Indemnisation des préjudices corporels : évaluation des pertes de gains et incidence professionnelle après un accident.

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Indemnisation des préjudices corporels : évaluation des pertes de gains et incidence professionnelle après un accident.

L’Essentiel : Le 7 avril 2016, M. [L] [J] a été passager d’un véhicule assuré par la CRAMA lors d’un accident de la circulation, entraînant une fracture de L4 et des séquelles. Après une expertise médicale, la CRAMA a proposé une indemnisation, acceptée par M. [L] [J], mais des désaccords subsistaient sur les pertes de gains futurs. M. [L] [J] a alors assigné la CRAMA en justice, obtenant une indemnisation complète. La CRAMA a interjeté appel, contesté les montants, tandis que M. [L] [J] a demandé une réévaluation. La cour a ajusté les indemnités, condamnant la CRAMA à verser 60 080 euros.

Contexte de l’accident

Le 7 avril 2016, M. [L] [J] a été impliqué dans un accident de la circulation en tant que passager d’un véhicule assuré par la Caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Bretagne-Pays de Loire (CRAMA). À la suite de cet accident, il a subi une fracture du coin antéro-supérieur de L4, entraînant des séquelles médicales.

Expertise médicale et offre d’indemnisation

Un expert médical, le docteur [P] [K], a été mandaté par la CRAMA et a établi un rapport le 8 février 2019, fixant la date de consolidation des blessures au 20 septembre 2018. Le 30 juillet 2019, la CRAMA a proposé une offre d’indemnisation à M. [L] [J], qui a été acceptée le 8 août 2019. Cependant, des désaccords subsistaient concernant les pertes de gains professionnels futurs et d’autres préjudices.

Procédure judiciaire

M. [L] [J] a assigné la CRAMA, la SA Allianz Vie et la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) devant le tribunal judiciaire de Rennes pour obtenir une indemnisation complète de ses préjudices. Le jugement rendu le 8 février 2022 a condamné la CRAMA à indemniser M. [L] [J] pour l’ensemble de ses préjudices, fixant des montants spécifiques pour les pertes de gains professionnels futurs, l’incidence professionnelle, le déficit fonctionnel permanent et le préjudice d’agrément.

Appel de la CRAMA

Le 15 mars 2022, la CRAMA a interjeté appel du jugement, contestant notamment les montants fixés pour les pertes de gains professionnels futurs et l’incidence professionnelle. Elle a demandé à la cour d’infirmer le jugement et de réduire les indemnités accordées à M. [L] [J].

Réclamations de M. [L] [J]

En réponse, M. [L] [J] a formulé un appel incident, demandant la confirmation du jugement initial concernant certains préjudices et une réévaluation des pertes de gains professionnels futurs et du préjudice d’agrément. Il a présenté des arguments détaillés sur l’impact de l’accident sur sa vie professionnelle et personnelle.

Arguments des parties

La CRAMA a soutenu que les revenus de référence utilisés pour calculer les pertes de gains étaient erronés et a proposé des montants inférieurs. M. [L] [J], de son côté, a insisté sur le fait que ses revenus avaient été affectés par l’accident et a demandé une indemnisation adéquate pour les préjudices subis.

Décision de la cour

La cour a examiné les arguments des deux parties, notamment en ce qui concerne les pertes de gains professionnels futurs, l’incidence professionnelle et le préjudice d’agrément. Elle a finalement décidé d’infirmer certaines parties du jugement initial, en ajustant les montants des indemnités dues à M. [L] [J] et en confirmant d’autres aspects du jugement.

Montant total de l’indemnisation

La cour a condamné la CRAMA à verser à M. [L] [J] un total de 60 080 euros pour ses préjudices, tout en rejetant les demandes de trop-perçu de la CRAMA. Les frais d’appel ont été mis à la charge de la CRAMA, et le jugement a été déclaré commun aux autres parties impliquées dans l’affaire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences juridiques de l’accident sur les pertes de gains professionnels futurs de M. [L] [J] ?

L’accident survenu le 7 avril 2016 a eu des conséquences significatives sur les pertes de gains professionnels futurs de M. [L] [J]. Selon l’article 1382 du Code civil, toute personne qui cause un dommage à autrui est tenue de le réparer. En l’espèce, la CRAMA a été reconnue responsable de l’accident et, par conséquent, doit indemniser M. [L] [J] pour ses pertes de gains professionnels futurs.

L’évaluation de ces pertes se base sur le revenu de référence, qui est le revenu net annuel imposable avant l’accident. Dans ce cas, le tribunal a retenu un revenu de référence de 2 468,41 euros, tel que mentionné dans l’avis d’imposition de 2015.

La cour a constaté que M. [L] [J] a subi une perte théorique de 32 036,91 euros, après avoir pris en compte les revenus perçus et la rente accident du travail.

