L’Essentiel : Le 5 décembre 2019, Monsieur [U] [B] est victime d’un accident de la circulation, entraînant des blessures graves, dont un traumatisme crânien. Hospitalisé, il subit une évacuation neurochirurgicale. Contestant l’indemnisation proposée par AXA France IARD, il engage une procédure judiciaire. Le tribunal, reconnaissant le droit à indemnisation selon la loi Badinter, évalue les préjudices et fixe le montant total à 27.567,14 €, après déduction d’une provision. AXA est condamnée aux dépens et à verser 2.000 € pour les frais non compris. Le jugement est exécutoire de plein droit.
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Exposé du litigeLe 5 décembre 2019, Monsieur [U] [B], passager d’un véhicule, est impliqué dans un accident de la circulation. Il subit plusieurs blessures, dont un traumatisme crânien et des côtes fracturées, et est hospitalisé pour des soins médicaux. Exposé des faits et de la procédureAprès l’accident, Monsieur [B] est pris en charge par les services d’urgence et subit des examens médicaux. Un scanner révèle des hématomes sous-duraux, entraînant une hospitalisation pour évacuation neurochirurgicale. Les assureurs sont informés, et une expertise médicale est réalisée. Monsieur [B] conteste l’offre d’indemnisation qui lui est faite, entraînant une procédure judiciaire. Prétentions et moyens des partiesMonsieur [B] demande au tribunal de reconnaître ses demandes comme recevables et de lui accorder une indemnisation totale de 39.045,08 € pour divers préjudices. En revanche, la société AXA France IARD conteste les demandes de Monsieur [B] et propose des indemnités inférieures, tout en soulignant l’existence d’antécédents médicaux chez la victime. Motifs de la décisionLe tribunal constate que l’accident est couvert par la loi Badinter, et que Monsieur [B] a droit à une indemnisation. Les préjudices sont évalués en tenant compte des expertises médicales, et le tribunal fixe les montants dus à Monsieur [B] pour ses préjudices temporaires et permanents. Indemnisation des préjudicesLe tribunal alloue des sommes spécifiques pour les dépenses de santé, les frais divers, le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées, et les préjudices esthétiques. Au total, l’indemnisation s’élève à 27.567,14 € après déduction d’une provision déjà versée. Déclaration de jugement communLe tribunal déclare le jugement commun à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Meurthe-et-Moselle, en raison de l’implication de cet organisme dans le litige. Frais du procès et exécution provisoireLa société AXA France IARD est condamnée aux dépens et doit également verser 2.000 € à Monsieur [B] pour les frais non compris dans les dépens. Le jugement est exécutoire de plein droit, sans condition. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le cadre juridique applicable à l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation ?La loi du 5 juillet 1985, également connue sous le nom de loi Badinter, est le texte fondamental qui régit l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation. L’article 1er de cette loi stipule que : « Les dispositions de la présente loi sont applicables aux accidents de la circulation dans lesquels sont impliqués un ou plusieurs véhicules terrestres à moteur. » Dans le cas présent, l’accident survenu le 5 décembre 2019 impliquait un véhicule terrestre à moteur, ce qui fait que les dispositions de la loi Badinter s’appliquent. Il est établi que la société AXA France IARD, assureur du véhicule responsable, ne conteste pas le principe même du droit à indemnisation de Monsieur [B]. Ainsi, la société AXA France IARD est tenue de réparer les conséquences dommageables subies par Monsieur [B] résultant de cet accident. Comment sont évalués les préjudices subis par la victime ?L’évaluation des préjudices subis par la victime est effectuée en tenant compte des conclusions des rapports d’expertise médicale. L’article 246 du code de procédure civile précise que : « Le juge n’est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien. Il peut évaluer un préjudice en fonction de tous documents versés au dossier, en ce compris une expertise non contradictoire soumise à la discussion et corroborée par d’autres éléments probants. » Dans cette affaire, les préjudices ont été évalués sur la base des rapports d’expertise du Docteur [L] et du Docteur [V]. Le tribunal a pris en compte