L’Essentiel : Le 12 octobre 2023, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE a assigné Mme [G] [N] [V] pour constater la déchéance du terme de son crédit de 20 500 €. Lors de l’audience du 7 novembre 2024, le juge a soulevé des questions sur la forclusion, Mme [G] [N] [V] n’ayant pas comparu. Le tribunal a établi que le premier impayé non régularisé datait du 15 juin 2021, rendant l’assignation forclose. En conséquence, la demande de paiement a été déclarée irrecevable, et la CAISSE D’EPARGNE a été condamnée aux dépens, sans application de l’article 700 du code de procédure civile.
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Contexte du litigeLa CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE a accordé un crédit de 20 500 € à Mme [G] [N] [V] le 25 octobre 2019, remboursable en 51 mensualités de 439,24 € avec un taux effectif global de 4,49 %. Suite à des manquements dans le remboursement, la société de crédit a décidé de se prévaloir de la déchéance du terme. Procédure judiciaireLe 12 octobre 2023, la CAISSE D’EPARGNE a assigné Mme [G] [N] [V] devant le juge des contentieux de la protection à Rennes, demandant la constatation de la déchéance du terme et, à défaut, la résolution judiciaire du contrat. Elle a également réclamé le paiement de 13 984,25 € avec intérêts, ainsi que 600 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Audience et délibérationLors de l’audience du 7 novembre 2024, le juge a soulevé d’office des questions relatives à l’application du code de la consommation, notamment sur la forclusion. Bien que régulièrement assignée, Mme [G] [N] [V] n’a pas comparu, et l’affaire a été mise en délibéré, avec une décision rendue le 16 janvier 2025. Analyse de la demande principaleLe tribunal a examiné la demande de paiement en se basant sur l’article R.312-35 du code de la consommation, qui stipule que les actions en paiement doivent être formées dans les deux ans suivant le premier incident de paiement non régularisé. Le dernier paiement effectué par Mme [N] [V] date du 15 octobre 2021, et les annulations de retard effectuées par le prêteur n’ont pas été considérées comme des paiements. Conclusion sur la forclusionLe tribunal a déterminé que le premier impayé non régularisé était survenu le 15 juin 2021. Étant donné que l’assignation a été délivrée le 12 octobre 2023, elle a été jugée forclose, rendant l’action du prêteur irrecevable. Décision finaleLe juge a constaté la forclusion de la demande de la CAISSE D’EPARGNE, déclarant la demande en paiement irrecevable. La CAISSE D’EPARGNE a été condamnée aux dépens, et il n’y a pas eu lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire du jugement a été maintenue. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de la forclusion dans le cadre des actions en paiement en matière de crédit à la consommation ?La forclusion est un mécanisme juridique qui limite dans le temps l’exercice d’un droit. En matière de crédit à la consommation, l’article R.312-35 du code de la consommation précise que : “Le tribunal judiciaire connaît des litiges nés de l’application des dispositions du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.” Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues, le premier incident de paiement non régularisé, ou d’autres situations spécifiques. Dans l’affaire en question, le premier impayé non régularisé a été identifié au 15 juin 2021. L’assignation a été délivrée le 12 octobre 2023, soit plus de deux ans après cet impayé. Ainsi, l’action du prêteur est déclarée forclose, ce qui signifie qu’il ne peut plus revendiquer le paiement des sommes dues. Quelles sont les conséquences de la forclusion sur les demandes accessoires, notamment les dépens et l’article 700 du code de procédure civile ?Les conséquences de la forclusion sur les demandes accessoires sont régies par l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule que : “La partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.” Dans le cas présent, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE, ayant été déboutée de sa demande principale en raison de la forclusion, est considérée comme la partie perdante. Par conséquent, elle est condamnée aux dépens de l’instance. De plus, l’article 700 du code de procédure civile, qui permet de demander le remboursement des frais d’avocat, ne s’applique pas ici, car le juge a décidé qu’il n’y avait pas lieu à son application. Ainsi, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE ne pourra pas obtenir de remboursement de ses frais d’avocat, renforçant la conséquence de sa défaite dans cette affaire. Comment les annulations de retard influencent-elles le calcul du délai de forclusion ?Les annulations de retard, lorsqu’elles sont initiées par le prêteur, n’ont pas d’effet sur le calcul du délai de forclusion. En effet, le jugement souligne que : “Les annulations de retard à l’initiative du prêteur qui figurent sur le décompte produit sont un acte unilatéral, dont le but évident est de retarder le premier impayé non régularisé.” Cela signifie que ces annulations ne peuvent pas être considérées comme des paiements effectifs. Dans cette affaire, les annulations de retard pour des montants spécifiques ne correspondent pas à des paiements et demeurent des mensualités impayées. Ainsi, le premier impayé non régularisé reste fixé au 15 juin 2021, ce qui a conduit à la forclusion de l’action du prêteur. Quelles sont les implications de l’exécution provisoire dans le jugement rendu ?L’exécution provisoire est régie par les articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, qui stipulent que : “L’exécution provisoire du jugement est de droit, sauf disposition contraire.” Dans le jugement rendu, il est précisé qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire. Cela signifie que, malgré la décision de forclusion, le jugement est exécutoire immédiatement. Les implications de cette exécution provisoire sont significatives, car elles permettent à la partie gagnante de bénéficier rapidement des effets du jugement, même si la décision peut être susceptible d’appel. Dans ce cas, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE, bien qu’ayant perdu, voit l’exécution provisoire maintenue, ce qui pourrait avoir des conséquences sur d’éventuelles actions futures. |
DE RENNES
Service des contentieux de la protection
[Adresse 4]
[Adresse 4]
JUGEMENT DU 16 Janvier 2025
N° RG 23/07711 – N° Portalis DBYC-W-B7H-KT4E
Jugement du 16 Janvier 2025
Société CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE PAYS DE LOIRE
C/
[G] [N] [V]
EXÉCUTOIRE DÉLIVRÉ
LE
à
COPIE CERTIFIEE CONFORME
à
Au nom du Peuple Français ;
Rendu par mise à disposition le 16 Janvier 2025 ;
Par Caroline ABIVEN, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de RENNES statuant en qualité de juge des contentieux de la protection, assistée de Emmanuelle BADUFLE, Greffier ;
Audience des débats : 07 Novembre 2024.