Il est important de noter que la cour a rejeté la demande de M. [L] [J] pour une indemnisation supplémentaire, considérant qu’il n’a pas démontré de perte de gains postérieure au 31 décembre 2022.

Ainsi, la CRAMA est tenue de verser à M. [L] [J] une somme totale de 60 080 euros en réparation de son préjudice corporel, incluant les pertes de gains professionnels futurs.

Comment la cour a-t-elle évalué l’incidence professionnelle de M. [L] [J] ?

L’incidence professionnelle est un préjudice qui vise à indemniser les conséquences d’un accident sur la vie professionnelle de la victime, notamment en ce qui concerne la dévalorisation sur le marché du travail et l’augmentation de la pénibilité de l’emploi.

La cour a confirmé l’évaluation de ce préjudice à 50 000 euros, comme l’avait fait le tribunal. Elle a pris en compte le fait que M. [L] [J] a été contraint de quitter son emploi de technicien de maintenance, un poste qui impliquait des déplacements à l’étranger et des tâches physiquement exigeantes.

Les séquelles de l’accident ont conduit à son licenciement pour inaptitude, et la nécessité d’une reconversion professionnelle a été reconnue. La cour a également noté que les différents postes occupés par M. [L] [J] après l’accident témoignent de sa dévalorisation sur le marché du travail.

L’article 1382 du Code civil, qui impose la réparation intégrale du préjudice, a été appliqué pour justifier l’indemnisation de l’incidence professionnelle. La cour a ainsi estimé que M. [L] [J] devait être indemnisé pour la perte de chance professionnelle et l’augmentation de la pénibilité de son emploi.

Quelle est la nature et l’évaluation du préjudice d’agrément dans cette affaire ?

Le préjudice d’agrément est défini comme la perte de la capacité à pratiquer des activités de loisirs ou sportives que la victime pouvait réaliser avant l’accident. Dans le cas de M. [L] [J], il a été établi qu’il pratiquait régulièrement le Kung-fu et d’autres activités sportives avant l’accident.

La cour a pris en compte les témoignages et les preuves fournies par M. [L] [J], qui a indiqué qu’il avait dû abandonner sa pratique du Kung-fu en raison des séquelles de l’accident. L’expert a confirmé que la gêne résiduelle et les contraintes physiques liées à cette pratique n’étaient plus compatibles avec son état de santé.

Le tribunal a initialement fixé l’indemnisation de ce préjudice à 3 000 euros, montant que la cour a confirmé. L’article 1382 du Code civil a été appliqué pour justifier cette indemnisation, en considérant que le préjudice d’agrément est distinct du déficit fonctionnel permanent, qui compense les limitations physiques dans la vie quotidienne.

Ainsi, la cour a reconnu que M. [L] [J] a subi un préjudice d’agrément, mais a estimé que le montant de 3 000 euros était approprié au regard des éléments de preuve présentés.

Quelles sont les implications des frais irrépétibles et des dépens dans cette affaire ?

Les frais irrépétibles, régis par l’article 700 du Code de procédure civile, permettent à une partie de demander le remboursement de ses frais d’avocat et autres frais liés à la procédure. Dans cette affaire, la CRAMA a succombé partiellement en appel, ce qui a des implications sur les dépens.

La cour a décidé de ne pas faire application des dispositions de l’article 700, considérant que l’équité ne commandait pas une telle mesure. Cela signifie que chaque partie devra supporter ses propres frais d’avocat, malgré la décision favorable de M. [L] [J] sur certains points.

En ce qui concerne les dépens, la CRAMA a été condamnée à les supporter, ce qui inclut les frais de justice liés à l’appel. Cela est conforme à l’article 696 du Code de procédure civile, qui stipule que la partie perdante doit généralement supporter les dépens.

Ainsi, la CRAMA devra assumer les frais d’appel, tandis que M. [L] [J] ne recevra pas d’indemnisation pour ses frais irrépétibles, en raison de la décision de la cour.

5ème Chambre

ARRÊT N°-15

N° RG 22/01747 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SSD4

(Réf 1ère instance : 20/00423)

A.M.A. CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE-PAYS DE LA LOIRE

C/

M. [L] [J]

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 10]

S.A. ALLIANZ VIE

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 JANVIER 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 Novembre 2024

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 15 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

APPELANTE :

CAISSE REGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE-PAYS DE LA LOIRE dite GROUPAMA LOIRE BRETAGNE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité

au siège

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Monsieur [L] [J]

né le [Date naissance 5] 1981 à

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté par Me Vincent JULÉ-PARADE de la SELASU VJP AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représenté par Me Lison RIDARD-DESGUES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 10] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège (REF N°SS [Numéro identifiant 2]) ayant fait l’objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l’acte à personne habilitée à le recevoir, n’ayant pas constitué avocat

[Adresse 6]

[Localité 10]

S.A. ALLIANZ VIE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège (REF N° SS [Numéro identifiant 2]-Prestataire COGEVE)

ayant fait l’objet des significations prévues par les articles 902 et 911 du code de procédure civile par remise de l’acte à personne habilitée à le recevoir, n’ayant pas constitué avocat

[Adresse 1]

[Localité 9]

Le 7 avril 2016, M. [L] [J] a été victime d’un accident de la circulation alors qu’il était passager d’un véhicule assuré auprès de la Caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Bretagne-Pays de Loire (ci-après la CRAMA).