les souffrances endurées, le déficit fonctionnel temporaire et permanent, ainsi que les préjudices esthétiques, en se basant sur les éléments médicaux et les circonstances de l’accident. Quels sont les critères d’indemnisation des préjudices corporels ?Les critères d’indemnisation des préjudices corporels sont définis par la jurisprudence et les barèmes d’indemnisation. L’article 31 de la loi du 5 juillet 1985 stipule que : « Le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel. » Les préjudices peuvent être classés en préjudices patrimoniaux (dépenses de santé, frais divers) et préjudices extra-patrimoniaux (souffrances endurées, déficit fonctionnel). Dans le cas de Monsieur [B], les préjudices ont été évalués en tenant compte de la gravité des blessures, de l’impact sur sa qualité de vie et des éléments médicaux fournis par les experts. Quelle est la procédure à suivre pour obtenir une indemnisation ?La procédure pour obtenir une indemnisation commence par la déclaration de l’accident à l’assureur. L’article 473 du code de procédure civile précise que : « La présente décision est réputée contradictoire. » Monsieur [B] a assigné la société AXA France IARD et la CPAM devant le tribunal judiciaire, ce qui a permis d’initier la procédure d’indemnisation. Il est essentiel que la victime constitue avocat et présente ses demandes de manière claire et documentée, comme cela a été fait dans le cas présent. Le tribunal a ensuite examiné les demandes et les arguments des parties avant de rendre sa décision. Quelles sont les conséquences de l’absence de comparution d’une partie ?L’absence de comparution d’une partie n’empêche pas le tribunal de statuer sur le fond. L’article 472 du code de procédure civile indique que : « Si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond. » Dans cette affaire, bien que la CPAM n’ait pas constitué avocat, le tribunal a pu examiner les demandes de Monsieur [B] et rendre une décision sur la base des éléments fournis. Cela souligne l’importance de la régularité des actes de procédure et de la capacité du tribunal à statuer même en l’absence d’une partie. Ainsi, la décision a été rendue en tenant compte des éléments présentés par Monsieur [B] et de la position de l’assureur. |
JUGEMENT DU : 10 Janvier 2025
DOSSIER N° : N° RG 22/03142 – N° Portalis DBZE-W-B7G-IL4Q
AFFAIRE : Monsieur [U] [B] C/ Organisme CPAM de MEURTHE ET MOSELLE, S.A. AXA FRANCE IARD
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANCY
POLE CIVIL section 5
JUGEMENT
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRESIDENT : Madame Mathilde BARCAT,
Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux Avocats.
GREFFIER : Madame Emilie MARC
PARTIES :
DEMANDEUR
Monsieur [U] [B], né le [Date naissance 1] 1941 à [Localité 7], demeurant [Adresse 4]
représenté par Maître Maxime JOFFROY de la SCP JOFFROY LITAIZE LIPP, avocats au barreau de NANCY, avocats plaidant, vestiaire : 3
DEFENDERESSES
CPAM de MEURTHE ET MOSELLE, organisme de sécurité social de M. [B] sous le n° [Numéro identifiant 2], dont le siège social est sis [Adresse 5]
défaillant
S.A. AXA FRANCE IARD, immatriculée sous le n° RCS 722 057 460, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Maître Bertrand MARRION de la SCP DUBOIS MARRION MOUROT, avocats au barreau de NANCY, avocats plaidant, vestiaire : 76
Clôture prononcée le : 10 octobre 2023
Débats tenus à l’audience du : 13 Novembre 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : 10 Janvier 2025
Jugement prononcé par mise à disposition au greffe du 10 Janvier 2025
le
Copie+grosse+retour dossier : Maître Maxime JOFFROY et Maître Bertrand MARRION
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le 5 décembre 2019, Monsieur [U] [B], passager arrière d’un véhicule, est victime d’un accident de la circulation.
Il est pris en charge par les pompiers puis le service des urgences du CHRU de [Localité 8].
Il présentait notamment un traumatisme crânien, plusieurs côtes fracturées, un hématome sur le trajet de la ceinture et une contusion du membre inférieur gauche.
A la suite de céphalées importantes et d’un état confusionnel, un scanner cérébral a été réalisé le 27 février 2020, lequel a révélé deux hématomes sous duraux chroniques bilatéraux prédominant à droite. Du 2 au 5 mars 2020, Monsieur [B] a été hospitalisé pour évacuation neurochirurgicale des hématomes.
Le sinistre a été déclaré aux assureurs.
