Conditions de garantie et preuve de l’origine des fonds en matière d’assurance

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Conditions de garantie et preuve de l’origine des fonds en matière d’assurance

L’Essentiel : M. [F] [T] a souscrit une assurance pour sa caravane FENDT le 5 mai 2022. En mai, il a déclaré un sinistre dû à la grêle, mais l’expert a jugé le véhicule économiquement irréparable. Bien qu’il ait accepté l’indemnisation de 23.000 euros, la SA PACIFICA a refusé de verser cette somme, arguant l’absence de justification de l’achat. M. [F] [T] a alors assigné la SA PACIFICA en justice, demandant des réparations pour préjudice moral et matériel. Le tribunal a finalement rejeté sa demande, considérant que l’assureur avait le droit de refuser l’indemnité en raison de documents manquants.

Souscription de l’assurance

M. [F] [T] a souscrit une assurance pour sa caravane FENDT le 5 mai 2022.

Déclaration de sinistre

En mai 2022, M. [F] [T] a déclaré un sinistre causé par la grêle, et l’expert d’assurance a jugé le véhicule économiquement irréparable.

Proposition d’indemnisation

M. [F] [T] a accepté l’offre de l’assureur de céder le véhicule pour 23.000 euros, déduction faite d’une franchise de 91 euros. Cependant, la SA PACIFICA a refusé de verser l’indemnité, arguant que M. [F] [T] ne pouvait justifier l’achat de la caravane.

Assignation en justice

Par acte d’huissier du 21 juillet 2023, M. [F] [T] a assigné la SA PACIFICA devant le tribunal judiciaire de Poitiers, demandant des réparations pour préjudice moral et matériel, ainsi que des intérêts légaux.

Arguments de M. [F] [T]

M. [F] [T] soutient que la SA PACIFICA invoque à tort une condition nouvelle concernant la justification de l’origine des fonds, ce qu’il considère comme une mauvaise foi et une violation de la loyauté contractuelle.

Arguments de la SA PACIFICA

La SA PACIFICA a demandé le rejet des demandes de M. [F] [T], affirmant qu’il n’avait pas fourni de documents probants concernant l’origine des fonds et le justificatif de domicile, ce qui justifie son refus d’indemnisation.

Clôture de l’affaire

La clôture de l’affaire a été prononcée le 23 mai 2024, avec une audience fixée au 1er octobre 2024, et la décision mise en délibéré pour le 26 novembre 2024.

Jugement du tribunal

Le tribunal a rejeté la demande principale de M. [F] [T] pour le préjudice matériel, considérant que la SA PACIFICA avait le droit de refuser l’indemnité en raison de l’absence de justification de l’origine des fonds et du domicile.

Demande de dommages et intérêts

La demande accessoire de M. [F] [T] pour dommages et intérêts a également été rejetée, le tribunal estimant que la SA PACIFICA était fondée à refuser l’exécution du contrat.

Dépens et exécution provisoire

M. [F] [T] a été condamné à payer les dépens et une somme de 1.000 euros à la SA PACIFICA au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire a été maintenue.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’obligation de preuve en matière d’assurance ?

L’article 9 du code de procédure civile stipule que : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

Dans le cadre d’un contrat d’assurance, cette obligation de preuve est cruciale. En effet, l’assuré doit démontrer qu’il remplit les conditions nécessaires pour bénéficier de l’indemnisation.

En l’espèce, M. [F] [T] a été contraint de prouver l’origine des fonds ayant permis l’acquisition de la caravane. La SA PACIFICA a justifié son refus de paiement en raison de l’absence de documents probants.

Ainsi, l’assuré doit fournir des éléments tangibles pour établir son droit à l’indemnisation, sans quoi sa demande peut être rejetée.

Quelles sont les conséquences du refus d’indemnisation par l’assureur ?

L’article L113-1 du code des assurances précise que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l’assuré sont à la charge de l’assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Dans le cas présent, la SA PACIFICA a refusé d’indemniser M. [F] [T] en raison de l’absence de justification de l’origine des fonds et de l’absence de preuve que la caravane n’était pas utilisée comme résidence permanente.

Ce refus est fondé sur des obligations légales de vigilance en matière de lutte contre le blanchiment d’argent.

Ainsi, si l’assuré ne parvient pas à prouver ses droits, il ne peut obtenir réparation, ce qui a été le cas pour M. [F] [T].

Comment se justifie la demande de dommages et intérêts ?

L’article 1240 du code civil dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Dans cette affaire, M. [F] [T] a demandé des dommages et intérêts en raison du préjudice moral subi suite au refus d’indemnisation.