Des suites de l’accident, M. [L] [J] a présenté une fracture du coin antéro-supérieur de L4 avec respect du mur vertébral postérieur.

Le docteur [P] [K] a été mandaté par la CRAMA aux fins d’expertise médicale. Un rapport a été établi le 8 février 2019, fixant notamment la date de consolidation au 20 septembre 2018.

Le 30 juillet 2019, la CRAMA a adressé à [L] [J] une offre d’indemnisation acceptée par la victime le 8 août 2019. Aucun accord n’a cependant pu être trouvé sur les pertes de gains professionnels futurs à compter du 1er avril 2019, l’incidence professionnelle, le déficit fonctionnel

permanent et le préjudice d’agrément.

Par actes délivrés les 11, 13 et 18 décembre 2019, M. [L] [J] a alors fait assigner devant le tribunal judiciaire de Rennes, la CRAMA Bretagne-Pays de Loire dite Groupama Loire Bretagne, la SA Allianz Vie et la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 10] (ci-après CPAM) aux fins d’obtenir l’indemnisation de ces préjudices.

Par jugement en date du 8 février 2022, le tribunal judiciaire de Rennes a :

– dit que la CRAMA Bretagne-Pays de Loire est tenue d’indemniser l’entier préjudice subi par M. [L] [J] en lien avec l’accident survenu le 7 avril 2016,

– fixé les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux de M. [L] [J] en lien avec l’accident du 7 avril 2016 comme suit :

* Préjudices patrimoniaux

– Permanents

* Perte de gains professionnels futurs = 143 267,70 euros

* Incidence professionnelle = 50 000 euros

* Préjudices extrapatrimoniaux

– Permanents

* Déficit fonctionnel permanent = 7 080 euros

* Préjudice d’agrément = 3 000 euros

– condamné en conséquence la CRAMA Bretagne-Pays de Loire à verser à M. [L] [J], après imputation de la rente accident du travail d’un montant de 63 699,20 euros, une somme totale restant due de 139 648,50 euros en réparation de son préjudice corporel,

– condamné la CRAMA Bretagne-Pays de Loire aux entiers dépens,

– condamné la CRAMA Bretagne-Pays de Loire à verser à M. [L] [J] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– déclaré le jugement commun à la SA Allianz Vie et à la CPAM de [Localité 10],

– rejeté toute demande plus ample ou contraire,

– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement

Le 15 mars 2022, la société CRAMA Bretagne-Pays de la Loire a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 8 décembre 2023, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

* Fixé les préjudices de M. [L] [J] comme suit :

– Pertes de gains professionnels futurs = 143 267,70 euros

– Incidence professionnelle = 50 000 euros

* l’a condamnée en conséquence à verser à M. [L] [J], après imputation de la rente accident du travail d’un montant de 63 699,20 euros une somme totale de 139 648,50 euros en réparation de son préjudice corporel,

En conséquence,

– confirmer le jugement en ce qu’il a fixé l’indemnisation de M. [L] [J] à la somme de 3 000 euros au titre du préjudice d’agrément mais déduire de cette somme le trop-perçu de 5 000 euros. Subsidiairement, ordonner la restitution de la somme de 5 000 euros,

– confirmer le jugement en ce qu’il a fixé l’indemnisation de M. [L] [J] à la somme de 7 080 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

Statuant de nouveau :

– fixer les préjudices de M. [L] [J] comme suit avant déduction de la rente accident du travail :

* Pertes de gains professionnels futurs = 17 163,45 euros

* Incidence professionnelle = 8 000 euros

* Déficit fonctionnel permanent = 7 080 euros

* Préjudice d’agrément = 3 000 euros

– lui donner acte de ses offres indemnitaires détaillées comme suit, avant imputation de la rente accident de travail :

* Pertes de gains professionnelles futures = 17 163,45 euros

* Incidence professionnelle = 8 000 euros

* Déficit fonctionnel permanent = 7 080 euros

* Préjudice d’agrément = 3 000 euros

dont à déduire le trop-perçu de 5 000 euros,

– juger ces offres satisfactoires et réduire à de plus justes proportions les demandes de M. [L] [J],

– juger que les pertes de gains professionnelles futures et l’incidence professionnelle sont intégralement indemnisées par la rente accident de travail, après imputation de la créance de la CPAM,

– débouter M. [L] [J] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,

– condamner M. [L] [J] à lui régler une somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– statuer ce que de droit sur les dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 20 septembre 2023 M. [L] [J] demande à la cour de :