Une expertise médicale amiable a été confiée au Docteur [L].
Une offre d’indemnisation a été adressée à Monsieur [B] qui l’a contestée.
Un bilan neurologie et neuropsychologique a été réalisé par le Docteur [V], à la demande de Monsieur [B].
Aucun accord n’a pu être trouvé sur l’indemnisation de ses préjudices.
Par actes d’huissier de justice signifiés le 20 octobre 2022 et le 31 octobre 2022, déposés au greffe de la juridiction par voie électronique le 7 novembre 2022, Monsieur [B] a constitué avocat et a fait assigner la société AXA France IARD et la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Meurthe-et-Moselle devant le tribunal judiciaire de Nancy.
La société AXA France IARD a constitué avocat par acte notifié par RPVA le 8 décembre 2022.
Bien que l’assignation lui ait été régulièrement signifiée, par remise à personne morale, la CPAM de Meurthe-et-Moselle n’a pas constitué avocat.
En application de l’article 473 du code de procédure civile, la présente décision est réputée contradictoire.
La clôture est intervenue le 10 octobre 2023 par ordonnance du même jour.
Appelée à l’audience du 13 novembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 10 janvier 2025.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 mai 2023, Monsieur [U] [B] demande au tribunal, au visa de la loi Badinter du 5 juillet 1985, de :
-déclarer ses demandes recevables et bien fondées ;
A titre principal,
-fixer les postes de préjudice subis par Monsieur [B] comme suit :
*1.600,50 € au titre du déficit fonctionnel temporaire
*8.000 € au titre des souffrances endurées
*25.800 € au titre du déficit fonctionnel permanent
*800 € au titre du préjudice esthétique temporaire
*2.000 € au titre du préjudice esthétique permanent
*78.50 € au titre des dépenses de santé actuelles
*766.80 € au titre des frais divers
-condamner par conséquent la société AXA France IARD à lui verser la somme totale de 39.045,08 € au titre des préjudices subis dont à déduire la provision versée à hauteur de 10.000 € ;
A titre subsidiaire et avant dire droit,
-ordonner l’expertise médicale de Monsieur [B] et commettre pour y procéder un expert judiciaire spécialisé en neurologie qui aura notamment pour mission de :
*décrire, le cas échéant, l’état antérieur physique et psychique en ne retenant que les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence directe sur les lésions ou leurs séquelles,
*rechercher, le cas échéant, si l’état antérieur était révélé et traité avant l’accident du 5 décembre 2019 et de dire si l’éventuel état antérieur aurait évolué de façon identique en l’absence d’accident,
*dire si l’accident du 5 décembre 2019 a déclenché une décompensation ou s’il a entraîné une aggravation de l’évolution normalement prévisible en l’absence de traumatisme crânien,
*fixer la date de consolidation des lésions,
*décrire le déficit fonctionnel permanent imputable à l’accident du 5 décembre 2019 et en fixer le taux ; dire que ce taux devra prendre en compte, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques, mais aussi les douleurs physiques et morales permanentes que la victime ressent, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence rencontrées après consolidation ;
*fixer les évaluations sur la base du barème médical applicable en droit commun ;
En tout état de cause,
-condamner la société AXA France IARD à verser à Monsieur [B] la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamner la société AXA France IARD aux entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’expertise judiciaire, les frais de signification du jugement à venir et, le cas échéant, d’exécution forcée ;
-déclarer commun et opposable à la CPAM de Meurthe et Moselle le jugement à venir.
