L’Essentiel : Les époux [U] ont engagé la société MT Couverture pour la couverture de leur maison, mais des infiltrations d’eau ont été constatées en avril 2023, dues à un défaut d’étanchéité. Après une mise en demeure restée sans réponse, ils ont assigné la société et son assureur, Gan Assurances, devant le tribunal. Lors de l’audience, Gan a contesté son statut d’assureur, tandis que MT Couverture a demandé une expertise. Le juge a ordonné une expertise judiciaire et a statué en faveur de la communication de l’attestation d’assurance, tout en maintenant la charge des dépens aux époux [U].
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Contexte de l’affaireLes époux [U] ont engagé la société MT Couverture pour réaliser la couverture de leur maison, selon une facture datée du 13 avril 2019, pour un montant de 18 978,60 €. Constatation des désordresUn rapport d’expertise en date du 17 avril 2023 a révélé des infiltrations d’eau causées par un défaut d’étanchéité de la toiture terrasse des époux [U]. Mise en demeureLe 20 juillet 2023, le conseil des époux [U] a adressé une mise en demeure à la société MT Couverture, lui demandant de remédier aux désordres identifiés dans le rapport d’expertise. Assignation en référéLes époux [U] ont assigné la société MT Couverture et son assureur, Gan Assurances, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Rennes, demandant la désignation d’un expert et la communication de l’attestation d’assurance de la société MT Couverture. Audiences et contestationsLors de l’audience du 27 novembre 2024, les époux [U] ont maintenu leur demande, tandis que Gan Assurances a contesté son statut d’assureur au moment de la réclamation. La société MT Couverture a également formé des réserves et demandé la mise en œuvre de l’expertise. Décision sur la demande d’expertiseLe juge a reconnu un motif légitime pour ordonner une expertise judiciaire, considérant que les époux [U] avaient des raisons valables de prouver les faits avant un procès. Communication de piècesLes époux [U] ont demandé à la société MT Couverture de produire son attestation d’assurance responsabilité civile, ce que la société a contesté, affirmant avoir déjà fourni des attestations pour 2023. Décision sur la communication de piècesLe juge a statué que les époux [U] avaient un motif légitime pour obtenir l’attestation d’assurance de la société MT Couverture à la date de l’assignation, ordonnant sa communication sous astreinte. Décision sur les dépensLe juge a décidé que les époux [U] conserveraient provisoirement la charge des dépens, sans que la société MT Couverture ne soit considérée comme la partie perdante dans le cadre de l’expertise. Ordonnances finalesLe tribunal a ordonné la communication des attestations d’assurance, la désignation d’un expert pour évaluer les désordres, et a fixé une provision pour la rémunération de l’expert, tout en laissant la charge des dépens aux époux [U]. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions pour ordonner une expertise judiciaire en référé selon l’article 145 du Code de procédure civile ?L’article 145 du Code de procédure civile stipule que : « S’il existe un motif légitime d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé en référé. » Dans le cas présent, les époux [U] ont sollicité une expertise judiciaire en raison de désordres constatés sur leur toiture, ce qui constitue un motif légitime pour établir la preuve des faits avant un procès au fond. En effet, ils ont démontré que la société MT Couverture avait réalisé des travaux sur leur maison et que des infiltrations avaient été constatées par un expert amiable. Ainsi, la demande d’expertise est justifiée par la nécessité d’établir des faits qui pourraient influencer la décision du tribunal dans un futur procès. Quelles sont les obligations de la société MT Couverture en matière de communication de pièces selon l’article 10 du Code civil et les articles 11 et 145 du Code de procédure civile ?L’article 10 du Code civil dispose que : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. » Les articles 11 et 145 du Code de procédure civile précisent que : « Il peut être ordonné à une partie ou à des tiers de produire tout document qu’ils détiennent s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige. » Dans cette affaire, les époux [U] ont demandé à la société MT Couverture de produire son attestation d’assurance responsabilité civile à la date de la réclamation. La société a contesté cette demande en