des organismes sociaux

Il convient de rappeler qu’en vertu des principes posés par les articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale et 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 modifiée par l’article 25 III et IV de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 :
– les recours subrogatoires des caisses et tiers payeurs contre les tiers responsables s’exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel,
– conformément à l’article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l’indemnisation, lorsqu’elle n’a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; qu’en ce cas, l’assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, pour ce qui lui reste dû, par préférence à la caisse subrogée,
– cependant, si le tiers payeur établit qu’il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s’exercer sur ce poste de préjudice.

En l’espèce, les prestations en nature, prises en charge à hauteur de 7 44,03 € par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Gironde s’imputent sur le poste de dépenses de santé actuelles.

Les prestations en espèces versées par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de la Gironde à hauteur de 148 863,89 € s’imputent sur le poste de pertes de gains professionnels actuels et la rente accident du travail (12 925 € au titre des arrérages échus et 82 466 € au titre du capital représentatif de la rente à échoir) s’impute sur l’incidence professionnelle.

En définitive, après imputation des créances des tiers payeurs, et en l’absence de justificatif des sommes effectivement versée par la SA AREAS DOMMAGES, Monsieur [J] recevra, en deniers et quittances, la somme de 14270€ en réparation de son préjudice corporel, consécutif à l’aggravation des séquelles de l’accident survenu le 12 mars 1999 , la répartition des sommes s’établissant comme précisée au sein du dispositif du présent jugement.

Sur le préjudice de Madame [Z] au titre des troubles dans les conditions d’existence :
Il s’agit du préjudice moral subi par certains proches, parents ou non, mais justifiant d’un lien affectif réel, au contact de la souffrance de la victime directe.

En l’espèce, bien que cela soit soulevé en défense, Madame [Z] ne justifie pas de son lien avec Monsieur [J] et d’une communauté de vie. Dans ces circonstances, sa demande au titre des troubles dans les conditions d’existence par ricochet ne pourra pas être accueillie.

Sur les autres demandes

Sur les intérêts légaux

Conformément à l’article 1231-7 du code civil, les indemnités allouées porteront intérêts au taux légal à compter du présent jugement, avec application des dispositions de l’article 1343-2 du même code pour l’avenir selon les conditions légales définies par ce texte.

Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Succombant à la procédure, AREAS DOMMAGES sera condamnée aux dépens dont distraction au profit de la SELARL BIROT-RAVAUT et ASSOCIES par application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Sur les frais irrépétibles
D’autre part, il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [J] les frais non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de condamner AREAS DOMMAGES à une indemnité en sa faveur au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, après en avoir délibéré, statuant par mise à disposition au Greffe, les parties préalablement avisées conformément à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONSTATE que le droit à indemnisation de Monsieur [L] [J], en application de la loi du 5 juillet 1985, consécutif à l’accident de la circulation survenu le 12 mars 1999 , impliquant le véhicule assuré auprès de la SA AREAS DOMMAGES n’est pas contesté ;

FIXE le préjudice corporel de Monsieur [L] [J] en lien avec l’aggravation de son état à compter du 3 décembre 2016 avec consolidation au 8 octobre 2018 à la somme de 193 877,92 euros, décomposée comme suit :

Evaluation du préjudice
Créance victime
Créance CPAM
PREJUDICES PATRIMONIAUX

temporaires

-DSA dépenses de santé actuelles
744,03 €
0,00 €
744,03 €
-PGPA perte de gains actuels
0,00 €
0,00 €
0
permanents

– DSF dépenses de santé futures
148 863,89 €

148 863,89 €
– PGPF perte de gains professionnels futurs
0,00 €

– IP incidence professionnelle
30 000,00 €

30 000,00 €
PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

temporaires

– DFTT déficit fonctionnel temporaire
3 370,00 €
3 370,00 €

– SE souffrances endurées
3 000,00 €
3 000,00 €

permanents

– DFP déficit fonctionnel permanent
7 900,00 €
7 900,00 €

– TOTAL
193 877,92 €
14 270,00 €
179 607,92 €

CONDAMNE la SA AREAS DOMMAGES à payer à Monsieur [L] [J] la somme de 14 270 €, après imputation de la créance des tiers payeurs, en deniers ou quittances, en réparation de son préjudice corporel, consécutif à l’accident survenu le 12 mars 1999, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ET DIT que ces intérêts porteront anatocisme dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil ;

REJETTE la demande formée par Madame [H] [Z] ;

CONDAMNE AREAS DOMMAGES aux dépens de l’instance dont distraction au profit de la SELARL BIROT-RAVAUT et ASSOCIES par application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

CONDAMNE AREAS DOMMAGES, à payer à Monsieur [L] [J] la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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