Au soutien de ses prétentions, Monsieur [U] [B] fait valoir que la Compagnie d’assurance SA AXA FRANCE IARD est l’assureur du véhicule impliqué dans l’accident de Monsieur [U] [B], que ledit accident s’inscrit dans le cadre des dispositions de la Loi Badinter du 5 juillet 1985 et que par conséquent la Compagnie d’assurance SA AXA FRANCE IARD doit indemniser intégralement son préjudice. Ainsi, Monsieur [U] [B] affirme que l’indemnisation de son préjudice doit s’élever à une somme totale de 39.045,08 €, retenant notamment :
– La somme de 1.600,50 € au titre du déficit fonctionnel temporaire, calculée comme suit : sur la base d’une somme de 27 € par jour, un déficit fonctionnel temporaire total de 10 jours, un déficit fonctionnel temporaire à 50% pour 82 jours, un déficit fonctionnel temporaire à 25% pour 16 jours, et un déficit fonctionnel temporaire à 10 % pour 65 jours compte tenu des conclusions de l’expert qui prend en compte les deux périodes d’hospitalisation, le besoin de se soumettre à de multiples examens exploratoires et consultations médicale, la nécessité de recourir aux services d’une infirmière libérale en mars 2020, l’impossibilité de conduire pendant cette période et la présence de troubles cognitifs ;
– La somme de 8.000 € au titre des souffrances endurées : Monsieur [B] souligne que le Docteur [L] a retenu des souffrances endurées de 3/7 notamment du fait des douleurs costales et crâniennes, des céphalées quotidiennes et des vertiges. Il avance également avoir subi des souffrances psychiques et des douleurs durant plusieurs mois ;
– La somme de 25.800 € au titre du déficit fonctionnel permanent : Monsieur [B] fait valoir que le Docteur [L] a retenu un déficit fonctionnel permanent à hauteur de 10% mais que les examens nombreux et poussés réalisés par le Docteur [V] ont amené ce dernier à conclure à un déficit fonctionnel permanent de 20% qu’il relie directement à l’accident sans qu’aucun état antérieur n’ait interféré avec ces séquelles. Monsieur [B] avance que la valeur de point devant être retenue est de 1.920 € du fait de son âge de 78 ans, et que par conséquent multiplié par 20, la Compagnie d’assurance SA AXA FRANCE IARD doit être condamnée à lui payer 25.800 € au titre de son déficit fonctionnel permanent. Il affirme que le bilan fait par le Docteur [V] est recevable car bien que l’expertise ait été faite de façon unilatérale, elle peut constituer une preuve recevable à condition qu’elle soit soumise aux débats. Il ajoute que la Compagnie d’assurance SA AXA FRANCE IARD a été informé en temps réel de la prise de rendez-vous avec le Docteur [V] et que par conséquent il lui appartenait de se présenter audit rendez vous ou à tout le moins de formuler des observations après que le rapport fait le docteur lui ait été transmis. Monsieur [B] souligne également que les conclusions du Docteur [V] recoupent celle du Docteur [L] et ne diffèrent de ces dernières que sur l’évaluation de l’ampleur des séquelles. Monsieur [B] souligne alors la qualification de neuro-chirurgien du Docteur [V] et indique que bien que ce dernier ne soit pas expert judiciaire, il a été formé à l’évaluation médico-légale et est donc en capacité de fixer le déficit fonctionnel permanent. Monsieur [B] souligne également que son âge ne peut expliquer les ressentis physiques éprouvés après l’accident car il était en parfaite santé cognitive avant cet épisode ;
– la somme de 800 € au titre du préjudice esthétique temporaire, en ce qu’il a eu plusieurs hématomes ;
– la somme de 2.000 € au titre du préjudice esthétique permanent, du fait des deux cicatrices de trépanation présentes sur son crâne ;
– la somme de 78,50 € au titre des dépenses de santé actuelles ;
– la somme de 766,08 € au titre des frais divers liés à la location d’une télévision lors de son hospitalisation du mois de mars 2020, aux honoraires du Docteur [V] et aux frais de déplacement.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 avril 2023, la société AXA France IARD demande au tribunal de :
-débouter Monsieur [B] de ses demandes ;
-juger les offres indemnitaires de la compagnie AXA FRANCE IARD suivantes comme satisfactoires :
*1.476 € au titre du déficit fonctionnel temporaire ;
*5.000 € au titre des souffrances endurées ;
*78,50 € au titre des dépenses de santé actuelles ;
*400 € au titre du préjudice esthétique temporaire ;
*8.200 € au titre du déficit fonctionnel permanent ;
*1.200 € au titre du préjudice esthétique définitif ;
-statuer ce que de droit sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.