arguant qu’elle avait déjà fourni ses attestations d’assurance pour l’année 2023. Cependant, les époux [U] ont assigné la société en 2024, et il n’est pas prouvé qu’ils aient eu accès aux attestations d’assurance pour cette année-là. Ainsi, le juge a considéré qu’il existait un motif légitime pour ordonner la communication de ces pièces, car elles sont essentielles pour établir la responsabilité de la société MT Couverture. Comment se détermine la charge des dépens en référé selon l’article 491 du Code de procédure civile ?L’article 491 du Code de procédure civile stipule que : « Le juge des référés statue sur les dépens. » Il est précisé que la partie défenderesse à une expertise ordonnée sur le fondement de l’article 145 ne peut pas être considérée comme la partie perdante au sens des articles 696 et 700 du même Code. Dans cette affaire, bien que les époux [U] aient obtenu gain de cause sur certaines de leurs demandes, la charge des dépens a été laissée provisoirement à leur charge. Cela signifie qu’ils devront supporter les frais de la procédure jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans le cadre du procès au fond. Cette disposition vise à éviter que la partie qui a demandé une expertise ne soit immédiatement pénalisée par les frais associés, en attendant que la responsabilité soit établie dans le cadre du litige principal. |
N°
Du 10 Janvier 2025
N° RG 24/00661 – N° Portalis DBYC-W-B7I-LCZC
54Z
c par le RPVA
le
à
Me Christophe BAILLY,
Me Aurane GERNIGON,
Me Claire LE QUERE
– copie dossier
– 2 copies service expertises
Expédition et copie executoire délivrée le:
à
Me Aurane GERNIGON,
Expédition délivrée le:
à
Me Christophe BAILLY,
Me Claire LE QUERE
Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
OR D O N N A N C E
DEMANDEURS AU REFERE:
Madame [F] [T] [X] [U], demeurant [Adresse 5]
représentée par Me Aurane GERNIGON, avocate au barreau de RENNES
Monsieur [H] [R] [W] [N] [U], demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Aurane GERNIGON, avocate au barreau de RENNES
DEFENDEURS AU REFERE:
S.A. SOCIÉTÉ GAN ASSURANCES, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Me Christophe BAILLY, avocat au barreau de RENNES, substitué par Me ANTOINE, avocate au barreau de RENNES,
S.A.R.L. MT COUVERTURE, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Claire LE QUERE, avocate au barreau de RENNES
LE PRESIDENT: Béatrice RIVAIL, Présidente du tribunal judiciaire
LE GREFFIER: Graciane GILET, greffier, lors des débats et Claire LAMENDOUR, greffier, lors du prononcé par mise à disposition au greffe, qui a signé la présente ordonnance.
DEBATS: à l’audience publique du 27 Novembre 2024,
ORDONNANCE: contradictoire, prononcée par mise à disposition au Greffe des référés le 10 Janvier 2025, date indiquée à l’issue des débats
VOIE DE RECOURS: Cette ordonnance peut être frappée d’appel devant le greffe de la Cour d’Appel de RENNES dans les 15 jours de sa signification en application des dispositions de l’article 490 du code de procédure civile.
L’appel de cette décision n’est cependant pas suspensif de son exécution.
Suivant facture en date du 13 avril 2019, Monsieur [H] [U] et Madame [F] [U] (les époux [U]), demandeurs à l’instance, on fait réaliser la couverture de leur maison d’habitation par la société à responsabilité limitée (SARL) MT Couverture, défenderesse à l’instance pour un montant de 18 978, 60 € (pièce n°5 demandeurs).
Suivant rapport en recherche de fuite en date du 17 avril 2023 il a été constaté une infiltration due à un défaut d’étanchéité de leurs toiture terrasse (pièce n°6 demandeurs).
Suivant lettre recommandée avec accusé de réception, en date du 20 juillet 2023, le conseil des époux [U] a mis en demeure la société MT couverture de reprendre les désordres dénoncés dans le rapport d’expertise du 17 avril 2023 (pièce n°9 demandeurs).
Par actes de commissaire de justice en date des 29 juillet et 01 août 2024, Monsieur [H] [U] et Madame [F] [U] ont assigné devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Rennes, la SARL MT Couverture et son assureur, la société anonyme (SA) Gan assurances, au visa des articles 11 et 145 du Code de procédure civile, aux fins de :
– désigner un expert au bénéfice de la mission définie à l’assignation ;
– condamner la société MT couverture à communiquer aux époux [U], sous astreinte de 100 € par jours de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, son attestation d’assurance civile à la date de la réclamation ;
– réserver les dépens.
