Évaluation de la Capacité Financière et Rétablissement Personnel en Situation de Surendettement

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Évaluation de la Capacité Financière et Rétablissement Personnel en Situation de Surendettement

La commission de surendettement des particuliers de la Loire a déclaré recevable la demande de Mme [U] [M] le 1er décembre 2022. Le 2 février 2023, elle a proposé un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, contesté par la société [12] le 10 février 2023. Les parties ont été convoquées devant le juge des contentieux de la protection à Saint-Etienne. La société [12] a demandé un plan de remboursement ou un moratoire de 24 mois, évoquant une dette frauduleuse de 18 406,34 euros auprès de la CAF. Mme [M] a reconnu cette dette, liée à la présence non déclarée d’une autre personne dans son foyer. Elle a demandé la confirmation de la décision de la commission, affirmant son revenu modeste. Le 9 octobre 2024, le juge a déclaré la contestation recevable, reconnu l’incapacité de Mme [M] à rembourser ses dettes, mais a suspendu l’exigibilité des créances pendant 24 mois. Mme [M] a interjeté appel le 2 novembre 2023. Lors de l’audience du 19 juin 2024, son avocate a soutenu que sa situation était irrémédiablement compromise, tandis que la société [12] a plaidé pour la confirmation du jugement, arguant que Mme [M] avait des perspectives d’emploi et que son logement devait être adapté.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

18 septembre 2024
Cour d’appel de Lyon
RG n°
23/08345
N° RG 23/08345 – N° Portalis DBVX-V-B7H-PI6M

Décision du Juge des contentieux de la protection du TJ de SAINT-ETIENNE

du 09 octobre 2023

RG : 23/00816

[M]

C/

[12]

Société [14]

CAF DE LA LOIRE

TRESORERIE [Localité 13] AMENDES

[10] CHEZ [11] SERVICE SURENDETTEMENT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 18 Septembre 2024

APPELANTE :

Mme [U] [M]

née le 25 Juillet 1993

[Adresse 1]

[Localité 6]

comparante, assistée de Me Carole CHAMBARETAUD, avocat au barreau de LYON, toque : 569

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/10659 du 7 décembre 2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)

INTIMEES :

[12]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 6]

comparant, représenté par Mme [B] [N], muni d’un pouvoir de représentation

[14]

SERVICE CLIENT

[Adresse 15]

[Localité 4]

non comparante

CAF DE LA LOIRE

[Adresse 8]

[Localité 6]

non comparante

TRESORERIE [Localité 13] AMENDES

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 9]

non comparante

[10] CHEZ [11] SERVICE SURENDETTEMENT

[Adresse 2]

[Localité 5]

non comparante

* * * * * *

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 19 Juin 2024

Date de mise à disposition : 18 Septembre 2024

Audience présidée par Stéphanie ROBIN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Cécile NONIN, greffière.

Composition de la Cour lors du délibéré :

– Joëlle DOAT, présidente

– Evelyne ALLAIS, conseillère

– Stéphanie ROBIN, conseillère

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES :

Par décision du 1er décembre 2022, la commission de surendettement des particuliers de la Loire a déclaré recevable la demande de Mme [U] [M], afin de voir traiter sa situation de surendettement.

Le 2 février 2023, la commission a notifié à la débitrice et aux créanciers la mesure qu’elle entendait imposer, consistant en un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

La société [12], créancier, a contesté cette mesure par lettre recommandée adressée le 10 février 2023 à la commission.

Les parties ont été convoquées devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Etienne saisi de cette contestation.

La société [12], représentée par Mme [C] [G], sollicite, à titre principal, la mise en place d’un plan, après vérification des ressources du foyer et, à titre subsidiaire, la mise en place d’un moratoire de 24 mois, dans la perspective d’un meilleur emploi et de l’acquisition d’un logement plus adapté à la situation personnelle de Mme [M]. Elle soutient que la dette frauduleuse contractée auprès de la CAF d’un montant de 18 406,34 euros pose question quant à la déclaration des ressources effectuée, et précise que le logement actuel de Mme [M] est un F4, alors qu’elle est mère d’un seul enfant.

Mme [M], assistée de son avocate, a reconnu la dette frauduleuse contractée auprès de la CAF après un contrôle ayant alors mis en évidence la présence au foyer d’une autre personne non déclarée et percevant un revenu.

Mme [M] a fait état d’un revenu très modeste et sollicité la confirmation de la décision de la commission de surendettement.

Les autres parties n’ont pas comparu.

Par jugement du 9 octobre 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint Etienne a :

– déclaré recevable en la forme la contestation formée par [12] à l’encontre de la décision de la commission de surendettement prise le 2 février 2023 au bénéfice de Mme [M],

– constaté que Mme [M], dont la bonne foi n’est pas contestée, est dans l’incapacité de faire face à ses dettes exigibles et à échoir,

– déclaré la demande de Mme [M] afin de traitement de sa situation de surendettement recevable,

– constaté l’absence de capacité de remboursement de Mme [M],

– constaté toutefois que la situation de Mme [M] n’est pas irrémédiablement compromise,

– dit que la situation de Mme [M] justifie de suspendre l’exigibilité des créances pendant 24 mois sans intérêt,

– laissé les dépens à la charge du Trésor public.