En défense, la société AXA France IARD prise en la personne de son représentant légal réplique que :
-Monsieur [B] était âgé de 78 ans au moment de l’accident et avait déjà plusieurs antécédents médicaux tels qu’une prothèse totale de la hanche gauche, du genou gauche, un cancer du colon et une encéphalopathie ischémique chronique ;
-Sur le déficit fonctionnel temporaire : une indemnisation sur la base de 24 € par jour est suggérée, les périodes n’étant pas contestées ;
-Au titre des souffrances endurées, la société AXA FRANCE IARD souligne que la somme de 8.000 € demandée par Monsieur [B] sur ce poste de préjudice correspond à la fourchette haute du référentiel indicatif de l’indemnisation du préjudice corporel des Cours d’appels et que bien que les souffrances de Monsieur [U] [B] soient réelles, retenir la somme de la fourchette haute n’apparait pas opportune.
-Sur le déficit fonctionnel permanent : la défenderesse conteste l’expertise réalisée par le Docteur [V], soulignant qu’il s’agit d’une expertise privée initiée par Monsieur [B] et qui ne lui est donc pas opposable. Elle ajoute que le Docteur [V] ne prend pas en compte l’âge de Monsieur [B], donnée pourtant essentielle pour l’évaluation de son trouble de la mémoire et de l’attention. Elle souligne également que le Docteur [V] n’est pas diplômé en réparation du dommage corporel, contrairement au Docteur [L]. Elle propose ainsi de retenir la somme de 820 € comme valeur du point et donc d’indemniser Monsieur [B] à hauteur de 8.200 € sur ce poste de préjudice.
-Sur le préjudice esthétique, elle souligne que le référentiel des cours d’appel vise une indemnisation allant jusqu’à 2.000 € pour un préjudice esthétique permanent de 1/7 mais note que les marques présentes sur Monsieur [B] bien que situées sur sa tête, ne sont pas visibles car présentes sur le sommet de son crâne ;
-Concernant les frais divers, la défenderesse demande le débouté de Monsieur [B] sur ce poste de préjudice, arguant que ces dépenses sont uniquement les conséquences de choix personnels du demandeur.
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Il sera rappelé qu’en application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions de chacune des parties pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens.
Il ressort des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile que si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond. Cependant, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
1°) SUR LE DROIT A INDEMNISATION
Il résulte de l’article 1er de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation que les dispositions de cette loi sont applicables aux accidents de la circulation dans lesquels sont impliqués un ou plusieurs véhicules terrestres à moteur.
En l’espèce, il est établi que l’accident dont a été victime Monsieur [B] résulte de la collision entre le véhicule dans lequel il était passager et un second véhicule, soit deux véhicules terrestres à moteur dont l’implication n’est pas contestée.
Les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation ont donc vocation à s’appliquer au présent litige.
Il ressort des pièces produites aux débats que la société AERAS, assureur de Monsieur [B], a transmis le mandat d’indemnisation à la société AXA France IARD, assureur du véhicule responsable, laquelle ne conteste pas le principe même du droit à indemnisation de Monsieur [B].
En conséquence, la société AXA France IARD sera condamnée à réparer les conséquences dommageables subies par Monsieur [B] résultant de l’accident survenu le 5 décembre 2019.
2°) SUR L’INDEMNISATION DES PREJUDICES
Il convient de se prononcer sur l’indemnisation des préjudices en prenant en considération les conclusions du rapport d’expertise amiable du Docteur [L] en date du 2 octobre 2020.
La date de consolidation a été fixée au 25 mai 2020.
I. L’indemnisation des préjudices patrimoniaux temporaires
1.Les dépenses de santé actuelles déjà exposées
Vu l’article 31 de la loi du 5 juillet 1985, dans sa rédaction résultant de la loi n°2006-1640 du 21 décembre 2006, modifié par Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016,
Le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu’ils ont pris en charge, à l’exclusion des préjudices à caractère personnel.
Les frais pris en charge par l’organisme social sont en l’espèce des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, et de transport, pour un montant total de 6.065,54 € selon la notification définitive des débours de la CPAM du 28 décembre 2022.
Monsieur [U] [B] sollicite la somme de 78,50 € au titre des dépenses de santé actuelles restant à sa charge, ce qui correspond à la proposition d’indemnisation faite par la compagnie d’assurance SA AXA FRANCE IARD.
Vu l’accord des parties, il sera en conséquence alloué une somme de 78,50 €.