Cependant, le tribunal a rejeté cette demande, considérant que la SA PACIFICA était fondée à refuser l’exécution du contrat d’assurance.

Le lien de causalité entre le refus d’indemnisation et le préjudice moral n’a pas été établi, ce qui a conduit à la décision de rejet de la demande de M. [F] [T].

Quelles sont les implications des dépens dans cette affaire ?

L’article 699 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante supporte les dépens.

Dans le jugement rendu, M. [F] [T] a été condamné à payer les dépens à la SA PACIFICA, ce qui inclut les frais engagés par cette dernière pour sa défense.

De plus, M. [F] [T] a également été condamné à verser 1.000 euros à la SA PACIFICA au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qui permet de compenser les frais non compris dans les dépens.

Ainsi, la décision du tribunal a des conséquences financières directes pour M. [F] [T], qui doit assumer les coûts liés à la procédure judiciaire.

Quelles sont les conséquences de l’exécution provisoire dans ce jugement ?

L’article 514-1 du code de procédure civile stipule que l’exécution provisoire peut être ordonnée, sauf disposition contraire.

Dans cette affaire, le tribunal a maintenu l’exécution provisoire, ce qui signifie que les décisions prises sont immédiatement applicables, même si elles peuvent faire l’objet d’un appel.

Cela implique que M. [F] [T] doit se conformer aux obligations financières imposées par le jugement, même s’il conteste la décision.

L’exécution provisoire vise à garantir l’efficacité de la décision judiciaire et à éviter que le temps d’un éventuel appel ne compromette les droits de la partie gagnante.

MINUTE N° :
DOSSIER : N° RG 23/02039 – N° Portalis DB3J-W-B7H-GBFX

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE POITIERS

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU 26 NOVEMBRE 2024

DEMANDEUR :

Monsieur [F] [T]
demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Guy DIBANGUE, avocat au barreau de POITIERS (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/005963 du 06/10/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de POITIERS)

DÉFENDERESSE :

S.A. PACIFICA
dont le siège social est sis [Adresse 2]

Représentée par Me Thomas DROUINEAU, avocat au barreau de POITIERS

LE :

Copie simple à :
– Me DIBANGUE
– Me DROUINEAU

Copie exécutoire à :
– Me DROUINEAU

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

PRÉSIDENT : Sébastien VANDROMME-DEWEINE, Juge

Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux avocats.

GREFFIER LORS DE L’AUDIENCE : Thibaut PAQUELIN
GREFFIER LORS DE LA MISE A DISPOSITION : Marie PALEZIS

Débats tenus publiquement à l’audience à juge unique du 01 octobre 2024.

EXPOSE DU LITIGE

M. [F] [T] a souscrit le 05 mai 2022 une assurance pour une caravane FENDT immatriculée [Immatriculation 3].

M. [F] [T] a déclaré un sinistre dû à la grêle en mai 2022, et l’expert d’assurance a déclaré le véhicule économiquement irréparable.

M. [F] [T] a accepté la proposition de l’assureur de céder le véhicule techniquement irréparable contre 23.000 euros avant déduction de la franchise pour 91 euros, mais la SA PACIFICA a refusé de payer l’indemnité en invoquant la circonstance que M. [F] [T] ne peut justifier de l’achat de la caravane.

Par acte d’huissier de justice du 21 juillet 2023, M. [F] [T] a fait assigner la SA PACIFICA devant le tribunal judiciaire de Poitiers (1ère chambre civile) en demandant de :
Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 22.909 en réparation de son préjudice matériel ;Déclarer que les sommes seront assorties des intérêts légaux à compter de l’assignation et jusqu’à parfait paiement en application de l’article 1154 du code civil ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec distraction ;Condamner la SA PACIFICA aux dépens.
En demande, M. [F] [T], suivant dernières conclusions notifiées par RPVA le 26 mars 2024, demande au tribunal de notamment :
Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 22.909 en réparation de son préjudice matériel ;Déclarer que les sommes seront assorties des intérêts légaux à compter de l’assignation et jusqu’à parfait paiement en application de l’article 1154 du code civil ;Condamner la SA PACIFICA à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et faisant application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle dont distraction ;Condamner la SA PACIFICA aux dépens.
Au soutien de sa position, M. [F] [T] expose que c’est à tort que la SA PACIFICA oppose, non au jour de la conclusion du contrat mais seulement au jour du paiement de l’indemnité, une condition nouvelle tenant à la justification par l’assuré de l’origine des fonds ayant permis d’acquérir le véhicule, de sorte que son refus de garantie fondé artificiellement sur l’objectif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme est invoqué de mauvaise foi et en violation de l’impératif de loyauté contractuelle.