Le juge à l’issue des débats a avisé les parties présentes ou représentées, que la décision serait rendue le 16 Janvier 2025, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
ENTRE :
DEMANDEUR :
Société CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE PAYS DE LOIRE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Guillaume METZ avocat au barreau de VERSAILLES, substitué par Me VIRGILE THIBAULT, avocat au barreau de RENNES
ET :
DEFENDEUR :
Mme [G] [N] [V]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
non comparante, ni représentée
Selon offre préalable signée électroniquement le 25 octobre 2019, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE a consenti à Mme [G] [N] [V] un crédit d’un montant en capital de 20 500 € remboursable en 51 mensualités de 439,24 € incluant les intérêts au taux effectif global de 4,49 %.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société de crédit a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.
Par acte de commissaire de justice du 12 octobre 2023, la CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE a fait assigner Mme [G] [N] [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes, afin d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire,
– le constat de la déchéance du terme et, à défaut, le prononcer de la résolution judiciaire du contrat pour manquement grave de l’emprunteur à son obligation de remboursement,
– sa condamnation au paiement des sommes suivantes :
– 13 984,25 € avec intérêts au taux conventionnel de 4,16 % à compter du 3 avril 2022,
– 600 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu’à supporter les dépens.
Après un renvoi, à l’audience du 7 novembre 2024, le juge a soulevé d’office les moyens tirés de l’application du code de la consommation, et notamment l’irrecevabilité du fait de la forclusion.
La CAISSE D’EPARGNE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE, comparant par ministère d’avocat, a maintenu ses demandes. Interrogée sur le respect des diverses obligations édictées par le code de la consommation, elle s’en est rapportée.
Bien que régulièrement assigné par dépôt en l’étude, Mme [G] [N] [V] n’a pas comparu.
En cet état l’affaire a été mise en délibéré, la décision étant rendue par sa mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.
Il résulte des dispositions des articles 472 du code de procédure civile que :
“Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond.
Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.”
Sur la demande principale en paiement :
Il résulte des dispositions de l’article R.312-35 du code de la consommation que :
“ Le tribunal judiciaire connaît des litiges nés de l’application des dispositions du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par :
-le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ;
-ou le premier incident de paiement non régularisé ;
-ou le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ;
-ou le dépassement, au sens du 13° de l’article L. 311-1, non régularisé à l’issue du délai prévu à l’article L. 312-93.
Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 ou après décision de la commission imposant les mesures prévues à l’article L. 733-1 ou la décision du juge de l’exécution homologuant les mesures prévues à l’article L. 733-7.”
En l’espèce, le décompte produit par le prêteur fait état d’une dernière échéance du crédit payée par Mme [N] [V] le 15 octobre 2021.
Toutefois, les “annulations de retard” à l’initiative du prêteur sont sans effet sur la computation du délai de forclusion. En effet, une remise de dette n’est un don manuel que si elle est faite dans une intention de libéralité acceptée comme telle par le débiteur. Or, les annulations de retard à l’initiative du prêteur qui figurent sur le décompte produit sont un acte unilatéral, dont le but évident est de retarder le premier impayé non régularisé, si bien qu’elles ne peuvent être assimilées à une remise de dette. Admettre que le créancier puisse agir par une réduction de sa demande à des échéances postérieures conduirait à lui laisser la maîtrise arbitraire du délai de forclusion.
Il convient donc de considérer que les annulations de retard des 24 septembre 2021 pour 1474,26 € et 26 mai 2020 pour 491,42 € ne correspondent pas à un paiement et demeurent des mensualités impayées.
Il en résulte que le premier impayé non régularisé remonte au 15 juin 2021.
L’assignation ayant été délivrée le 12 octobre 2023, elle a été délivrée plus de deux ans après le premier impayé non régularisé.
L’action du prêteur est donc forclose.
Sur les demandes accessoires :
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En application de ces dispositions, la caisse d’épargne et de prévoyance Bretagne – Pays de Loire, partie perdante au procès, sera condamnée aux dépens de l’instance et déboutée de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
En application des dispositions des dispositions des articles 514 et 514-1 du code de procédure civile, il convient de constater que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit. Il n’y a pas lieu de l’écarter.
Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort,
CONSTATE la forclusion de la demande de la caisse d’épargne et de prévoyance Bretagne – Pays de Loire à l’encontre de Mme [G] [N] [V] ;
DÉCLARE, en conséquence, irrecevable la demande en paiement de la caisse d’épargne et de prévoyance Bretagne – Pays de Loire ;
CONDAMNE la caisse d’épargne et de prévoyance Bretagne – Pays de Loire aux dépens ;
DIT n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
MAINTIENT l’exécution provisoire.
LA GREFFIERE LE JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
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