SOUS-TOTAL : 78,50 €
2.Les frais divers
Il s’agit des frais divers exposés par la victime avant la date de consolidation de ses blessures :
– les honoraires du médecin assistant la victime aux opérations d’expertise ;
– les frais de transport survenus durant la maladie traumatique, dont le coût et le surcoût sont imputables à l’accident ;
– les dépenses liées à l’emploi de tiers pour une activité que la victime ne peut effectuer seule durant cette période temporaire : frais de garde d’enfants, soins ménagers, tierce personne pour les besoins de la vie courante, frais d’adaptation temporaire d’un véhicule ou d’un logement.
En l’espèce, Monsieur [B] sollicite la somme de 286,08 € au titre des frais de déplacement. Il verse aux débats un récapitulatif détaillé des déplacements qu’il a dû effectuer pour se rendre à ses différentes consultations et examens médicaux à partir du 6 décembre 2019, soit un total de 194 km. Il justifie également du certificat d’immatriculation pour un véhicule de 7 chevaux.
Il n’y a pas lieu d’intégrer, comme il le demande, son déplacement à [Localité 6] du 15 décembre 2021 pour l’expertise médicale auprès du Docteur [V], ce déplacement étant postérieur à la date de consolidation.
Le calcul est donc le suivant : 194 km x 0,601 = 116,59 € au titre des frais de déplacement.
Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que la victime d’un accident a droit au confort dont elle aurait disposé si l’accident n’était pas survenu. Ainsi, la location d’une télévision par Monsieur [B] lors de son hospitalisation lui sera remboursée par la SA AXA FRANCE IARD à hauteur de 20,80 €.
De même, il sera alloué une somme de 460 € au titre des honoraires réglés par Monsieur [B] au Docteur [V] en règlement de son expertise, selon note d’honoraires en date du 8 février 2022.
Il résulte de ce qui précède qu’il sera alloué à Monsieur [U] [B] la somme de 597,39 € au titre des frais divers.
SOUS TOTAL : 597,39 €
II. L’indemnisation des préjudices extra-patrimoniaux
A. Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires
1.Le déficit fonctionnel temporaire
Ce poste de préjudice inclut, pour la période antérieure à la consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique et jusqu’à la date de consolidation. Il comprend notamment le préjudice temporaire d’agrément.
En l’espèce, l’expert a conclu comme suit :
– « Gêne temporaire totale du 15/12/19 au 16/12/19 et du 27/02/20 au 05/03/20
-Gêne temporaire partielle de classe III du 17/12/19 au 26/02/20, sur des douleurs à la mobilisation et des troubles des fonctions supérieures d’apparition progressive
-Gêne temporaire partielle de classe II du 06/03/20 au 21/03/20 en post opératoire
-Gêne temporaire partielle de classe I du 22/03/20 au 25/05/20 »
Il y a lieu de rectifier l’erreur matérielle contenue dans le rapport d’expertise, l’accident ayant eu lieu le 5 décembre et non le 15 décembre 2019.
Sur la base de 25 € par jour qui apparaît satisfactoire, et sur les périodes suivantes déterminées par l’expert, il sera alloué la somme de :
-Déficit fonctionnel temporaire total du 5 au 6 décembre 2019 et du 27 février au 5 mars 2020,
soit 9 jours x 25 € = 225 €
-Déficit fonctionnel temporaire partiel (50%) du 7 décembre 2019 au 26 février 2020,
soit 81 jours x 12,50 € = 1.012,50 €
-Déficit fonctionnel temporaire partiel (25%) du 6 mars 2020 au 21 mars 2020,
soit 15 jours x 6,25 € = 93,75 €
-Déficit fonctionnel temporaire partiel (10%) du 22 mars 2020 au 25 mai 2020,
soit 64 jours x 2,50 € = 160 €
Il sera ainsi alloué une somme de 1.491,25 € au titre du déficit fonctionnel temporaire.
SOUS-TOTAL : 1.491,25 €
2.Les souffrances endurées
Il s’agit de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime du jour de l’accident à la date de consolidation.
L’expert a évalué sur le plan médico-légal ce poste de préjudice à 3/7 en tenant compte des hospitalisations, de la neurochirurgie et de l’ensemble des souffrances post-traumatiques durant la convalescence.
