Une nouvelle décision toute en nuances a été rendue à propos de la reproduction d’objet protégés dans les photographies publicitaires. Au titre de la reproduction non autorisée d’un modèle de parapluies dans une publicité, la responsabilité des sociétés L’Oréal et Publicis a été retenue.
Théorie de l’accessoire
Lorsque la présentation d’une oeuvre est accessoire au sujet traité, elle doit être regardée comme une inclusion fortuite constitutive d’une limitation au monopole d’auteur (absence de contrefaçon). En l’espèce, le visuel publicitaire litigieux présentait la tête d’un mannequin avec ses épaules et ses bras, qui tient dans l’une de ses mains un parapluie miniature reproduisant le modèle de la société X. Le visuel comportait également une maquette de paquebot et en assez petit une chaise longue avec un motif à rayures identique à celui du parapluie. Le parapluie est certes petit et constitue un accessoire composant le décor mais son aspect miniature, loin de le rendre secondaire, a au contraire eu pour effet d’attirer l’attention du spectateur surpris par la disproportion ainsi créée entre le mannequin et cet objet et par une dimension qui lui fait abandonner toute utilité pour le transformer en sorte de jouet. Cette transformation subie par le parapluie lui fait ainsi perdre tout caractère accessoire pour au contraire en faire un élément essentiel du décor et de l’ambiance créée par le visuel. Les juges ont donc retenu que la présence du parapluie n’était pas accessoire.
En toutes hypothèses, la jurisprudence de l’accessoire s’applique dans le domaine des droits d’auteur mais non pas dans le domaine des dessins et modèles qui répondent à des règles différentes.
Contrefaçon de modèle
L’article L521-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que constitue une contrefaçon toute atteinte portée aux droits du propriétaire d’un dessin ou modèle. Sont interdits à défaut d’autorisation du titulaire, la fabrication, l’offre, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation, l’utilisation ou la détention à ces fins, d’un produit incorporant le dessin ou modèle. En l’occurrence, le modèle de parapluie a été reproduit dans une publicité mais sans effectuer aucun acte de fabrication ou de commercialisation. Un visuel publicitaire ne peut être considéré comme un produit qui incorporerait un modèle car ce produit selon l’article L513-4, doit faire lui-même l’objet d’une offre commerciale alors que le visuel publicitaire ne donne pas lieu à une exploitation commerciale mais est utilisé directement par l’entreprise pour ses propres besoins de promotion. Il ne ressort donc pas suffisamment des dispositions de l’article L513-4 du Code de la propriété intellectuelle que l’usage à titre publicitaire d’un modèle soit un acte illicite en soi. Néanmoins, l’article L513-6 du Code de la propriété intellectuelle dispose que les droits conférés par l’enregistrement d’un modèle ne s’exercent pas à l’égard :
– d’actes accomplis à titre privé et à des fins non commerciales,
– d’actes accomplis à des fins expérimentales,
– d’actes de reproduction à des fins d’illustration ou d’enseignement si ces actes mentionnent l’enregistrement et le nom du titulaire des droits, sont conformes à des pratiques commerciales loyales et ne portent pas préjudice à l’exploitation normale du dessin ou modèle.
Il se déduit a contrario de ces dispositions que la reproduction d’un modèle est contraire aux droits de son titulaire lorsque les conditions sus-énoncées ne sont pas réunies. Or en l’espèce, même si on admettait que la reproduction du modèle de parapluie était un usage à titre d’illustration, l’indication de l’enregistrement et de son titulaire ne figure pas sur le visuel publicitaire. En conséquence, la reproduction du modèle de parapluie dans la publicité en cause était bien un acte illicite au regard des dispositions de l’article L521-1 du Code de la propriété intellectuelle.
Mots clés : Image des oeuvres
Thème : Image des oeuvres
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de Grande instance de Paris | Date : 10 octobre 2013 | Pays : France