Évaluation des préjudices et obligations contractuelles dans le cadre d’une réparation automobile

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Évaluation des préjudices et obligations contractuelles dans le cadre d’une réparation automobile

Madame [Z] [N] est propriétaire d’un véhicule Peugeot 5008 qu’elle a confié à la SASU AMG POINT S pour diverses prestations le 13 novembre 2021. Le 15 juillet 2023, le véhicule a subi une panne moteur et a été déposé au garage le 31 juillet 2023. Une expertise a conclu que la panne était due à une défaillance de la pompe à eau mal montée lors de l’intervention du garage. La SASU AMG POINT S a reconnu sa responsabilité et a proposé de réparer le véhicule, ce qui a été accepté par Madame [Z] [N] le 14 mars 2024. Un différend est survenu lors de la restitution du véhicule, conduisant Madame [Z] [N] à assigner la SASU AMG POINT S devant le tribunal judiciaire de Draguignan le 16 mai 2024, demandant la restitution du véhicule, la communication de la facture d’achat du moteur, et des indemnités pour préjudices divers. À l’audience du 10 juillet 2024, elle a indiqué que son véhicule avait été restitué le 5 juillet 2024 et a abandonné certaines demandes, tout en réitérant d’autres, notamment une actualisation de son préjudice de jouissance. La SASU AMG POINT S a demandé le rejet des demandes d’indemnisation pour préjudice moral et résistance abusive, ainsi qu’une réduction de l’indemnité demandée. La décision sera mise à disposition au greffe le 25 septembre 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

25 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Draguignan
RG n°
24/03791
T R I B U N A L J U D I C I A I R E
D E D R A G U I G N A N
____________

O R D O N N A N C E D E R E F E R E

REFERE n° : N° RG 24/03791 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KIAN

MINUTE n° : 2024/ 447

DATE : 25 Septembre 2024

PRESIDENT : Madame Alexandra MATTIOLI

GREFFIER : M. Alexandre JACQUOT

DEMANDERESSE

Madame [Z] [N], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Hakim DAIMALLAH, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE

S.A.S.U. AMG POINT S, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Nathalie CENAC, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

DEBATS : Après avoir entendu à l’audience du 10 Juillet 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, l’ordonnance a été rendue ce jour par la mise à disposition de la décision au greffe.

copie exécutoire à
Me Nathalie CENAC
Me Hakim DAIMALLAH

copie dossier

délivrées le

Envoi par Comci à Me Nathalie CENAC
Me Hakim DAIMALLAH

EXPOSE DU LITIGE

Madame [Z] [N] est propriétaire d’un véhicule Peugeot 5008 immatriculé [Immatriculation 2].

Le 13 novembre 2021, Madame [Z] [N] a confié ce véhicule à la SASU AMG POINT S, exploitant le garage sis [Adresse 3], aux fins de réalisation de diverses prestations automobiles.

Le 15 juillet 2023, le véhicule a subi une panne moteur.

Déposé au garage exploité par la SASU AMG POINT S le 31 juillet 2023, le véhicule a alors été immobilisé.

Une expertise amiable contradictoire a été diligentée par les assureurs des parties, dont le rapport d’expertise établi le 10 janvier 2024 a conclu que la survenance de la panne était en lien avec une défaillance de la pompe à eau, dont le montage lors de l’intervention du garage du 13 novembre 2021 a été réalisé non conformément aux règles de l’art.

Reconnaissant sa part de responsabilité dans la survenance du désordre, la SASU AMG POINT S a proposé de réparer à ses frais le véhicule suivant devis accepté par Madame [Z] [N] le 14 mars 2024.

Toutefois un différend est survenu entre les parties lors de la restitution du véhicule litigieux.

Par acte de commissaire de justice en date du 16 mai 2024, Madame [Z] [N] a fait assigner la SASU AMG POINT S devant le tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN aux fins de se faire restituer son véhicule, sous astreinte, de se faire communiquer la facture de l’achat du moteur, sous astreinte, de voir condamner la société SASU AMG POINT S à lui verser à titre de provision la somme de 2.940 euros en réparation du préjudice de jouissance, 2.000 euros en réparation du préjudice moral, 2.000 en réparation du préjudice causé par sa résistance abusive, le tout assorti des intérêts au taux légal à compter de la signification de l’assignation, la capitalisation de ces intérêts, outre la condamnation à la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

L’affaire a été appelée à l’audience du 10 juillet 2024.

À l’audience Madame [Z] [N] a indiqué que son véhicule lui avait été restitué le 5 juillet 2024. Elle a expliqué dans ces conditions abandonner sa demande de restitution du véhicule ainsi que celle de se faire communiquer la facture de l’achat moteur. En revanche, elle a réitéré oralement le reste de ses demandes formulées dans son assignation du 16 mai 2024, auxquelles elle a ajouté celle de se faire communiquer la facture des prestations effectuées par le garage et a actualisé son préjudice de jouissance à la somme de 3.570 euros.