L’offre de 5.000 € de la partie tenue à indemnisation est insuffisante car il convient de prendre en compte l’inscription dans le temps long des souffrances endurées par Monsieur [B]. En effet, ce dernier a connu deux périodes d’hospitalisation, la première directement après l’accident et la seconde quelques mois après. Ainsi, les souffrances endurées se sont inscrites dans le temps et ont nécessité la réalisation de plusieurs examens médicaux pour comprendre leur origine. Il convient au surplus de relever que Monsieur [B] a dû prendre des médicaments contre la douleur (notamment un morphinique avec des effets secondaires) pendant une période importante.
Il résulte de ce qui précède qu’il sera alloué au titre des souffrances endurées la somme de 7.000 €.
SOUS TOTAL : 7.000 €
3.Le préjudice esthétique temporaire
Il s’agit de l’altération physique subie jusqu’à la date de consolidation.
En l’espèce, l’expert a évalué le préjudice esthétique temporaire à 0,5/7 en raison des hématomes.
Il convient de constater que les photographies transmises par Monsieur [B] montre des hématomes importants situés sur le visage, tout autour de l’œil gauche.
Il sera alloué au titre du préjudice esthétique temporaire la somme de 600 €.
SOUS TOTAL : 600 €
B. Les préjudices extra-patrimoniaux permanents
1.Le déficit fonctionnel permanent
Il s’agit ici de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime que ce soient les atteintes à ses fonctions physiologiques ou la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans ses conditions d’existence quotidiennes. Ce poste de préjudice doit réparer la perte d’autonomie personnelle que vit la victime dans ses activités journalières, ainsi que tous les déficits fonctionnels spécifiques qui demeurent même après la consolidation.
L’article 246 du code de procédure civile dispose que le juge n’est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien. Il peut évaluer un préjudice en fonction de tous documents versés au dossier, en ce compris une expertise non contradictoire soumise à la discussion et corroborée par d’autres éléments probants.
En l’espèce, la SA AXA FRANCE IARD demande que seul le rapport d’expertise amiable soit pris en compte et non pas le rapport du Docteur [V] qui ne lui est pas opposable. Toutefois, l’expertise du Docteur [V], bien que non contradictoire, a été soumise à la discussion et est corroborée par d’autres éléments probants, tels que l’expertise du Docteur [L]. En effet, il convient de relever que si les conclusions des deux médecins diffèrent sur l’évaluation du déficit fonctionnel permanent, leurs constatations médicales sont similaires.
Le Docteur [L] considère, qu’après consolidation, il subsiste une incapacité permanente partielle de 10 %, compte tenu des troubles de la mémoire et de la concentration, de céphalées, en référence au Barème Droit commun, sur un état antérieur d’encéphalopathie ischémique chronique mis en évidence sur le scanner.
Le Docteur [V], consulté par Monsieur [B] pour un bilan neurologique et neuropsychologique approfondi, conclut pour sa part qu’au regard du barème en Droit commun et de l’absence d’état pathologique préexistant significatif, le déficit fonctionnel permanent est de 20% du fait des troubles cognitifs modérés avec retentissement léger sur la vie familiale et sociale.
Le rapport du Docteur [V] objective les perturbations cognitives subies par Monsieur [B], dont il affirme qu’elles sont en lien direct et certain avec l’accident du 5 décembre 2019, et constate que leur ampleur dépasse nettement celle d’un syndrome post-commotionnel puisqu’elles consistent selon lui en des séquelles cognitives affectant la mémoire visuelle, les fonctions visuo-praxiques et attentionnelles, un stress post-traumatique et des céphalées.
S’agissant de l’existence d’un état antérieur, le Docteur [L] retient une encéphalopathie ischémique chronique mise en évidence sur le scanner réalisé le 27 février 2020, tandis que le Docteur [V] conteste tout état antérieur et toute influence de l’âge de Monsieur [B].
Il convient de rappeler que le droit d’une victime à obtenir l’indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection qui en est issue n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable. Ce principe signifie que le droit à réparation de la victime est intégral si l’atteinte physique ou psychologique issue de cet état antérieur n’a été révélée ou provoquée que par le fait dommageable.
En l’espèce, il y a lieu de constater que l’état antérieur évoqué par le Docteur [L] n’a été révélé que lors du scanner du 27 février 2020, soit postérieurement à l’accident survenu le 5 décembre 2019, de sorte qu’il ne saurait être retenu pour limiter le droit à indemnisation de Monsieur [B]. Il en est de même pour l’âge de Monsieur [B], dont aucun élément sérieux n’établit qu’il soit en lien avec les séquelles observées.