Lors de l’audience du 27 novembre 2024, les époux [U], représentés par avocat, ont sollicité le bénéfice de leur acte introductif d’instance et maintenu leur demande de pièce.
La société Gan Assurances, pareillement représentée, a oralement formé les protestations et réserves d’usage, alléguant ne pas être l’assureur au jour de la réclamation.
La société MT Couverture, pareillement représentée, a, par conclusions formé les protestations et réserves d’usage et demandé au juge des référés de :
– ordonner la mise en œuvre de l’expertise sollicitée par les demandeurs au contradictoire de la société Gan Assurances en tant qu’assureur de la société MT Couverture.
– débouter les demandeurs de leur demande de condamnation de la société MT couverture à produire son attestation d’assurance responsabilité civile à la date de la réclamation, comme étant dépourvue d’objet.
Sur la demande d’expertise
En application de l’article 145 du Code de procédure civile, s’il existe un motif légitime d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé en référé.
En l’espèce, les époux [U] sollicitent une expertise judiciaire dans la perspective d’un procès au fond qu’ils ont l’intention d’intenter à l’encontre des défendeurs sur le fondement des articles 1792 du Code civil et L 124-3 du Code des assurances.
Il ressort des éléments versés aux débats que la société MT couverture est intervenue pour la réalisation de la couverture de la maison d’habitation des demandeurs (pièce n°5 demandeurs), que des infiltrations dans la toiture ont été constatées par un expert amiable (pièce n°6 demandeurs) et que la société Gan assurances était bien l’assureur au titre de la responsabilité décennale de la société MT couverture pour l’année 2020 (pièce n°3 demandeurs).
En outre les défendeurs ont formé les protestations et réserves d’usage sur cette demande.
Dès lors les demandeurs démontrent disposer d’un motif légitime à ce qu’un expert soit désigné, lequel accomplira sa mission comme énoncé au dispositif de la présente ordonnance et à leurs frais avancés.
Sur la demande de communication de pièces
Il résulte de la combinaison de l’article 10 du Code civil et des articles 11 et 145 du Code de procédure civile qu’il peut être ordonné à une partie ou à des tiers de produire tout document qu’ils détiennent s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige.
Le juge saisi d’une telle demande, après avoir caractérisé l’existence d’un motif légitime, est tenu de s’assurer de la vraisemblance de la possession et de l’accessibilité des pièces par la partie requise.
En l’espèce, les époux [U] sollicitent de la société MT construction qu’elle produise son attestation d’assurance responsabilité civile à la date de la réclamation.
La SARL MT Couverture s’y oppose au motif qu’elle a spontanément produit ses attestations d’assurance décennale et civile professionnelle pour l’année 2023 (ses pièces n°1 et 2).
Si les demandeurs ont déclarés les infiltrations d’eau par la toiture à la société MT couverture en 2023 (pièce n°7 demandeurs), ils l’ont assigné devant le juge des référés durant l’année 2024 et rien ne démontre qu’ils disposent des attestations d’assurance de la défenderesse pour cette année là.
Il résulte de l’article L124-5 du Code des assurances que « La garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation ». L’annexe de l’article A.112 du Code des assurances définit la réclammation comme la mise en cause de la responsabilité de l’assuré, soit par lettre adressée à l’assuré ou à l’assureur, soit par assignation devant un tribunal civil ou administratif.
Par conséquent les époux [U] disposent d’un motif légitime à voir condamner la société MT Couverture à communiquer ses attestations d’assurances responsabilité civile au jour de la délivrance de la présente assignation, sous astreinte, comme énoncé au dispositif de la présente décision.
Sur les demandes annexes
L’article 491 du Code de procédure civile dispose, en son second alinéa, que le juge des référés « statue sur les dépens ».
La partie défenderesse à une expertise ou à son extension, ordonnée sur le fondement de l’article 145 du même Code, ne saurait être regardée comme la partie perdante au sens des dispositions des articles 696 et 700 dudit Code.
En conséquence, les époux [U] conserveront provisoirement la charge des dépens.