– le déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– fixé ses préjudices comme suit :

* Préjudices patrimoniaux permanents :

– Incidence professionnelle : 50 000 euros

* Préjudices extra patrimoniaux permanents :

– Déficit fonctionnel permanent : 7 080 euros

– condamné la CRAMA Bretagne Pays de Loire aux entiers dépens,

– condamné la CRAMA Bretagne Pays de Loire à lui verser la somme de

3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– déclaré le jugement commun à la SA Allianz et à la CPAM de [Localité 10],

Pour le surplus,

– infirmer le jugement entrepris sur le poste de préjudice d’agrément et sur les pertes de gains professionnels, afin de prendre en compte l’actualisation du préjudice,

Ce faisant et statuant à nouveau :

– condamner la CRAMA à lui verser en réparation de ses pertes de gains professionnels futurs, une somme de 73 326,36 euros déduction faite de la rente accident du travail,

– condamner la CRAMA à lui verser en réparation de son préjudice d’agrément la somme de 35 000 euros,

– condamner la CRAMA à lui verser une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 de code de procédure civile en cause d’appel,

– condamner la CRAMA aux entiers dépens d’appel,

– dire l’arrêt à intervenir commun aux organismes sociaux appelés à la cause.

La société Allianz Vie n’a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d’appel ainsi que les conclusions d’appelant ont été signifiées à personne morale, le 15 juin 2022 et 19 décembre 2023.

La CPAM de [Localité 10] n’a pas constitué avocat dans le délai prescrit. La déclaration d’appel ainsi que les conclusions d’appelant ont été signifiées à personne habilitée, le 16 juin 2022 et le 23 décembre 2023 .

L’ordonnance de clôture est intervenue le 24 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La décision du tribunal judiciaire n’est discutée devant la cour qu’en ce qui concerne l’indemnisation des postes de préjudices suivants :

– les pertes de gains professionnels futurs

– l’incidence professionnelle

– le préjudice d’agrément.

– sur les pertes de gains professionnels futurs

La CRAMA critique le revenu de référence retenu par le tribunal de

2 468,41 euros, contestant notamment l’intégration de l’intéressement, qui est un revenu exceptionnel. Selon elle, le revenu de référence est de 2 363 euros.

Elle fait valoir que pour la période du 1er avril 2019 au 31 décembre 2022, (45 mois), M. [J] aurait donc dû percevoir une somme de 106 335 euros.

S’agissant des revenus perçus à déduire, elle estime nécessaire de reconstituer, d’une part les revenus de 2020, pour ne pas tenir compte du chômage partiel (crise sanitaire) et, d’autre part les revenus de 2021, afin de ne pas prendre en compte les arrêts de travail dont M. [J] a fait l’objet, lesquels n’ont pas de lien avec l’accident. Elle évalue ainsi le salaire perçu par M. [J] en 2020 et 2021 à 2 600,27 euros.

Après déduction des revenus effectivement perçus par ce dernier pendant la même période, soit une somme totale de 89 171,55 euros, la perte de gains théorique de M. [J] est, selon elle, de 17 163,45 euros.

S’agissant de sa perte de gains à compter du 1er janvier 2023, elle relève que le revenu annuel antérieur à l’accident est de 28 356 euros par an, que les derniers salaires de 2023 de l’intéressé montrent un revenu annuel de 31 416 euros, de sorte que M.[J] ne démontre aucun préjudice pour l’avenir.

Elle fait valoir que, si la cour retenait une capitalisation, celle-ci ne pourrait se calculer que jusqu’aux 62,5 ans de M. [J], âge auquel il pourra prétendre à un départ en retraite à taux plein et non jusqu’à 65 ans, et s’oppose à l’application de la table de capitalisation publiée à la Gazette du palais en 2022 au taux de -1%, faisant observer que la jurisprudence récente retient quant à elle, au vu de l’évolution économique, le barème de la Gazette du palais en 2020 au taux 0.

Elle affirme que ce préjudice ne peut être calculé de manière hypothétique puisque M. [J] est âgé de 42 ans et que son déficit fonctionnel n’est que de 4%, ce qui constitue des séquelles mineures et qu’il peut, en tout état de cause, retrouver un emploi aussi bien rémunéré que celui exercé antérieurement à l’accident, puisque tel est le cas. Elle argue d’une perte de chance de retrouver un emploi, minime au plus de 20%, si elle devait être retenue.

Relevant enfin que M. [J] a perçu une rente accident du travail de

62 161,89 euros, elle estime qu’il ne peut prétendre à aucune indemnisation.

M. [J] demande à la cour de faire application du barème de capitalisation de la Gazette du palais de 2022, dernier barème publié.