Par conclusions notifiées le 9 juillet 2024, auxquelles elle se réfère à l’audience, la SASU AMG POINT S se rapporte à l’appréciation du tribunal quant à la réparation du préjudice de jouissance, sollicite le rejet des demandes d’indemnisation au titre du préjudice moral et de la sanction d’une résistance abusive, et demande en outre la réduction de l’indemnité sollicitée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

À l’issue de cette audience, les parties présentes ont été avisées de la mise en délibéré de la décision par mise à disposition au greffe au 25 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’indemnisation des préjudices

Aux termes de l’article 1231-1 du code civil, « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ».

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile « Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend » .

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile « Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ». Ainsi l’article précité exige seulement la constatation de l’existence d’une obligation non sérieusement contestable comme condition à l’octroi d’une provision au créancier.

Il n’est pas contesté par les parties que la société SASU AMG POINT S a manqué à son obligation de résultat dans le cadre de ses relations contractuelles entretenues avec Madame [Z] [N] portant sur la réparation de son véhicule.

Toutefois un débat réside sur l’étendue des sommes provisionnelles susceptibles d’être alloués dans le cadre de la présente procédure en réparation des préjudices allégués.

Sur le préjudice de jouissance

Il existe un préjudice de jouissance certain subi par Madame [Z] [N] du fait de la panne moteur qui s’est manifestée plusieurs années après la réparation du véhicule par la société SASU AMG POINT S. Cette panne a entraîné l’immobilisation du véhicule du 31 juillet 2023 au 5 juillet 2024.

Sur la base des éléments produits aux débats quant à la durée de l’immobilisation et aux caractéristiques du véhicule, la part non sérieusement contestable de son préjudice de jouissance sera évaluée à la somme de 3.570 euros, à laquelle la société SASU AMG POINT S sera condamnée.

Cette condamnation sera assortie des intérêts au taux légal et il est fait droit à la demande de capitalisation des intérêts applicable de droit.

Sur les autres préjudices

Madame [Z] [N] allègue l’existence d’un préjudice moral ainsi que celle d’un préjudice distinct au titre d’une résistance supposée abusive de la SASU AMG POINT S.

Toutefois, force est de constater que la requérante ne produit aucun élément au dossier permettant d’évaluer un préjudice moral ou un préjudice résultant d’une résistance abusive.

L’absence d’élément de preuve au soutien de l’existence de tels préjudices rend de fait l’obligation sérieusement contestable, de sorte qu’il n’y a lieu à référé sur ces chefs de demande.

Le défendeur sera par ailleurs condamné à remettre à la demanderesse la facture correspondant aux prestations effectuées sur le véhicule, s’agissant d’une obligation légale incombant au garagiste. Toutefois, il n’est pas établi pour l’heure la nécessité d’ordonner une mesure comminatoire à l’effet d’obliger la SAS AMG POINT S à s’exécuter, celui-ci devant être présumé en mesure de respecter une décision judiciaire exécutoire de droit à titre provisoire. Il n’y a donc pas lieu à condamnation sous astreinte.

Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

Par application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens de l’instance seront laissés à la partie perdante, à savoir la SASU AMG POINT S.

La SASU AMG POINT S, condamnée aux dépens, indemnisera Madame [Z] [N] de ses frais exposés par elle non compris dans les dépens par une somme qu’il est équitable de fixer à 1.500 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile, rappel étant fait que le véhicule est resté immobilisé près d’une année avant d’être restitué à son légitime propriétaire des suites immédiates de la remise de l’assignation.

En application de l’article 514 du code de procédure civile, la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire, sans qu’il n’y ait lieu d’en disposer autrement.

PAR CES MOTIFS

Nous, Alexandra MATTIOLI, Première Vice-Présidente, statuant en référé, après débats en audience publique par ordonnance mise à la disposition des parties au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNONS la société SASU AMG POINT S à payer à Madame [Z] [N] la somme de 3.570 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice de jouissance ;

DISONS que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2024, date de l’assignation ;

ORDONNONS la capitalisation des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil ;

ORDONNONS la communication de la facture des prestations réalisées par le garage exploité par la société SASU AMG POINT S sur le véhicule de Madame [Z] [N] ;

DISONS n’y avoir lieu à référé s’agissant des autres demandes de provisions formées par Madame [Z] [N] ;

CONDAMNONS la société SASU AMG POINT S aux dépens de la présente instance ;

CONDAMNONS la société SASU AMG POINT S à payer à Madame [Z] [N] la somme de 1.500 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS toute autre demande ;

RAPPELONS que les ordonnances de référé sont exécutoires de plein droit à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe, les jours, mois et an susdits.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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