L’Essentiel : Le 07 février 2014, Madame [S] [E]-[B] a souscrit un contrat d’assurance collective auprès de la SOCIETE GENERALE, garantissant le remboursement d’un prêt de 162.700 € en cas de décès ou d’incapacité. Depuis 2017, elle souffre de troubles anxio-dépressifs et a assigné SOGECAP PREVOYANCE pour obtenir une expertise de son incapacité. Lors de l’audience du 25 novembre 2024, sa demande a été maintenue. SOGECAP a accepté l’expertise tout en demandant des documents médicaux pour vérifier d’éventuelles fausses déclarations. Le tribunal a ordonné la désignation d’un expert pour évaluer son état de santé, avec des frais à la charge de Madame [S] [E]-[B].
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Contexte de l’AffaireLe 07 février 2014, Madame [S] [E]-[B] a souscrit un contrat d’assurance collective « DIT PPI (90197) » auprès de la société SOCIETE GENERALE, garantissant le remboursement d’un prêt de 162.700 € en cas de décès, perte totale et irréversible d’autonomie, invalidité permanente totale, ou incapacité temporaire de travail. Le lendemain, elle a également adhéré à ce contrat pour un prêt de 20.000 €. Demande d’ExpertiseDepuis 2017, Madame [S] [E]-[B] souffre de troubles anxio-dépressifs liés à des difficultés personnelles et un burn-out. Le 26 juin 2024, elle a assigné la société SOGECAP PREVOYANCE en référé pour obtenir la désignation d’un médecin expert afin d’évaluer son incapacité permanente professionnelle et fonctionnelle. Lors de l’audience du 25 novembre 2024, elle a maintenu sa demande d’expertise, sans s’opposer à la communication de documents demandée par SOGECAP. Position de SOGECAPLa société SOGECAP a accepté la mesure d’expertise tout en émettant des réserves et en demandant la production des questionnaires de santé de Madame [E]-[B] des 07 et 08 février 2014, afin de vérifier d’éventuelles réticences ou fausses déclarations lors de la souscription de l’assurance. Décision sur l’ExpertiseLa décision a été fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, qui permet d’ordonner des mesures d’instruction avant procès en cas de motif légitime. Les rapports médicaux fournis par Madame [S] [E]-[B] ont été jugés suffisants pour justifier l’expertise. Les frais de consignation de l’expertise seront à la charge de Madame [S] [E]-[B]. Communication des Documents MédicauxSOGECAP a justifié son intérêt à obtenir les questionnaires de santé, soulignant que la dissimulation d’informations pourrait affecter l’évaluation du risque. En raison du secret médical, seule Madame [E]-[B] peut produire ces documents. Ordonnances et InstructionsLe tribunal a ordonné la désignation d’un expert, le Docteur [F] [J], pour examiner Madame [S] [E]-[B] et établir un rapport sur son état de santé. L’expert devra convoquer les parties, examiner les antécédents médicaux, et déterminer les incapacités. Les parties doivent communiquer tous documents nécessaires à l’expert, qui devra rendre son rapport dans un délai de quatre mois. Consignation et DépensUne provision de 2000 euros a été fixée pour la rémunération de l’expert, à consigner par Madame [S] [E]-[B] dans un délai de six semaines. En cas de non-consignation, la désignation de l’expert sera caduque. Madame [S] [E]-[B] est également chargée des dépens de l’instance, sous réserve de ce que décidera le juge du fond. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions pour ordonner une mesure d’expertise selon l’article 145 du code de procédure civile ?L’article 145 du code de procédure civile stipule que : « S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. » Pour justifier d’un motif légitime, la partie doit démontrer la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel. Dans le cas de Madame [S] [E]-[B], les rapports d’expertise médicale fournis ont établi l’existence d’un motif légitime pour demander une expertise. Ces éléments permettent de conclure que la demande d’expertise est fondée sur des preuves tangibles, justifiant ainsi la décision du tribunal d’ordonner cette mesure. Quel est l’impact de la réticence ou de la fausse déclaration sur le contrat d’assurance selon l’article L113-8 ?L’article L113-8 du code des assurances précise que : « Indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l’article L132-26, le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre. » Cela signifie que si l’assuré dissimule des informations essentielles sur son état de santé lors de la souscription, cela peut entraîner la nullité du contrat. Dans cette affaire, la société SOGECAP a un intérêt légitime à obtenir les questionnaires de santé de Madame [S] [E]-[B] pour vérifier si des informations ont été omises, ce qui pourrait affecter la validité du contrat d’assurance. Quelles sont les obligations de l’expert désigné dans le cadre de l’expertise ordonnée ?L’expert désigné doit respecter plusieurs obligations, notamment celles énoncées dans les articles 263 et suivants du code de procédure civile. Il doit : – Convoquer les parties et leur rappeler qu’elles peuvent se faire assister par un médecin-conseil. L’expert doit également rendre compte de l’avancement de ses travaux et informer le magistrat chargé du contrôle des