Cette décision a été notifiée à Mme [M] par lettre recommandée dont elle a signé l’avis de réception le 20 octobre 2023.

Par lettre recommandée envoyée le 2 novembre 2023, Mme [M] a interjeté appel du jugement.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience du 19 juin 2024.

Par des conclusions développées à l’oral, maître Chambaretaud, assistant Mme [M], a demandé de :

– déclarer recevable l’appel interjeté par Mme [M],

– juger que Mme [M] est de bonne foi,

– juger en outre qu’elle se trouve dans une situation financière irrémédiablement compromise,

– orienter son dossier vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Elle expose que Mme [M] travaille en qualité d’intérimaire et touche 1 141 euros par mois en moyenne, qu’elle a perçu une somme un peu supérieure ces derniers mois mais que son contrat va se terminer début juillet 2024. Elle ajoute qu’elle ne bénéficie pas de l’allocation logement, en raison d’une retenue de la caisse d’allocations familiales pour résorber sa dette frauduleuse et qu’elle a fait des démarches pour trouver un logement plus petit, démarches qui n’ont pas encore abouti. Une visite d’un logement a cependant eu lieu récemment. Elle soutient que la capacité de remboursement est négative et que sa situation est irrémédiablement compromise.

Mme [B] [N], muni d’un pouvoir de réprésentation pour [12] sollicite la confirmation du jugement. Elle réplique que Mme [M] est jeune, qu’elle est diplômée, que les recrutements dans le secteur du social sont nombreux et que les contrats à durée déterminée révèlent qu’elle est en mesure de travailler. Elle ajoute que le logement actuel n’est pas adapté et qu’une location d’un logement plus petit est nécessaire pour permettre la réduction des charges. Elle précise que le loyer courant est réglé régulièrement.

Dans ces conditions, elle estime qu’une mesure de rétablissement personnel n’est pas justifiée.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les parties intimées défaillantes ayant signé l’accusé de réception de leur lettre de convocation, l’arrêt sera réputé contradictoire en application de l’article 474 du code de procédure civile.

L’article L. 724-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable dispose :

‘Lorsqu’il ressort de l’examen de la demande de traitement de la situation de surendettement que les ressources ou l’actif réalisable du débiteur le permettent, la commission prescrit des mesures de traitement dans les conditions prévues aux articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7.

Lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l’impossibilité manifeste de mettre en ‘uvre des mesures de traitement mentionnées au premier alinéa, la commission peut imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, si elle constate que le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l’exercice de son activité professionnelle, ou que l’actif n’est constitué que de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale…’

Liminairement, il convient de constater que la bonne foi de Mme [M] dans le cadre de la procédure de surendettement n’est pas contestée.

Le premier juge a retenu que Mme [M], célibataire avec un enfant à charge, effectuait des missions en qualité d’intérimaire, et avait justifié d’un contrat à durée déterminée limité au mois d’août 2022 mentionnant une rémunération brute de 1 678,99 euros, rendant difficilement évaluable la réalité des ressources mensuelles. Il a mentionné que Mme [M] évaluait son revenu mensuel moyen à la somme de 550 euros outre 334 euros d’allocations logement.

Il a été retenu parallèlement des charges d’un montant de 1 832 euros se décomposant comme suit :

– forfait charges courantes pour deux personnes : 774 euros,

– loyer : 606 euros charges comprises,

– charges d’habitation (frais énergétiques, eau, assurances, téléphone) : 210 euros,

– cantine : 32 euros,

Devant la cour d’appel, Mme [M] fait état d’un salaire de 1 141 euros. Elle produit cependant aux débats un contrat à durée déterminée de mars à juin 2024 comportant une rémunération mensuelle de 1 900 euros bruts (soit 1 482 euros net) outre une prime de 238 euros brut (soit 166 euros net).

Il importe en outre de relever que le revenu fiscal de référence dans la décision d’aide jurdictionnelle rectificative est de 1 423 euros.

S’agissant des charges, il convient de retenir :

– forfait de base (barème actualisé 2024 pour deux personnes) : 844 euros

– forfait habitation (barème actualisé 2024 pour deux personnes) : 161 euros

– forfait chauffage (barème actualisé 2024 pour deux personnes) : 164 euros

– loyer : 471,59 (hors charges courantes et chauffage déjà compris dans les forfaits)

– cantine : 35 euros

soit un total de 1 675,89 euros par mois, les assurances étant déjà comprises dans le forfait.

La capacité de remboursement est ainsi négative. Cependant, Mme [M] est actuellement âgée de 31 ans, elle justifie de diplômes universitaires soit un master 1 de droit privé et un master 2 de droit social ce qui, comme l’a relevé le premier juge, lui permettent de prétendre à une rémunération encore plus élevée. Il est en outre constant que le logement qu’elle occupe actuellement ne correspond pas à la composition de son foyer, étant seule avec un enfant. Elle a entrepris des démarches pour trouver un logement plus adapté et moins onéreux et a d’ailleurs visité un appartement récemment. Cela lui permettra également de réduire ses charges.

Dans ce contexte, sa situation n’est pas irrémédiablement compromise et c’est à juste titre que le premier juge a suspendu l’exigibilité des créances pendant 24 mois au taux de 0%.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement.

Les dépens d’appel sont laissés à la charge du Trésor public

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Laisse les dépens d’appel à la charge du Trésor Public.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


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