Statuant en référé, par ordonnance contradictoire et en premier ressort, rendue par mise à disposition au greffe :
Condamnons la société MT couverture à communiquer aux époux [U] ses attestations d’assurance responsabilité civile à la date de l’assignation, sous astreinte provisoire de 50 € (cinquante euros) par jour de retard à l’expiration d’un délai de trente jours (30 jours) à compter de la signification de la présente ordonnance et ce, pendant trente (30) jours, délai à l’issue duquel il sera de nouveau statué, le cas échéant, par le juge de l’exécution ;
Ordonnons une expertise et désignons, pour y procéder, Monsieur [P] [K], expert inscrit sur la liste de la cour d’appel de Rennes, domicilié [Adresse 3] à [Localité 7] (22) tél: [XXXXXXXX01]. Mel : [Courriel 6], lequel aura pour mission de :
– se rendre sur place, situé [Adresse 5] à [Localité 8] (35), après avoir convoqué les parties par lettre recommandée avec accusé de réception, avis étant donné à leurs avocats éventuels ;
– entendre les parties et tous sachants ;
– se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission ;
– décrire les travaux effectués et dire s’ils ont été réalisés suivant les règles de l’art et conformément aux documents contractuels ;
– vérifier la réalité des désordres, malfaçons, non façons invoqués dans l’assignation et dans ses annexes et, dans l’affirmative, les décrire ;
– en rechercher les causes et préciser, pour chacun d’entre eux s’ils sont imputables à une erreur de conception, à un vice de construction, à un vice de matériaux, à une malfaçon dans la mise en œuvre, à une négligence dans l’entretien ou l’exploitation des ouvrages ou à quelqu’autre cause ; s’ils affectent l’un des éléments constitutifs de l’ouvrage ou l’un de ses éléments d’équipement en précisant, dans ce dernier cas, si les éléments d’équipement en question font ou non indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert ; s’ils constituent une simple défectuosité ou s’ils sont de nature à compromettre la solidité de l’immeuble ou à le rendre impropre à sa destination ;
– si la réception des travaux a été prononcée, préciser si elle a été accompagnée ou non de réserves et, dans l’affirmative, dire s’il y a eu des travaux de reprise et préciser si et quand les réserves ont été levées ;
– au cas où ils auraient été cachés, rechercher leur date d’apparition ;
– indiquer l’importance, la nature, le coût et la durée des travaux de remise en état et, s’il y a lieu, le montant de la moins value résultant de l’impossibilité de reprendre tout ou partie des désordres ;
– donner son avis, s’il y a lieu, sur le compte à faire entre les parties ;
– s’adjoindre en tant que de besoin le concours de tout spécialiste de son choix dans un domaine autre que le sien, conformément aux dispositions des articles 278 et suivants du code de procédure civile ;
– de manière générale, fournir tous éléments techniques et de fait et faire toutes constatations permettant à la juridiction, le cas échéant saisie, d’apprécier les responsabilités encourues et les préjudices subis ;
Fixons à la somme de 6 000 € (six mille euros) la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que les époux [U] devront consigner au moyen d’un chèque émis à l’ordre du régisseur du tribunal judiciaire de Rennes dans un délai de deux mois à compter de ce jour, faute de quoi la désignation de l’expert sera caduque ;
Disons que l’expert commencera ses opérations après avis de la consignation qui lui sera adressé par le greffe ;
Disons qu’à l’issue de la deuxième réunion, au plus tard, l’expert communiquera aux parties, s’il y a lieu, un état prévisionnel détaillé de l’ensemble de ses frais et honoraires et, en cas d’insuffisance manifeste de la provision allouée, demandera la consignation d’une provision supplémentaire ;
Disons que l’expert dressera un rapport de ses opérations qui sera déposé au greffe de ce tribunal dans un délai de huit mois à compter de l’avis de consignation ; qu’il aura, au préalable, transmis un pré-rapport aux parties et leur aura laissé un délai suffisant pour présenter leurs observations sous forme de dires auxquels l’expert sera tenu de répondre dans son rapport définitif ;
Désignons le magistrat en charge du service des expertises pour contrôler les opérations d’expertise et, en cas d’empêchement de l’expert, procéder d’office à son remplacement ;
Laissons provisoirement la charge des dépens aux époux [U] ;
Rejetons toute autre demande, plus ample ou contraire.
Ainsi rendu, au nom du peuple français, les jour, mois et an susdits.
La greffière Le juge des référés
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