expertises de toute carence des parties dans la communication des pièces nécessaires. Ces obligations garantissent que l’expertise est menée de manière rigoureuse et transparente, permettant ainsi une évaluation juste des prétentions des parties. Quelles sont les conséquences d’une non-consignation des frais d’expertise dans le délai imparti ?La décision stipule que : « Faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet. » Cela signifie que si Madame [S] [E]-[B] ne consigne pas la somme de 2000 euros dans le délai de six semaines, l’expertise ne pourra pas avoir lieu. Cette règle vise à garantir que les frais d’expertise soient couverts avant le début de la mission, évitant ainsi des abus ou des retards dans le processus judiciaire. Il est donc crucial pour la partie demanderesse de respecter ce délai pour assurer la continuité de la procédure d’expertise. |
RÉFÉRÉS
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 13 JANVIER 2025
N° RG 24/01688 – N° Portalis DB3R-W-B7I-ZSXH
N° de minute :
Madame [S] [E] [B]
c/
S.A. SOGECAP
DEMANDERESSE
Madame [S] [E] [B]
[Adresse 7]
[Localité 9]
représentée par Maître Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES, avocate au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : NAN 744
DEFENDERESSE
S.A. SOGECAP
[Adresse 5]
[Localité 11]
représentée par Maître Corinne CUTARD, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : D1693
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président : François PRADIER, 1er Vice-président, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,
Greffière : Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière,
Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 25 novembre 2024, avons mis l’affaire en délibéré à ce jour.
Le 07 février 2014, Madame [S] [E]-[B] a adhéré au contrat d’assurance collective « DIT PPI (90197) » souscrit par la société SOCIETE GENERALE auprès de la compagnie d’assurance SOGECAP en vue de garantir en cas de décès, perte totale et irréversible d’autonomie (PTIA), invalidité permanente totale (IPT), incapacité temporaire totale de travail (ITT) ou partielle de travail (ITP) le remboursement d’un prêt d’un montant total de 162.700 € auquel elle s’était obligée envers la société SOCIETE GENERALE.
Le 08 février 2014, Madame [S] [E]-[B] a adhéré au même contrat d’assurance collective « DIT PPI (90197) » en vue e garantir le remboursement d’un prêt d’un montant total de 20.000 € auquel elle s’était obligée envers la société SOCIETE GENERALE.
Arguant que depuis 2017, elle souffre d’une décompression anxio-dépressive dans un contexte de difficultés familiales et de burn-out, Madame [S] [E]-[B] a, par acte en date du 26 juin 2024 assigné en référé la société SOGECAP PREVOYANCE pour obtenir la désignation d’un médecin expert sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de déterminer l’incapacité permanente professionnelle et l’incapacité permanente fonctionnelle.
L’affaire étant venue à l’audience du 25 novembre 2024, Madame [S] [E]-[B] a maintenu sa demande d’expertise. Elle a précisé par ailleurs ne pas s’opposer à la demande de communication formulée par la société SOGECAP.
La société SOGECAP a indiqué ne pas s’opposer à la mesure d’expertise, tout en formulant des protestations et réserves et en proposant la mission qui serait confiée à l’expert désigné, telle qu’elle est énoncée au dispositif des conclusions écrites de son conseil.
D’autre part, elle demande que Madame [E]-[B] produise les formulaires de déclaration du risque (questionnaires de santé) en date des 07 et 8 février 2014.
Sur la mesure d’expertise sollicitée
Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.
Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.
Les pièces versées aux débats (et notamment les rapports d’expertise médicales du Docteur [O] [I] en date du 09 mars 2020, du Docteur [L] [H] en date du 04 juillet 2020 et du Docteur [X] [V] en date du 20 mars 2024) signent pour Madame [S] [E]-[B] l’existence d’un motif légitime lui permettant d’obtenir au visa de l’article 145 du code de procédure civile, l’organisation d’une mesure d’expertise dans les termes et conditions figurant au dispositif de la présente décision.
Au regard des pièces versées au dossier et des observations respectivement formulées par les parties, il convient de donner à l’expert la mission figurant au dispositif de la présente décision.
Il convient de prendre acte des protestations et réserves formulées par la société SOGECAP.
L’expertise étant ordonnée à la demande de Madame [S] [E]-[B] et dans son intérêt probatoire, les frais de consignation seront à sa charge.
Sur la demande de communication des questionnaires de santé
L’article L113-8 dispose qu’indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l’article L132-26, le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre.
C’est dès lors à juste titre que la société SOGECAP justifie d’un intérêt à la communication des formulaires de déclarations de risques, dans l’hypothèse où la demanderesse aurait pu dissimuler des informations sur son état de santé au moment de la souscription de l’assurance, empêchant ainsi l’assureur de se faire une opinion exacte du risque.