En défense, la SA PACIFICA, suivant dernières conclusions notifiées par RPVA le 19 septembre 2023, demande au tribunal de notamment :
Débouter M. [F] [T] de toutes ses conclusions ;Condamner M. [F] [T] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;Condamner M. [F] [T] aux dépens avec distraction.
Au soutien de sa position, la SA PACIFICA expose qu’elle a refusé sa garantie faute pour M. [F] [T] d’avoir produit deux documents suffisamment probants. Premièrement, sur l’origine des fonds ayant permis l’acquisition, la SA PACIFICA objecte que M. [F] [T] produit un certificat de cession auprès d’une personne mais ne peut justifier que d’un virement auprès d’une autre personne, et pour la somme de 15.000 euros seulement alors qu’il prétend avoir acquis la caravane pour 22.500 euros. Deuxièmement, la SA PACIFICA souligne qu’il n’a pas produit de justificatif de domicile à son nom qui soit conforme aux règles applicables, et qui permette notamment d’exclure que la caravane ait été utilisée à titre d’habitation permanente, ce qui ne permettrait pas l’indemnisation en exécution du contrat en cause. En conséquence, la SA PACIFICA estime que M. [F] [T] échoue à rapporter la preuve de la réunion des conditions contractuelles justifiant le paiement de l’indemnité d’assurance.

La clôture a été prononcée par ordonnance au 23 mai 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience du 1er octobre 2024.

Avis a été donné que la décision était mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 26 novembre 2024.

MOTIFS DU JUGEMENT

1. Sur la demande principale de M. [F] [T] en exécution du contrat d’assurance souscrit auprès de la SA PACIFICA et paiement d’une indemnité en réparation de son préjudice matériel.

L’article 9 du code de procédure civile dispose que : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

Il résulte de l’article L113-1 du code des assurances que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l’assuré sont à la charge de l’assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

En l’espèce, il résulte des éléments mis dans les débats que la SA PACIFICA justifie être en droit de refuser le paiement de toute indemnité à M. [F] [T] en exécution du contrat d’assurance les liant au titre de la caravane de ce dernier, en ce que d’une part M. [F] [T] n’a pu justifier intégralement auprès de son assureur de l’origine des fonds ayant permis l’acquisition de cette caravane ce qui est susceptible de placer la SA PACIFICA dans l’illégalité au regard de son obligation légale de vigilances quant aux flux financiers, d’autre part M. [F] [T] n’a pu produire aucun élément suffisamment probant pour justifier que son domicile ne serait pas établi dans la caravane, ce qui vaut exclusion de garantie en exécution du contrat liant les parties (pièce défenderesse n°1, page 19).

En conséquence, la demande de M. [F] [T], en paiement d’une indemnité en exécution du contrat d’assurance pour réparer son préjudice matériel dû aux dommages à la caravane, est rejetée.

2. Sur la demande accessoire de M. [F] [T] en dommages et intérêts pour 3.000 euros.

L’article 1240 du code civil dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

En l’espèce, en considération du rejet de la demande principale de M. [F] [T] au titre du préjudice matériel, la SA PACIFICA était bien fondée à refuser d’exécuter le contrat les liant.

Par conséquent, la demande accessoire de M. [F] [T] en dommages et intérêts, manifestement liée à l’ancienneté du litige et à l’impossibilité de le régler par voie amiable, est à rejeter.

3. Sur les autres demandes et les dépens.

3.1. Sur les dépens.

M. [F] [T] supporte les dépens.

Le recouvrement direct est accordé au conseil de la SA PACIFICA dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

3.2. Sur l’article 700 du code de procédure civile.

M. [F] [T], tenu aux dépens, doit payer à la SA PACIFICA la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La propre demande de M. [F] [T] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 est nécessairement rejetée.

3.3. Sur l’exécution provisoire.

Rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de l’article 514-1 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, rendu après débats en audience publique par mise à disposition au greffe,

REJETTE toutes les demandes de M. [F] [T] contre la SA PACIFICA ;

CONDAMNE M. [F] [T] à payer à la SA PACIFICA la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de M. [F] [T] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

CONDAMNE M. [F] [T] aux dépens, avec recouvrement direct au profit du conseil de la SA PACIFICA dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande ;

MAINTIENT l’exécution provisoire en totalité.

Le Greffier Le Président


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