Il rappelle qu’au moment de l’accident, il travaillait en qualité de technicien SAV international sur des machines de soudage automatisées et se déplaçait régulièrement à l’étranger, son activité sédentaire représentant 50% de son temps de travail. Il précise qu’il assurait la maintenance de machines pouvant peser jusqu’à 50 kg et qu’il effectuait des voyages à l’étranger, manutentionnant ainsi une caisse à outils d’une vingtaine de kilos.

Il explique également avoir été placé en arrêt de travail du 8 avril 2016 au 30 octobre 2016, puis du 24 novembre 2016 au 25 juin 2018 puis a été licencié pour inaptitude en septembre 2018.

Il précise avoir tenté de se reclasser à différents postes mais qu’aucun des postes n’était en adéquation avec les préconisations de la médecine du travail et avec les séquelles de l’accident.

Il indique qu’avant l’accident il bénéficiait d’un salaire confortable de

2 468,41 euros et qu’il s’est retrouvé avec des revenus moyens de 541,82 euros par mois comprenant la rente versée par la CPAM.

Il observe que seule la nature de ses séquelles doit être prise en compte et non le taux de déficit fonctionnel conclu par l’expert.

Il demande à la cour de retenir le salaire de référence fixé par le tribunal, faisant valoir que l’appelante ne justifie pas ses allégations quant à la perception d’un intéressement. Il demande de prendre en compte ses revenus imposables perçus à compter du mois d’août 2020.

Enfin, il soutient que ses revenus depuis 2022 sont toujours inférieurs à ceux perçus avant l’accident, et qu’il n’est pas certain qu’il soit en mesure de conserver son emploi, précisant que son poste l’amène à des déplacements et à porter des charges lourdes comme du matériel pédagogique.

Il évalue son préjudice comme suit :

– entre le 1er avril 2019 et le 31 août 2020 : 26 229,65 euros

– à compter du 1er septembre 2020 : arrérages échus de 1 913,32 euros, (sur une base de salaire perçue de 1990,08 euros),

– à compter du 1er janvier 2021 : arrérages échus de 6 116,88 euros, (sur une base de salaire perçue de 1958,67 euros)

– à compter du 1er janvier 2022 : arrérages échus de 5 496,24 euros,

– à compter du 1er janvier 2023 : capitalisation jusqu’à ses 65 ans selon un euro de rente de 25,969 de 105 386,35 euros

Soit un total de 139 025,56 euros, duquel il convient de déduire la rente perçue de 63 699,20 euros.

Il sollicite ainsi la fixation de ce poste de préjudice à la somme de 73 326,36 euros.

La perte de gains professionnels futurs résulte de la perte de l’emploi ou du changement de l’emploi. Ce préjudice est évalué à partir des revenus antérieurs afin de déterminer la perte annuelle, le revenu de référence étant le revenu net annuel imposable avant l’accident.

Il est rappelé que l’accident est survenu le 7 avril 2016 et que la consolidation a été fixée par l’expert au 20 septembre 2018.

Les parties ont trouvé un accord pour l’indemnisation des pertes de gains professionnels futurs pour la période du 1er octobre 2018 au 31 mars 2019 et n’ont donc soumis au juge que l’évaluation des pertes de gains postérieurs à cette période.

Les pièces versées aux débats établissent les éléments suivants:

– l’expert décrit, au titre des séquelles, des douleurs lombaires en barre sans signe radiculaire avec limitation en fin de mouvement d’antéflexion et pour les sollicitations du rachis,

– il ajoute s’agissant des répercussions professionnelles des séquelles que le licenciement est à rattacher aux conséquences de l’accident du fait de geste en force, des ports de charges et des postures de travail décrites (port de charges lourdes et postures contraignantes pour le rachis). L’expert précise que M. [J] a pu s’inscrire dans un autre projet professionnel dans l’enseignement sans contrainte particulière pour le rachis,

– M. [J] a été licencié pour inaptitude le 10 septembre 2018,

– il a travaillé en qualité d’enseignant contractuel du 16 janvier 2019 au 7 mars 2019,

– il a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 29 août 2019, en qualité de conducteur accompagnateur de transport spécialisé de personnes handicapées à mobilité réduite auprès de la société Monamiligo, mais a quitté cet emploi le 31 janvier 2020,

– il a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 15 février 2020 au service d’une société de maintenance BC Maintenance en qualité de technicien de maintenance, et a fait l’objet d’un licenciement pour inaptitude (apte à un poste sédentaire, administratif, sans port de charges, sans travail en hauteur, ni déplacement professionnel),

– il a travaillé depuis le 6 septembre 2021 pour la Sarl Perfo et la Sarl HT Perfo, d’abord en qualité de technicien qualifié, puis de janvier 2022 en qualité de formateur junior, et depuis janvier 2023, en qualité de formateur senior.

Il se déduit de ces éléments que M. [J] a été contraint de quitter son emploi, en raison des séquelles de l’accident. Ses tentatives pour retrouver un emploi, qui sont le fruit d’efforts non contestables, traduisent les difficultés physiques rencontrées par l’intéressé à reprendre un emploi conforme à celui exercé avant l’accident.