En raison du secret médical, la société SOGECAP se trouve dans l’impossibilité de produire les pièces de nature médicale émanant de Madame [E] [B] transmises lors de son adhésion au contrat d’assurance et qui sont susceptibles d’être détenues par son médecin-conseil.
Seule Madame [E]-[B], maître du secret médical des pièces qui la concernent, peut les communiquer.
Il conviendra par conséquent d’ordonner à cette dernière de produire les formulaires de déclaration du risque.
Il convient de laisser à Madame [S] [E]-[B] la charge provisoire des dépens, sous réserve de ce qui sera éventuellement décidé par le juge du fond.
Statuant par décision mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
RENVOYONS les parties à se pourvoir sur le fond du litige,
ORDONNONS une expertise et COMMETTONS pour y procéder :
Docteur [F] [J]
Hôpital [13] – Service hospitalo-universitaire
[Adresse 4]
[Localité 10]
Tél : [XXXXXXXX02] Port. : [XXXXXXXX03]
Email : [Courriel 12]
(expert inscrit auprès de la cour d’appel de Paris, sous la rubrique F-02.01 – Psychiatrie d’adultes)
lequel pourra se faire assister de tout spécialiste de son choix, avec pour mission de :
° Convoquer les parties, leur rappelant qu’elles peuvent se faire assister ou représenter par un médecin-conseil ;
° Entendre tous sachants si nécessaire ;
° Se faire remettre tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission ;
° Relever si Madame [S] [E]-[B] a connu des antécédents médicaux-chirurgicaux antérieurs aux dates d’adhésion au contrat d’assurance (dates d’adhésion des 07 et 08 février 2014) et les décrire,
° Examiner Madame [S] [E]-[B] aux fins de procéder à toutes constatations utiles, et prendre connaissance de son dossier médical,
° Déterminer la nature exacte de l’(ou des) affections(s) actuellement en cause,
° Déterminer la date des premières manifestations pathologiques, la nature et la date des premiers soins reçus,
° Préciser le bilan actuel et les traitements suivis,
° Fixer la durée de l’incapacité temporaire totale de travail pour chacune des pathologies objectivées,
° Fixer la durée de l’incapacité temporaire partielle de travail pour chacune des pathologies objectivées,
° Si l’état de santé est stabilisé, donner la date de consolidation contractuelle de l’état de santé pour chacune des pathologies objectivées,
° Si la consolidation est acquise, préciser pour chacune des pathologies objectivées :
– le taux d’incapacité fonctionnelle en référence au barème de droit commun
– le taux d’incapacité professionnelle en tenant compte soit de sa profession, soit à une profession quelconque.
Faisons injonction aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu’elles adresseront à l’expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions,
Disons que l’expert pourra se faire communiquer tant par les médecins que par les caisses de sécurité sociale et par les établissements hospitaliers concernés, tous les documents médicaux qu’il jugerait utiles aux opérations d’expertise,
Disons que l’expert ne communiquera directement aux parties les documents médicaux ainsi obtenu directement de tiers concernant la partie demanderesse qu’avec son accord; qu’à défaut d’accord de celui-ci, ces éléments seront portés à la connaissance des parties par l’intermédiaire du médecin qu’elles auront désigné à cet effet.
Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera son rapport en un exemplaire original sous format papier et en copie sous la forme d’un fichier PDF enregistré sur un CD-ROM au greffe du tribunal judiciaire de Nanterre, service du contrôle des expertises, extension du palais de justice, [Adresse 8] ([XXXXXXXX01]), dans le délai de quatre mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),
Disons que l’expert devra, dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l’expiration d’un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera a une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d’éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu’à l’issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,
Dans le but de limiter les frais d’expertise, invitons les parties, pour leurs échanges contradictoires avec l’expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure, à utiliser la voie dématérialisée via l’outil OPALEXE,
Disons que, sauf accord contraire des parties, l’expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l’ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,
Disons que l’expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l’article 276 du code de procédure civile et rappelons qu’il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,
Désignons le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents,
Disons que l’expert devra rendre compte à ce magistrat de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devra l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,
Fixons à la somme de 2000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui devra être consignée par Madame [S] [E]-[B] entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 6], dans le délai de 6 semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis et accompagné d’une copie de la présente décision,
Disons que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet,
Disons qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération,
Ordonnons à Madame [S] [E]-[B] de produire les formulaires de déclaration du risque (questionnaires de santé) en date des 7 et 8 février 2014,
Laissons à Madame [S] [E]-[B] la charge provisoire des dépens de l’instance,
Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision,
FAIT À NANTERRE, le 13 janvier 2025.
LA GREFFIÈRE
Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière
LE PRÉSIDENT
François PRADIER, 1er Vice-président
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