En conséquence, un déficit fonctionnel permanent de 20% sera retenu.
A la date de la consolidation, intervenue le 25 mai 2020, Monsieur [U] [B] était âgé de 78 ans, comme étant né le [Date naissance 1] 1941. En prenant un point indemnisation arrêté à 1.290, il lui sera alloué à ce titre la somme de 1.290 x 20 = 25.800 €.
SOUS-TOTAL : 25.800 €
2.Le préjudice esthétique permanent
Il s’agit du préjudice lié aux éléments de nature à altérer l’apparence physique de la victime de manière séquellaire.
L’expert chiffre le préjudice esthétique permanent à 1/7 compte tenu des cicatrices de trépanation.
En l’espèce, il convient de prendre en considération la localisation du préjudice esthétique permanent, en l’occurrence sur la tête de Monsieur [B]. Bien que ces marques soient situées sur le haut de son crâne, il est manifeste au regard des photos transmises qu’elles sont visibles par tout un chacun.
Il sera alloué à ce titre une somme de 2.000 €.
SOUS TOTAL : 2.000 €
***
En définitive, l’indemnisation des conséquences dommageables de l’accident doit être évaluée comme suit :
-dépenses de santé actuelles : 78,50 €
-frais divers : 597,39 €
-déficit fonctionnel temporaire : 1.491,25 €
-souffrances endurées : 7.000 €
-préjudice esthétique temporaire : 600 €
-déficit fonctionnel permanent : 25.800 €
-préjudice esthétique permanent : 2.000 €
TOTAL 1 : 37.567,14 €
Provision à déduire : 10.000 €
TOTAL 2 : 27.567,14 €
Il y a lieu de condamner la société AXA France IARD à payer à Monsieur [B] la somme totale de 27.567,14 €, à titre de dommages et intérêts, provision déduite, en réparation des conséquences dommageables de l’accident du 5 décembre 2019 outre intérêts légaux à compter du jugement.
3°) SUR LA DECLARATION DE JUGEMENT COMMUN
Lorsqu’une personne victime d’un préjudice corporel agit à l’encontre d’un tiers qu’elle estime responsable de son préjudice, il lui appartient de mettre en cause son organisme de sécurité sociale. La Caisse de Sécurité Sociale peut intervenir volontairement à l’instance civile. A défaut, le tiers payeur doit être cité aux fins de déclaration de jugement commun, en application des articles L. 376-1 alinéa 8 et R. 376-2 du Code de Sécurité Sociale. Devant une juridiction civile, l’organisme de sécurité sociale ne peut être régulièrement mis en cause que par la délivrance d’une assignation, comme en l’espèce.
Il y a lieu de déclarer le présent jugement commun à la CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE MEURTHE-ET-MOSELLE prise en la personne de son représentant légal.
4°) SUR LES FRAIS DU PROCES ET L’EXECUTION PROVISOIRE
a) Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la société AXA France IARD, qui succombe, sera condamnée aux dépens.
b) Sur les demandes au titre des frais irrépétibles
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer 1° à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
La société AXA France IARD, partie condamnée aux dépens, indemnisera Monsieur [U] [B] de ses frais non compris dans les dépens par une somme qu’il est équitable de fixer à 2.000 €.
c) Sur l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable à l’espèce, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire, à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
En l’espèce, compte tenu de l’absence de motif dérogatoire, il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
DECLARE la SA AXA France IARD tenue d’indemniser les conséquences dommageables de l’accident subi le 5 décembre 2019 par Monsieur [U] [B] ;
CONDAMNE la SA AXA France IARD à payer à Monsieur [U] [B] la somme totale de 27.567,14 €, à titre de dommages et intérêts, provision déduite, en réparation des conséquences dommageables de l’accident du 5 décembre 2019 outre intérêts légaux à compter du jugement ;
CONDAMNE la SA AXA France IARD aux dépens de l’instance, ainsi qu’à régler à Monsieur [U] [B] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DECLARE le présent jugement commun à la CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE MEURTHE-ET-MOSELLE prise en la personne de son représentant légal ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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