* sur le salaire de référence

L’avis d’imposition de M. [J] antérieur à l’accident, soit celui portant sur les revenus de 2015, mentionne un salaire imposable de 29 621 euros, soit un salaire moyen de 2 468,41 euros.

Il est observé par la cour que, si M. [J] évoque un salaire réactualisé en 2022 de 2 764,41 euros en tenant compte de l’érosion monétaire, son calcul des pertes de gains en 2022 repose toutefois sur la différence entre son revenu moyen perçu à compter de 2022 et le revenu de référence de 2015 (2 468, 81 euros), de sorte que la question d’une actualisation de son revenu de référence est hors débat, puisque non appliquée par l’intéressé.

Pour affirmer qu’un revenu exceptionnel de 1 261, 68 euros a été perçu en 2015 par M. [J] (et doit donc être déduit du revenu imposable de 2015), la CRAMA produit un échange de courriel entre les parties évoquant le versement d’une prime d’intéressement en 2015 au titre de l’exercice 2014. Son montant n’en est cependant pas précisé et le justificatif du versement d’une prime d’intéressement, produit aux débats, ne porte mention d’aucun nom.

La cour retient en conséquence le revenu de référence de 2 468,41 euros, tel que décidé par le tribunal, la preuve d’une somme moindre imposable au titre des revenus de 2015 n’étant pas clairement apportée.

* sur les sommes servies au titre de la rente accident du travail

S’agissant de la rente accident du travail versée à M. [J], la cour constate que les parties diffèrent dans la somme à prendre en compte : 63 699,20 euros pour M. [J] et 62 161,89 euros pour la CRAMA.

Il est constaté que le tribunal prend en compte ce recours pour une somme de 63 599,20 euros.

Le décompte des débours de la CPAM en date du 10 juillet 2019, versé aux débats par M. [J] mentionne la créance suivante :

– arrérages échus de la rente AT du 26 juin 2018 au 17 juillet 2019 :

2 117,80 euros,

– capital rente : 61 581,40 euros,

soit un total de 63 699,20 euros.

Le procès-verbal transactionnel portant sur l’indemnisation des pertes de gains professionnels futurs pour la période du 1er octobre 2018 au 31 mars 2019 admis entre les parties à hauteur de 6 230,69 euros, a toutefois pris en compte le versement de la rente AT durant cette période.

La cour retiendra le montant de rente arrêté par la CRAMA de 62 161,879 euros.

* sur la perte de gains professionnels futurs

M. [J] produit des bulletins de salaire jusqu’au 31 août 2023.

Au regard des calculs respectifs des parties, la cour recherchera tout d’abord les arrérages échus au 31 décembre 2022.

– pour la période du 1er avril 2019 au 31 décembre 2019

M. [J] aurait dû percevoir une somme de 2 468,41 x 9 mois = 22 215,69 euros.

Il a perçu les sommes suivantes :

– 394,25 euros en mai 2019

– 1 545,12 euros entre août et décembre 2019,

soit 1 939,37 euros.

Il s’ensuit une perte théorique de 20 276,32 euros.

– pour la période du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020

Il aurait dû percevoir une somme de 2 468,41 x 12 = 29 620,92 euros.

Il a déclaré 23 881 euros de revenus, soit :

– 562,52 euros correspondent au salaire qu’il a perçu de la société Monamiligo en janvier 2020,

– 23 318,48 euros correspondant aux salaires versés par la société CB Maintenance à compter du 17 février 2020.

Les salaires perçus de la société CB Maintenance ont cependant été impactés par le chômage partiel subi par M. [J] au titre de la crise sanitaire, qui l’aurait tout aussi impacté s’il n’avait pas eu d’accident et avait poursuivi son emploi d’origine. Le tribunal décide, à raison, qu’il est nécessaire de reconstituer le revenu de M. [J] pendant l’année 2020 sans tenir des comptes des mois d’avril et mai 2020, affectés par ce chômage partiel.

Le revenu imposable de M. [J] en avril 2020 est de 1 659,34 euros et en mai 2020 de 2 262,35 euros.

Le revenu imposable de M. [J] pour la période d’emploi auprès de la société CB Maintenance, exclusion faite de ces deux mois est donc de :

23 318,48 euros – 1 659,34 – 2 262,35 = 19 396,79 euros, pour 7 mois et demi travaillés, soit un salaire moyen dans cette entreprise de 2 586,23 euros.

Pour 9 mois et demi d’emploi dans la société CB Maintenance, cela représente un revenu de 2 586,23 x 9,5 = de 24 569,18 euros.

Le montant à déduire est donc de 562,52 + 24 569,18 = 25 131,70 euros.

Il s’ensuit une perte théorique de 4 489,22 euros.

– pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021

M. [J] aurait dû percevoir une somme de 29 620,22 euros.

Il a déclaré 23 504 euros de revenus. M. [J] a été en arrêt de travail entre le 1er janvier 2021 et le 31 août 2021, alors qu’il était salarié au sein de la société CB Maintenance en qualité de technicien de maintenance.

Au regard des motifs d’inaptitude ayant conduit à son licenciement de la société CB maintenance, la cour considère que M. [J] justifie, ainsi qu’il l’allègue, que les arrêts de travail dont il a fait l’objet durant la maladie qui précédait, étaient liés aux séquelles de son accident, puisqu’un tel emploi est apparu incompatible avec son état de santé résultant de l’accident, ayant motivé son licenciement par la société qui l’employait avant l’accident. La cour prendra donc en compte les revenus déclarés par M. [J], sans reconstitution à la hausse ainsi que le suggère la CRAMA.

Sa perte théorique est donc de 6 116,92 euros.

– pour la période du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2022

Il aurait dû percevoir une somme de 29 620,22 euros.

Il a déclaré 28 466,47 euros.

Il s’ensuit une perte théorique de 1 154,45 euros.

Les arrérages arrêtés au 31 décembre 2022 sont donc de 32 036,91 euros.

S’agissant de la période postérieure au 31 décembre 2023, M.[J] justifie avoir perçu de janvier 2023 à août 2023 (8 mois ) et selon les bulletins de salaire produits :

– de la société HT Perco un revenu net imposable à cette date de 8 596,28 euros,

– de la Sarl Perco un revenu net imposable à cette date de 12 348,49 euros,

soit un revenu total pour 8 mois de 20 944,77 euros et donc un salaire moyen de 2 618,09 euros.

La CRAMA soutient à raison que M. [J] a retrouvé une situation professionnelle lui offrant un salaire supérieur à celui qu’il avait avant l’accident.

M. [J] ne peut se contenter de déclarer qu’il n’est pas certain qu’il soit en mesure de conserver cet emploi qu’il occupe maintenant depuis septembre 2021, et ce, sans produire de quelconques éléments étayant ses affirmations. Il est rappelé que les séquelles sont un frein au port de charges et à des mouvements contraignant le rachis, et qu’il exerce à ce jour un emploi de formateur dont aucun élément ne démontre qu’il est incompatible avec son état de santé résiduel.

Ainsi, nonobstant l’existence d’une inaptitude à exercer l’emploi qu’il occupait avant l’accident, force est de constater que M. [J] n’est pas privé pour l’avenir d’exercer une activité professionnelle.

Aucune perte de gains postérieure au 31 décembre 2022 n’est démontrée par M. [J] qui ne rapporte pas non plus la preuve, au regard des salaires perçus depuis l’accident, que ses droits à la retraite seront impactés.

La cour dit n’y avoir lieu à capitalisation de ses pertes de gains.

La rente de la CPAM, prise ici en compte par la cour à hauteur de

62 161,99 euros, s’impute sur sa perte théorique de gain qui est de :

20 276,32 + 4 489,22 + 6 116,92 + 1 154,45 = 32 036,91 euros.

Il n’est donc dû aucune somme à M. [J], au titre des pertes de gains professionnels futurs.

La cour infirme le jugement.

– sur l’incidence professionnelle

La CRAMA estime qu’une somme de 8 000 euros indemnise suffisamment ce poste de préjudice.

Elle considère que M. [J] ne justifie pas d’une dévalorisation sur le marché du travail, en relevant qu’il a retrouvé du travail comme technicien de maintenance, poste qu’il occupait avant l’accident.

Si M. [J] n’effectue plus des déplacements, elle prétend que cette absence de déplacement n’est pas susceptible d’être indemnisée.

Selon elle, M. [J] ne peut se prévaloir que d’une pénibilité très minime dans l’exercice de sa profession.

M. [J] demande à la cour de confirmer l’évaluation retenue par le tribunal de 50 000 euros, au regard d’une dévalorisation sur le marché du travail,du renoncement à l’activité exercée avant l’accident et la nécessité d’une reconversion professionnelle, et d’une plus grande pénibilité et fatigabilité.

Ce chef de dommage a pour objet d’indemniser non la perte de revenus liée à l’invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe imputable au dommage, ou encore l’obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d’une autre en raison de la survenance de son handicap.

Les pièces produites établissent que M. [J] exerçait, avant l’accident et depuis plusieurs années, un emploi de technicien de maintenance l’amenant à des déplacements à l’étranger.

Il est acquis que les séquelles de l’accident ont conduit à son licenciement pour inaptitude.

Il ne saurait être tiré argument du fait qu’il a retrouvé après l’accident pour quelques mois un poste de technicien de maintenance, les pièces produites établissant que ce poste a généré pour lui des douleurs, notamment pour le port de charges lourdes et la manutention, et qu’il a de nouveau été licencié pour inaptitude pour ces motifs.

La nécessité d’une reconversion professionnelle et l’abandon de son métier d’origine sont donc incontestables. Les différents postes occupés par M. [J] après l’accident traduisent la dévalorisation sur le marché du travail dont il est désormais atteint.

L’existence d’une pénibilité et d’une fatigabilité dans l’emploi sont établies.

La cour approuve l’évaluation de ce poste de préjudice opérée par le premier juge. Le jugement est confirmé.

– sur le préjudice d’agrément

M. [J] forme appel incident sur ce point et sollicite l’octroi d’une somme de 35 000 euros.

Il expose qu’il pratiquait régulièrement le Kung-fu, était licencié dans un club, pratiquant une ou deux fois par semaine, pour des séances d’une heure à une heure trente. Il indique que cette activité était une passion et qu’il a dû l’abandonner.

Il ajoute qu’il pratiquait le footing une fois par semaine environ avec un quart d’heure de course ainsi que la marche (une dizaine de kilomètres une ou deux fois par semaine) et que depuis l’accident, il a repris la marche une fois par semaine et fait de la natation une ou deux fois par mois, tout en prenant d’extrêmes précautions.

Il indique aussi, que père de quatre enfants, il ne pourra plus participer comme avant aux nombreuses activités ludiques et sportives, avec ces derniers, notamment durant les vacances.

La CRAMA s’oppose à de telles prétentions, demandant à la cour de confirmer le jugement sur ce point, qui a fait une juste appréciation de ce préjudice au regard des pièces produites.

Le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour une victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs comme elle le faisait avant sa maladie, alors que la réduction des capacités de la victime avec toutes les répercussions qu’elle a sur sa vie quotidienne est réparée au titre du déficit fonctionnel.

 

L’expert retient à ce titre:

La gêne résiduelle et les contraintes physiques nécessitées par la pratique du kung-fu ne sont pas conseillées compte tenu de la prise en charge chirurgicale qui a été réalisée. Il n’y a pas de contre-indication à la reprise des autres activités. En adaptant les postures et le rythme de travail, l’état médical demeure compatible avec la réalisation de travaux de bricolage et de jardinage.

Au regard de ces conclusions, la cour estime que seule la pratique du kung-fu est impactée par les séquelles liées à l’accident. Cette pratique régulière est attestée en l’espèce par une attestation de Mme [O] [J], et le justificatif de sa cotisation pour l’année 2025/2016.

Au vu de ces seuls éléments, la cour considère que le premier juge a justement fixé le montant de l’indemnisation de ce poste de préjudice. Le jugement est confirmé.

– sur le montant total de l’indemnisation

La CRAMA considère pouvoir prétendre à un trop perçu de 5 000 euros, au regard des sommes provisionnelles versées.

En conséquence de ce qui précède, la cour condamne la société CRAMA à payer à M. [J] les sommes de 50 000 euros (incidence professionnelle), 7 080 euros (déficit fonctionnel permanent, poste non discuté) et 3 000 euros (préjudice d’agrément), soit 60 080 euros.

Si l’offre du 8 août 2019 acceptée par M. [J] mentionne des provisions versées à hauteur de 24 515,58 euros, ces sommes ont été déduites de l’indemnité allouée à la victime au titre des postes de préjudice non en litige, le tribunal puis la cour n’étant saisis que des postes de réservés. Il n’est pas démontré par la CRAMA l’existence d’un quelconque trop perçu de 5 000 euros au titre de provisions servies pour les postes réservés.

La cour déboute la CRAMA de sa demande en ce sens.

Le jugement est infirmé sur le montant total des sommes dues à M. [J].

– sur les frais irrépétibles et les dépens

La CRAMA succombant partiellement en son appel, supportera les dépens d’appel. L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile étant précisé que les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il :

– fixe les pertes de gains professionnels futurs à la somme de 143 267,70 euros,

– condamne la CRAMA Bretagne-Pays de Loire à verser à M. [L] [J], après imputation de la rente accident du travail d’un montant de

63 699,20 euros, une somme totale restant due de 139 648,50 euros en réparation de son préjudice corporel,

Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés,

Fixe les pertes de gains professionnels futurs de M. [J] à compter du 1er avril 2019 à la somme de 32 036,91 euros,

Déboute M. [L] [J] de sa demande d’indemnisation au titre des pertes de gains professionnels futurs et ce, après imputation des sommes reçues au titre de la rente accident du travail de 62 161,99 euros ;

Condamne la CRAMA Bretagne-Pays de Loire à verser à M. [L] [J] une somme totale restant due de 60 080 euros en réparation de son préjudice corporel,

Y ajoutant,

Déboute les parties pour le surplus de leurs demandes ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamne la société CRAMA aux dépens d’appel ;

Déclare le présent arrêt commun à la CPAM de [Localité 10] et à la société Allianz Vie.

Le Greffier La Présidente


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